Consommation de drogue
Les efforts soutenus des systèmes carcéraux pour empêcher les détenus de consommer de la drogue - en faisant ce qu’ils peuvent pour bloquer l’entrée de drogue en prison - ne parviennent pas au but. On trouve de la drogue dans les prisons et plusieurs études fournissent des preuves de l’ampleur de la consommation de drogue par injection et par d’autres moyens, en prison.
Au Canada
Dans un sondage du Service correctionnel du Canada (SCC) en 1995, auprès de 4 285 détenus d’établissements fédéraux, 40% des répondants ont déclaré avoir utilisé de la drogue depuis leur arrivée dans l’établissement où ils se trouvaient à ce moment.
L’injection de drogue se pratique et la rareté du matériel d’injection entraîne souvent le partage de ce matériel. Aux membres du Comité d’experts sur le sida et les prisons (CESP), des détenus ont dit que l’injection de drogue et le partage d’aiguilles sont des activités fréquentes et que, parfois, de 15 à 20 détenus utilisent la même aiguille. Plusieurs employés du SCC ont reconnu que la drogue est une réalité dans les prisons, en disant que « l’usage de drogue fait partie de la culture et des réalités carcérales » et qu’il ne semble pas exister de moyen de s’assurer qu’il cesse.
De tels témoignages de la prévalence de l’injection de drogue ont été confirmés par plusieurs études :
dans une étude parue en 2004, 76% des utilisateurs de drogue par injection participant à la Vancouver Injection Drug Users Study déclaraient des épisodes d’incarcération depuis qu’ils avaient commencé à s’injecter des drogues ; de ceux-là, 31% rapportaient s’en être injecté aussi en prison ;
dans une étude de 2003 auprès de femmes détenues dans des établissements fédéraux, 19% ont déclaré s’être injecté des drogues en prison ;
dans une étude de 1998, 24,3% des détenus de l’établissement Joyceville (Kingston) déclaraient s’être injecté des drogues en prison (une étude semblable dans la même prison, en 1995, avait mesuré 12%) ;
dans une étude parmi des hommes et des femmes incarcérés dans des établissements provinciaux à sécurité intermédiaire de Montréal, 73,3% des hommes et 15% des femmes ont affirmé consommer de la drogue durant leur incarcération ; parmi ceux-là, 6,2% des hommes et 1,5% des femmes s’en injectaient ;
dans une étude effectuée dans un établissement provincial à Québec, 12 des 499 répondants ont affirmé s’injecter de la drogue en prison, 11 partageaient le matériel d’injection et 3 étaient séropositifs ;
dans un sondage du SCC en 1995, 11% des détenus ont déclaré s’être injecté de la drogue depuis leur arrivée dans l’établissement où ils se trouvaient ; l’injection de drogue était particulièrement fréquente dans la région du Pacifique à 23%.
Dans le monde
On rapporte des taux élevés d’usage de drogue par injection dans les prisons de plusieurs autres pays. De manière générale, l’injection de drogue diminue, en prison, parmi les personnes qui s’y adonnaient avant d’être incarcérées. En revanche, ceux qui s’injectent sont plus susceptibles de le faire de manière plus risquée ; par ailleurs, un nombre important commencent une telle consommation par injection en prison. Ainsi, des études ont conclu que l’incarcération augmente le risque d’infection à VIH. Voici des données d’études récentes :
dans un rapport de 2002 pour l’Union européenne (U.E.), on signalait qu’entre 0,3% et 34% des détenus, dans l’U.E. et en Norvège, s’injectaient des drogues en prison ; entre 0,4% et 21% des utilisateurs de drogue par injection avaient commencé cette pratique alors qu’ils étaient incarcérés ; et une proportion élevée de ceux qui s’injectaient en prison partagaient du matériel d’injection ;
en Russie, une étude auprès de 1 087 détenus a relevé que 43% s’étaient injecté une drogue pendant leur vie, et 20% pendant leur détention. De ceux-là, 64% avaient utilisé du matériel d’injection déjà utilisé par une autre personne, et 13,5% avaient commencé l’injection pendant la détention ;
au Mexique, une étude dans deux prisons a décelé des taux d’injection de drogue de 37% et de 24%.
