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(2001-12-07) Conclusions d’audience de la défense

Mise en ligne : 25 juin 2002

Dernière modification : 19 juin 2005

Texte de l'article :

A Messieurs les Président et Conseillers
Composant la 10ème chambre correctionnelle
De la Cour d’appel de Paris

Audience du 7 décembre 2001

CONCLUSIONS

POUR :   

Monsieur Abdelhamid HAKKAR
Né le 20 juillet 1955 à Kenchela (Algérie),
De nationalité algérienne,
Actuellement détenu à la Maison d’arrêt de La Santé

Ayant pour Avocats :
La SCP Henri LECLERC & Associés
Avocat à la Cour de Paris
Palais P 110

Maître Philippe SARDA
Avocat à la Cour de Paris
81, boulevard Saint Michel - 75005 PARIS
01 46 34 03 07 - Palais A 702

CONTRE :
Monsieur le Procureur Général

Rappel des Faits

Arrêté en 1984 avec neuf autres personnes, Abdelhamid Hakkar, citoyen algérien, était condamné le 8 décembre 1989 à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une mesure de sûreté de 18 ans par la cour d’assises de l’Yonne, alors que le procès se déroulait en son absence en son absence et hors de la présence de son avocat.

Ses neuf coaccusés ont tous été depuis remis en liberté, le dernier d’entre eux en janvier 1992.

Le 14 juin 1991, Abdelhamid Hakkar introduisait une requête devant la commission européenne des droits de l’homme.

Le 27 juin 1995, celle-ci adoptait un rapport au terme duquel elle concluait, à l’unanimité de ses membres, à la violation par l’Etat français des articles 6 § 1 et 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Il ressortait de ce rapport qu’Abdelhamid Hakkar n’avait pas été jugé dans un délai raisonnable et que surtout, n’ayant pas bénéficié de l’assistance d’un avocat, son procès avait été inéquitable.

Le 15 décembre 1995, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, à qui la Commission avait transmis cette affaire, concluait, à l’unanimité lui aussi, aux même violations.

Au terme de ses résolutions, il condamnait l’Etat français à devoir verser la somme de 62 000 francs au requérant en réparation de son préjudice moral. Il lui enjoignait surtout recommandation d’avoir à remédier au plus tôt aux violations constatées et d’en effacer les conséquences.

Depuis 1995, constatant qu’il n’y avait toujours pas été remédié, tant le Comité des Ministres que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe devaient rappeler à plus de trente cinq reprises à l’Etat français de se confronter à ses obligations, telles qu’elles découlent de sa ratification de la Convention européenne des droits de l’homme.

Le 10 février 2000, sensibilisé par le cas d’Abdelhamid Hakkar, Monsieur Jack Lang présentait un amendement parlementaire aux fins d’introduire un nouveau cas de révision qui permettrait d’exécuter les condamnations prononcées par le Conseil de l’Europe contre l’Etat français.

Le 21 avril 2000, Monsieur le Premier Vice-Président du Tribunal de grande instance de Paris était saisi en référé par Monsieur Hakkar.

Après avoir écarté le déclinatoire de compétence déposé par le Préfet de la Région Ile de France, Préfet de Paris, il avait jugé :

« Attendu en conséquence que la France, sanctionnée par l’organe compétent du Traité à raison de la violation des dispositions de Convention, se devait de prendre d’office les initiatives de nature à lui permettre de justifier qu’elle entendait satisfaire à l’exigence d’un procès équitable au sens des dispositions précitées, dans l’intérêt de Monsieur HAKKAR,

« Or, attendu qu’il n’est pas fourni la preuve d’une telle initiative, sauf l’information relative au dépôt d’une proposition de loi devant permettre d’y satisfaire pour l’avenir ;

« Qu’en conséquence, Monsieur HAKKAR se voit privé de l’exercice d’un droit fondamental de l’homme, en l’occurrence de son droit à un procès équitable, ce qui caractérise suffisamment la voie de fait qu’il invoque et qui justifie la saisine de notre juridiction garante du respect des libertés individuelles ».

La loi du 15 juin 2000, renforçant la protection de la présomption d’innocence contenait l’amendement évoqué plus haut en prévoyant l’insertion des articles 626-1 et suivants dans le Code de procédure pénale sous le titre « Du réexamen d’une décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme » d’application immédiate.

