CONSEIL D’ETAT
REQUÊTE
N° 319 580
(6ème sous-section)
en annulation de l’article 1 du décret n°2008-546 du 10 juin 2008 relatif au régime de détention et modification le code de procédure pénale (art. D.53-1 du C.P.P.)
et
en annulation partielle du décret n°75-402 du 23 mai 1975 modifié par le décret n°85-836 du 6 août 1985 et par le décret n°2004-1364 du 13 décembre 2004 (art. D.145 t D.146 du C.P.P.)
POUR
monsieur François KORBER
actuellement détenu au C.D. de (77) MELUN
10 quai de la Courtille, 77011 MELUN
CONTRE
madame la Garde des Sceaux, ministre de la Justice
13 place Vendôme, 75042 PARIS cedex 01
Il convient, en premier lieu, de rappeler que M. François KORBER, né le 4 février 1952 à Paris XVème se trouve détenu en Centres de détention depuis le 26 janvier 2001 (MURET, RIOM, CHÂTEAUDUN, MELUN), avec des séjours intermédiaires plus ou moins prolongés, mais illégaux, à la maison d’arrêt de (94) FRESNES. Cette affectation en Centre de détention est conforme à l’article 717 du Code de procédure pénale issu de la loi n°2002-1138 du 9 septembre 2002 disposant que « les condamnés purgent leur peine dans un établissement pour peines » et que « les condamnés à l’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à un an peuvent, cependant, à titre exceptionnel, être maintenus en maison d’arrêt et incarcérés, dans ce cas, dans un quartier distinct, lorsque des conditions tenant à la préparation de leur libération, leur situation familiale ou leur personnalité le justifient ».
Emprisonné depuis le 26 juin 1996, M. KORBER exécute une peine de quinze années de réclusion criminelle prononcée par la Cour d’Assises de la GIRONDE par arrêt du 7 juillet 1999, ainsi que deux peines correctionnelles de 8 à 6 mois prononcées par la Cour d’Appel d’AGEN le 27 juin 2002, après avoir exécuté un reliquat de peine de quelques semaines pour une affaire remontant à 1992 (3 ans, dont 18 mois avec sursis).
Juriste, membre de l’Observatoire International des Prisons, M. KORBER a fait l’objet de multiples transferts imposés, - autrement appelés « transferts disciplinaires » -, au simple motif qu’il milite activement :
- pour faire entrer le Droit en prison, comme le préconise, entre autres, le rapport de M. Guy CANIVET (mars 2000)
- et pour aider ses codétenus à faire respecter leurs droits dans un univers de non-droit : santé, travail, alimentation, dignité, etc.
Ces transferts disciplinaires, - associés à toute la panoplie de ce que Martine HERZOG-EVANS, éminente spécialiste française du Droit de l’application des Peines, qualifie de « sanctions occultes », dans une célèbre chronique de Droit pénitentiaire (mélanges COUVRAT)-, ont été effectués avec une très originale conception du « rapprochement familial »...
Toutes ses racines et sa famille étant bordelaises, M. François KORBER a, successivement, été « rapproché » de BORDEAUX de la manière suivante :
- (33) Bordeaux-Gradignan - (31) Muret (2001) Midi-Pyrénées
- (31) Muret - (94) Fresnes (2002)
- (94) Fresnes - (63) Riom (2002) Massif central
- (63) Riom - (94) Fresnes (2004)
- (94) Fresnes - (28) Châteaudun (2004) Région centre
- (28) Châteaudun - (94) Fresnes (2007)
- (94) Fresnes - (77) Melun (2007) Région parisienne
Dans le but évident de favoriser sa réinsertion et le maintien de ses liens familiaux et amicaux...
Ces transferts étaient, - tous -, parfaitement illégaux car effectués, notamment, en violation de l’article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 (Conseil d’Etat, 14 décembre 2007, Miloud BOUSSOUAR, req. n°290730) et dépourvus de la motivation qu’impose la loi n°79-587 du 11 juillet 1979.
