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Guy Laumont : témoignage de Bruxelles

Mise en ligne : 13 mai 2005

Texte de l'article :

Guy LAUMONT
47117 0402
52 Ave de la Jonction
1190 Bruxelles
Belgique
Le 10/01/2005

Je suis aux cuisines à préparer la bouffe, c’est une surveillante qui est de service. Elle vient vers mon plan de travail où je me trouve avec 3 autres
codétenus. Elle nous raconte sa vie, son voyage avec son mari qui est aussi maton en chef. Puis elle s’engage sur un terrain glissant en nous disant : « ici, il y a des surveillants qui n’ont pas leur place ». Les gars en viennent à un maton détesté par les détenus et aussi ses collègues. Elle nous dit qu’il a des problèmes parce qu’il est juif, les copains maghrébins lui disent qu’ils en ont rien à foutre qu’il soit juif, il se comporte comme une ordure et un jour, il aura un grave problème.
Moi, pour foutre la merde, en rigolant, je lui dis : « Bof ! s’il me touche un cheveu, un coup de fil et je lui fais coller une balle dans chaque genou ». Elle continue à nous parler d’autres collègues. Le lendemain, j’apprends que j’ai un rapport disciplinaire. Je vois une sous directrice qui me déteste et m’agresse en me disant : « vous avez menacé un gardien en disant que vous alliez lui faire coller une balle dans chaque genou. Vous profitez de votre statut de caïd du Milieu, je vais demander à Mme Z. (la directrice), que vous soyez viré des cuisines ». Une hystérique !
Le lendemain, j’apprends que la bonne femme à la cuisine avait monté une salade pour me faire virer aussi ! Sentant que ça craignait, j’appelle ma petite amie et lui demande de contacter une radio locale écouté par les matons où une copine bosse et je lui donne l’info sur un turc torturé, un noir tabassé sans raison, un jeune suicidaire torturé, un fou de maton qui a failli étranglé un détenu. C’était le dimanche à 18h.
Affolement dans la prison, plein de gradés viennent m’espionner : le mot torture les a choqué, de plus la copine qui lit les infos est membre du CPT. On me raccompagne en cellule. En détention, les mecs parlent d’émeutes. Le lendemain, je vois Mme Z. qui me dit que les matons voudraient que je sois puni pour mes infos mais elle ne peut rien faire et ne veut rien faire car elle n’était pas au courant.
Le CPT, Amnesty, l’OIP ont été informés.