Une nouvelle juridiction, la Commission de réexamen des décisions pénales, était alors créée par la Cour de Cassation.

Le 30 novembre 2000, après seize années d’emprisonnement et dix ans de multiples procédures, la nouvelle juridiction rendait sa première décision. Elle ordonnait la suspension de la peine de réclusion à perpétuité prononcée le 8 décembre 1989 contre Abdelhamid HAKKAR par la cour d’assises de l’Yonne et renvoyait l’affaire devant la Cour d’Assises des Hauts de Seine afin que l’affaire soit rejugée.

Au lieu d’être immédiatement mis en liberté, Monsieur HAKKAR était maintenu en détention à la maison d’arrêt de la Santé et placé au surplus à l’isolement, ce qui ôtait tout sens à la suspension de sa peine criminelle à perpétuité.

Pour prétendre maintenir Monsieur HAKKARD en prison, l’administration pénitentiaire invoque trois condamnations correctionnelles, devenues définitives en 1989, 1992 et 1997, mises à l’écrou à la diligence des Parquets généraux de Paris et de Reims qui ne seraient, selon elles, devenues « exécutoires » qu’à compter de cette suspension.

Monsieur HAKKAR conteste fermement cette décision et soutient que ces trois peines ont déjà été exécutées. Elles sont en tout état de cause prescrites.

Sur la recevabilité de la requête

Le problème soumis à la Cour relatif à l’exécution de ces trois condamnations correctionnelles dont l’administration pénitentiaires se prévaut afin de maintenir Monsieur HAKKAR en détention.

Elle argue tout d’abord de la condamnation, du chef de tentative d’évasion, à 18 mois d’emprisonnement assortie d’une décision de maintien en détention prononcée par la Cour d’appel de Paris le 2 décembre 1988.

Elle se prévaut ensuite de la condamnation, du chef de tentative d’évasion avec violences, à 8 ans d’emprisonnement prononcée par cette même Cour le 27 février 1992.

Enfin, l’administration pénitentiaire fait état d’une condamnation, du chef d’infraction à la législation sur les stupéfiants, à 6 mois d’emprisonnement prononcée le 14 mars 1996 par la Cour d’appel de Reims.

En vertu de l’article 710 du code de procédure pénale, « tout incidents contentieux relatifs à l’exécution sont portés devant le tribunal ou la cour qui prononcé la sentence ».

La Cour de céans est donc compétente pour examiner les incidents d’exécution relatifs aux deux peines qu’elle a prononcées en 1988 et 1992.

En ce qui concerne la peine prononcée par la Cour d’appel de Reims, aucun problème d’exécution ne peut se poser puisqu’il est indiscutable que cette peine a été entièrement purgée.

En effet, quand bien même cette condamnation à 6 mois d’emprisonnement ne serait devenue exécutoire que le 30 novembre 2000, ainsi que l’affirme l’administration pénitentiaire, elle a été entièrement exécutée au plus tard le 30 mars 2001, Monsieur HAKKAR ayant bénéficié, sur cette condamnation, de deux mois de remise gracieuse au titre du décret de grâces collectives de 1997.

Discussion
- Sur l’exécution de ces peines
- sur la peine de 18 mois prononcée le 2 décembre 1998 par la 10ème Chambre de la cour d’appel de paris

En novembre 1986, Monsieur HAKKAR tentait de s’évader.
Dans ce cadre, un mandat de dépôt était pris en juillet 1988 et une mise en liberté était ordonnée cinq mois plus tard, en décembre 1988.

Le 21 septembre 1989, Monsieur HAKKAR était condamné à cinq années d’emprisonnement (peine rapportée à trois années par la Cour d’appel de paris) et un nouveau mandat de dépôt était pris.

Au regard de sa fiche d’exécution, le début de cette peine de trois années était fixé au 21 septembre 1989, jour du second mandat de dépôt.

L’administration considère, à juste titre, que cette peine est à ce jour exécutée.

En janvier 1988, Monsieur HAKKAR tentait de s’évader une seconde fois et était condamné de ce chef à la peine de 18 mois d’emprisonnement par la Cour d’appel de Paris le 2 décembre 1988.

