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G04 La prison et le droit international

Publication originale : 1er mai 2002

Dernière modification : 6 avril 2008

Pour affirmer les droits des personnes privées de liberté, il ne manque pas de règles minimales pour le traitement des détenus ou de règles pénitentiaires, de conventions, résolutions ou recommandations émanant des Nations Unies comme du Conseil de l’Europe... Malheureusement non contraignantes pour les Etats, ces dispositions visent à consolider le respect des droit de l’homme en prison mais n’ont pas la même valeur juridique et la même influence sur le droit interne français. A ce jour, seules les instructions du Comité de prévention de la torture et les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme ont permis de renforcer la protection effective des droits des détenus.

Texte de l'article :

609 Qu’est-ce que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ?
La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) consacre des droits et libertés individuels que les Etats signataires doivent respecter. Ce texte entend assurer la protection de toute personne, et par conséquent toute personne détenue, qui estime que l’un de ses droits a été violé. Les Etats signataires, dont la France qui a ratifié la CEDH en 1974, se sont solennellement engagés à assurer l’effectivité de ces droits et garanties fondamentales. Concrètement, la Convention ne contient aucune disposition spécifique aux conditions de détention. Cependant, en n’attribuant pas à la personne privée de liberté de statut particulier, elle contribue directement à lui reconnaître un statut de citoyen à part entière. En effet, il a toujours été considéré que la détention ne prive pas l’individu « de la garantie des droits et des libertés définis dans la Convention ». La CEDH permet donc à un détenu qui considère que ses droits ne sont pas respectés au regard des prescriptions de la Convention d’engager une procédure devant les institutions européennes.
Articles 3, 4, 5, 6, 8 et 11 du titre 1 de la Convention européenne des droits de l’homme et articles 2 et 3 du premier protocole additionnel. Commission européenne des droits de l’homme, 8 mars 1962, Koch c/ RFA

610 Les principes inscrits dans la CEDH peuvent-ils être invoqués devant les juridictions internes ?
La CEDH s’applique concrètement et directement en droit interne. L’ensemble des textes juridiques en vigueur en France (lois, décrets...) doivent donc en principe respecter scrupuleusement le contenu de la Convention. De la même manière, les administrations sont tenues de tout faire pour garantir un respect absolu des articles de la Convention. Lorsqu’elles sont saisies d’une affaire, les différentes juridictions administratives ou judiciaires examinent les actes et les comportements de la puissance publique en prenant en considération les exigences européennes. Elles regardent ce que dit le droit international et vérifient que les administrations nationales vont dans le même sens.
Article 55 de la Constitution

611 Un détenu peut-il saisir la Cour européenne des droits de l’homme ?
La Cour européenne des droits de l’homme constitue l’instance juridictionnelle unique compétence pour statuer sur les requêtes individuelles introduites contre les agissements d’un Etat. Lorsqu’un détenu a tenté en vain de faire valoir ses droits devant le juge national et qu’il a épuisé toutes les voies de recours (appel et cassation), il peut intenter une dernière action devant la Cour européenne des droits de l’homme. La requête doit être introduite dans un délai de six mois à partir compter du moment où l’intéressé a eu connaissance effective et suffisante de la décision de justice ayant épuisé les voies de recours internes. Le requérant doit être directement et personnellement victime d’une violation d’un droit ou d’une liberté consacré dans la convention. Le recours doit donc être fondé sur une violation précise d’un article de la Convention. Enfin, le requérant ne doit pas déjà avoir soumis sa requête à une autre instance internationale, notamment le Comité des droits de l’homme des Nations Unies.
Articles 34 et 35 de la CEDH, protocole n°11 à la CEDH du 1er novembre 1998

612 En quoi consiste la règle de l’épuisement des voies de recours internes ?
L’obligation d’épuiser les voies de recours internes recouvre deux obligations distinctes. Pour agir devant la Cour européenne, le détenu doit en premier lieu avoir soumis aux juridictions françaises, au moins en substance, le grief qu’il veut faire valoir devant le juge européen. Il n’est pas indispensable qu’il ait invoqué l’article de la CEDH qui s’y rapporte, mais au minimum les dispositions du droit français équivalentes. D’autre part, la règle implique que l’intéressé ait préalablement exercé un « recours de nature à remédier directement à la situation litigieuse ». Il faut donc avoir utilisé la voie de recours la plus efficace. Par exemple, le détenu pourra saisir la Cour européenne après avoir tenté en vain d’obtenir gain de cause devant le juge judiciaire, sans être obligé de déposer un recours devant le juge administratif, dès lors que le recours devant le juge judiciaire était le plus adéquat. En revanche, le requérant n’a pas à exercer un recours interne aléatoire dès lors que l’insuccès de la voie de recours est probable, notamment si une constances particulières, lorsque les autorités nationales font preuve d’une passivité totale face à des allégations sérieuses de violation de la Convention (par exemple, en s’abstenant d’ouvrir une requête), l’intéressé peut être dispensé de l’exercice des voies de recours internes. Il faut toutefois rappeler que cette dispense n’est admise que de façon exceptionnelle par la Cour et que si la passivité des autorités n’est pas confirmée lors de l’instruction du dossier, la requête de l’intéressé sera déclarée irrecevable.
CEDH, 22 mai 1984, De Jong ; 25 mars 1991, Cardot ; 20 mai 1998, Gautrin. ; 30 décembre 1999, Baghli

