Tribunal Administratif de Paris
N° instance 0112522/7-1
MEMOIRE RESPONSIF n°3
POUR : Monsieur Michel GHELLAM, né le 30 septembre 1959 à FREJUS, Maison centrale de Saint Maur, -Ecrou 3795 Quartier d’isolement-, Bel air 36255 Saint Maur
Assisté de Me Françoise LUNEAU, Barreau des Hauts de Seine (PN 335), 175 quater boulevard Jean Jaurès 92100 Boulogne-Billancourt, téléphone : 01.46.04.59.59. Télécopie : 01.46.04.60.94.
CONTRE :
- La décision du 12 juin 2001 du directeur de la maison d’arrêt de la santé de placement en isolement,
- La décision du 18 juin 2001 de Hugues BERBAIN, chef du bureau de gestion de la détention auprès de la direction de l’administration pénitentiaire de Paris,
- La décision de prolongation du placement à l’isolement en date du 10 septembre 2001 de Hugues BERBAIN, chef du bureau de gestion de la détention auprès de la direction de l’administration pénitentiaire de Paris,
Monsieur Michel GHELLAM a l’honneur de solliciter l’annulation des décisions précitées sur le fondement des observations suivantes :
1. Rappel des faits
Monsieur Michel GHELLAM a été placé en isolement du 1er octobre 1993 au 11 décembre 2000.
Par la parfaite information du Tribunal de céans, il convient de préciser que Monsieur Michel GHELLAM est l’un des huit détenus ayant réussi à s’évader en septembre 1992 de la maison centrale de Clairvaux.
Monsieur Michel GHELLAM a été condamné pour ces faits à une peine de 20 ans de réclusion criminelle par la cour d’assises de l’Aube par arrêt en date du 10 novembre 1999.
Néanmoins et avant et après cette condamnation, l’administration pénitentiaire a toujours considéré Monsieur Michel GHELLAM comme un détenu devant être astreint à un traitement très "particulier".
Que c’est la raison pour laquelle il est demeuré à l’isolement pendant près de 7 années jusqu’au 11 décembre 2000.
La décision de l’administration pénitentiaire procède d’une vengeance à l’encontre de Monsieur Michel GHELLAM, tenu pour l’organisateur de l’unique évasion réussie de la maison centrale de Clairvaux, au cours de laquelle un surveillant pénitentiaire est décédé dans des conditions demeurées au demeurant obscures.
Il convient également de préciser qu’un détenu a été abattu lors de cette évasion, sur lequel a été mise la responsabilité de la mort du surveillant pénitentiaire.
Mais aussi, la presse s’est largement fait l’écho des diverses brimades subies par Monsieur Michel GHELLAM au cours de sa détention, dénoncées devant la cour d’assises de l’Aube en novembre 1999.
Monsieur Michel GHELLAM était détenu jusqu’au mois de juin 2001 au sein de la centrale de MOULINS.
Puis, il a été transféré au cours du mois de juin 2001 à la maison d’arrêt de la Santé au sein du quartier d’isolement.
Le 12 juin 2001, Monsieur GHELLAM a été conduit directement à l’isolement, sans information ni explication préalables, et sans être présenté dans les formes prévues aux articles D 250 et suivants du Code de Procédure Pénale.
Dans un premier temps, aucune décision de mise en isolement ne lui a été notifiée.
Puis, Monsieur GHELLAM s’est vu notifier le 19 juin 2001 une décision de " validation, en régularisation " de son placement en isolement, prononcée par Monsieur BERBAIN, chef du bureau de gestion de la détention de la Direction de l’administration pénitentiaire de Paris, en date du 18 juin 2001.
Cette décision a été critiquée par le requérant par requête en excès de pouvoir portant le numéro 0111747/7 devant le Tribunal de céans.
Le 7 août 2001, Monsieur GHELLAM s’est vu notifier une proposition de prolongation de la mesure du 19 juin 2001 pour une durée de trois mois émanant du directeur de la maison d’arrêt de la Santé.
Par décision en date du 10 septembre 2001, Hugues BERBAIN, chef du bureau de gestion de la détention auprès de la direction de l’administration pénitentiaire de Paris, a décidé de prolonger le placement à l’isolement de Monsieur Michel GHELLAM pour une nouvelle durée de 3 mois.
Monsieur Michel GHELLAM a justement formé un recours en annulation à l’encontre de cette décision auprès du Tribunal administratif de céans par requête enregistrée sous le n° 0112522/7.
Dans un souci de bonne administration de la justice, il conviendra de joindre ces deux instances, jonction à laquelle le Ministre de la Justice a donné son accord.
2. Sur le recours en excès de pouvoir
A. Sur la recevabilité du présent recours
L’article 283-2 dispose que "la mise à l’isolement ne constitue pas une mesure disciplinaire".
Néanmoins, il est constant que toute décision d’une autorité administrative faisant grief à celui à l’encontre de laquelle elle a été édictée est susceptible d’un recours en excès de pouvoir.
La faculté d’introduire un recours en excès de pouvoir devant le Juge Administratif est d’ailleurs un Principe Fondamental du Droit Administratif.
Ce n’est donc qu’en appréciant in concreto si une décision de l’autorité administrative fait grief ou non à l’intéressé que les Juridictions administratives peuvent déterminer si un recours en excès de pouvoir est recevable ou non.
Dans le cas d’espèce, les décisions administrative attaquées font particulièrement grief à Monsieur Michel GHELLAM.
La mise en l’isolement a entraîné une modification certaine de ses conditions de détention, (déjà extrêmement difficiles en détention ordinaire) et par voie de conséquence de sa situation juridique.
Mais surtout l’isolement est une zone pénitentiaire où le détenu n’a aucun contact tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’établissement.