Dans ce cadre, un mandat de dépôt était pris le 27 juillet 1988, soit quatorze mois avant le mandat de dépôt pris en compte pour faire débuter la peine de trois années qui seule aurait été exécutée.

Or, en tout logique, la peine de 18 mois a nécessairement débuté le 27 juillet 1988, au jour du mandat de dépôt correspondant.

A cette date, Monsieur HAKKAR ne purgeait  aucune peine devenue définitive.

Ce n’est que le 27 janvier 1990, dix huit mois plus tard, qu’à débuter la peine de trois ans.

En tout état de cause, la peine de dix huit mois a été infligée en première instance et est devenue définitive avant celle des trois ans, ce qui confirme que son exécution a nécessairement débuté avant celle ci.

La peine de 18 mois a donc été entièrement exécutée, au même titre que celle de trois ans.

3.1.2- Sur la peine de 8 ans d’emprisonnement prononcée le 27 février 1992 par la 10ème Chambre de la Cour d’appel de paris

L’administration pénitentiaire soutient que cette condamnation n’a été mise à exécution que le 30 novembre 2000.

Cette peine, qui n’avait pas donné lieu à un mandat de dépôt en cours d’instruction, a cependant fait l’objet d’une remise gracieuse de trois mois en application du décret de grâces du 2 juillet 1992.

L’article 3 de ce décret, nécessairement applicable à la situation de Monsieur HAKKAR, disposait que « les personnes condamnées au plus tard le 7 juillet 1992 à une peine temporaire de liberté non ramenée à exécution à cette même date, bénéficient d’une remise gracieuse de trois mois sous réserve que la peine soit devenue exécutoire avant le 19 juillet 1992.

La circulaire 92-11 précisait par ailleurs que la remise ne s’appliquait que si les trois conditions cumulatives suivantes étaient réunies :

« la condamnation a été prononce au plus tard le 7 juillet 1992
la peine n’a pas encore été ramenée à exécution, c’est à dire qu’elle n’a pas été mise à l’écrou, à la date du 7 juillet 1992
la peine doit être devenue exécutoire avant le 19 juillet 1992 »

La peine de 8 ans était donc exécutoire le 19 juillet 1992. Surtout, la seconde condition posée exprime nettement que la mise à l’écrou d’une peine ramenée à exécution.

Or, cette peine de 8 ans d’emprisonnement prononcée le 27 février 1992 a été mise à l’écrou et donc ramenée à exécution le 8 décembre 1992 à l’initiative du Parquet général ; en aucun cas le 30 décembre 2000 comme le soutient aujourd’hui l’administration pénitentiaire.

Monsieur le Procureur général reconnaît d’ailleurs lui-même dans les observations qu’il a formulées dans le cadre de la présente requête, que Monsieur HAKKAR invoquait à bon droit les dispositions du décret.

Cette peine, à laquelle il convient donc de soustraire trois mois de grâce, a donc été entièrement exécutée le 8 septembre 2000 au plus tard.

A l’appui de sa démonstration, le requérant produit une consultation de Monsieur le professeur Bouloc qui confirme son analyse.

Ainsi, concluant sur la question de savoir si deux peines prononcées pour les tentatives d’évasion précitées pouvaient ou non être ramenées à l’exécution, Monsieur le Professeur Bouloc indique :

« les peines d’emprisonnement pour tentatives d’évasion, tout en devant être exécutées en sus de la peine prononcée pour l’infraction à raison de laquelle le condamné était détenu, ne peuvent qu’être absorbées par une condamnation à la réclusion à perpétuité.

On ne voit pas en effet comment après la cessation de cette peine pas décès, il serait possible de la mettre à exécution. »

Contrairement à l’avis du Parquet général selon lequel « ces deux peines se cumulent sans possibilité de confusion et la peine prononcée le 2 décembre 1988 doit être subie après la peine prononcée le 8 décembre 1989 », Monsieur le Professeur Bouloc conclut encore sans ambiguïté au terme de sa consultation :

« en tout cas, les peines prononcées par la Cour d’appel de Paris au titre de l’évasion ont nécessairement été ramenées à exécution du fait de leur mention sur le registre d’écrou ; elles ne sauraient être ramenées à exécution à la suite d’une seule suspension d’exécution d’une peine de réclusion criminelle à perpétuité qui n’équivaut pas à son exécution ».

