L’OBSERVATOIRE international des prisons (OIP) a dénoncé hier une « spirale infernale » après l’annonce par l’administration pénitentiaire que le plan de fermeture des portes des maisons centrales serait prochainement achevé. Jusqu’à une période récente, les portes des cellules pouvaient rester ouvertes entre 17 et 19 heures dans ce type d’établissement afin de permettre aux détenus purgeant de longues peines d’avoir un semblant de vie sociale à l’intérieur des établissements. Il s’agissait d’une simple tolérance. Cette annonce a été faite mardi par le directeur de l’administration pénitentiaire, Didier Lallement, à la suite de la prise d’otages, lundi, de gardiens à la centrale de Moulins (Allier). Ce plan avait été mis en place par la Chancellerie en février dernier après des incidents dans les prisons. L’annonce de « la suppression de cette libéralité, qui était un élément de vie sociale permettant aux détenus de se retrouver et de leur éviter d’être seuls dans leur cellule face à eux-mêmes, est symptomatique de la politique pénitentiaire du gouvernement, qui propose une mesure d’urgence à chaque fois qu’il y a un incident », a dénoncé un représentant de l’OIP, François Carlier. Mais selon l’administration pénitentiaire, ce coup de tension à la centrale de Moulins trouverait son origine dans une rupture sentimentale qu’aurait mal supporté l’un des deux meneurs, André Allaix. La France compte une dizaine de centrales dont cinq à sécurité renforcée : Lannemezan (Hautes-Pyrénées), Clairvaux (Aube), Arles (Bouches-du-Rhône), Saint-Maur (Indre) et Moulins-Yzeure. La fermeture des portes des cellules dans la journée doit encore être mise en oeuvre à Saint-Maur et à Arles. Elle avait commencé par Moulins-Yzeure en avril.
« A nous de savoir qui peut travailler dans ces ateliers » La mutinerie de Moulins pose également une autre question : celle de l’accès des détenus aux ateliers équipés d’outils tranchants qui peuvent servir d’armes. Faut-il alors revenir sur l’existence même de ces ateliers de travail ? Pas question pour l’administration pénitentiaire. « Le travail est un élément essentiel de la réinsertion des détenus et leur permet d’avoir des revenus. Nous avons fait le pari de la formation et nous continuerons même s’il faut savoir, parfois, prendre des risques. On ne peut se contenter comme dans certains pays d’avoir de simples activités comme de démonter et remonter le même moteur toute la semaine ! », réplique d’emblée Didier Lallement, le directeur de l’administration pénitentiaire. Cette centrale qui accueille les longues peines a déjà été le théâtre en 1996 d’une mutinerie restée dans les mémoires, sans oublier la tentative d’évasion de février 2003, où trois hommes dont un ancien du groupe terroriste Action directe avaient été interceptés sur les toits en possession d’une arme et d’explosifs. « Nous sommes face à des individus dangereux et d’autres incidents se produiront. C’est à nous de savoir, au quotidien, qui peut travailler dans ces ateliers. Un dosage délicat d’appréciation », reconnaît volontiers Didier Lallement. Ce point de vue est partagé, une fois n’est pas coutume, par les gardiens : « Revenir au régime carcéral dur, c’est enfermer des détenus comme des fauves en cage. Mais il est difficile de les réintégrer s’il n’y a pas un vrai travail social d’accompagnement et une formation réelle. Il faut mieux sélectionner les détenus en atelier », ajoute Bernard Houlesse, le délégué syndical de l’Ufap.