Le détenu est ainsi coupé de tout contact avec les autres détenus et n’a "droit" qu’à la promenade journalière d’une heure dans une petite cour obscure surmonté d’un grillage.
Les dégradations liées à l’isolement sur le physique et le psychisme de l’être humain ont été étudiées et constatées par des médecins et professeurs de renom.
Le régime d’isolement appliqué par l’administration pénitentiaire française a été dénoncé et critiqué à de très nombreuses reprises.
Par exemple, Amnesty International a attiré l’attention des autorités françaises à de très nombreuses reprises sur les conséquences alarmantes observés chez plusieurs détenus placés à l’isolement pendant plusieurs années.
En parlant de l’isolement lors d’un colloque d’Amnesty international, Christiane VOLLAIRE, infirmière a déclaré :
L’isolement tue. A cette agression qu’est l’absence de tout, le corps répond par le dérèglement de tout. Il est travaillé par l’isolement comme il le serait par n’importe qu’elle machine à torturer. Passé au laminoir de l’isolement le prisonnier en ressort souvent diminué à vie, physiquement et mentalement.
Pareillement, le Comité Européen pour la Prévention de la Torture et des Peines ou Traitements Inhumains ou Dégradants a adressé à l’Etat français à plusieurs reprises des demandes d’explication, des recommandations et des mises en garde pour les conditions de détention des personnes placées à l’isolement.
Le caractère inhumain du régime d’isolement a en outre été condamné formellement par la Cour Européenne des Droits de l’Homme dans un arrêt en date du 25 mai 2000, énonçant que :
l’isolement sensoriel complet combiné à un isolement social total peut détruire la personnalité et constitue une forme de traitement inhumain qui ne saurait se justifier par les exigences de la sécurité ou toute autre raison ".
S’agissant de Monsieur Michel GHELLAM, différents médecins ont attesté de l’incompatibilité de l’état de santé du requérant avec une telle mesure d’isolement.
Le Docteur FAUCHER, qui a récemment examiné Monsieur Michel GHELLAM, a précisé dans un certificat médial que :
étant donné les effets délétères de l’isolement prolongé, mentionné dans la circulaire de l’isolement, et étant donné qu’il a subi plusieurs périodes d’isolement et une période de plusieurs années successives (6 ans), l’isolement est contre-indiqué
De même, les Docteurs PEDECH et STEPHANT ont attesté que son état de santé n’était pas compatible avec son maintien à l’isolement.
Ces décisions lui font gravement griefs.
Au surplus, les décisions de placement – puis de prolongation - à l’isolement sont mentionnées sur la fiche carcérale de Monsieur GHELLAM, ce qui lui interdira certaines mesures d’assouplissement de peines.
Pour toutes ces raisons, le placement à l’isolement crée un préjudice certain à Monsieur Michel GHELLAM.
Les décisions administratives attaquées font donc particulièrement griefs à Monsieur Michel GHELLAM.
Il s’agit bien de décisions administratives susceptibles d’un recours en excès de pouvoir.
Mais encore, il convient de rappeler l’article 6 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme dispose :
Toute personne a le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement, dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial (…)
La Jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme énonce que le droit de tout individu à un procès équitable est applicable en matière de contentieux disciplinaire.
Il s’agit d’un droit absolu reconnu dans le cadre d’une convention internationale ayant valeur supra légale, et en tout état de cause, supérieure aux dispositions réglementaires de l’article D 283-2 du Code de Procédure Pénale.
Pareillement, la Jurisprudence du Conseil d’Etat énonce que les mesures d’ordre Intérieur sont susceptibles de faire l’objet d’un recours en excès de pouvoir (Conseil d’état, arrêt d’assemblée du 17 février 1995 " Marie Hardouin " ; Tribunal Administratif de PARIS, 16 mai 1995 " Astier " ; Tribunal Administratif de PARIS 6 décembre 1995 " Bekkouche ").
Selon cette Jurisprudence désormais établie, les sanctions prononcées par l’administration pénitentiaire à l’encontre des détenus sont susceptibles d’un recours en excès de pouvoir devant les Juridictions administratives.
En l’espèce, la décision de placement de Monsieur GHELLAM à l’isolement constitue, compte tenu des faits particuliers de l’espèce, une véritable sanction disciplinaire déguisée par l’administration pénitentiaire.
Monsieur GHELLAM a été placé à l’isolement sans aucune explication préalable et sans être présenté à la commission de discipline de l’établissement dans les formes prévues aux articles D 250 et suivants du Code de Procédure Pénale.
Il ne lui a pas été permis de présenter ses observations et de se faire assister par le conseil de son choix.
Aucune décision de placement en isolement ne lui a été notifiée.
La décision de " validation, en régularisation " de la mise en isolement de Monsieur GHELLAM en date du 18 juin 2001 énonce par ailleurs que cette mesure a été appliquée à Monsieur GHELLAM en raison de la participation de ce dernier à "un mouvement collectif qui a gravement troublé l’ordre à la Maison Centrale de Moulins".
A lire la seconde décision déférée, c’est bien cette circonstance qui a motivée le placement en isolement de Monsieur Michel GHELLAM dès le 12 juin 2001.
Pareillement, cette circonstance est retenue pour justifier la prolongation de la mise à l’isolement suivant décision en date du 10 septembre 2001.
Il est curieux également de constater que seul Monsieur GHELLAM (qui ne constitue pas à lui seul "un mouvement collectif") a fait seul l’objet d’une telle mesure.
Il est aussi fait mention d’une "tentative d’évasion de la maison d’arrêt de Fresnes le 4/02/1994 " et de "l’évasion de la maison centrale de Claivaux du 22/10/1992".