3.1.3- Sur la peine de 6 mois d’emprisonnement prononcée le 14 mars 1996 par la Cour d’appel de Reims

A titre d’information, cette peine ayant également fait l’objet d’une remise gracieuse de deux mois en application du décret de grâce de 1997, il est établi qu’elle a été mise à exécution et qu’elle est aujourd’hui purgée.

Elle a été mise à l’écrou et de ce fait portée à exécution le 8 septembre 1997.

Elle a donc été entièrement exécutée le 8 janvier 1998 au plus tard.

Si par impossible la Cour admettait, à l’instar de l’administration pénitentiaire, que les peines de 18 mois et 8 ans d’emprisonnement n’avaient été ramenées à exécution que le 30 novembre 2000, elle ne pourrait que constater que la prescription de ces peines était alors acquises.

3.2- Sur la prescription de ces peines
En application de l’article 133-3 du Code pénal, les peines de 18 mois et 8 ans d’emprisonnement sont indiscutablement prescrites.

L’article 133-3 du Code pénal qui est, comme l’a été précisé le législateur, d’application restrictive, dispose en effet que « les peines prononcées pour un délit se prescrivent par cinq années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive ».

Ainsi, la peine de 18 mois d’emprisonnement, devenue définitive le 18 octobre 1989, était prescrite le 18 octobre 1994.

La peine de 8 ans d’emprisonnement, devenue définitive le 23 juin 1992, était prescrite le 23 juin 1997.

L’interruption de la prescription invoquée par l’administration pénitentiaire est sans effet.

Dans une lettre adressée le 23 novembre 2000 à Monsieur HAKKAR, le directeur de la maison d’arrêt de la Santé explique en effet que la mise à l’écrou des condamnations à 18 mois et 8 ans d’emprisonnement aurait interrompu le délai de prescription.

Or, l’interruption de la prescription n’a autre effet que d’annuler le temps écoulé et de faire débuter un nouveau délai.

Ainsi, dans l’hypothèse où la Cour admettrait que la mise à l’écrou ne ramènerait pas la peine à exécution et interromprait le délai de prescription, elle ne pourrait que constater que les peines sont malgré toutes prescrites.

La peine de 18 mois d’emprisonnement, mise à l’écrou le 12 janvier 1990, aurait ainsi été prescrite le 12 janvier 1995.

La peine de 8 ans d’emprisonnement, mise à l’écrou le 8 décembre 1992, aurait été prescrite le 8 décembre 1997.

Monsieur HAKKAR est donc détenu de façon irrégulière quelle que soit la présentation faite de sa situation.

L’administration pénitentiaire ne saurait par ailleurs invoquer la suspension du délai de prescription par l’exécution de la peine perpétuelle.

Cette analyse, pourtant retenue par Monsieur le Procureur général, serait en totale contradiction avec le principe posé par le premier alinéa de l’article 132-5 du Code Pénal au terme duquel « toute peine privative de liberté est confondue avec une peine perpétuelle ».

Au surplus, la suspension de la peine perpétuelle, ordonnées le 30 novembre 2000 anéantirait rétroactivement cette prétendue suspension du délai de prescription des peines de 8 ans et 18 mois.

Cette analyse a été donnée à Monsieur HAKKAR dans un courrier en date du 22 janvier 2001 rédigé au nom de madame le Garde des Sceaux, où il est affirmé qu’à la suite de l’arrêt rendu le 30 novembre 2000, il se trouve en situation d’accusé et que la condamnation prononce le 8 décembre 1989 par la Cour d’assises de l’Yonne à la réclusion criminelle à perpétuité n’est ni définitive, ni exécutoire.

En outre, ainsi que le fait remarquer Monsieur le Professeur Bouloc :

« Outre que postées à l’écrou ces peines ont été exécutées, il faut aussi reconnaître, pour le cas où elles n’auraient pas été exécutées (malgré la règle selon laquelle la mention sur l’écrou emporte l’exécution), le parquet général ne serait pas en droit de les mettre à exécution.

