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17 L’action de la Ligue pour les droits en prison

Mise en ligne : 18 décembre 2004

Texte de l'article :

Au-delà des thématiques théoriques relatives aux droits fondamentaux, les personnes privées de liberté rencontrent au quotidien de nombreuses difficultés. Ainsi le service juridique de la LDH est-il régulièrement sollicité par les personnes incarcérées, nécessitant aide, soutien, conseil, ou ayant a minima un besoin de témoigner et de dénoncer les conditions dans lesquelles ils purgent leur peine.

De janvier à août 2000, sur un total de 1 300 courriers traités par le service juridique, 230 correspondances relèvent des personnes incarcérées. La plupart de ces sollicitations visent des questions relatives à des procédures judiciaires en cours, pour lesquelles les intéressés souhaitaient une intervention de la LDH, malheureusement irrecevable dans ce contexte. Nombreux sont les détenus ne comprenant pas les décisions qui leur sont opposées, ne connaissant pas leurs droits, se sentant abandonnés ou incompris par leurs défenseurs et par l’appareil judiciaire. Les réponses du service visent alors à leur apporter, au vu des éléments transmis ou des explications fournies, les informations nécessaires et les renseignements minimums.

D’autres portent à notre connaissance leurs conditions de détention, les problèmes rencontrés dans l’univers carcéral et dans leur procédure judiciaire, nous apportant ainsi des témoignages précieux. S’il est la plupart du temps difficile de répondre concrètement à ces courriers douloureux, une correspondance de la LDH apporte semble-t-il fréquemment un réconfort, aussi modeste soit-il.

Certains appels à l’aide ont toutefois permis au service juridique d’intervenir auprès des autorités. Ainsi, depuis le début d’année 2000, la LDH est intervenue dans près de dix dossiers auprès des administrations compétentes, principalement l’administration pénitentiaire et l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS).

Il s’agit d’une part d’interventions visant à appuyer les requêtes individuelles de transfèrement d’un établissement à un autre, notamment en raison de difficultés rencontrées avec les codétenus, et/ou pour un rapprochement familial. À chaque fois, l’administration pénitentiaire a donné suite aux interventions du service, et les dossiers concernés doivent normalement aboutir prochainement. D’autre part, une saisine du ministère de la justice au soutien d’un recours en grâce a été introduite, eu égard aux conditions particulières du dossier, qui est actuellement en instruction.

Enfin, certaines des interventions du service juridique concernent la question médicale. À chaque fois, l’IGAS a été sollicitée et a donné suite. Du problème de l’aménagement des conditions de détention pour les détenus handicapés à celui des alternatives à l’emprisonnement ou des aménagements de peine pour les personnes atteintes de pathologies lourdes et/ou incurables, nos sollicitations ont systématiquement trouvé un écho plutôt satisfaisant, des enquêtes sur place par le médecin-inspecteur de santé publique étant la plupart du temps diligentées.

Reste désormais à voir l’issue qui sera réservée à ces dossiers. En outre, par deux fois les directions d’établissements pénitentiaires ont directement été interpellées quant aux aménagements des conditions de détention ou à un délai anormalement long d’hospitalisation, et là encore des réponses adaptées ont été données à nos interventions.

Notons enfin que se mêlent à cette réalité carcérale les cas des détenus étrangers - bien souvent incarcérés pour infraction à la législation sur les étrangers - purgeant une peine principale privative de liberté et se voyant sous le coup, de manière complémentaire, d’une interdiction du territoire français ou d’un arrêté ministériel d’expulsion. L’action du service juridique rejoint alors le champ du droit des étrangers, par les explications utiles et l’accompagnement éventuel de l’intéressé dans ses démarches visant l’annulation ou l’abrogation de la mesure d’éloignement.

Ainsi l’action quotidienne du service juridique est-elle de nouveau tournée vers les prisons depuis ces trois dernières années. Les actions conjointes sur certains dossiers avec d’autres structures, telle l’Observatoire international des prisons, sont fréquentes. Forte de ce constat, la LDH se doit de poursuivre plus avant sa réflexion et ses actions relatives à la réalité pénitentiaire, afin de s’affirmer toujours plus présente dans ce champ d’action. Mais aujourd’hui, nos interventions demeurent encore réduites. Il est donc essentiel que la LDH, dans le cadre de ses services permanents, redevienne plus présente sur ce terrain, où les droits sont difficile à faire respecter.

Mathieu BOIDE, service juridique LDH