Il convient également de noter que le médecin, le Docteur ZAK DIT ZBAR Olivier, a apposé "son visa" sans avoir, auparavant donner la peine d’examiner le détenu afin de vérifier son état de santé.
En fait, il ne s’agit que d’un prétexte fallacieux.
Or, la participation à un mouvement collectif de nature à perturber l’ordre de l’établissement constitue une faute disciplinaire de 2ème degré, par application de l’article D 249-2 du Code de Procédure Pénale.
Seul Monsieur Michel GHELLAM a été sanctionné dans le cadre de ce prétendu "mouvement collectif" .
Dès lors, les décisions déférées par Monsieur Michel GHELLAM constituent bien des sanctions disciplinaires, susceptibles d’un recours en excès de pouvoir.
Il est donc demandé au Tribunal de céans de déclarer recevable le présent recours en annulation.
B. Sur le fond
I - Sur l’annulation de la décision du 12 juin 2001
Il convient de rappeler que Monsieur GHELLAM s’est vu conduire, le 12 juin 2001, sans explication ni information préalables, au quartier d’isolement de la maison d’arrêt de la Santé.
Il ne lui a été remis aucune décision en ce sens.
Dans le cadre de l’instance, le Ministre de la Justice a produit aux débats une décision en date du 12 juin 2001 de Monsieur GUEGAN.
Cette décision porte mention de " l’avis favorable " de l’administration régionale de l’administration pénitentiaire en date du 13 juin 2001.
Cette décision devra être annulée par le Tribunal.
1) Sur l’incompétence de son auteur
L’article D 283-1 du Code de Procédure pénale dispose que la mise à l’isolement est de la compétence du Ministre de la Justice pour les détenus ayant subi plus de un an de mise à l’isolement.
La décision de placement de Monsieur GHELLAM à l’isolement aurait donc dû être prise par le Ministre de la Justice, qui avait seul compétence pour décider d’une telle mesure dans le cas d’espèce.
Tel n’a pas été le cas, la décision de mise à l’isolement ayant été rendue par Madame GUEGAN, l’un des directeurs adjoints de la maison d’arrêt de la Santé.
Le Tribunal annulera donc la décision déférée pour incompétence de son auteur.
Le Ministre de la Justice n’a jamais contesté l’incompétence de Madame GUEGAN, auteur de cette décision.
Il le reconnaît d’ailleurs dans son mémoire en date du 9 janvier 2002
Le Ministre de la Justice s’est contenté d’invoquer l’absence du Directeur de la Maison d’ Arrêt de la Santé était en vacances (!!!).
Que cette argumentation est parfaitement inopérante dans la mesure où la décision de placement à l’isolement relevait du Ministre de la Justice, et non du directeur de la maison d’arrêt de la Santé.
Au surplus, le Ministre de la Justice a versé lui même aux débats une lettre de Monsieur JEGO dont il résulte que Madame GUEGAN a assuré l’intérim de la direction de la Maison d’arrêt de la Santé du 6 au 31 août 2001.
Celle-ci n’avait donc aucune délégation de pouvoir le 12 juin 2001.
Finalement, le Ministre de la Justice a modifié son argumentation dans son dernier mémoire.
Il soutient désormais que le directeur de la maison d’arrêt de la Santé n’était pas en vacances le 12 juin 2001, mais assistait à … une réunion.
La volte face du Ministère de la Justice est particulièrement surprenante.
Mais cette nouvelle argumentation n’abusera pas la religion du Tribunal.
Même à supposer que le directeur de la Maison d’Arrêt de la Santé ait été effectivement absent (en réunion ou en vacances), – ce qui n’est pas démontré en l’espèce -, il n’en reste pas moins que pour pouvoir valablement exercer les prérogatives dévolues à cette fonction, Madame GUEGAN devait être bénéficiaire d’une délégation de pouvoir.
Or, le Ministre de la Justice s’abstient de verser aux débats toute délégation de pouvoir démontrant que Madame GUEGAN, directrice adjoint de la maison d’arrêt de la Santé, avait compétence pour exercer les prérogatives et fonctions légales et réglementaires du chef d’établissement au sens de l’article D 283-1 du Code de Procédure Pénale.
De même le Ministre de la Justice s’abstient de verser aux débats toute délégation de pouvoir démontrant que Madame GUEGAN, directrice adjoint de la Maison d’Arrêt de la Santé, avait compétence pour exercer les prérogatives et fonctions légales et réglementaires du Ministre de la Justice.
Cette carence démontre en réalité que Madame GUEGAN n’était titulaire d’aucune délégation de pouvoir émanant de Monsieur JEGO et du Ministre de la Justice le 12 juin 2001.
Le Tribunal annulera donc la décision déférée pour incompétence de son auteur.
2) Sur la violation de la loi
La participation à un mouvement collectif de nature à perturber l’ordre de l’établissement constitue une faute disciplinaire de 2ème degré, par application de l’article D 249-2 du Code de Procédure Pénale.
En l’espèce, il est reproché dans la décision de mise en isolement de Monsieur GHELLAM en date du 12 juin 2001 la participation de ce dernier à un mouvement collectif qui a gravement troublé l’ordre du centre pénitentiaire de Moulins.
A lire cette décision, c’est bien cette circonstance qui a motivée la mise à l’isolement de Monsieur GHELLAM dès le 12 juin 2001.
La décision de validation en régularisation du placement de Monsieur GHELLAM à l’isolement constitue, compte tenu des faits de l’espèce, une véritable sanction disciplinaire déguisée.
Or, les articles D 250 et suivants du Code de Procédure Pénale énoncent les règles relatives au prononcé des sanctions disciplinaires à l’encontre des détenus.
Notamment, aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée hors la tenue de la commission de discipline régulièrement convoquée.