C’est qu’en effet, la commission de réexamen n’a fait que suspendre l’exécution de la peine de la réclusion, elle n’a pas pour autant annulé la décision de condamnation qui demeure jusqu’à ce qu’une nouvelle décision vienne se substituer à la décision initiale. A fortiori la décision de la commission de réexamen n’a pas mis un terme à l’exécution de la condamnation initiale, en sorte que la perpétuité ne s’est pas achevé le 30 novembre 2000. (...) En pareil cas, il y a un différé dans l’exécution, et non pas peine exécutée, de sorte qu’il est impossible de faire débuter les peines prononcées pour évasion tant que n’est pas expirée la peine encourue pour le crime à raison duquel l’intéressé était détenu.

Il est clair que la réclusion criminelle à perpétuité dont l’exécution a été suspendue temporairement n’est pas achevée et de ce fait les peines pour évasion ne sauraient être mises en œuvre ».

3.3- Sur les ambiguïtés de l’administration
La purge de ces condamnations - du fait de leur exécution ou de leur prescription- est encore établie, s’il en était besoin, par l’Etat français lui-même.

Ainsi, en avril 2000, devant le Juge des référés, Le Ministère public et l’Agent judiciaire du Trésor ne se sont aucunement prévalu de ces peines d’emprisonnement, outre la peine à perpétuité jugée illégale et non avenue par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, pour démontrer qu’Abdelhamid HAKKAR ne pouvait prétendre être arbitrairement détenu et ainsi disculper l’Etat de la voie de fait qui lui était reprochée.

Ensuite, la fiche d’exécution des peines de Monsieur HAKKAR, telle qu’elle était établie avant le 30 novembre 2000, révèle qu’il était proposable à la libération conditionnelle le 2 septembre 2002, soit dix-huit années après son incarcération en 1984, ce qui correspond à la peine de sûreté prononcée par la Cour d’assises de l’Yonne en 1989.

Dans le calcul de la date à laquelle Monsieur HAKKAR était proposable à la libération conditionnelle, seule la peine perpétuelle a été prise en compte, à l’exclusion de toutes peines correctionnelles.

L’administration pénitentiaire avait ainsi justement considéré, avant la suspension de la peine perpétuelle, que toutes les peines correctionnelles avaient été, de fait, entièrement « absorbées » par la peine perpétuelle, conformément aux dispositions du 1er alinéa de l’article 132-5 du Code Pénal.

S’agissant de l’absorption des peines correctionnelles par les peines criminelles, Monsieur le Professeur Bouloc confirme l’interprétation du requérant.

Après avoir rappeler le principe posé sous l’empire de l’ancien Code Pénal, repris par l’article 132-5 du Code Pénal et l’exception qui s’applique à ce principe en matière d’évasion, celui-ci indique très clairement : « la logique impose que la peine temporaire prononcée pour évasion soit exécutée en même temps que la peine perpétuelle, sinon cette peine pour évasion ne pourra jamais être ramenée à exécution ».

Sa thèse selon laquelle les seize années de détention précédant la suspension de peine perpétuelle correspondrait à une période de détention provisoire est évidemment à exclure, d’autant que l’administration maintient que la peine de trois ans a été exécutée durant cette période.

Comment peut-on décemment affirmer que Monsieur HAKKAR, qui aurait ainsi subi une « détention provisoire » de size années, devrait désormais purger au surplus de dix ans de détention pour des faits qui ont été commis alors qu’il était déjà en « détention provisoire » et qui ont été définitivement jugés entre 1989 et 1995.

Comment peut-on sérieusement prétendre qu’une personne pourrait être incarcérée au titre de la détention provisoire pendant seize années, alors que dans ce laps de temps, elle pouvait être détenue, pendant dix ans, en exécution de trois peines définitives ?

Monsieur HAKKAR est à l’évidence incarcéré hors les cas prévus par la loi et est, de ce fait, détenu arbitrairement.

Sa mise en liberté doit être ordonnée sans délai.

Par ces motifs
Il est demandé à la cour d’appel de Paris de :
Constater que Monsieur HAKKAR est détenu arbitrairement ;
Ordonner sa mise en liberté immédiate.

Paris le 7 décembre 2001

Pièce Jointe  :
Copie de la consultation de Monsieur le Professeur BOULOC.