La section française de l’OIP informe des faits suivants :
Un homme d’une trentaine d’années en attente d’une transplantation cardiaque a été réincarcéré hier après-midi au centre pénitentiaire de Marseille (Bouches-du-Rhône) pour effectuer un reliquat de peine de trois mois et quelques jours en dépit des risques sanitaires auxquels l’expose la détention.
Atteint d’une cardiomyopathie nécessitant une greffe de cœur pour laquelle il est en attente, et d’une maladie génétique l’exposant à une forme grave d’anémie en cas d’ingestion de certains aliments ou médicaments, A.M. bénéficiait d’une suspension de peine pour raison médicale depuis le 10 décembre 2007. Prononcée après deux mois de détention au centre pénitentiaire de Marseille, la décision avait été motivée par les malaises répétés du jeune homme et l’impossibilité « de l’extraire de l’établissement pénitentiaire dans des délais utiles » en cas d’aggravation subite de son état de santé. Cette décision a été révoquée, et une réincarcération ordonnée, le 7 octobre dernier par le juge de l’application des peines de Draguignan (Var) sur la base d’un nouveau rapport d’expertise concluant que, en dépit de la menace d’une« décompensation imprévisible », l’état cardiaque de A.M « est durablement compatible avec une incarcération, sous réserve qu’il bénéficie d’un suivi régulier et un accès facile vers un contact médical à toute heure du jour et de la nuit. »
Selon le service médical du centre pénitentiaire, cet impératif est cependant intenable.
Interrogé par l’OIP, celui-ci en effet a déclaré que « rien n’avait changé » depuis la précédente incarcération d’A.M. Une extraction dans des délais utiles demeure impossible en cas d’arrêt cardiaque, ou de la possibilité de bénéficier d’un greffon. De même qu’un accès continu au service médical, en raison de l’arrêt de la permanence des soins après 18h30.
La juge d’application des peines de Draguignan qui a révoqué la mesure de suspension a, quant à elle, indiqué qu’elle était favorable à la proposition du procureur de la République d’accorder une libération conditionnelle à l’intéressé compte tenu de son état de santé, mais qu’elle s’est rendue compte lors de la rédaction du jugement qu’A.M n’était pas dans les délais pour bénéficier d’une telle mesure. Il lui reste une dizaine de jours de détention à effectuer avant d’atteindre la mi-peine. À aucun moment, une mesure de semi-liberté ou de placement sous surveillance électronique n’a été envisagée alors que A.M avait un reliquat de peine inférieur à un an à effectuer.
L’OIP rappelle :
- l’article L.1110-1 du Code de la santé publique selon lequel « le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en œuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne ».
- la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qui considère que « l’état de santé, l’âge et un lourd handicap physique constituent désormais des situations pour lesquelles la question de la capacité à la détention est aujourd’hui posée au regard de l’article 3 de la Convention » relatif au traitement inhumain et dégradant et que la santé « fait partie des facteurs à prendre en compte dans les modalités de l’exécution de la peine privative de liberté, notamment en ce qui concerne la durée du maintien en détention » (notamment arrêt Matencio c. France, 15 janvier 2004).
- les articles 723-1 et 723-7 du Code de procédure pénale qui prévoient que les détenus dont le reliquat de peine est inférieur à un an peuvent bénéficier d’une mesure de semi-liberté, ou de placement sous surveillance électronique.