Les détenus ont le droit d’être assister par un avocat et de s’entretenir librement avec lui avant le passage devant la Commission de discipline après avoir eu accès au dossier les concernant.
En l’espèce, Monsieur GHELLAM a été placé à l’isolement sans aucune explication préalable.
Il n’a pas été présenté à la commission de discipline de l’établissement.
Il ne lui a pas été permis de présenter ses observations.
La décision de placement à l’isolement n’a pas été notifiée à Monsieur GHELLAM avant le 19 juin 2001.
Dans son mémoire, le Ministre de la Justice ne le conteste même pas.
Dès lors, la décision en date du 12 juin 2001 a été prononcée en violation des règles impératives énoncées aux articles D 250 et suivants du Code de Procédure Pénale.
Au surplus, l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme énonce le principe de la prohibition absolue des traitements inhumains et dégradants.
Il est de jurisprudence constante que cette prohibition des traitements inhumains et dégradants s’applique aux conditions de détention.
Le caractère inhumain du régime d’isolement a ainsi été condamné formellement par la Cour Européenne des Droits de l’Homme dans un arrêt en date du 25 mai 2000, énonçant que :
l’isolement sensoriel complet combiné à un isolement social total peut détruire la personnalité et constitue une forme de traitement inhumain qui ne saurait se justifier par les exigences de la sécurité ou toute autre raison
Les dégradations liées à l’isolement sur le physique et le psychisme de l’être humain ont été étudiées et constatées par des médecins et professeurs de renom.
Le régime d’isolement appliqué par l’administration pénitentiaire française a été dénoncé et critiqué à de très nombreuses reprises.
Il s’agit, dans les faits, d’un véritable acte de barbarie et d’inhumanité admis et perpétré par l’Etat à l’encontre de détenus.
A ce titre, Amnesty International a attiré l’attention des autorités françaises à de très nombreuses reprises sur les conséquences alarmantes observées chez des détenus placés à l’isolement depuis plusieurs années.
En parlant de l’isolement lors d’un colloque d’Amnesty international, Christiane VOLLAIRE, infirmière a déclaré :
"L’isolement tue. A cette agression qu’est l’absence de tout, le corps répond par le dérèglement de tout. Il est travaillé par l’isolement comme il le serait par n’importe qu’elle machine à torturer. Passé au laminoir de l’isolement le prisonnier en ressort souvent diminué à vie, physiquement et mentalement".
Pareillement, le Comité Européen pour la Prévention de la Torture et des Peines ou Traitements Inhumains ou Dégradants a adressé à la France à plusieurs reprises des demandes d’explication, des recommandations et des mises en garde pour les conditions de détention des personnes placées à l’isolement.
En l’espèce, les conditions d’isolement de Monsieur Michel GHELLAM sont extrêmes et procèdent d’une volonté de l’administration pénitentiaire de "lui faire payer" son évasion de Clairvaux.
Monsieur Michel GHELLAM est ainsi coupé de tout contact avec d’autres personnes, à l’exception du personnel pénitentiaire dont on se doute qu’il ne lui adresse pas la parole.
Il ne peut communiquer avec aucune autre personne à l’exception du personnel pénitentiaire chargé de le surveiller.
S’agissant de Monsieur Michel GHELLAM, différents médecins ont attesté de l’incompatibilité de l’état de santé du requérant avec une telle mesure d’isolement.
Le Docteur FAUCHER, qui a récemment examiné Monsieur Michel GHELLAM, a précisé dans un certificat médial que
Etant donné les effets délétères de l’isolement prolongé, mentionné dans la circulaire de l’isolement, et étant donné qu’il a subi plusieurs périodes d’isolement et une période de plusieurs années successives (6 ans), l’isolement est contre-indiqué
De même, les docteurs PEDECH et STEPHANT ont attesté que son état de santé n’était pas compatible avec son maintien à l’isolement.
Le placement à l’isolement, régime appliqué avec une rigueur extrême et expressément contre indiqué par différents médecins, constitue un traitement inhumain et dégradant pour Monsieur Michel GHELLAM.
La décision entreprise viole donc les termes de l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
La décision déférée encourt donc l’annulation de plus fort pour violation des dispositions suscitées.
3) Sur le défaut de motivation et l’erreur manifeste d’appréciation
Pour motiver sa décision, le Directeur Adjoint de la Maison d’arrêt de la Santé se contente d’exposer, sans autrement en justifier, que Monsieur GHELLAM a été placé à l’isolement le 12 juin 2001 en raison de sa participation à "un mouvement collectif qui a gravement troublé l’ordre à la Maison Centrale de Moulins"
Les motivations de la décision entreprise sont dépourvues de fondement.
En l’état, ces accusations formulées à l’encontre de Monsieur Michel GHELLAM ne sont corroborées par aucun rapport dans lequel l’administration pénitentiaire aurait pu consigner – comme c’est l’usage - les faits imputés au détenu.
Monsieur GHELLAM entend d’ailleurs contester formellement ces accusations.
Faute de justifier de la réalité de la participation de Monsieur Michel GHELLAM a un mouvement collectif au sein de la maison centrale de Moulins, les seules allégations contenues dans la décision du 12 juin 2001 ne pouvaient à elles seules constituer une motivation suffisante pour que Monsieur Michel GHELLAM fasse l’objet de la décision attaquée.
Le Tribunal constatera donc le défaut de motivation de la décision déférée.
Mais encore, il échet au requérant de souligner que les prétendus faits qui lui sont reprochés se seraient déroulés au sein de la maison centrale de Moulins.
Rien ne justifiait dès lors que Monsieur GHELLAM soit placé à l’isolement au sein de la maison d’arrêt de la Santé.
Au surplus, l’isolement auquel Monsieur Michel GHELLAM se voit astreint à un régime d’isolement extrêmement strict et inhumain.
