Procès de l’ARB : le verdict, mesuré, met à mal l’accusation
PARIS (AFP) - 27/03/2004 16h23
Le verdict mesuré rendu vendredi au procès à Paris des militants indépendantistes bretons accusés d’une série d’attentats, dont celui mortel de Quévert (Côtes-d’Armor), est un camouflet pour une accusation dont la défense n’a eu de cesse de décrier l’argumentaire "mal ficelé".
"C’est un verdict consciencieux. Les magistrats ont sanctionné les failles du dossier", se félicite l’un des avocats des accusés, Me Vincent Omez.
Sur les onze accusés initialement poursuivis, devant la cour d’assises spéciale de Paris, pour 17 attentats attribués à l’Armée révolutionnaire bretonne (ARB), quatre ont été acquittés, dont Jérôme Bouthier, qui a fait deux ans et demi de prison - il a été immédiatement libéré après le verdict - et Pascal Scattolin, qui a fait six mois de détention.
Parmi les sept accusés condamnés, l’ancien porte-parole du mouvement indépendantiste breton Emgann Gaël Roblin, 31 ans, l’a été à une peine de prison inférieure à la durée de sa détention provisoire (trois ans, alors qu’il en a passé près de quatre à la prison de la Santé).
Contre Roblin, qui a également quitté la prison de la Santé vendredi soir, l’avocat général François-Louis Coste avait requis 15 ans de réclusion.
Christian Georgeault (condamné à 11 ans de réclusion), Pascal Laizé (8 ans de prison), Stéphane Philippe (6 ans de prison), ont eux aussi eu des peines bien inférieures à celles réclamées mardi par le représentant du parquet.
Surtout, les trois hommes, tout comme Gaël Roblin ont été acquittés pour les faits les plus graves qui leur étaient reprochés, à savoir la "complicité" dans l’attentat de Quévert, qui avait provoqué la mort le 19 avril 2000 de Laurence Turbec, une employée de McDonald’s de 27 ans.
"A deux reprises durant l’instruction, le parquet général avait estimé que Gaël Roblin devait bénéficier d’un non-lieu sur Quévert, notamment au moment de la fin de l’instruction. Aujourd’hui on retombe sur nos pattes", se réjouit son défenseur, Me Ronan Apéré.
"Sur Quévert, on manquait dramatiquement de preuves. Dans le doute, les juges ont pris la position la meilleure en acquittant", se félicite Me Omez.
Christian Georgeault et Gaël Roblin étaient suspectés d’avoir participé à l’attentat de Quévert car ils avaient rédigé après le drame un communiqué à en-tête de l’ARB niant la responsabilité du groupe armé dans cette attaque.
Mais en l’absence de toute preuve matérielle indiquant qu’ils avaient pu poser la bombe ou ordonner de le faire, l’accusation s’est fondée sur ses seules "certitudes" - l’appartenance revendiquée de Georgeault à l’ARB, le radicalisme de Roblin, notamment - pour forger sa conviction.
"Je n’ai pas la preuve que Gaël Roblin a lui-même déposé la charge mais j’ai la certitude que son rôle est décisif dans la définition de l’objectif", avait ainsi estimé François-Louis Coste dans son réquisitoire.
"C’est une thèse (...) une construction intellectuelle qui ne résiste pas au débat devant une cour d’assises", avait répliqué Me Omez, jugeant que Roblin était avant tout victime d’une "image" qui "agace" avec son "romantisme teinté de mysticisme malvenu".
Mais au-delà de l’accusation, le verdit met également à mal l’instruction menée par le juge anti-terroriste Gilbert Thiel dans cette affaire. Durant le procès, les accusés ont presque tous dénoncé son "acharnement" et sa volonté de désigner Georgeault et Roblin comme "cibles".