C’est ainsi que M. François KORBER a quitté le Centre de détention de (31) MURET pour la M.A. de (94) FRESNES en 2002. Il est revenu à la M.A. de FRESNES en 2004, puis encore en 2007 :
- dans le plus total arbitraire
- en étant soumis au régime des maisons d’arrêt (entassement à 2 ou 3 dans une cellule prévue pour une personne, obligation de subir le tabagisme de ses codétenus, promiscuité infâme, activités réduites, impossibilité de téléphoner à ses proches, etc...).
Il se trouve actuellement détenu en Centre de détention (MELUN) depuis le 4 septembre 2007 mais peut, -à chaque instant-, après avoir déplu à tel ou tel directeur ou directrice - adjointe, être sommé de préparer son « paquetage » à l’aube avant de monter, -entravé et menotté-, dans un fourgon qui le conduira de nouveau vers la maison d’arrêt de FRESNES ou dans n’importe quelle autre maison d’arrêt de France, pour un épuisant « Tour de Gaule des taules » selon l’originale formule de monsieur David FONTAINE, brillant journaliste au « Canard Enchaîné » (pièce n°2).
L’archaïsme du système pénitentiaire français est toujours d’actualité malgré les effrois périodiques des responsables politiques de gauche comme de droite, vite recouverts par la poussière qui s’entasse un peu plus chaque année sur les innombrables colloques, recommandations et autres rapports consacrés à ce que la Commission d’Enquête Parlementaire du Sénat qualifiait, en 2000, d’« Humiliation pour la République ».
Seules :
- la pression des instances Européennes
- les initiatives isolées de quelques parlementaires
- la saisine régulière du Juge administratif et du Juge judiciaire par une poignée de détenus et leurs avocats - en dépit des représailles de toute nature - permettent des avancées ponctuelles, mais significatives.
Tel est l’objet principal du présent recours.
I RECOURS CONTRE L’ARTICLE 1 DU DECRET DU 10 JUIN 2008 PORTANT CREATION DE L’ARTICLE D.53-1 DU CODE DE PROCEDURE PENALE
§ 1 - sur l’intérêt à agir
Monsieur François KORBER a, de toute évidence, un intérêt personnel et direct à demander l’annulation de l’article 2 du décret n°2008-546 du 10 juin 2008 relatif au régime de détention et modifiant le Code de procédure pénale en créant l’article D.53-1 nouveau du Code de procédure pénale. Ceci en tant qu’« usager », -contraint, certes, mais usager tout de même-, du service public pénitentiaire.
Bien que « condamné », il peut, en effet, à tout instant, se retrouver affecté en maison d’arrêt, avec des « prévenus » et beaucoup d’autres « condamnés », en violation de l’article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 et des articles 716 et 717 du Code de Procédure Pénale.
Il agit, également, en qualité de citoyen soucieux de l’intérêt général des personnes privées, -à tort ou à raison-, de leur liberté. Ou qui le seront un jour.
Le décret litigieux (pièce n°1) concerne une question fondamentale relative aux conditions de vie des personnes détenues dans les maisons d’arrêt de la République française.
Ces conditions sont, -de notoriété publique-, le plus souvent inhumaines et avilissantes, y compris pour les personnels en charge de certains établissements pénitentiaires.
§ 2 - une exception remarquable mais discriminatoire : le Quartier V.I.P. de la maison d’arrêt de la Santé (Paris)
A l’exception du secteur surnommé « le Quartier V.I.P. » de la maison d’arrêt de La Santé qui constitue le modèle de ce que devraient être toutes les cellules de toutes les maisons d’arrêt de France :
- encellulement individuel
- cellules propres et confortables
- accès aisé à une salle de sport ou de lecture, etc.
la plupart des personnes détenues s’entassent aujourd’hui dans des cellules de 9 mètres carrés, avec une ou deux personnes couchant sur un matelas posé au sol.
L’existence d’un tel Quartier privilégié constitue, pour l’instant, une intolérable discrimination dans un pays démocratique :
- le Juriste et l’Humaniste se demandent, en effet, quels peuvent bien être les critères retenus en 2008 pour qualifier une personne détenue de « personne très importante » (V.I.P.) ou, au contraire, de « personne sans importance » (P.S.I.).