Monsieur Michel GHELLAM est coupé de tout contact avec les autres détenus, à l’exception du personnel pénitentiaire.
Monsieur GHELLAM se retrouve totalement désocialisé.
S’agissant de Monsieur Michel GHELLAM, différents médecins ont attesté de l’incompatibilité de l’état de santé du requérant avec une telle mesure d’isolement.
Le Docteur FAUCHER, qui a récemment examiné Monsieur Michel GHELLAM, a précisé dans un certificat médial que
étant donné les effets délétères de l’isolement prolongé, mentionné dans la circulaire de l’isolement, et étant donné qu’il a subi plusieurs périodes d’isolement et une période de plusieurs années successives (6 ans), l’isolement est contre-indiqué
De même, les Docteurs PEDECH et STEPHANT ont attesté que son état de santé n’était pas compatible avec son maintien à l’isolement.
La décision de mise à l’isolement, de par son principe et de par les avis médicaux, est donc manifestement inadaptée dans le cas de Monsieur Michel GHELLAM.
La décision du chef du bureau de gestion de la détention de l’administration pénitentiaire de Paris est donc entachée d’une erreur manifeste d’appréciation et d’un défaut de motivation.
L’annulation est donc encourue de ce chef.
II - Sur l’annulation de la décision en date du 18 juin 2001
1) Sur l’incompétence de son auteur
L’article D 283-1 du Code de Procédure pénale dispose que la mise à l’isolement est de la compétence du Ministre de la Justice pour les détenus ayant subi plus de un an de mise à l’isolement.
La décision de placement de Monsieur GHELLAM à l’isolement aurait donc dû être prise par le Ministre de la Justice, qui avait seul compétence pour décider d’une telle mesure dans le cas d’espèce.
En l’espèce, la décision de " validation, en régularisation " du placement à l’isolement de Monsieur GHELLAM a été prononcée par Monsieur BERBAIN, exerçant la fonction de chef du bureau de gestion de la détention au sein de l’administration pénitentiaire.
Monsieur BERBAIN n’a jamais occupé les fonctions de Ministre de la Justice.
Seul est compétent le ministre de la justice au-delà d’une année d’isolement.
Il n’est pas versé aux débats une quelconque délégation de pouvoir du Ministre de la justice au profit de Monsieur BERBAIN portant sur la prérogative issue de l’article D 80 du Code de Procédure Pénale de transférer les détenus.
La carence du ministre de la justice est patente.
Faute de produire une telle délégation de pouvoir, l’auteur de la décision déférée était nécessairement incompétent pour prononcer la décision critiquée.
Dès lors, le Tribunal prononcera l’annulation de la décision déférée pour incompétence de son auteur.
En tout état de cause, les dispositions de l’article D 283-1 du Code de Procédure Pénale n’attribue à l’administration pénitentiaire dont dépendent les maisons d’arrêt aucune compétence de régularisation d’une mesure de placement en isolement d’un détenu.
2) Sur la violation de la loi
La participation à un mouvement collectif de nature à perturber l’ordre de l’établissement constitue une faute disciplinaire de 2ème degré, par application de l’article D 249-2 du Code de Procédure Pénale.
En l’espèce, il est reproché dans la décision de validation de la mise en isolement de Monsieur GHELLAM en date du 18 juin 2001 la participation de ce dernier à " un mouvement collectif qui a gravement troublé l’ordre à la maison centrale de Moulins ".
A lire cette décision, c’est bien cette circonstance qui a motivée la mise à l’isolement de Monsieur Michel GHELLAM dès le 12 juin 2001.
La décision de validation en régularisation du placement de Monsieur Michel GHELLAM à l’isolement constitue, compte tenu des faits de l’espèce, une véritable sanction disciplinaire déguisée.
Or, les articles D 250 et suivants du Code de Procédure Pénale énoncent les règles relatives au prononcé des sanctions disciplinaires à l’encontre des détenus.
Notamment, aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée hors la tenue de la commission de discipline régulièrement convoquée.
Les détenus ont droit à un procès équitable et être assister par un avocat de son choix, de s’entretenir librement avec son conseil avant le passage devant la commission de discipline.
En l’espèce, Monsieur GHELLAM a été placé à l’isolement sans aucun "procès" ni explication préalable.
Il n’a pas été présenté à la commission de discipline de l’établissement.
Il ne lui a pas été permis de présenter ses observations assisté d’un conseil de son choix.
La décision de placement à l’isolement n’a pas été notifiée à Monsieur GHELLAM avant le 19 juin 2001.
Dès lors, la décision en date du 18 juin 2001 a été prononcée en violation des règles impératives énoncées aux articles D 250 et suivants du Code de Procédure Pénale.
Au surplus, l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme énonce le principe de la prohibition absolue des traitements inhumains et dégradants.
Il est de jurisprudence constante que cette prohibition des traitements inhumains et dégradants s’applique aux conditions de détention.
Le caractère inhumain du régime d’isolement a ainsi été condamné formellement par la Cour Européenne des Droits de l’Homme dans un arrêt en date du 25 mai 2000, énonçant que " l’isolement sensoriel complet combiné à un isolement social total peut détruire la personnalité et constitue une forme de traitement inhumain qui ne saurait se justifier par les exigences de la sécurité ou toute autre raison ".
Les dégradations liées à l’isolement sur le physique et le psychisme de l’être humain ont été étudiées et constatées par des Médecins et Professeurs renommés.
Le régime d’isolement appliqué par l’administration pénitentiaire française a donc été dénoncé et critiqué à de très nombreuses reprises.
A ce titre, Amnesty International a attiré l’attention des autorités françaises à de très nombreuses reprises sur les conséquences alarmantes observées chez plusieurs détenus placés à l’isolement pendant plusieurs années.
