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DISCOURS DE MADAME LA SECRÉTAIRE D’ÉTAT
REMISE DES CLÉS DU NOUVEAU
CENTRE PÉNITENTIAIRE DE LIANCOURT
PARIS - 17 FEVRIER 2004
Je suis heureuse de me trouver parmi vous aujourd’hui à l’occasion de l’inauguration du nouveau Centre Pénitentiaire de Liancourt
D’abord parce que vous êtes tous, ici présents, les acteurs du changement.
Agence de Maîtrise d’Ouvrage des Travaux du Ministère de la Justice.
Architecte.
Responsables judiciaires et pénitentiaires.
Elus locaux.
A chaque visite d’établissement, à chaque rencontre, j’apprends à mieux vous connaître et je mesure à la fois la difficulté, mais aussi les enjeux humains de votre mission.
Si je dis que vous êtes les acteurs du changement, c’est que je veux me placer du côté de ceux qui agissent et qui servent la République.
Mais je suis heureuse aussi parce que l’établissement pénitentiaire moderne qui s’ouvre aujourd’hui incarne lui aussi le changement.
Nous venons de loin vous le savez tous. Il n’est jamais inutile de rappeler que le parc immobilier pénitentiaire Français est en majeure partie composé d’établissements du début du siècle.
C’est un défi de moderniser notre outil dans ces conditions.
L’effort qui est exigé de nous aujourd’hui est exactement à la mesure de carences du passé.
Tout est à faire. Je rappelle que sur les 185 établissements Français, 100 datent d’avant 1912. Leur conception est aujourd’hui obsolète... C’est le sens de la mission que j’ai acceptée au sein du Gouvernement.
Je sais que vous partagez tous ici la même volonté d’humaniser nos prisons.
Non pas uniquement pour répondre aux critiques parfois vives contre l’institution pénitentiaire, mais parce que c’est une conviction forte. Une conviction que nous partageons tous et que nous devons mettre en pratique :
Pour la société : pour répondre à la très forte attente de nos concitoyens en matière de sécurité, de prévention de la récidive et de réinsertion.
Pour les personnels pénitentiaires auxquels on demande toujours plus et qui doivent avoir un outil moderne pour réussir pleinement leur mission.
Pour tous ceux qui sont sanctionnés par la justice mais, dont on ne doit jamais oublier qu’ils ont vocation à exécuter leur peine et à réintégrer la société.
Pour leurs familles qui subissent les contraintes d’une rupture que nous devons veiller à ne pas aggraver.
Le nouvel établissement pénitentiaire de Liancourt incarne ces préoccupations.
Je voudrais tout d’abord adresser mes félicitations à tous ceux qui ont contribué avec dynamisme à cette réalisation :
A l’architecte M. Bretagnolle
A l’Agence de Maîtrise d’Ouvrage des Travaux du Ministère de la Justice, représentée par son Directeur Général, Christian Cléret.
A toutes les entreprises qui ont fait un travail exceptionnel dans des délais très courts que je tiens à souligner.
Aux responsables de l’Administration Pénitentiaire qui ont suivi le développement du programme avec vigilance.
Aux élus et aux services de l’Etat qui ont accompagné le projet.
Pour mesurer la performance, je rappelle que le premier coup de pioche a été donné en fin 2001 et que le centre pénitentiaire accueillera ses premiers détenus avant l’été.
Voilà l’enjeu du Gouvernement, construire pour humaniser, et construire vite parce qu’il y a urgence.
Les chiffres ont toujours raison. On ne construit pas des places de prison pour développer l’emprisonnement. Cette affirmation, largement véhiculée, procède d’une profonde perversion de la pensée.
Notre volonté est toute autre. Il s’agit d’offrir aux personnes incarcérées, et à tous ceux qui sont chargés de responsabilités au sein de l’administration pénitentiaire, un cadre d’existence adapté à un véritable enjeu de société. Vous connaissez les chiffres : 60 000 détenus pour un peu moins de 50 000 places. Voilà le problème.
Le Gouvernement a choisi une voie courageuse. Celle de construire les places qui nous font défaut.
Est-ce qu’on peut raisonnablement parler de travail de réinsertion dans des prisons surpeuplées ?
Est-ce qu’on peut détecter les détenus les plus fragiles et prévenir le suicide ?
Est-ce qu’on peut élargir l’offre de travail et de formation ?
Est-ce que les personnels peuvent avoir une idée exacte de l’importance de leur mission et de la reconnaissance que leur doit la nation dans un environnement dégradé ?
Non. Nous le savons tous.
Liancourt répond à ces attentes, c’est un outil moderne, adapté à toutes les missions de la prison d’aujourd’hui.
Liancourt n’est pas qu’une prison neuve.
Je pense aux personnels de l’Administration pénitentiaire largement représentés ici. J’ai bien entendu votre message qui fait écho aux entretiens que j’ai déjà eu avec vos collègues depuis ma prise de fonction.
