Résultats de l’enquête de juin 2003
Depuis 1988, une enquête effectuée un jour donné est régulièrement conduite afin d’évaluer auprès des équipes médicales intervenant dans les établissements pénitentiaires [1] le nombre de personnes incarcérées atteintes par le VIH, dont la séropositivité est connue par le personnel de santé. En 1998, l’enquête a été modifiée de façon à apprécier les modes de prise en charge thérapeutique de ces personnes à chaque stade de la maladie : nombre de personnes détenues traitées par antirétroviraux et type d’association prescrite. Par ailleurs, l’enquête a été étendue au recueil d’informations sur les personnes détenues atteintes d’hépatite C chronique en raison de la prévalence de cette pathologie au sein de la population pénale : nombre de détenus infectés par le VHC bénéficiant d’une prise en charge médicale (ponction biopsie hépatique, mono ou bi-thérapie).
Cette enquête n’est pas une étude de prévalence de l’infection par le VIH et le VHC en milieu pénitentiaire ; certaines personnes détenues ne souhaitent pas être dépistées à leur entrée en prison, d’autres ne déclarent pas leur séropositivité. Elle constitue, par contre, un des éléments d’appréciation de la charge en soins des équipes médicales des UCSA ainsi que l’accès aux soins dont bénéficie les personnes détenues atteintes d’infection à VIH et d’hépatite C. Reproduite tous les deux ans à la même période (fréquence annuelle avant 1999, compte tenu de la forte prévalence à VIH en milieu pénitentiaire), l’analyse évolutive des données est possible et permet d’avoir des données d’ordre épidémiologique sur cette population touchée par les deux pathologies.
Le VIH
Le jour de l’enquête, en juin 2003, 60 513 personnes étaient incarcérées en France, réparties dans les établissements pénitentiaires à l’exception des centres de semi-liberté non pourvus de structures médicales. 139 établissements pénitentiaires sur 166, départements d’outre-mer compris, nous ont adressé en retour le questionnaire d’enquête, ce qui constitue un taux de réponse de 83,7 %. Ces 139 établissements pénitentiaires regroupaient, le jour de l’enquête, 49 150 personnes détenues. Parmi ces dernières, 512 personnes atteintes par le VIH étaient connues des unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA), soit 1,04 % de la population pénale de ces établissements (tableau 1). La proportion de personnes détenues atteintes par le VIH diminue régulièrement depuis 1991 : 5,8% en 1990, 2,8% en 1994, 2,3% en 1995, 1,9% en 1996, 1,6% en 1997 et 1998, 1,3% en 1999, 1,2% en 2000 et 1,04% en 2003.
Toutefois, la baisse du pourcentage de personnes détenues VIH + n’est que de 0,16% entre 2000 et 2003.
Parmi les 512 personnes détenues atteintes par le VIH en 2003, 55 (10,7%) étaient au stade SIDA, 70 (13,7%) présentaient une forme symptomatique de l’infection par le VIH et 387 (75,6%) présentaient une forme asymptomatique de l’infection (tableau 1 ).
Les deux régions Ile-de-France et Provence Alpes Côte d’Azur regroupent à elles seules 49% des patients détenus VIH connus, (29% pour l’Ile-de-France et 20% pour la Provence Alpes Côte d’Azur). Les établissements pénitentiaires de ces deux régions regroupent 30% de la population pénale nationale.
Parmi les personnes détenues VIH + connues, 58,2% sont traitées par antirétroviraux, 48,6% des détenus traités au stade A de la maladie, 95,7% des détenus traités au stade B et 78,2% traités au stade C (tableau 2).
Ces traitements sont presque uniquement dispensés sous forme d’association : 8,7% des personnes détenues qui bénéficient d’un traitement antirétroviral sont sous bi thérapie et 83,9% sous trithérapie. Dix sept personnes détenues sont sous quadrithérapie ou plus, soit 5,7% des personnes sous traitement, et 5 sous monothérapie soit 1,7% (tableau 2 ).
Si l’on compare avec les données de la précédente enquête de 2000, la répartition par stade de l’évolution du VIH en milieu carcéral s’est considérablement modifiée. En effet, 75,6% des personnes détenues se trouvent au stade A de la maladie contre à peine un peu plus de 50% en 2000 (tableau 1). Pour ces 75,6% de personnes qui se trouvent dans la phase asymptomatique du VIH, 82,4% sont traitées sous trithérapie (tableau 2). Par rapport à l’année 2000, les personnes détenues se trouvant au stade C de la maladie (SIDA) a chuté de plus de la moitié (de 23 à 10,7%) (tableau 1).
Ces résultats semblent notamment attester de l’efficacité des trithérapies, ce qui expliquerait la régression au stade A de patients détenus qui auparavant pouvaient se trouver à un stade plus avancé de la maladie, et le net recul des patients détenus aux stades B et C de la maladie.
Cette évolution depuis la dernière enquête de 2000 montre que les patients détenus séropositifs reçoivent, en milieu carcéral, une prise en charge thérapeutique équivalente à celle proposée en milieu ouvert. En effet, il est possible d’initier ou de reconduire toutes les combinaisons antirétrovirales validées. Toutes les molécules antirétrovirales bénéficiant d’une AMM ou d’une ATU nominative ou de cohorte sont disponibles.
Le VHC
Les personnes détenues atteintes d’hépatite C connues des équipes médicales hospitalières représentent 4,2% (2076/49150) de l’ensemble de la population pénale des établissements pénitentiaires ayant répondu à l’enquête (tableau 3), soit une baisse de 0,6% par rapport à la précédente enquête de 2000 (4,8% de VHC+).
Il ressort de l’enquête que, dans 69% des cas, les personnes détenues VHC+ sont en maison d’arrêt, alors qu’en 2000 ce même taux était seulement de 60%.
On peut constater dans les chiffres 2003 une parfaite adéquation entre le nombre de personnes détenues VHC+ avec symptômes (186 détenus, soit 9% des personnes infectées) et le nombre de traitements délivrés par mono ou bithérapie (186 traitements, soit 9% des personnes VHC+).
La très grande majorité des personnes détenues VHC+ se trouve dans la phase de la maladie dite "asymptomatique " (1890 détenus, soit 91% des personnes VHC+).
Parmi ces personnes détenues VHC+, 129 ont eu une biopsie hépatique (6,2%). On constate que le recours à la PBH est plus de quatre fois plus fréquent en établissement pour peines. En maison d’arrêt, la difficulté d’obtenir ce type d’examen et la durée de détention parfois courte, handicapent et ralentissent la prise en charge thérapeutique des patients détenus.
Il s’agit de la première enquête sur l’infection à VIH et VHC dans laquelle il était demandé de mentionner les personnes co-infectées VIH et VHC. Si ces personnes détenues représentent 0,35% de la population pénale, elles constituent plus du tiers des VIH+ (33,6%) et 8,3% des VHC+.
Les personnes détenues VIH+ et VHC+ déclarées par les services médicaux en milieu pénitentiaire représentent 5,3% de la population pénale, soit un peu plus d’un détenu sur 20, ce qui constituent un travail de prise en charge médicale important pour les unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA).
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du système de soins
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Mars 2004