la loi Perben II, vue par Jacques Engel, détenu de la Farlède (83)
jeudi 2 décembre 2004
Philosophie générale de la loi du 10 mars 2004 :
• aggravation des dispositions concernant les prévenus (tolérance zéro = plus de détention),
• essai d’amélioration des fins de peine.
Pour les prévenus, on assiste à un net recul des droits de la défense.
• Le jugement par le principe du plaider-coupable ne permet aucune défense par l’avocat du prévenu, fut-il commis d’office.
Pour les mineurs.
• Fin de la compétence exclusive du juge des enfants.
• La responsabilité pénale du mineur est abaissé à 10 ans.
• La détention provisoire est rendue possible pour les mineurs à partir de 13 ans au lieu de 16 ans, y compris en matière correctionnelle.
Pour les majeurs.
• La durée de détention provisoire en matière correctionnelle passe de deux années à trois années.
• Le lien entre les motifs de mise en détention (ou de maintien en détention) [1] passent de "et" à "ou".
• Elle permet le placement en détention provisoire pour tous les délits passibles d’une peine au moins égale à trois ans d’emprisonnement. Auparavant, le seuil était fixé à cinq ans.
• Elle instaure un délai de 4 mois pour présenter une nouvelle demande de liberté provisoire lorsqu’une demande vient d’être refusée.
• Elle supprime le droit du mis en examen de demander que son avocat assiste aux auditions de témoins, de parties, ou à un transport sur les lieux.
• Elle restaure une procédure de référé-détention permettant au procureur de la république d’empêcher la mise en exécution de la décision du juge de la liberté et de la détention ayant ordonné la mise en liberté d’une personne mise en examen. Et ce, sans qu’aucun délai ne soit imparti à la Cour pour statuer, et sans que la demande de comparution personnelle du détenu ne soit prévue.
• La détention provisoire ne peut plus s’effectuer sous le régime de la surveillance électronique.
Pour les condamnés.
• Sécurité dans les prisons, par un classement des détenus selon des critères laissés à l’appréciation discrétionnaire de l’administration pénitentiaire, et non plus selon des règles opposables à celle-ci.
• Théoriquement, aucun condamné ne devrait terminer sa peine le jour de sa sortie du système. Six mois avant sa sortie, le SPIP doit prendre contact avec lui et lui proposer des aménagements lui permettant de chercher du travail à l’extérieur, de suivre une formation, ou de bénéficier d’une libération conditionnelle. Dans tous les cas, il devrait être suivi par le service d’insertion et de probation pendant au moins six mois après sa sortie d’un centre pénitentiaire.
• Mais, s’il "replonge" pendant ce temps de ce qui ressemble à un sursis, il exécutera la totalité de sa peine restante, en détention, augmentée le cas échéant, d’une nouvelle condamnation.
En conclusion, nos députés ont voté cette loi en mars 2004, juste deux mois avant que nos ministres ne viennent nous expliquer que le cas d’Outreau ne se renouvellera plus, alors que cette loi diminue grandement les droits de la défense et les interventions des avocats, et rend beaucoup plus difficile les mises en liberté provisoire. Bref, cette loi consacre une justice productiviste d’abattage, chargée de juger "sans formalisme" les plus modestes.
Jacques Engel, détenu
à la Farlède, le 22 novembre 2004
Source LDH Toulon