Tel est le cas de Monsieur Michel GHELLAM, isolé depuis bientôt dix ans.
En parlant de l’isolement lors d’un colloque d’Amnesty international, Christiane VOLLAIRE, infirmière a déclaré :
" L’isolement tue. A cette agression qu’est l’absence de tout, le corps répond par le dérèglement de tout. Il est travaillé par l’isolement comme il le serait par n’importe qu’elle machine à torturer. Passé au laminoir de l’isolement le prisonnier en ressort souvent diminué à vie, physiquement et mentalement ".
Pareillement, le Comité Européen pour la Prévention de la Torture et des Peines ou Traitements Inhumains ou Dégradants a adressé à l’Etat français à plusieurs reprises des demandes d’explication, des recommandations et des mises en garde pour les conditions de détention des personnes placées à l’isolement.
En l’espèce, les conditions d’isolement de Monsieur Michel GHELLAM sont extrêmes et inhumaines.
Monsieur Michel GHELLAM est ainsi coupé de tout contact avec d’autres personnes, à l’exception du personnel pénitentiaire dont on imagine le mépris se doute qu’il ne lui adresse pas la parole.
Il ne peut ni parler ni converser d’aucune façon, et se retrouve totalement désocialisé.
S’agissant de Michel GHELLAM, différents médecins ont attesté de l’incompatibilité de l’état de santé du requérant avec une telle mesure d’isolement.
Le Docteur FAUCHER, qui a récemment examiné Monsieur Michel GHELLAM, a précisé dans un certificat médial que
étant donné les effets délétères de l’isolement prolongé, mentionné dans la circulaire de l’isolement, et étant donné qu’il a subi plusieurs périodes d’isolement et une période de plusieurs années successives (6 ans), l’isolement est contre-indiqué
De même, les docteurs PEDECH et STEPHANT ont attesté que son état de santé n’était pas compatible avec son maintien à l’isolement.
Le placement à l’isolement, régime appliqué avec une rigueur extrême et expressément contre indiqué par différents Médecins, constitue un traitement inhumain et dégradant pour Michel GHELLAM.
La décision entreprise viole donc les termes de l’article 3 de la convention européenne des Droits de l’Homme.
La décision déférée encourt donc l’annulation de plus fort.
3) Sur le défaut de motivation et l’erreur manifeste d’appréciation
Pour motiver sa décision, le chef du bureau de gestion de la détention de l’administration pénitentiaire de Paris se contente d’exposer, sans autrement en justifier, que Monsieur Michel GHELLAM a été placé à l’isolement le 12 juin 2001 en raison de sa participation à " un mouvement collectif qui a gravement troublé l’ordre à la Maison Centrale de MOULINS "
Les motivations de la décision entreprise sont dépourvues de fondement.
En l’état, ces accusations formulées à l’encontre de Monsieur GHELLAM ne sont corroborées par aucun rapport dans lequel l’administration pénitentiaire aurait pu consigner – comme c’est l’usage - les faits imputés aux détenus.
Monsieur GHELLAM entend d’ailleurs contester formellement ces accusations.
Faute de justifier de la réalité de la participation de Monsieur GHELLAM a un mouvement collectif au sein de la Maison Centrale de MOULINS, les seules allégations contenues dans la décision du 18 juin 2001 ne pouvaient à elles seules constituer une motivation suffisante pour que Monsieur GHELLAM fasse l’objet de la décision attaquée.
Le Tribunal constatera donc le défaut de motivation de la décision déférée.
Mais encore, il échet au requérant de souligner que les prétendus faits qui lui sont reprochés se seraient déroulés au sein de la Maison Centrale de Moulins.
Rien ne justifiait dès lors que Monsieur GHELLAM soit placé à l’isolement au sein de la maison d’arrêt de la Santé.
Au surplus, Monsieur Michel GHELLAM se voit astreint à un régime d’isolement extrêmement strict.
S’agissant de Monsieur Michel GHELLAM, différents médecins ont attesté de l’incompatibilité de l’état de santé du requérant avec une telle mesure d’isolement.
Le Docteur FAUCHER, qui a récemment examiné Monsieur Michel GHELLAM, a précisé dans un certificat médial que
étant donné les effets délétères de l’isolement prolongé, mentionné dans la circulaire de l’isolement, et étant donné qu’il a subi plusieurs périodes d’isolement et une période de plusieurs années successives (6 ans), l’isolement est contre-indiqué
De même, les docteurs PEDECH et STEPHANT ont attesté que son état de santé n’était pas compatible avec son maintien à l’isolement.
De plus fort, la décision attaquée est donc manifestement contraire aux avis médicaux produits par le requérant.
La décision du chef du bureau de gestion de la détention de l’administration pénitentiaire de Paris est donc entachée d’une erreur manifeste d’appréciation et d’un défaut de motivation.
L’annulation est donc encourue de ce chef.
3) Sur la contradiction des termes de la décision entreprise
Il convient de rappeler que la décision déférée prononce " la validation, en régularisation " du placement initial de Monsieur GHELLAM à l’isolement du 12 juin 2001, tout en énonçant que l’échéance de cette mesure est fixée au 12 septembre 2001.
Pourtant, cette décision a pour titre : "Décision initiale pour une mesure d’isolement de plus d’un an".
Il y a donc contradiction dans les termes de la décision, qui ne peut tout à la fois régulariser une mesure de placement à l’isolement pour une durée de 3 mois et fixer cette même durée à un an.
Les termes de la décision déférée ne permettent donc même pas d’en saisir le sens.
L’annulation est donc encourue de plus fort de ce chef.