Le nouveau centre intègre, dans sa conception même, plusieurs points que je veux souligner.
La prise en compte de la sécurité des agents et celle de l’établissement.
Les quartiers d’hébergement ont été clairement sectorisés. Les flux de population, qui sont la conséquence du développement des activités de proximité, ont été limités au maximum. Les systèmes de communication, de détection et de protection correspondent à ce qui se fait de mieux aujourd’hui.
L’amélioration des conditions de travail des personnels.
L’ergonomie des postes de travail a fait l’objet d’un soin particulier.
Les conditions de détention correspondent fidèlement aux normes actuelles.
Je pense aux équipements permettant l’accueil des handicapés, aux équipements d’hygiène des détenus et aux locaux d’activités, situés au cœur des quartiers d’hébergement.
D’autres aménagements collectifs doivent être installés avant l’ouverture de l’établissement.
L’Administration Pénitentiaire doit engager des travaux supplémentaires dans la zone atelier. Le gymnase et les salles de musculation vont prochainement recevoir les équipements nécessaires.
Il y a un point que je voudrais souligner et qui tient à la localisation géographique de Liancourt.
Cette localisation répond à un besoin identifié en région Picardie. Le nouveau Liancourt va donc pallier le surencombrement des maisons d’arrêt de Compiègne et de Beauvais.
Il va aussi permettre d’affecter des condamnés qui relèvent de la direction régionale de Paris. C’est donc la garantie supplémentaire de nouvelles possibilités de rapprochement avec les familles des détenus.
C’est aussi la possibilité d’affecter provisoirement des détenus de région parisienne pour rénover les grandes maisons d’arrêt parisienne. Choisir le bon endroit à un sens pour les familles. Nous ne devons jamais l’oublier.
Je voudrais dire quelques mots des conditions de fonctionnement de ce nouvel équipement et de son impact sur la vie locale.
Sur le premier point, une gestion mixte permet de confier au groupement SIGES certaines tâches pour le fonctionnement courant de l’établissement (maintenance, restauration, formation professionnelle, hôtellerie, nettoyage, transport et cantine).
Ces activités représentent 50 emplois de droit privé. Bien entendu, une part de ces emplois donnera lieu à des embauches directes localement.
J’ajoute, bien entendu, les 313 emplois publics du nouvel effectif du centre pénitentiaire.
En faisant l’addition, nous pouvons mesurer l’impact positif de ce nouvel équipement sur le dynamisme démographique et la vie économique du secteur. Je voulais simplement dire à quel point le nouveau centre pénitentiaire constitue aussi un élément fort d’une bonne politique d’aménagement du territoire.
Sur ce dernier point, la convention passée entre le ministère de la Justice et celui de la Santé donne à l’hôpital de Creil la gestion du service médical de l’établissement pénitentiaire. C’est encore un élément qui renforce la présence du service public hospitalier dans l’Oise.
En matière d’impact local, je voudrais apaiser certaines craintes. Il est évident que l’augmentation du niveau d’activité des services d’escorte sera accompagné d’une augmentation des effectifs. La gendarmerie nationale verra donc, à terme, ses moyens renforcés à la hauteur de ses nouvelles missions. Au moment où on enregistre un mouvement de baisse de la délinquance dans le département, cela me paraît essentiel.
Je ne peux conclure mon propos sans évoquer l’avenir de l’actuel centre de détention.
Je sais que certains avaient des projets pour les collectivités.
Je dois pourtant vous dire que la situation de surpopulation carcérale ne nous permettra pas d’abandonner le site.
Certes, il n’aurait pas été raisonnable de le maintenir en fonctionnement dans les conditions actuelles. Il est en trop mauvais état. Pour autant, il n’aurait pas été judicieux non plus, dans le contexte de surpopulation que vous connaissez, de le fermer purement et simplement. La décision a donc été prise de rénover et de conforter 2 des 3 constructions existantes. On pourra accueillir 170 détenus assez âgés et de faible dangerosité.
Dans un second temps, la troisième construction sera démolie pour édifier sur son emprise une structure neuve pour 70 détenus.
Ce nouveau centre pénitentiaire est donc une réalisation exemplaire à plus d’un titre. Il ouvre une véritable perspective à la fois technique et humaine sur une modernisation en profondeur de la politique pénitentiaire.
Avec les ouvertures de la Farlède et de Meaux, on crée plus de 1 700 places nouvelles en 2004.
A moyen terme, le programme de construction de 13 200 places nouvelles constitue une réponse à la hauteur des enjeux.
Aucun Gouvernement n’avait engagé un tel effort depuis longtemps. Ce sera la clé de voûte de notre politique de modernisation et d’humanisation.
Cet effort doit être poursuivi avec énergie. Je m’y emploierai au Secrétariat d’Etat qui m’a été confié. Je n’ai aucun doute sur votre engagement à mes côtés. Je compte sur vous.
Source : Ministère de la Justice