Activité sexuelle
Dans les prisons, l’activité sexuelle est considérée comme un facteur de risque moins répandu que l’injection de drogue, pour la transmission du VIH et de l’hépatite C. Elle a lieu, néanmoins, et elle entraîne un risque de transmission de ces infections pour les détenus qui s’y adonnent.
En prison, l’activité homosexuelle a lieu comme à l’extérieur en raison de l’orientation sexuelle, mais elle se produit aussi en raison de la vie carcérale, qui incite à des activités et relations homosexuelles entre détenus qui ne s’identifient pas comme homosexuels. La prévalence de l’activité sexuelle en prison dépend du fait que les détenus soient logés dans des cellules individuelles ou des dortoirs ainsi que de facteurs comme la durée d’emprisonnement, le degré de sécurité de l’établissement et le degré d’autorisation de visites conjugales. Des études sur le contact sexuel en prison ont permis de constater que les pratiques des détenus varient beaucoup. Dans une étude dans des établissements d’État et municipaux, à New York, des détenus ont déclaré des cas fréquents de relations sexuelles non protégées, derrière les barreaux. Une femme a résumé comme suit la prévalence et la diversité de l’activité sexuelle :
« Les agents de correction masculins ont des relations sexuelles avec les femmes, les agents de correction féminins en ont avec les femmes détenues, les détenus de sexe masculin en ont avec les détenues. Il y en a de toutes sortes, c’est une vraie fricassée là-dedans. »
Dans un sondage mené en Russie auprès de 1 100 détenus masculins, de 10% à 15% seulement ont déclaré ne pas avoir eu de contacts sexuels pendant leur incarcération. L’activité sexuelle non consensuelle était prévalente.
Au Canada, dans le sondage du SCC (1995), 6% des détenus sous l’autorité du fédéral ont déclaré avoir des relations sexuelles avec un autre détenu. Ceci concorde avec les résultats d’études effectuées dans des établissements provinciaux. Plus récemment (2002), dans une étude auprès de femmes détenues dans des prisons fédérales, 37% ont rapporté être sexuellement actives en prison.
Tatouage
En prison, le tatouage est une pratique sociale et il s’accompagne d’un partage d’aiguilles qui le rend risqué. Au Canada, 45% des détenus s’étaient fait tatouer en prison. En 2004, le SCC a annoncé qu’il procéderait à un essai d’« initiative de pratiques sécuritaires de tatouage ».
Lectures complémentaires
Un survol de la recherche sur l’injection de drogue en prison - R. Lines et coll., L’échange de seringues en prison : Examen des données et de l’expérience internationales, Montréal, Réseau juridique canadien VIH/ sida, 2004. (Accessible via www.aidslaw.ca/francais/Contenu/themes/prisons.htm)
De l’information, entre autres, sur les comportements à risque parmi les détenus de ressort fédéral, au Canada - A. DiCenso, G. Dias, J. Gahagan, Ouvrir notre avenir - Une étude nationale sur les détenues, le VIH et l’hépatite C, Toronto, Réseau d’action et de soutien des prisonniers et prisonnières vivant avec le sida (PASAN), 2003. www.pasan.org/Publications/Ouvrir_Notre_Avenir.pdf
Service correctionnel du Canada, Rapport de recherche, Sondage national auprès des détenus : rapport final, Ottawa, SCC, Secteur de recherche et développement, 1996, No SR-02. (Accessible via www.csc-scc.gc.ca)
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Troisième version révisée et mise à jour, 2004. On peut télécharger ce feuillet à partir du site Web du Réseau juridique <http://www.aidslaw.ca/francais/Contenu/themes/prisons.htm> ou le commander auprès du Centre canadien d’information sur le VIH/sida (courriel : aidssida@cpha.ca). Il est permis de faire et de distribuer (mais non de vendre) des copies de ce feuillet, en indiquant que l’information provient du Réseau juridique canadien VIH/sida. Pour information, veuillez contacter le Réseau juridique (tél. : (514) 397-6828, téléc. : (514) 397-8570, courriel : info@aidslaw.ca). This info sheet is also available in English.
Financé par Santé Canada dans le cadre de la Stratégie canadienne sur le VIH/sida. Les constats, interprétations et points de vue exprimés dans cette publication sont ceux de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement les positions ou politiques officielles de Santé Canada.
© Réseau juridique canadien VIH/sida, 2004