Ce vocabulaire futile et anodin rappelle malencontreusement « les juifs intéressants » distingués par M. Maurice PAPON à l’occasion de son procès devant la Cour d’Assises de la GIRONDE. La discrimination consciente ou inconsciente est de la même nature : détestable.
- le Requérant ne demande, par conséquent, pas l’abolition de ce Quartier mais son extension très rapide, dans le délai de : un an et sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt à intervenir (le cas échéant) lorsque le Conseil d’Etat aura été amené à se prononcer sur ce litige. Une telle décision constituerait, -pour le Juge administratif-, la seule solution susceptible d’imposer, une fois pour toutes, le respect des promesses électorales cent fois réalisées et cent fois reniées. Face à l’incurie des gouvernements successifs, il imposerait, surtout, -comme tel est son Devoir-, le respect des Droits de l’Homme à l’intérieur des prisons de la République.
Il est, en effet, notoire que, dans certains domaines, les autorités exécutives n’agissent que sous la contrainte d’amendes et de pénalités infligées, par exemple, par la Commission Européenne de BRUXELLES. De la même manière, seule une décision de Justice, coercitive, peut contraindre les gouvernements de la République à agir concrètement.
§ 3 - l’illégalité de l’article 1 du décret numéro 2008-546 du 10 juin 2008
Le 11 janvier 2006, le Comité des ministres des 46 pays européens adoptait les 108 recommandations du Conseil de l’EUROPE dites « Règles Pénitentiaires Européennes » (R.P.E.).
La règle pénitentiaire européenne 18-5 stipule que « chaque détenu doit en principe être logé pendant la nuit dans une cellule individuelle sauf lorsqu’il est considéré comme préférable pour lui qu’il cohabite avec d’autres détenus ».
Il suffit de consulter le Code de procédure pénale à l’article 716 pour constater que, en l’an 2000, le Parlement avait décidé que l’encellulement individuel des prévenus serait applicable aux prévenus au 16 juin 2003 (article 68 de la loi n°2000-516 du 15 juin 2000). L’article 717, -qui le complète-, oublie cependant de prévoir l’encellulement individuel des condamnés maintenus en maison d’arrêt pour une raison ou une autre.
En 2003, un nouveau délai de cinq ans était voté à la faveur d’un amendement à une loi... renforçant la lutte contre la violence routière (article 41 de la loi n°2003-495 du 12 juin 2003).
Ce délai arrivait à échéance le 13 juin 2008.
Pour contourner les règles européennes et les lois votées en 2000 et 2003, la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a réalisé une acrobatie juridique en prenant, le 10 juin 2008, un décret fantaisie et inapplicable en son article premier créant l’article D.53-1 du Code de procédure pénale :
Article 1
« Si un prévenu demande au chef d’établissement à bénéficier du régime de l’emprisonnement individuel de jour et de nuit alors que la distribution intérieure de la maison d’arrêt et le nombre de détenus présents ne lui permettent pas de bénéficier sur place de ce régime, il est fait application des dispositions du présent article.
Le prévenu est informé qu’il a la possibilité de déposer auprès du chef d’établissement une requête pour être transféré, afin d’être placé en cellule individuelle, dans la maison d’arrêt la plus proche permettant un tel placement, à la condition que ce transfèrement obtienne l’accord du magistrat saisi du dossier de l’information.
Dans un délai de deux mois à compter du dépôt de la requête, le chef d’établissement indique au prévenu les propositions de transfèrement permettant de répondre à sa demande, en lui précisant la ou les maisons d’arrêt dans laquelle il sera susceptible d’être détenu.
Si le prévenu indique accepter l’une ou plusieurs de ces propositions, le chef d’établissement en informe immédiatement le magistrat saisi du dossier de l’information, au moyen d’un formulaire adressé par télécopie. Ce dernier indique alors au chef d’établissement, selon les mêmes modalités, s’il donne ou non son accord.
