Humanahum
Il y avait une planète que l’on appelait la Terre ; il y faisait bon vivre, les saisons y rythmaient la vie.
Il y avait une planète si belle qu’on l’appelait la "planète bleue".
Venu des profondeurs de l’Océan ou du fin fond de l’univers, sur cette planète si belle et en paix, s’abattit le plus grand des désastres, le plus grand fléau que l’univers pouvait avoir en son sein ; survient sur cette Terre le plus grand prédateur.
Dans ce jardin d’Eden, l’homme vint y faire son nid.
Il y avait un jardin qu’on appelait la Terre.
Pendant des millénaires, l’homme a vécu en harmonie avec la Terre, il l’a respectée et elle lui apportait sa subsistance. Pendant des siècles il a vénéré le soleil, la lune, la puissance du vent, celle de l’eau et le pouvoir du feu, il a respecté les dieux des forêts, la puissance de l’ours ou celle du tigre ; il dansait pour les crues du fleuve ou la pluie de la mousson. Il chantait pour la divinité des roches et la terre fertile ; il chantait encore afin de remercier les dons de cette terre si généreuse.
Plus tard il a remercié Krom de lui avoir donné le fer, il a fabriqué des socs de charrues afin de lui rendre la tâche plus facile mais il a aussi fabriqué des épées pour tuer.
Bien plus tard encore un nouveau dieu, l’acier : il battira des ponts pour relier les hommes entre eux et inventera des chars afin de détruire ces mêmes ponts et ceux qui les traversent.
Non content de travailler la terre sur toute sa surface, de la défricher, de la déboiser, il a fallu qu’il la fouille dans ses profondeurs et c’est là que le dieu le plus puissant a vu le jour. Ce fut le commencement de la fin de l’homme : il ne pensera plus. Les dieux du vent, de la pluie, de la forêt disparaîtront à jamais ; l’homme ne pensera plus qu’au pétrole et à l’argent que celui-ci génère, il mangera pétrole, il roulera avec le pétrole, il se parfumera pétrole ; il souillera les terres, les océans, il poluera l’atmosphère.
Il souillera à jamais ce formidable jardin, ce jardin d’Eden.
Aujourd’hui mère nature a décidé de reprendre sa vie. Aujourd’hui la belle planète bleue, qui n’est plus toute bleue, veut se venger de toutes les souffrances que l’homme au travers des temps lui a infligées.
Pleure homme de peu de foi, pleure tes rires passés ; entends le grondement du temps. Les richesses s’épuisent, l’atmosphère s’amenuise, l’eau se tarit, les dépressions et les anticyclones s’allient pour te détruire.
Admire ton travail, les rivières polluées, la terre couverte de déchets, l’air surchargé de gaz destructeurs, les nappes phréatiques vidées, les océans dépotoirs.
Aujourd’hui tu trembles en attendant la prochaine averse, l’annonce du premier coup de vent ; aujourd’hui tu te terres à l’annonce d’un tsunami, puis tu pleures la perte de ton bien ou la disparition d’un être cher.
Le glas vient de sonner, la Terre va se venger, le temps va changer, el Nino n’est pas chérubin, les tsunamis vont se multiplier, les coulées de boue s’amplifier, l’eau se raréfier.
Fut un temps où l’homme, par peur des élements, portait à ses Dieux des offrandes, afin de les apaiser. Mais l’homme a perdu jusqu’au nom de ces Dieux, il ne sait plus danser pour la pluie ou chanter pour les moissons.
Alors l’homme ... pleure.
L’homme a oublié.
« L’homme n’a pas tissé la toile de la vie, il n’est qu’un fil de cette toile. Quoi qu’il fasse à la toile, il le fait à lui-même. »
« Quand le derrnier arbre sera abattu, la dernière rivière empoisonnée, le dernier poisson capturé, alors seulement vous vous apercevrez que l’argent ne se mange pas. »
Prophétie d’un Indien Cree
Jean-François Dudoué
Août 2005