III. Sur l’annulation de la décision en date du 10 septembre 2001
1) Sur l’incompétence de son auteur
L’article D 283-1 du Code de Procédure pénale dispose que toute mesure d’isolement ne peut être prolonge au delà d’une durée de un an que par décision du Ministre de la Justice.
En l’espèce, Monsieur GHELLAM avait déjà subi une mise à l’isolement supérieure à une année, puisqu’il est demeuré à l’isolement depuis 1993.
La décision de placement de Monsieur GHELLAM à l’isolement aurait dû être prise par le Ministre de la Justice, qui a seul compétence pour décider d’une telle mesure dans le cas d’espèce.
Or, cette décision de prolongation de l’isolement pour une durée de 3 mois a été rendue par Monsieur BERBAIN, chef du bureau de gestion de la détention de l’administration pénitentiaire, sur délégation du ministre de la justice.
Monsieur BERBAIN n’a jamais occupé les fonctions de Ministre de la Justice.
Seul est compétent le ministre de la justice au-delà d’une année d’isolement.
Il n’est pas versé aux débats une quelconque délégation de pouvoir du Ministre de la justice au profit de Monsieur BERBAIN portant sur la prérogative issue de l’article D 80 du Code de Procédure Pénale de transférer les détenus.
La carence du ministre de la justice est patente.
Faute de produire une telle délégation de pouvoir, l’auteur de la décision déférée était nécessairement incompétent pour prononcer la décision critiquée.
Dès lors, le Tribunal prononcera l’annulation de la décision déférée pour incompétence de son auteur.
L’annulation est donc encourue de ce chef.
2) Sur la violation de la loi
La participation à un mouvement collectif de nature à perturber l’ordre de l’établissement constitue une faute disciplinaire de 2ème degré, par application de l’article D 249-2 du Code de Procédure Pénale.
En l’espèce, il est reproché dans la décision de prolongation de la mise en isolement de Monsieur GHELLAM en date du 10 septembre 2001 la participation de ce dernier à :
une évasion de la Maison Centrale de Clairvaux le 22/10/1992, des préparatifs d’évasion à la Maison d’Arrêt de Fresnes le 4/2/1994 et un mouvement collectif à la Maison Centrale de Moulins le 11/06/2001
A lire cette décision, c’est bien cette circonstance qui a motivée la mise à l’isolement de Monsieur GHELLAM dès le 12 juin 2001, puis la prolongation de sa mise en isolement pour une nouvelle période de 3 mois.
La décision de prolongation du placement de Monsieur Michel GHELLAM à l’isolement constitue, compte tenu des faits de l’espèce, une véritable sanction disciplinaire déguisée.
Or, les articles D 250 et suivants du Code de Procédure Pénale énoncent les règles relatives au prononcé des sanctions disciplinaires à l’encontre des détenus.
Notamment, aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée hors la tenue de la commission de discipline régulièrement convoquée ;
Les détenus ont le droit d’être assister par un avocat ayant accès à son dossier et de s’entretenir librement avec lui avant le passage devant la Commission de discipline.
En l’espèce, Monsieur Michel GHELLAM s’est vu prolongé sont placement en l’isolement sans aucune explication préalable.
Il n’a pas été présenté à la commission de discipline de l’établissement.
Il ne lui a pas été permis de présenter ses observations.
Dès lors, la décision en date du 7 août 2001 a été prononcée en violation des règles impératives énoncées aux articles D 250 et suivants du Code de Procédure Pénale.
Au surplus, l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme énonce le principe de la prohibition absolue des traitements inhumains et dégradants.
Il est de jurisprudence constante que cette prohibition des traitements inhumains et dégradants s’applique aux conditions de détention.
Le caractère inhumain du régime d’isolement a ainsi été condamné formellement par la Cour Européenne des Droits de l’Homme dans un arrêt en date du 25 mai 2000, énonçant que
l’isolement sensoriel complet combiné à un isolement social total peut détruire la personnalité et constitue une forme de traitement inhumain qui ne saurait se justifier par les exigences de la sécurité ou toute autre raison
Les dégradations liées à l’isolement sur le physique et le psychisme de l’être humain ont été étudiées et constatées par des Médecins et Professeurs renommés.
Le régime d’isolement appliqué par l’administration pénitentiaire française a donc été dénoncé et critiqué à de très nombreuses reprises.
A ce titre, Amnesty International a attiré l’attention des autorités françaises à de très nombreuses reprises sur les conséquences alarmantes observés chez plusieurs détenus placés à l’isolement pendant plusieurs années.
En parlant de l’isolement lors d’un colloque d’Amnesty international, Christiane VOLLAIRE, infirmière a déclaré :
" L’isolement tue. A cette agression qu’est l’absence de tout, le corps répond par le dérèglement de tout. Il est travaillé par l’isolement comme il le serait par n’importe qu’elle machine à torturer. Passé au laminoir de l’isolement le prisonnier en ressort souvent diminué à vie, physiquement et mentalement ".
Pareillement, le Comité Européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements Inhumains ou dégradants a adressé à la France à plusieurs reprises des demandes d’explication, des recommandations et des mises en garde pour les conditions de détention des personnes placées à l’isolement.
En l’espèce, les conditions d’isolement de Michel GHELLAM sont extrêmes.
Monsieur Michel GHELLAM est ainsi coupé de tout contact avec les autres détenus, à l’exception du personnel pénitentiaire.
Il est renfermé 23 heures sur 24 dans une cellule exiguë, une heure de promenade par jour dans une petite cour surmonté d’un grillage.
Il ne peut ni parler ni converser d’aucune façon et se retrouve totalement désocialisé.
S’agissant de Michel GHELLAM, différents médecins ont attesté de l’incompatibilité de l’état de santé du requérant avec une telle mesure d’isolement.
