Etat de grâce de Nicolas SARKOZY
Grâce présidentielle ou cadeau présidentiel
Comme à son habitude, le Président de la République Française, M. Nicolas SARKOZY, vient de prendre, seul, la décision d’accorder une grâce présidentielle de six mois à M. Jean-Charles MARCHIANI, condamné à trois ans de prison ferme pour corruption, ainsi qu’à une trentaine d’autres personnes incarcérées ayant eu « une conduite irréprochable ». Mais qu’est-ce qu’« une conduite irréprochable » ? Je suis prêt à prendre le pari qu’il y en a eu bien plus qu’une trentaine, M. Le Président, sur les 64.000 personnes incarcérées qui ont eu « une conduite irréprochable ». Ou alors, cette trentaine ciblait particulièrement une population carcérale comme, par exemple : policiers, hommes politiques, pour ne citer qu’eux. Pourtant, il semble que notre Président avait proclamé, bien haut et bien fort devant la presse (comme à son habitude) l’abolition des grâces collectives, instituées par M. François MITTERAND, délivrées chaque année pratiquement lors de la Fête Nationale, le 14 juillet, aux personnes incarcérées. Encore une preuve (s’il en fallait encore une) que les personnes incarcérées n’ont droit à aucune considération, encore moins d’indulgence, même lors des Fêtes nationales.
Pour en revenir à M. Jean-Charles MARCHIANI, puisque c’est de lui qu’il s’agit, en prison depuis sept mois à peine, il va donc pouvoir bénéficier d’un aménagement de peine sous la forme d’une libération conditionnelle. Quelle aubaine !!! Alors que certaines personnes incarcérées galèrent pendant des mois, voire des années, pour obtenir ne serait-ce qu’une permission, M. Jean-Charles MARCHIANI, ami du Président, n’ayons pas peur de nommer les relations entre les personnes, n’aura sans aucun doute pas très longtemps à attendre pour déposer sa demande et passer en Commission d’Application des Peines dans la foulée, lui permettant ainsi de sortir très rapidement.
D’habitude très alerte pour critiquer le fait que des prisonniers français sortent avant d’avoir effectués la totalité de leur peine, grâce à des « crédits de peine », cette fois l’opinion publique ne s’émeut pas de cette grâce présidentielle ciblée. On peut également se poser la question : pourquoi seulement une trentaine de personnes, alors que l’on s’en doute bien, bien plus mériterait cette reconnaissance ? D’autant que connaissant les chiffres de la population carcérale, le Président de la République aurait pu en profiter pour revenir à un taux plus humaniste. Faut-il donc croire que les hommes politiques emprisonnés fassent l’objet d’un traitement particulier et plus favorable ? Faut-il donc croire qu’en raison de leur état de service envers la Nation, ils auraient droit à une certaine clémence ? Décidemment, M. Nicolas SARKOY, le Président de la République de tous les français (sauf des personnes incarcérées) nous étonnera toujours avec ses manières de « je-fais-ce-que-je-veux-je-suis-le-Président-de-la-République. »
Profitons de cette occasion pour délivrer un petit cours du Code de Procédure Pénale (C.P.P.). Pour être clair, depuis la première loi Perben, les « remises de peines gracieuses » n’existent plus telles que nous les avions connus auparavant. Ce qui existe aujourd’hui, depuis cette loi, se nomment les « crédits de peine », ce qui est tout à fait différent. Les « remises de peines gracieuses » en leur temps, étaient véritablement des déductions de peine. Elles avaient pour but de réduire la condamnation (sept jours par mois de condamnation pour une peine inférieure à un an ou trois mois par année affectée) quand une personne incarcérée avait eu une bonne conduite lors de sa détention. Les « crédits de peine » (sept jours par mois de condamnation pour une peine inférieure à un an ou trois mois la première et deux mois par année effectuée) ont un tout autre sens et ressemblent plus à une transformation d’une partie de la condamnation en sursis avec mise à l’épreuve. Ce qui veut dire que ce qui vous a été octroyé comme « crédits de peine », la personne incarcérée qui en aura bénéficier ne devra absolument pas faire un pas de travers pendant toute la période où il aurait dû faire sa peine sous peine de voir ses « crédits de peine » révoqués. Il n’existe donc plus de « remises de peine gracieuses ». A bon entendeur !
Didier ROBERT,
Incarcéré au Centre de détention de Melun