613 Comment se déroule la procédure de saisine de la Cour européenne ?
La Cour européenne peut être saisie par requête individuelle, sans que le recours à un avocat ne soit obligatoire. Le détenu doit adresser un courrier à la Cour exposant avec clarté, même sommairement, l’objet de sa plainte. Le greffe de la Cour mettra ensuite à sa disposition un formulaire de requête et une note d’information lui permettant de remplir correctement sa demande. Ce formulaire devra lui être retourné, signé du requérant ou de son représentant, dans un délai maximum de six semaines. La procédure est contradictoire et publique. Pour garantir un accès égalitaire à la Cour, le Conseil de l’Europe a prévu un mécanisme d’aide pour les personnes ne disposant pas de ressources suffisantes. La demande peut être rédigée en français (langue officielle de la Cour) ou dans une langue officielle du Conseil de l’Europe.

614 Quels sont les effets des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme ?
Il est toujours possible de parvenir à un règlement amiable avant le prononcé du jugement. Il arrive en effet que l’Etat mis en cause préfère proposer une transaction à la personne qui a porté plainte plutôt que de subir une mauvaise publicité suite à une condamnation de la Cour européenne. L’Etat peut ainsi proposer une modification de la réglementation ainsi qu’une indemnisation pour que la victime retire sa plainte. Dans le cas contraire, le règlement du litige devant la Cour donne lieu à l’adoption d’un arrêt motivé qui est investi de l’autorité de la chose jugée : il s’agit d’une décision de justice qui devra obligatoirement être appliquée. La décision rendue est définitive après un délai de trois mois, durant lequel il est possible de demander à ce que l’affaire soit renvoyée devant la grande chambre (il faut pour cela soulever une question grave d’application ou d’interprétation de la Convention). Si la Cour conclut à une violation d’un droit énoncé par la Convention, cela consiste une condamnation de l’Etat concerné. Elle peut prévoir une indemnisation financière du préjudice occasionné au plaignant (« satisfaction équitable »), qui devra obligatoirement être versée à la victime. Cette condamnation est également un moyen de pression important pour amener un Etat à modifier ses pratiques. Quand la CEDH considère que la Convention a été violée, le Comité des ministres est chargé de vérifier la bonne exécution de l’arrêt. Cet organe politique représente l’ensemble des gouvernements européens. Son rôle sera alors de suivre le dossier jusqu’à ce que l’Etat condamné prenne des mesures suffisantes (administratives ou législatives) pour supprimer tout risque de nouvelle violation.
Articles 626-1 à 626-7 du Code de procédure pénale

