Paris, le 12 janvier 2004
APPEL UNITAIRE A UN MORATOIRE
sur LE PROJET DE LOI « CRIMINALITE ORGANISEE »
Le projet de loi sur « la criminalité organisée » devrait être examiné au Sénat en 2ème lecture les 20 et 21 janvier 2004. S’il est adopté, il opérera, avec la nouvelle procédure de « plaider coupable » en particulier, un bouleversement de notre système pénal, notamment en ce qui concerne le jugement des délits (environ 430 000 condamnations chaque année en France).
En outre ce projet de loi, qui s’étend désormais à l’ensemble des activités relevant du droit pénal, de la phase policière de l’enquête à l’application des peines, modifie considérablement l’exercice de nombreux droits, qu’il s’agisse des droits de la défense, ceux attachés à la présomption d’innocence, des droits des personnes en garde à vue, ou du droit à un procès équitable.
Quelles que soient les conceptions et les analyses de chacune de nos organisations sur ce projet de loi "criminalité organisée", nous estimons qu’un large débat préalable dépassant l’enceinte parlementaire doit avoir lieu avant tout vote sur une loi qui transforme notre système judiciaire.
Le Parlement ne peut pas, en l’espace de trois ans à peine, adopter des positions totalement contradictoires : après qu’il a adopté de façon quasi-unanime en juin 2000 une loi renforçant la présomption d’innocence, celle-ci est remise en cause. Les deux rapports parlementaires de 2000, sur l’état lamentable des prisons en France avaient unanimement noté les effets nocifs de la détention, insistant sur le fait qu’elle devait être un recours ultime et exceptionnel. Au contraire, l’actuel projet de loi "criminalité organisée" aura pour conséquence de favoriser le recours à l’emprisonnement dans nombre de circonstances, contribuant à une inflation carcérale d’une ampleur sans précédent. Une telle politique est aussi en totale contradiction avec les recommandations les plus récentes adoptées, à l’unanimité des Etats membres, par le Conseil de l’Europe.
L’empilement des textes pénaux et la multiplication des nouvelles
infractions rendent l’application de la loi pénale de plus en plus complexe et de plus en plus incompréhensible pour les usagers de la justice, voire même pour les professionnels. Une pause législative est nécessaire afin de permettre l’évaluation des effets de ces textes. Aussi, demandons-nous au gouvernement de décider d’un moratoire sur ce projet de loi, et de suspendre son examen par le Sénat les 20 et 21 janvier 2004.
Nous demandons aussi au Garde des Sceaux d’organiser une consultation nationale des professionnels de la justice, magistrats, personnels de l’administration pénitentiaire et de la PJJ, travailleurs sociaux, avocats, fonctionnaires de police, représentants de la communauté scientifique et du monde associatif, usagers de la justice, sur ce texte qui, désormais, dépasse très largement la lutte contre la « criminalité organisée ».
Premières signatures :
Association Française de Criminologie (AFC),
Confédération générale du travail (CGT), FSU, Ligue des droits de l’homme (LDH), Parti Communiste Français (groupe CRC sénat, groupe Assemblée Nationale, Commission justice), Syndicat de la Magistrature (SM), Syndicat des avocats de France (SAF), Syndicat national de l’ensemble des personnels pénitentiaires (SNEPAP / FSU), Union générale des syndicats pénitentiaires (UGSP-CGT)...
Contacts :
groupe CRC Sénat (d.chevallier@senat.fr)
AFC (tournier@ext.jussieu.fr)
LDH (ldh.com@wanadoo.fr)
PCF (pcf@pcf.fr)
SAF(saforg@club-internet.fr),
SM (syndicat.magistrature@wanadoo.fr)
SNEPAP-FSU (snepap@culb-internet.fr)
UGSP-CGT(ugsp-cgt2@wanadoo.fr)