"L’univers carcéral national occupe l’avant scène de l’actualité [1]."
A quelques mots près, c’est aussi de cette façon que je pourrais commencer mon travail d’écriture.
Aujourd’hui en France, ce sont près de 60.000 hommes, femmes et mineurs incarcérés dans les prisons françaises, "prisons de la honte [2]."
L’actualité carcérale de ces six derniers mois secoue l’opinion publique et semble susciter un intérêt tout particulier dans les médias. Chargée, mouvementée, elle nous parle d’évasions et tentatives d’évasion, de mutinerie à la maison centrale d’Arles en novembre dernier [3], de personnel pénitentiaire en grève, de fouille des prisons [4], etc. Autant de faits marquants qui viennent s’inscrire au cœur d’un débat national, lancé l’an dernier lors des élections présidentielles, celui du problème de l’insécurité.
"Pour le grand public, la prison devient l’enjeu d’une prise de conscience nouvelle, un objet de curiosité, de recherches et de débats. […] La question carcérale devient un enjeu philosophique, politique et social décisif. [5]"
L’univers carcéral, si longtemps "caché" et oublié des médias, est aujourd’hui présent dans la presse française, ou à la télévision. Reportages [6], débats [7] et émissions télévisées [8] se multiplient en parlant de la prison comme un "problème". Certes, et aussi paradoxal que cela puisse paraître, l’organisation actuelle de la prison française ’ elle qui se veut pourtant si "ordonnée" ’ ne pose pas un problème mais plusieurs. Celui de la condition et du traitement des détenus, celui du nombre insuffisant de places, celui de la surveillance, de la sécurité, de la réinsertion et la liste est encore longue. Il paraît alors difficile de parler de culture en prison "quand le débat s’impose en premier lieu sur les conditions de détention en matière d’hygiène, de sécurité, de santé, de surpopulation. Pourtant le rôle de la culture en prison a son importance. Ne serait-ce que parce qu’elle participe pleinement à une mission, celle de la réinsertion [9]".
Toutes ces questions, toutes ces interrogations, ces peurs et ces angoisses autour du milieu carcéral ne sont pas sans remettre en question les "bonnes" intentions du gouvernement à savoir construire trente établissements pénitentiaires [10] supplémentaires afin de régler la question du nombre de places dans les prisons françaises et celle de la surpopulation pénale. Le Ministère de la Justice, représenté par Pierre BEDIER, secrétaire d’Etat aux programmes immobiliers de la Justice, parle de plan plus social et plus "humain" ’ personne n’ose y croire ’ un plan qui suscite polémiques et débats chez les membres de l’administration pénitentiaire comme dans l’opinion publique. Construire des prisons pour réduire la délinquance et protéger nos citoyens de la violence, là est le vaste programme du Ministère de la justice. Pourtant, les discours semblent se rejoindre : ce n’est pas en imposant une "fouille à corps systématique lors de l’extraction des détenus de leur cellule [11]" ou en construisant des prisons pour y enfermer la délinquance que l’on va réduire le problème de l’insécurité et encore moins celui de la surpopulation parce que, si construire des prisons signifie les "remplir", il faudra inévitablement plus de moyens financiers, humains et matériels pour répondre à cette "demande" toujours plus importante. La solution semble donc ailleurs et sûrement pas dans cette peur de l’insécurité que tente d’instaurer les médias.