En cas d’acceptation du prévenu et d’accord du magistrat, il est procédé dans les meilleurs délais au transfèrement ».
Les conditions posées par ce décret pour obtenir un encellulement individuel sont irréalistes et inapplicables. En supposant remplie la condition d’accord du magistrat, il est demandé aux chefs d’établissement d’accomplir une « mission impossible » : découvrir des places de prison qui n’existent pas. Il suffit, par ailleurs, de consulter les chiffres publiés par le Ministère de la Justice pour constater que presque toutes les maisons d’arrêt sont, actuellement, et structurellement, surpeuplées. Aucun juge d’instruction ne voudra, d’autre part, voir une personne mise en examen et détenue affectée, -le cas échéant-, à l’autre bout de la FRANCE, ce qui poserait, au demeurant, d’insurmontables et très coûteux problèmes d’escortes de police ou de gendarmerie.
Enfin, ce décret génère une première rupture du principe d’égalité entre les citoyens. Si l’on peut, -à l’extrême rigueur-, imaginer qu’une personne mise en examen par un Juge d’instruction de MARSEILLE puisse être placée en détention provisoire à la Maison d’arrêt de BREST ou de STRASBOURG, une telle solution est rigoureusement impraticable pour les Départements et Territoires d’Outre-mer.
Les maisons d’arrêt de :
- (97122) BASSE-TERRE (Guadeloupe)
- (97448) SAINT-PIERRE (La Réunion)
- (97600) MAJICAVO (Mayotte)
- (98600) MATA-UTU (Wallis-et-Futuna)
- (98845) NOUMEA (Nouvelle-Calédonie)
- (97394) REMIRE-MONTJOLY (Guyane)
- (97500) SAINT-PIERRE ET MIQUELON
- (98642) TAIOHAE (Iles marquises)
- ou (98735) UTUROA-RAIATEA (Iles sous le vent)
sont presque toutes surpeuplées et connaissent des taux de suroccupation de 150 à 200 pour cent.
A l’exception notoire, -il convient de le reconnaître-, des maisons d’arrêt de SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON (8 places opérationnelles) ou d’UTUROA-RAIATEA (20 places opérationnelles)... tous ces établissements connaissent des taux de suroccupation de 150 à 250 pour cent.
A supposer que des personnes mises en examen dans ces îles lointaines renoncent à tout lien familial (visites de leur famille et de leurs enfants au parloir) et à toute véritable défense (contacts réguliers avec l’avocat local), on n’imagine pas une seule seconde qu’elles demanderont à être affectées à la maison d’arrêt de (12) RODEZ, de (23) GUERET ou de (79) NIORT.
Lesquelles sont, au demeurant, déjà surpeuplées...
De telles affectations entraîneraient des milliers de déplacements en avion, -ruineux pour les finances publiques-, pour comparaître devant le Juge d’instruction en charge du dossier et revenir en métropole dans le lieu de détention « privilégié » (cellule individuelle). A quoi s’ajouterait la possibilité, -pour les personnes ainsi déplacées-, de déposer, environ toutes les trois semaines, des demandes de mise en liberté devant les Chambres de l’Instruction compétentes en requérant systématiquement leur comparaison personnelle, laquelle est de droit, à peine de nullité de l’arrêt intervenir.
Il ne s’agit nullement d’une hypothèse d’école. Dans les années 1990, un braqueur humainement sympathique, M. André SEGURA [1], et son épouse, -aujourd’hui admirablement réinsérés-, revendiquaient le droit, -tout à fait naturel-, d’avoir des relations intimes au parloir. Ils ont, d’ailleurs, ainsi, conçu un « bébé-parloir ». M. André SEGURA se trouvait détenu à la Maison d’arrêt de (33) BORDEAUX-GRADIGNAN, dans l’attente de sa comparution devant la Cour d’Assises de la GIRONDE. Son épouse, Laurence, occupait un logement à cinq minutes de la maison d’arrêt avec ses enfants.
