Synthèse des ateliers
Quel parcours pour le sortant de prison
atteint par le VIH et/ou le VHC ?
Cette séance de questions et de débats des participants a été introduite par le Pr. Antoine Lazarus
« Nous sommes restés dans le cadre d’une discussion d’ingénieurs du médico-social : comment se servir le plus astucieusement possible, en le poussant certes un peu mais à peine, du système médico-social tel qu’il existe, dans le cadre des structures, des financements, des réglementations actuelles ? Sommes-nous dans une seule logique d’amélioration du système médico-social existant ? Ne peut-on pas l’élargir, avec des logiques communautaires, des actions d’auto-support, des mobilisations de personnes en dehors du système ? En se réunissant et en contestant ensemble le système, ces dernières, je crois, pourraient réussir à faire des choses bien différentes de ce que nous constatons aujourd’hui. Faut-il seulement attendre une amélioration du système médico-social, laquelle sera forcément limitée par la hauteur et la logique des enveloppes budgétaires ? Seules quelques dizaines de places existent, disséminées sur le territoire, alors que des centaines seraient actuellement nécessaires et des milliers dans les années qui viennent. Il y a un besoin de lieux nombreux dans lesquels les personnes peuvent vivre, et non pas de quelques lieux, attribués parcimonieusement, à quelques uns, pour quelques semaines, avec des prix de journée faramineux. »
UCSA : pour un accès limité à Gide ?
Le débat a été animé concernant un possible accès des UCSA au système de gestion informatisé des détenus en établissement (Gide). Certains arguent que ces dernières peuvent toujours appeler le SPIP ou le greffe du tribunal. « C’est sûr, il est toujours possible de se débrouiller ! » rétorque Antoine Lazarus. Mais n’y a-t-il pas intérêt, pour le détenu, à ce que la date de sortie s’affiche en permanence sur le dossier dont dispose l’UCSA et d’informer en permanence l’équipe médicale du temps de séjour ? Parfois, le patient sortait la veille d’un examen qu’il avait passé des années à préparer. N’y a t-il pas un moyen de concevoir une prise en charge qui s’inscrive dans la continuité de son existence ? ». Christophe Lojou estime également que l’information doit être partagée. « L’UCSA est trop submergée de tâches pour se permettre d’appeler sans cesse le SPIP et apprendre de cette manière la date de sortie. Il y aurait mille moyens pour rendre cette information plus disponible. » Inversement, certains estiment que cet état de fait est la conséquence normale et logique de la rupture du lien entre pénitentiaire et santé. « Moins on en connaît sur les causes de l’incarcération du patient et mieux on le soigne », note un médecin d’UCSA. Réponse de la rapporteuse du groupe SPIP : « Si nous allons dans des directions différentes, ce ne sera pas au bénéfice des patients. Certes, toutes les données ne doivent pas être partagées, mais beaucoup doivent l’être ! Que ce soit par le biais de procédures et de conventions, il faut que nous trouvions des bases de travail communes ».
Faut-il replacer le patient au centre du processus de soin ?
« Il semble que l’on soit en face d’un bricolage interindividuel, en l’absence d’une mission de collaboration, de mise en commun et d’harmonisation », résume Antoine Lazarus. Comment imaginer dans le système actuel que travaillent ensemble les travailleurs sociaux, médecine somatique et médecine psychiatrique, qui sont les liens avec l’extérieur ? Sans création de postes, un pivot faisant office d’interface - de manière continue ou en roulement - est-il possible ?
« L’administration pénitentiaire ne pourrait-elle pas questionner le détenu sur ses attentes et ses désirs, et en partant de là, travailler avec l’ensemble des partenaires et fédérer une énergie constructive ? », demande Catherine Charles, de l’association Visa-Vie. « Cela permettrait que les gens soient observants et comprennent pourquoi ils sont en prison. » Antoine Lazarus rappelle que cette démarche, qui s’oppose à la logique bureaucratique, serait le contraire de la dépersonnalisation pénitentiaire. Le détenu n’est plus compétent sur lui-même, n’a plus l’autonomie de décision sur son propre corps. Il n’est plus un sujet, mais un objet. « L’individualisation de la personne est au centre de notre action. Nous conjuguons la notion de projet au quotidien. » précise Christophe Lojou. « Le lien, c’est le détenu. On sous-estime les capacités de la personne, affirme Ruth Gozlan de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et la toxicomanie (Mildt). L’interlocuteur premier ne peut-il pas être la personne elle-même ? Le SPIP ou le JAP peuvent interroger la personne sur son état de santé. Cette dernière doit devenir le lien privilégié entre les différents services du milieu carcéral et en dehors ».