615 Le droit à des conditions de détention décentes est-il garanti par la Convention européenne des droits de l’homme ?
Dans un arrêt Kudla c/Pologne du 26 octobre 2000, la Cour européenne a affirmé que « l’article 3 de la Convention impose à l’Etat de s’assurer que tout prisonnier est détenu dans des conditions qui sont compatibles avec le respect de la dignité humaine, que les modalités de l’exécution de la mesure ne soumettent pas l’intéressé à une détresse ou à une épreuve d’une intensité qui excède le niveau inévitable de souffrances inhérent à la détention et que, eu égard à ces exigences pratiques de l’emprisonnement, la santé et le bien-être du prisonnier sont assurés de manière adéquate, notamment par l’administration de soins médicaux requis ». Par cet arrêt, la Cour a procédé à un élargissement de la notion de « traitements dégradants » en ayant recours à la notion de dignité humaine, établissant ainsi un seuil objectif à l’article 3, qui peut s’appliquer indépendamment d’une volonté d’humilier le détenu. La Cour s’attache désormais à l’impact moral des mesures prises par les autorités pénitentiaires, sans nécessairement en rechercher les effets physiques ou psychiques sur le détenu. Elle exerce un examen méticuleux des conditions de détention (surface, lumière, ventilation, hygiène des locaux, alimentation, etc.) et apprécie les actions entreprises par les autorités pour les améliorer. Par ailleurs, elle tient également compte, dans son appréciation, de l’effet cumulatif des conditions de détention et de l’existence ou non d’une justification aux mesures employées. Pour la Cour, lorsqu’un détenu allègue de façon défendable qu’une mesure prise à son encontre constitue un traitement dégradant, il doit pouvoir la soumettre au contrôle d’un juge avant qu’elle ne soit exécutée ou qu’elle n’arrive à terme, en application de l’article 13 de la Convention (en liaison avec l’article 3). S’agissant de la protection de la santé, les détenus doivent bénéficier de traitements médicaux appropriés. D’autre part, le maintien en détention d’un prisonnier en mauvais état de santé est susceptible de constituer un traitement dégradant.
CEDH 6 mars 2001, Peers et Dougoz c/Grèce ; 24 juillet 2001, Valasinas c/Lituanie ; 3 avril 2001, Keenan c/Royaume-Uni ; 7 juin 2001, Papon c/France ; 14 novembre 2002, Mouisel c/France
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616 Qu’est-ce que la Convention européenne pour la prévention de la torture ?
L’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme dispose que « nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou à des traitements inhumains ou dégradants ». Cet article a inspiré en 1987 la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. La Convention prévoit un mécanisme non judiciaire, à caractère préventif, pour protéger les personnes détenues. Ce mécanisme repose sur un système de visites effectuées par une structure spécifique et mis en œuvre depuis 1989, le Comité pour la Prévention de la Torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants (CPT).

617 Quel rôle joue le Comité pour la prévention de la torture (CPT) ?
Le Comité pour la Prévention de la Torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants (CPT) est un organe du Conseil de l’Europe qui a pour mission de surveiller la situation au sein des lieux de détention dans les pays ayant ratifiés la Convention européenne pour la prévention de la torture. Composé d’experts indépendants, le CPT effectue des visites périodiques ainsi que des visites ad hoc en cas de nécessité. Il évalue la manière dont les personnes privées de liberté sont traitées et formule, le cas échéant, des recommandations à l’Etat qui fait l’objet de l’inspection. Le CPT entretient des rapports de coopération et de collaboration avec l’Etat. Il n’est ni un organe judiciaire ou de sanction ni une voie de recours. Dépourvu de pouvoirs contraignants, il développe une mission de prévention qui recherche l’amélioration progressive des conditions de détention dans le pays concerné. Le CPT représente le premier instrument international à exercer un véritable mécanisme de contrôle au sein des établissements pénitentiaires.

618 Quelle procédure faut-il suivre pour alerter le CPT ?
Toute personne, détenue ou non, estimant que les conditions de détention dans un établissement pénitentiaire sont contraires au principe posé par l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) peut se plaindre auprès du CPT. Cette requête se fait par courrier, impérativement envoyé à l’adresse officielle du Comité, au nom de son président ou l’un de ses membres. Si elle émane d’une personne incarcérée, la requête peut être adressée sou pli fermé, le CPT faisant partie des autorités administratives avec lesquelles le détenu peut librement correspondre sans contrôle. Si l’administration ouvre un tel courrier, elle commet une faute qui engage sa responsabilité.
Articles A.40 et A.40-1 du Code de procédure pénale

619 Comment se déroule une visite du CPT ?
Le CPT peut se rendre à son gré dans tous les lieux de détention et a le droit de se déplacer sans entrave à l’intérieur de ceux-ci. Les membres de ses délégations s’entretiennent sans témoin avec les personnes privées de liberté. De plus, ils doivent pouvoir entrer librement en contact avec toutes les personnes susceptibles de leur fournir des informations. La France a fait l’objet de plusieurs visites du CPT en 1991, en 1994, en 1996, en 2000. La dernière venue du Comité dans l’Hexagone s’est effectuée entre le 13 et 17 juin 2003.

620 Quelle est la portée des actions du CPT ?
Les recommandations que le CPT peut formuler, sur la base de constatations faites au cours de ses visites, figurent dans un rapport adressé à l’Etat concerné. Le Comité se réunit à huis clos et ses rapports sont strictement confidentiels. Néanmoins, si un pays ne coopère pas ou refuse d’améliorer la situation à la lumière des recommandations du Comité, celui-ci peut décider de faire une déclaration publique. L’Etat peut de lui-même demander la publication du rapport du Comité, ainsi que ses propres commentaires. Chaque année, le Comité élabore un rapport général d’activités qui est rendu public. Les appréciations protées sur les modalités de prise en charge des personnes détenus formulées dans les rapports du CPT exercent aujourd’hui une influence déterminante sur la jurisprudence de la Cour européenne. D’autre part, les constatations figurant dans un rapport du Comité peuvent permettre d’établir la réalité des allégations d’une personne détenue devant la Cour.