Le Docteur FAUCHER, qui a récemment examiné Monsieur Michel GHELLAM, a précisé dans un certificat médial que
étant donné les effets délétères de l’isolement prolongé, mentionné dans la circulaire de l’isolement, et étant donné qu’il a subi plusieurs périodes d’isolement et une période de plusieurs années successives (6 ans), l’isolement est contre-indiqué
De même, les docteurs PEDECH et STEPHANT ont attesté que son état de santé n’était pas compatible avec son maintien à l’isolement.
La prolongation du placement à l’isolement, régime appliqué avec une rigueur extrême et expressément contre indiqué par différents médecins, constitue un traitement inhumain et dégradant pour le requérant.
La décision entreprise viole donc les termes de l’article 3 de la convention européenne des Droits de l’Homme.
La décision déférée encourt donc l’annulation de plus fort.
3) Sur le défaut de motivation et l’erreur manifeste d’appréciation
Pour motiver sa décision, le chef du bureau de gestion de la détention de l’administration pénitentiaire de Paris se contente d’exposer, sans autrement en justifier, que Monsieur Michel GHELLAM a été placé à l’isolement le 12 juin 2001 en raison de sa participation à " un mouvement collectif à la Maison Centrale de MOULINS le 11/06/2001 "
Les motivations de la décision entreprise sont dépourvues de fondement.
En l’état, ces accusations formulées à l’encontre de Monsieur GHELLAM ne sont corroborées par aucun rapport dans lequel l’administration pénitentiaire aurait pu consigner – comme c’est l’usage - les faits imputés aux détenus.
Monsieur GHELLAM entend d’ailleurs contester formellement ces accusations mensongères.
Faute de justifier de la réalité de la participation de Monsieur GHELLAM a un mouvement collectif au sein de la maison centrale de Moulins, les seules allégations contenues dans la décision du 10 septembre 2001 ne pouvaient à elles seules constituer une motivation suffisante pour que Monsieur GHELLAM fasse l’objet de la décision attaquée.
Le Tribunal constatera donc le défaut de motivation de la décision déférée.
Mais encore, il échet au requérant de souligner que les prétendus faits qui lui sont reprochés se seraient déroulés au sein de la maison centrale de Moulins.
Rien ne justifiait dès lors que Monsieur GHELLAM soit placé à l’isolement au sein de la maison d’arrêt de la Santé.
Au surplus, l’isolement auquel Monsieur Michel GHELLAM se voit astreint à un régime d’isolement extrêmement strict et dépourvu d’humanité.
Monsieur GHELLAM est ainsi coupé de tout contact avec les autres détenus, à l’exception du personnel pénitentiaire.
S’agissant de Michel GHELLAM, différents médecins ont attesté de l’incompatibilité de l’état de santé du requérant avec une telle mesure d’isolement.
Le Docteur FAUCHER, qui a récemment examiné Monsieur Michel GHELLAM, a précisé dans un certificat médial que
étant donné les effets délétères de l’isolement prolongé, mentionné dans la circulaire de l’isolement, et étant donné qu’il a subi plusieurs périodes d’isolement et une période de plusieurs années successives (6 ans), l’isolement est contre-indiqué
De même, les docteurs PEDECH et STEPHANT ont attesté que l’état de santé u requérant n’était pas compatible avec son maintien à l’isolement.
La décision attaquée est donc manifestement contraire à l’état de santé du requérant.
La décision est donc entachée d’une erreur manifeste d’appréciation et d’un défaut de motivation.
L’annulation est donc encourue de ce chef.
Monsieur GHELLAM a été contraint d’exposer des frais irrépétibles qu’il serait inéquitables de laisser à sa charge ;
Il conviendra de condamner l’Administration pénitentiaire au paiement d’une somme de 4000 € en application des dispositions du Code de Tribunaux Administratifs.
A TITRE SUBSIDIAIRE :
Subsidiairement, au cas où le Tribunal ne serait pas assez informé des conséquences néfastes des mesures d’isolement prise à l’encontre des détenus et afin de constater la gravité du retentissement que la mise à l’isolement peut avoir sur l’état psychologique et physique des détenus, il est demandé d’ordonner une expertise.
L’expert pourrait ainsi éclairer le Tribunal, les conséquences de l’isolement de longue durée sur l’état de santé psychologique et physique d’un détenu.
PAR CES MOTIFS
IL EST DEMANDE AU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE :
- Dire et juger Monsieur GHELLAM recevable et bien fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions,
- Annuler la décision du 12 juin 2001 de Madame GUEGAN
- Annuler les décisions du 18 juin 2001 et du 10 septembre 2001 de Monsieur BERBAIN, chef du bureau de gestion de la détention de l’administration pénitentiaire de PARIS,
- Condamner l’Etat au paiement d’une somme de 4000 € au titre des frais irrépétibles de l’instance en application des dispositions du Code des Tribunaux Administratifs, ainsi qu’aux dépens.
- A titre subsidiaire, commettre tel expert en médecine qu’il plaira au Tribunal aux fins de :
- constater le caractère néfaste et inhumain d’une mesure d’isolement en milieu carcéral.
Sous Toutes Réserves
Et ce sera Justice
Pièces communiquées :
1. Décision du 18 juin 2001 du Chef du Bureau de gestion de la détention de l’administration pénitentiaire de PARIS
2. Décision du 7 août 2001
3. Certificats médicaux
4. Extrait du Journal l’envolée
5. Extraits du Journal LE MONDE concernant le procès de Michel GHELLAM par la Cour d’Assises
6. Rapports du Comité Européen de Lutte contre la Torture et les Traitements Inhumains ou Dégradants
7. Arrêt du 25 mai 2000 de la Cour Européenne des droits de l’Homme