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Lettre de l’UDB à M.Perben à propos de 6 prisonniers bretons

Mise en ligne : 17 janvier 2004

Texte de l'article :

UNVANIEZH DEMOKRATEL BREIZH
UNION DEMOCRATIQUE BRETONNE
B.P. 80722
44007 NANTES-CEDEX 01

Jeudi 18 décembre 2003.
 
Monsieur Dominique Perben,
Garde des Sceaux
Ministre de la Justice.

Monsieur le Garde des Sceaux,
 
Nous nous permettons d’attirer votre attention sur la situation des prisonniers bretons, Messieurs Alain Solé (détenu à Nanterre), Jérôme Bouthier (détenu à Fleury-Mérogis), Kristian Georgeault, Paskal Laizé, Stéphane Philippe et Gaël Roblin (détenus à la prison de la Santé). Ces six prisonniers ont été mis en examen dans le cadre de procédures concernant le vol d’explosifs à Plévin en septembre 1999 et des attentats attribués à l’ "A.R.B." (parmi lesquels l’attentat de Quévert, en avril 2000, ayant entraîné la mort d’une jeune fille.

Bien qu’il n’y ait pas officiellement en France de prisonniers politiques, ces six hommes sont soumis à des procédures particulières et ne sont donc pas des prisonniers de droit commun : incarcérés par la 14e section du Parquet, ils sont détenus loin des endroits où ont été commis les actes pour lesquels ils sont mis en examen, ce qui rend difficiles les visites de leur famille ; leur dossier est pris en charge par des juges d’instruction spécialisés et ils seront jugés par un tribunal spécialisé avec absence de jury populaire.

Leur situation pose de graves questions quant au respect des Droits de l’Homme. Quatre d’entre eux sont en détention provisoire depuis plus de trois ans et demi (Messieurs Georgeault, Laizé, Philippe et Roblin). L’un d’entre eux, Monsieur Solé, est même détenu depuis plus de quatre ans sans avoir été jugé. Une telle situation est contraire à l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme. Elle s’ajoute à d’autres situations analogues qui ont valu à la France d’être, à de multiples reprises, condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour le maintien de personnes en détention provisoire pendant une durée excessive. Déjà, en décembre 2001, la Ligue des Droits de l’Homme considérait que "les délais d’achèvement des procédures d’instruction sont largement dépassés au bénéfice d’un usage systématique des dérogations prévues en matière de terrorisme" et que "le déroulement des procédures atteste d’une interprétation de la loi peu soucieuse des libertés individuelles et s’éloigne des prescriptions de la Convention européenne des Droits de l’Homme".

En outre l’état de santé de Monsieur Solé s’est gravement dégradé en raison notamment de ses conditions de détention. Aussi "Amnesty International" et, plus récemment, le directeur du premier quotidien français ont-ils protesté contre la situation faite à ce détenu. C’est également ce qui arrive à Monsieur Laizé, dont le cas a été porté à la connaissance d’ "Amnesty International".

Nous avons toujours condamné l’utilisation de la violence, sous quelque forme que ce soit, à des fins politiques dans des pays ou régimes où la démocratie permet la libre expression des points de vue. Pour autant nous estimons que l’on ne peut défendre la démocratie et les Droits de l’Homme par des moyens contraires à ceux-ci, ce qui est malheureusement le cas dans la façon dont sont traités ces six prisonniers bretons. Nous souhaitons que la justice soit rendue, mais nous refusons tout traitement qui prendrait des allures de vengeance.

Nous considérons que ce n’est pas en créant des souffrances supplémentaires et des ressentiments que l’on consolidera la démocratie et la République.

L’instruction des dossiers qui concernent ces six détenus est maintenant terminée. La date du procès est désormais fixée. Aussi, sans nous prononcer sur la culpabilité ou sur l’innocence de ces personnes, nous vous demandons instamment d’user des pouvoirs qui vous sont conférés, pour que, à l’occasion de la "trêve des confiseurs", ces six prévenus soient remis en liberté en l’attente de leur procès, pour mettre fin à la situation décrite ci-dessus.

Nous sommes persuadés que vous voudrez bien accorder une attention particulière à notre demande et nous vous prions d’agréer, Monsieur le Garde des Sceaux, l’expression de notre haute considération.

Pour le Bureau Politique de l’Union Démocratique Bretonne,
Yves JARDIN, délégué aux relations internationales et aux droits de l’Homme