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Les permissions et autorisations de sortie

Publication originale : 1er mai 2002

Texte de l'article :

Les permissions de sortir devraient être le moyen le plus utilisé pour tous les condamnés afin de préparer un recours à la vie du dehors. Au lieu de cela, elles sont accordées avec parcimonie, toujours aux même détenus et uniquement en fin de peine. Afin de préserver le lien familial, de rencontrer d’éventuels employeurs, de bénéficier d’un suivi médical spécialisé… la seule solution satisfaisante est d’effectuer des sorties régulières du monde carcéral. D’autant plus que le taux de non-retour suite à une permission est dérisoire : 0,6% en 1999 (212 détenus), parmi lesquels des non-retours pour hospitalisation ou décès.

601-Qu’est-ce qu’une permission de sortir ?
Une permission de sortir est une autorisation d’absence temporaire de la prison donnée à un condamné. Pendant la permission, la peine d’emprisonnement n’est pas suspendue et continue de s’écrouler. La permission de sortir est accordée par le juge d’application des peines, après avis de la commission d’application des peines, sauf en cas d’urgence. Le JAP ordonne une expertise psychiatrique des personnes condamnées pour certaines infractions énumérées à l’article 722 du Code de procédure pénale, avant de décider de leur accorder ou non une permission de sortir. Cette démarche exige environ deux à trois mois.
La permission désigne le lieu, obligatoirement situé sur le territoire français, où le condamné est autorisé à séjourner. Quelle que soit la durée de la permission, un délai de route peut être accordé au bénéficiaire, compte tenu de la durée du trajet et des moyens de transports utilisés.
Articles 722, 723-3 et D.142 du Code de procédure pénale

602-Quels sont les différents types de permission de sortir ?
Trois catégories doivent être distinguées : les permissions de sortir en vue du maintien des liens familiaux ou de la réinsertion sociale, les permissions pour accomplir une obligation à l’extérieur, et les permissions pour circonstances familiales graves. En 1999, 36.462 permissions de sortir ont été accordées dont 29.686 pour maintien des liens familiaux (81,5%), 3.545 pour présentation à un employeur (9,7%), 1.063 pour présentation à un examen médical ou psychologique (2,9%), 992 pour présentation à un examen scolaire ou professionnel (2,7%), 769 pour des circonstances familiales graves (2,1%) et 407 pour remplir des formalités militaires (1,1%). Le taux de non-retour de permission a été de 0,6% (212 détenus).
Articles 733-1,723-3, D.143 à D.146 et D.425 du Code de procédure pénale, chiffres clés de l’AP mai 2000

603-Tous les détenus peuvent-ils bénéficier d’une permission de sortir ?
Certaines catégories de détenus ne peuvent pas avoir accès à une permission de sortir. Il s’agit des prévenus (détention provisoire) ; de tous les condamnés qui accomplissent une période de sûreté ; des étrangers condamnés à une interdiction définitive du territoire français (bien que la loi ne dise rien à ce sujet, la Cour de cassation a considéré qu’ils ne pouvaient pas obtenir de permissions) ; des condamnés à réclusion criminelle à perpétuité (ils ne peuvent, d’après la Cour de cassation, bénéficier ‘une permission de sortir qu’à partir du moment où une libération conditionnelle leur a été accordée). En cas de nécessité, le juge de l’application des peines pourra cependant accorder à ces détenus une « autorisation de sortie sous escorte ».
Articles 723-3 et D.142-1du Code de procédure pénale, arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 25 mars 1987 et du 13 décembre 1988

604-Quelles sont les conditions communes à toutes les permissions de sortir ?
Le condamné doit pouvoir supporter les frais qui vont résulter de son séjour hors de l’établissement, notamment la prise en charge de ses moyens de transport. S’il ne peut pas le faire ou s’il ne peut pas justifier de possibilités de transport et d’hébergement, il ne pourra pas sortir. Cependant, le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation (SPIP) du lieu d’incarcération doit, lorsque le motif de la permission apparaît sérieux et que le détenu est démuni, lui accorder une aide et éventuellement un bon de transport.
Articles D.142 et D.147 du Code de procédure pénale, circulaire DAP 88-06 GI du 10 mai 1988