La sottise et la malveillance de certains fonctionnaires, -fort heureusement minoritaires-, avaient conduit l’Administration pénitentiaire à transférer monsieur André SEGURA à la maison d’arrêt de (78) BOIS D’ARCY dans l’attente de son procès à... BORDEAUX. Ceci, malgré l’avis du Parquet général de BORDEAUX.
Ne pouvant supporter une telle séparation, Laurence SEGURA et ses jeunes enfants accomplissaient presque chaque semaine d’épuisants allers et retours de BORDEAUX à BOIS D’ARCY. De son côté, André SEGURA demandait régulièrement sa mise en liberté devant la Chambre de l’Instruction de BORDEAUX, en sachant n’avoir aucune chance de l’obtenir. Ces multiples demandes, seule parade à l’éclatement de la cellule familiale, lui permettaient ainsi de venir au moins une fois par mois à BORDEAUX, où son épouse et ses enfants parvenaient à l’apercevoir quelques instants, entre deux portes, au Palais de Justice de BORDEAUX.
Le coût de cette opération fut ruineux pour le Ministère de la Justice puisque la situation pénale de M. André SEGURA impliquait, à l’époque, à chaque fois, une imposante escorte du G.I.P.N. générant des frais considérables (avion, véhicules, mobilisations de troupes, etc.).
Les médias s’étant emparés de l’affaire, le bon sens a fini par avoir raison de la stupidité administrative, l’intéressé ayant été reconduit, -dans l’attente de son procès-, à la maison d’arrêt de BORDEAUX-GRADIGNAN.
Ce récit authentique et concret permet de mesurer toute l’absurdité du décret du 10 juin 2008.
Le décret litigieux constitue, à l’évidence, un artifice destiné à contourner la Loi. Une telle imposture ne saurait abuser le plus Haute Juridiction administrative française.
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Ce « monstre » juridique rappelle curieusement la création des « mandataires agréés » engendrés par la Circulaire NOR JUSE0040087C du 31 octobre 2000 destinée, pareillement, à contourner l’article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000.
Cette circulaire fut partiellement annulée par un arrêt du Conseil d’Etat en date du 20 mars 2002 (C.E., 20 mars 2002, DIENG-LOBAT, KORBER et autres, req. n°226803). Le monstre a cependant survécu, comme une inutile chimère, sous la forme du décret n°2002-1023 du 25 juillet 2002, vainement attaqué par le Requérant et curieusement « sauvé » par le Conseil d’Etat en 2003 (C.E., cont. 30 juillet 2003, BERTIN et KORBER, req. n°249563 et 250694).
Aucun « mandataire agréé » n’a jamais existé dans aucune prison française. Et si, d’aventure, il s’en était trouvé, aucun détenu n’aurait fait appel à lui, préférant, à tous égards, solliciter un avocat au titre de l’aide juridictionnelle ou à ses frais lorsqu’il en a les moyens.
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Le décret du 10 juin 2008 devra donc être annulé et remplacé par un texte prévoyant l’encellulement individuel de toutes les personnes détenues en maison d’arrêt, -qu’elles soient prévenues ou condamnées-, sur simple demande après instauration d’un numerus clausus au plus tard le 13 juin 2009.
Outre son absurdité intrinsèque, le décret du 10 juin 2008 est, en effet, rigoureusement illégal en ce qu’il instaure un régime de détention et un traitement radicalement différents pour les prévenus et les condamnés qui s’entassent, très nombreux, dans les maisons d’arrêt en attendant qu’une place se libère en centre de semi-liberté, en centre de détention ou en maison centrale.
L’instauration d’un numerus clausus est d’une extrême simplicité et ne pose pas de problème particulier (pièce n°3).
Il ‘agit d’appliquer, -dans chaque T.G.I. ou ressort de Cour d’Appel-, le principe : une place = un détenu, en libérant, de façon anticipée, des détenus proches de la fin de leur peine -et, naturellement, volontaires- sous le contrôle de la C.A.P. (Commission d’Application des Peines), du Juge de l’Application des Peines, du Parquet et, le cas échéant, du T.A.P. (Tribunal de l’Application des Peines).
