La famille d’un détenu mort en cellule porte plainte pour homicide involontaire
Delphine Chayet [05 novembre 2004]
La mort en prison de Tuzgay Kiran, 28 ans, sera portée aujourd’hui devant la justice. Le jeune homme d’origine turque, détenu à la maison d’arrêt de La Talaudière (Loire), a succombé le 17 octobre dernier à une hémorragie interne provoquée par un ulcère perforant. MeMichel Déalberti, avocat de la famille, doit déposer ce matin une plainte avec constitution de partie civile pour « homicide involontaire » et « non-assistance à personne en danger ».
Selon ses proches, Tuzgay Kiran aurait en effet souffert quatre jours durant avant de mourir sans avoir reçu de soins. D’après les témoignages de plusieurs détenus, eux aussi logés au deuxième étage de La Talaudière, le jeune homme incarcéré pour vol depuis novembre 2003 aurait appelé au secours, la veille de sa mort, en tapant contre la porte de sa cellule.
« Ses maux avaient commencé le mercredi 14 octobre, explique Me Déalberti. Pris de vomissements et de diarrhées, Tuzgay demande à voir un médecin. Sans aucune réponse. » Son état se dégrade au cours des deux jours suivants. Selon l’avocat, Tuzgay Kiran ne peut alors plus manger et reste allongé sur son lit, incapable de bouger. Samedi 16 octobre au matin, il reçoit la visite de sa famille au parloir. « Manifestement très amaigri et épuisé, le détenu se plaint d’aller très mal. Il interrompt la conversation à trois reprises pour aller aux toilettes », témoignent aujourd’hui sa mère et sa soeur. Un gardien promet alors aux deux femmes, très inquiètes, de faire venir un médecin au chevet du malade.
« En fin d’après-midi, le détenu est conduit au service médical, qui lui prescrit un traitement, souligne de son côté un responsable de l’établissement pénitentiaire. Avant cela, les surveillants n’avaient décelé aucun signe laissant penser que la vie du jeune homme était en danger. »
Dimanche 17 octobre, l’infirmière de garde donne un cachet au patient et promet de revenir après son tour de l’étage. A son retour, deux heures plus tard, Tuzgay est mort.
« La famille ne sera prévenue que quatre heures après le décès, dénonce M eDéalberti. Et l’administration pénitentiaire refuse, depuis lors, de répondre aux légitimes interrogations de ses proches. »
Une enquête en recherche des causes de la mort est aussitôt ouverte par le procureur de la République de Saint-Etienne. Les médecins légistes chargés d’autopsier le corps ne relèvent aucune trace de violence, mais concluent à une mort par hémorragie interne foudroyante. Les analyses toxicologiques sont actuellement menées, tandis que les surveillants, les détenus et le personnel médical de la prison ont été entendus par les enquêteurs.
« Selon les éléments ainsi recueillis », le procureur devait décider de l’opportunité d’ouvrir une information judiciaire en début de semaine prochaine. Grâce à la plainte déposée ce matin par la famille du détenu, une instruction sera automatiquement ouverte.
Source : Le Figaro