605-Qu’est-ce qu’une permission pour maintien des liens familiaux et préparation de la réinsertion sociale ?
Ce type de permission est prévu pour les condamnés qui ont exécuté au moins la moitié de leur peine (calculée en tenant compte des réductions de peine) et qui n’ont plus à subir qu’un temps de détention inférieur à trois ans. Il existe des régimes plus favorables pour certains détenus. Les condamnés exécutant une ou plusieurs peines d’emprisonnement dont le total n’excède pas un an y ont droit sans conditions de délai. Les condamnés incarcérés en centre de détention peuvent obtenir ces permissions dès lors qu’ils ont exécuté le tiers de leur peine.
Ces permissions peuvent être accordées par le juge d’application des peines (JAP) pour une durée maximale de trois jours, à laquelle est ajouté éventuellement le temps de transport nécessaire pour se rendre au lieu désigné. Lorsque le condamné est détenu en centre de détention, il peut obtenir une permission d’une durée maximale de cinq jours et une fois par an de dix jours.
Pour sa décision d’octroi ou de refus, le JAP doit en principe prendre en compte un certain nombre d’éléments, tels que la nature des relations familiales, les risques d’incidents au sein de la famille et la proximité de la fin de peine. Mais le comportement du détenu en détention, le motif de l’incarcération, le risque supporté d’incident au cours de la permission sont les éléments les plus déterminants. Un certificat d’hébergement est généralement demandé par le JAP. Une enquête préliminaire peut être réalisée par les services de polices sur les conditions d’accueil du permissionnaire.
Articles D.116-1, D.142, D.145 et D.146 du Code de procédure pénale, circulaire DAP 88-06 GI du 10 mai 1988

606-Qu’est-ce qu’une permission de sortir pour accomplir une obligation à l’extérieur ?
Il s’agit d’une permission accordée pour permettre au détenu d’accomplir à l’extérieur l’acte pour lequel sa présence est nécessaire. Il peut s’agir d’un entretien avec un employeur en vue d’une libération conditionnelle, d’une semi-liberté ou d’un placement à l’extérieur. Ce type de permission est également prévu pour se présenter aux épreuves d’un examen qui ne peut se dérouler en prison, à une consultation dans un centre des soins, ou pour une pratique d’activités culturelles ou sportives organisées par le SPIP, l’accomplissement d’une formalité militaire ou une comparution devant une juridiction. Ce type de permission est aussi utilisé dans le cadre d’une semi-liberté ou d’un placement à l’extérieur sans surveillance pour permettre aux condamnés d’êtres libres les samedis, dimanche et jours fériés. Ces permissions sont accessibles aux condamnés à une peine de prison inférieure ou égale à cinq ans et à ceux qui ont été condamnés à plus de cinq ans d’emprisonnement mais qui ont exécuté la moitié de leur peine. Ces permissions ne peuvent pas durer plus d’une journée.
Article D.143 du Code de procédure pénale

607-Qu’est-ce qu’une permission de sortir pour circonstances familiales graves ?
Il s’agit d’une permission accordée à un détenu pour se rendre auprès d’un membre de sa famille proche, gravement malade ou décédé. Pour pouvoir bénéficier de cette permission, le détenu doit être condamné à une peine inférieure ou égale à cinq ans ou bien avoir exécuté la moitié de sa peine s’il a été condamné à plus de cinq ans d’emprisonnement. La durée maximale de cette permission est de trois jours, auxquels s’ajoute éventuellement un délai de route.
Articles D.142, D.144 et D.425 du Code de procédure pénale

608-Quelle est la fréquence des permissions de sortir ?
Il n’y a pas de règle posée par la loi, à l’exception d’un cas : les permissions de sortir de dix jours accessibles aux condamnés incarcérés en centre de détention ne peuvent être accordées qu’une fois par an. Pour le reste, les pratiques des juges de l’application des peines peuvent varier d’une prison à l’autre. En pratique, il s’est constitué pour les longues peines un usage largement répandu en vertu duquel les permissions sont séparées de trois mois. Quant aux permissions accordées dans le cadre de la semi-liberté ou le placement à l’extérieur, elles sont le plus souvent hebdomadaires.
Article D.146 du Code de procédure pénale