Ces libérations un peu anticipées fourniraient un état mensuel des places disponibles permettant au Bureau de Gestion de la Détention (Direction de l’Administration Pénitentiaire) de disposer des places nécessaires dans les centres de détention ou les maisons centrales pour vider les maisons d’arrêt et permettre à l’administration d’offrir les places individuelles nécessaires pour les incarcérations strictement indispensables, comme le prévoit, déjà, la loi (grave trouble à l’ordre public, risque de fuite, nécessités impérieuses de l’instruction, etc.). Tout en évitant la fuite en avant extravagante actuellement engagée avec la construction de prisons déjà remplies avant même que d’être inaugurées.
A L’ILLEGALITE EXTERNE
... sur la valeur infralégislative du décret litigieux
Ainsi qu’il a été longuement exposé (cf. supra pp. 6-10), le décret du 10 juin 2008 vise, uniquement, à contourner grossièrement la loi n°2003-495 du 12 juin 2003.
Il n’est pas besoin d’un long exposé pour rappeler qu’un décret est, bien entendu, très inférieur, -dans la hiérarchie des normes-, à la loi et ne saurait donc lui être contraire à peine de nullité. Il est, d’autre part, de jurisprudence constante qu’un simple décret ne peut restreindre les droits conférés par une loi, en l’espèce l’article 41 de la loi n°2003-495 du 12 juin 2003.
Dans ce premier chef, déjà, l’article 1 du décret n°2008-546 du 10 juin 2008 sera donc annulé.
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... sur l’atteinte au principe d’égalité devant la loi résultant du décret litigieux
L’article 1er de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 dispose que :
« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondée que l’utilité commune ».
Le Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 intègre ce principe en énonçant que : « le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l’Homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu’aux droits et devoirs définis dans le Charte de l’environnement de 2004 ».
Quand à l’article 1er de la même Constitution, il proclame que :
« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race et de religion (...) ».
Le Conseil d’Etat a fait du principe d’égalité devant la loi un Principe Général du Droit [2]. Ce principe d’égalité joue aussi bien en faveur des agents publics que des usagers du service public pénitentiaire. Il ne peut y être dérogé que pour « une nécessité d’intérêt général » en rapport avec l’objet de la loi [3], ce qui n’est, à l’évidence, pas le cas du décret litigieux. Le Conseil Constitutionnel a, quant à lui, érigé le principe d’égalité devant la loi en principe de valeur constitutionnelle [4], placé au cœur de la conception républicaine du pouvoir et de la société.
L’article 1 du décret n°2008-546 du 10 juin 2008 porte donc une atteinte flagrante et caractérisée à ce principe dans la mesure où il instaure, -tout comme la loi n°2000-516 du 15 juin 2000 et la loi n°2003-495 du 12 juin 2003-, des conditions de vie quotidienne radicalement différentes, au sein d’un même établissement, entre les personnes « prévenues » et les personnes « condamnées » sans qu’aucune considération d’ordre public carcéral puisse justifier pareille discrimination.
Le même décret instaure, d’autre part, une inégalité de fait entre les personnes mises en examen (« prévenues ») dans les D.O.M.-T.O.M. et celles mises en examen en métropole puisque ledit décret, -à le supposer concrètement applicable en France métropolitaine, ce qui n’est, matériellement, pas le cas, faute de places disponibles-, est rigoureusement inapplicable aux usagers du service public pénitentiaire résidant dans les Départements et Territoires d’Outre-mer.
De ce deuxième chef, encore les lois précitées seront donc déclarées anticonstitutionnelles et le décret n°2008-546 du 10 juin 2008, comme tel, immédiatement annulé.
B L’ILLEGALITE INTERNE
... sur le détournement de pouvoir
Le décret litigieux constitue, manifestement, un détournement de pouvoir puisqu’il n’a d’autre objet, -ainsi qu’il a été démontré (supra, pp.6-9)-, que de contourner la loi n°2003-495 au 12 juin 2003 applicable au 13 juin 2008.
