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Lettre ouverte à l’intention des élus politiques belges

Mise en ligne : 22 novembre 2007

Texte de l'article :

Mesdames, Messieurs,
En vos titres et qualités.
 
J’aimerais vous interpeller par rapport à la situation de mon frère Nordin Benallal...
 
C’est en tant que « grande sœur », que j’ai suivi régulièrement Nordin durant toute la période de son incarcération à la prison d’Andenne. J’ai pu observer à cette période les efforts constants de Nordin pour gérer sa détention de façon constructive et nombre d’intervenants de la prison d’Andenne peuvent témoigner de la dynamique positive qui l’a habité à cette période. Je ne citerais que les enseignants qui l’ont encadrés dans les trois formations qu’il a suivies avec succès. Le Docteur De Rouck, médecin psychiatre à Andenne a également rencontré régulièrement Nordin avec qui elle semblait avoir initié un suivi thérapeutique très sérieux.
Je ne peux bien sûr apprécier les raisons qui ont amené l’Administration Pénitentiaire à transférer brutalement Nordin à la prison d’Ittre en juin 2007 mais je peux vous certifier qu’aussi bien moi, que plusieurs parmi les intervenants de la prison d’Andenne avons regretté vivement l’interruption brusque de contacts humains de qualité que nous avions avec Nordin. Loin de s’enfermer dans une vision intégriste de l’islam, Nordin était aussi motivé par un dialogue ouvert interreligieux et une recherche de sens et de pacification dans sa trajectoire de vie pour le moins compliquée.
 
Je peux imaginer l’impasse dans laquelle Nordin s’est senti en arrivant à la prison d’Ittre, se voyant brusquement privé de tous les repères humains constructifs qui l’aidaient à cheminer. Cela ne justifie bien sûr pas une évasion mais je ne peux m’empêcher de deviner le vertige qui a traversé Nordin en se trouvant soudain à nouveau dans un régime où rien de la dynamique positive amorcée ne pouvait plus se confirmer. Certes, il aurait dû patienter davantage. Un des soucis répétitifs confié par Nordin était cependant l’impossibilité pour lui d’obtenir communication d’une date d’admissibilité à la libération conditionnelle qui lui permettrait d’entrevoir un horizon humainement raisonnable pour son retour en liberté. Dans ce contexte, il était devenu difficile de devenir crédible lorsque j’essayais de le réconcilier un peu avec le temps de peine à subir. De plus, à la prison d’Ittre, il n’a trouvé aucun interlocuteur prêt à aborder avec lui l’incontournable problème du comment planifier la suite d’une détention dont on ne lui laissait même pas percevoir quand elle pourrait finir.
 
Je tiens à dire que je ne reconnais nullement mon frère dans les diabolisations insensées de certains médias. Le côté spectaculaire des évasions de Nordin semble avoir "autorisé" certains médias à des commentaires inacceptables à propos d’un homme qu’ils ne connaissent même pas. J’espère vraiment que vous pourrez amener, qui de droit, à poser un regard plus mesuré et objectif sur le cas de mon frère qui est un interlocuteur sensé même si sa situation l’a conduit à poser des gestes désespérés comme cette dernière évasion. Si Nordin était le "truand" que certains présentent, il n’aurait pas eu besoin de recourir à ce vol minable de moto deux jours après sa cavale. Cette nouvelle erreur est bien signe du désarroi d’un homme ayant perdu ses repères.
 
Je vous remercie de revoir votre position avec plus d’objectivité et ainsi vous comprendrez mieux le sens et la nécessité de mon combat.
 
Restant à votre entière disposition, veuillez recevoir l’expression de ma considération distinguée.
 
 
 
 
Samira Benallal (07/11/07)