621 Qu’appelle-t-on les « Règles pénitentiaires européennes » ?
Les Règles pénitentiaires européennes ont été instaurées en 1973 par le Conseil de l’Europe dans le but d’établir des principes communs aux Etats membres en matière de politiques pénale et pénitentiaire. A l’origine, ces Règles sont la version européenne de l’ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, un texte adopté par les Nations Unies en 1955. Révisée une première fois en 1987, ces Règles font actuellement l’objet d’une nouvelle actualisation qui devrait se terminer en décembre 2005. Elles doivent être mises en conformité avec les diverses résolutions et recommandations émises depuis quinze ans le Conseil de l’Europe. Elles devront également prendre en compte « le travail accompli par le CPT, les développements de la jurisprudence de la CEDH et le résultat des activités du Comité directeur pour les Droits de l’Homme (CDDH) relatives à un projet de Protocole à la Convention européenne des Droits de l’Homme, visant à garantir certains droits complémentaires aux personnes privées de liberté ». Pour le Conseil, « un objectif de premier ordre » de cette mise à jour « consistera à souligner les exigences liées aux droits de l’homme et à la dignité des détenus et à établir des normes permettant une gestion pénitentiaire humaine et efficace visant, entre autres, à préparer les prisonniers à vivre dans le respect de la loi après leur libération et à assurer la sécurité des détenus, du personnel pénitentiaire et de la société ». Les Règles pénitentiaires européennes visent à établir un ensemble de règles minima qui sont essentielles pour assurer « des conditions humaines de détention et un traitement positif dans le cadre d’un système moderne et progressif ». Pour autant, les principes qu’elles contiennent ne sont pas juridiquement contraignants pour les Etats membres. Ils n’ont qu’une valeur incitative. Néanmoins, elles exercent une influence importante que les normes morales et pratiques qui régissent l’administration pénitentiaire et peuvent servir d’appui pour un détenu à l’occasion d’une demande ou d’un recours.
Résolution (73)5 et recommandation (87)3 du Conseil de l’Europe ; mandat occasionnel au conseil de coopération pénologique relatif à une mise à jour des Règles pénitentiaires européennes, 18 septembre 2002

622 Quel rôle joue l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe concernant les droits des détenus ?
L’Assemblée parlementaire a adopté en 1995 une recommandation relative aux conditions de détention dans les Etats membre du Conseil de l’Europe dans laquelle elle se déclarait préoccupée par « la forte augmentation de la population pénitentiaire en Europe, par le surpeuplement qui en découle et par la détérioration des conditions de détention ». Dans un rapport en date di 19 février 2004, sa Commission des affaires juridiques et des droits de l’homme « constate avec inquiétude que la situation s’est aggravée, justifiant l’élaboration d’un cadre plus contraignant ». Le 27 avril 2004, l’Assemblée parlementaire a estimé que « les conditions de vie de nombreuses prisons et maisons d’arrêt sont devenus incompatible avec le respect de la dignité de la personne humaine. La nécessité d’harmoniser les conditions de détention et d’instaurer un contrôle extérieur permanent, qui implique aussi une harmonisation des délits et des peines, se fait sentir. L’élaboration d’un cadre général s’imposant à tous les Etats membres leur rappelant les droits et obligations des détenus devraient être rassemblées dans une Charte pénitentiaire européenne.
Rapport de Michel Hunault pour la Commission des affaires juridiques et des droits de l’homme, Situation des prisons et maisons d’arrêt en Europe, 19 février 2004 ; Recommandation adoptée par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe le 27 avril 2004