609-Que se passe-t-il si un détenu ne réintègre pas l’établissement pénitentiaire à l’issue de sa permission ?
Si la non-réintégration est volontaire, il est considéré comme évadé. Le délit d’évasion est punissable de trois ans d’emprisonnement et de 300.000 francs-45.735 euros- d’amende, sans compter la sanction disciplinaire encourue (45 jours de cellule de punition). La part disponible du compte nominatif d’un détenu évadé est appliquée d’office à l’indemnisation des parties civiles.
Articles 434-29 du nouveau Code pénal, D249-1, D.251, D.251-3 et D.323 du Code de procédure pénale

610-Que se passe-t-il si un détenu commet un crime ou un délit pendant sa permission de sortir ?
En plus de le poursuivre pour l’infraction commise, la juridiction saisie – tribunal ou Cour d’assises - peut décider de retirer au détenu permissionnaire l’ensemble des réductions de peines qui lui ont été accordées avant l’infraction.
Article 723-5 du Code de procédure pénale

611-A quelles obligations le permissionnaire peut-il être soumis ?
Le juge de l’application des peines (JAP) peut ordonner dans sa décision que le détenu se présente une ou plusieurs fois aux services de police ou de gendarmerie au cours de la permission. Cette obligation est particulièrement destinée aux condamnés auxquels il reste plus de 3 ans à purger. Pour conduire un véhicule automobile au cours de sa permission de sortir, le condamné doit en principe obtenir l’autorisation expresse du JAP. L’ordonnance du JAP (dans laquelle il accorde la permission de sortir) vaut pièce d’identité et, le cas échéant, comme permis de conduire. Elle est cependant peu pratique lorsque le détenu veut trouver du travail. Le condamné peut donc demander au JAP de lui faire remettre, pour sa permission, les originaux de la carte d’identité et du permis de conduire.
Article D.123 du Code de procédure pénale, circulaire DAP 88-06 GI du 10 mai 1988

612-Qu’est-ce qu’une autorisation de sortie sous escorte ?
L’autorisation de sortie sous escorte est la possibilité pour tout prisonnier de quitter temporairement la prison, encadré par des personnels de police, de gendarmerie ou de l’administration pénitentiaire. Les motifs d’une telle mesure doivent être exceptionnels et sont laissés à l’appréciation des juges compétents.
Articles D.148-5, 722, 723-6 et D.426 du Code de procédure pénale

613-Quelles sont les conditions pour demander une autorisation de sortie sous escorte ?
L’autorisation de sortie sous escorte peut être accordée à tout prisonnier, prévenu ou condamné, et pour ce dernier, quelle que soit sa peine. Elle peut être accordée y compris pendant la période de sûreté. Le prévenu doit demander l’autorisation au juge d’instruction ou à la juridiction d jugement. Le condamné doit s’adresser au juge de l’application des peines (JAP), qui décide après avoir pris l’avis de la commission d’application des peines. Sa décision ne peut pas faire l’objet d’un recours de la part du condamné.
L’autorisation de sortie sous escorte peut être accordée par le JAP alors que le condamné avait demandé une permission de sortir. Dans ce cas, le détenu peut toujours refuser cette mesure.
Articles D.148-5, 722, 723-6 et D.426 du Code de procédure pénale

614-Comment se déroule une autorisation de sortie sous escorte ?
L’escorte peut être composée de gendarmes, de policiers et de membres de l’administration pénitentiaire, y compris du Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation (SPIP). Ces personnels peuvent être dispensés de porter l’uniforme, sur décision du magistrat qui a accordé l’autorisation. La décision du port des menottes ou des entraves est de la seule compétence du chef d’escorte, en fonction des critères de dangerosité ou de risque de fuite qu’il évalue. En pratique, il est très fréquent que la direction de la prison donne des consignes à ses personnels.
Articles 803 et D.426 du Code de procédure pénale