623 Quel rôle joue le parlement européen concernant les droits des détenus ?
Le 9 mars 2004, dans le cadre d’une recommandation, le Parlement européen s’est prononcé de façon claire sur la nécessité d’un meilleur respect des droits des détenus dans l’Union européenne. Il a ainsi rappelé que l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et la jurisprudence de la CEDH « imposent aux Etats membres des obligations non seulement négatives en prohibant de soumettre les détenus à des traitements inhumains et dégradants, mais aussi positives en leur demandant de s’assurer que les conditions de détention soient conformes à la dignité, et que des enquêtes approfondies et efficaces soient effectuées en cas de violation de ces droits » .Le Parlement européen recommande une révision des Règles pénitentiaires européennes « axée sur un degré de protection plus élevée sur la base des principes élaborés par le CPT et par la CEDH », l’élaboration d’une « charte pénitentiaire européenne commune aux pays membre du Conseil de l’Europe (qui) inclue des règles précises et obligations pour les Etats membres » et a estimé que « si une telle entreprise n’aboutit pas dans de brefs délais ou si le résultat n’est pas satisfaisant, l’Union européenne élaborera une charte des droits des personnes privées de liberté, contraignante pour les Etats et susceptible d’être invoquée devant la Cour de justice ». Il a également invité les Etats membres à « garantir aux députés européens la prérogative de visiter et d’inspecter les lieux de détention sur le territoire de l’Union européenne », mais aussi à « lutter contre le suicide dans les prisons et à mener systématiquement des enquêtes impartiales lorsqu’un détenu décède en prison ». Enfin le Parlement européen « exhorte les Etats membres à ratifier le protocole optionnel à la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui établit un système de visites régulière des lieux de détention mis sur pied par des organismes internationaux et nationaux indépendants, en confiant aussi à ces derniers des tâches de contrôle et de recours pour les détenus, et à élaborer un rapport annuel public à l’intention des parlements respectifs ».
Recommandation du Parlement européen sur les droits des détenus dans l’Union européenne, 9 mars 2004.

624 Qu’appelle-t-on l’ »ensembles de règles minima pour le traitement des détenus » ?
Adopté à Genève en 1955 par le premier congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, l’ensemble des règles minima pour le traitement des détenus est considéré comme le socle du droit pénitentiaire.
Ces 95 règles n’ont pas pour objet de décrire un système pénitentiaire modèle, elles représentent les conditions minimales que souhaitent instaurer les Nations Unies en matière de détention. Concernant par exemple le statut du détenu, l’ONU pose le principe essentiel de droit au respect de la légalité. Les Etats doivent donc prévoir un droit prévisible et complet pour les personnes privées de liberté : les règles disciplinaires devront être particulièrement précises et permettre au détenu de jouir pleinement des droits de défense et d’une procédure équitable. Toute personne privée de liberté doit pouvoir déposer une plainte et avoir les moyens d’être entendue par des autorités administratives ou judiciaires compétentes. Sont également affirmés le droit au maintient d’un bon état de santé, la possibilité de maintenir des liens familiaux et sociaux. Les Nations Unies insistent sur le fait que chaque Etat devra être particulièrement attentif en ce quoi concerne la formation et le suivi de l’ensemble des personnels pénitentiaires. L’Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus n’a pas force obligatoire pour les Etats, qui ne sont pas tenus d’en tenir compte en droit interne. Toutefois, leur contenu est un élément important pour juger le degré de respect des droits de l’homme par un état donné. Ces orientations visent à influencer non seulement les politiques pénales mais aussi les pratiques pénitentiaires.
Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, 1955 ; résolutions du Conseil économique et social des 31 juillet 1957 et 13 mai 1977.

625 Quels autres rôles jouent les Nations Unies concernant les droits des détenus ?
L’Assemblée générale des Nations Unies a adopté en 1988 un Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention et d’emprisonnement. Dans sa résolution, l’ONU estime que l’expression « peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant » doit être interprétée de façon à assurer une protection aussi large que possible contre tous sévices, qu’ils aient un caractère physique et mental, y compris le fait de soumettre une personne détenue ou emprisonnée à des conditions qui la privent temporairement ou en permanence de l’usage de l’un quelconque de ses sens, tels que la vue ou l’ouïe, ou de la conscience du lieu où elle se trouve et du passage de temps. Plus récemment, le 18 décembre 2002, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté un protocole optionnel annexé à la Convention contre la torture et les peines inhumaines et dégradantes. Dans ce protocole, l’ONU invite les Etats à mettre en place un ou plusieurs « mécanismes nationaux de prévention indépendants », chargés d’« examiner régulièrement la situation des personnes privées de liberté » et de « prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » ; il a été ouvert à la signature le 1er janvier 2003 et entrera en vigueur à la vingtième ratification. Signé à l’heure actuelle par 21 Etats dont sept membres du Conseil de l’Europe, il a été ratifié par seulement trois pays. La France n’a ni signé ni ratifié ce protocole qui prévoit, outre la création au niveau national d’organismes indépendants chargés de surveiller la situation dans les lieux de détention, celle au niveau des Nations Unies d’un organe comparable au Comité de prévention de la torture.
Ensemble des principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement, 9 décembre 1988 ; protocole optionnel annexé à la Convention contre la torture et les peines inhumaines et dégradantes, 18 décembre 2002.

Lien sur la Convention Européenne des Droits de l’Homme

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