L’argument n’appelle pas de longs développements et se suffit à lui-même.
De ce nouveau chef, encore, l’article 1 du décret n°2008-546 du 10 juin 2008 devra donc être annulé.
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C SUR LE PREJUDICE
M. François KORBER vit à chaque instant dans la hantise d’un transfert arbitraire en maison d’arrêt, à FRESNES, BAYONNE ou NANTES, puisqu’il s’agit d’une pratique tristement courante de l’Administration pénitentiaire, mise en œuvre depuis longtemps sans que le Juge administratif, -jusqu’à une date très récente [5]-, ait accepté de s’en préoccuper.
Ceci, alors qu’il exécute ses peines depuis des années en Centre de détention (encellulement individuel obligatoire).
Le décret litigieux aggrave son stress et son anxiété, -cause de nombreux troubles psychosomatiques attestés par quatre experts-, puisque, se trouvant « condamné », il serait nécessairement, -en cas de « transfert disciplinaire » et en l’état actuel de la loi et du décret établissant une discrimination entre condamnés et prévenus dans les maisons d’arrêt-, affecté dans une cellule de 2, 3, 4 ou 6 personnes et contraint à une intolérable promiscuité.
Il a donc sollicité, dans son RECOURS ADMINISTRATIF PREALABLE en date du mercredi 23 juillet 2008 (pièce n°10) à titre de réparation de son préjudice moral (préjudice d’anxiété), le paiement d’une somme de 10.000 euros, qui est portée à 20.000 euros en raison de l’absence d’abrogation rapide du décret litigieux et de la nécessité de mener une longue procédure devant le Conseil d’Etat.
Compte tenu des délais de recours contentieux, M. François KORBER s’est trouvé contraint de saisir le Conseil d’Etat sans attendre une hypothétique réponse de la Garde des Sceaux à son offre de transaction. Il s’engage toutefois, naturellement, à se désister de son recours en cas de réponse favorable à ladite offre de transaction au plus tard le 23 septembre 2008.
Après annulation de l’article 1 du décret litigieux, la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, sera donc condamnée au paiement d’une somme de 20.000 euros à M. François KORBER en réparation de son préjudice moral.
D SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE L.761-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE
Aux termes de l’article L.761-1 du Code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ». L’article 43 de la loi du 20 juillet 1991 autorise, par ailleurs, le bénéficiaire de l’aide juridictionnelle à demander au juge de condamner, dans les mêmes conditions, la partie perdante « au paiement d’une somme au titre des frais qu’il a exposés ».
Enfin, l’article 37 de la même loi dispose que « (...) l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner (...) la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès et non bénéficiaire de l’aide juridictionnelle, à une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Il peut, en cas de condamnation, renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat et poursuivre le recouvrement à son profit de la somme allouée par le juge ».
Le Conseil de M. KORBER se trouve donc bien fondé à solliciter du Conseil d’Etat la condamnation de madame la ministre de la Justice au paiement d’une somme de 5.000 euros correspondant aux frais et honoraires qu’il aurait demandés à son client si ce dernier n’avait pas bénéficié de l’aide juridictionnelle pour mener la présente procédure devant la Haute Juridiction.
Cette somme se décompose comme suit :
- honoraires et temps passé pour la mise au point de la REQUÊTE initiale
- frais de secrétariat (dactylographique, jeux de photocopies, correspondances avec le client...)
- visite au Centre de détention de MELUN (environ 6 heures, le temps de franchir tous les contrôles, d’attendre que son client soit appelé, de s’entretenir avec lui, puis de ressortir et de regagner son Cabinet à PARIS).
En cas de condamnation de la ministre de la Justice, le Conseil de M. KORBER s’engagerait, naturellement, à renoncer au bénéfice de l’aide juridictionnelle si, dans les douze mois du prononcé définitif de l’arrêt à intervenir, il parvient à récupérer auprès de la ministre de la somme allouée.
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II RECOURS CONTRE LE DECRET DU 23 MAI 1975 (MODIFIE) PORTANT CREATION DES ARTICLES D.145 ET D.146 DU CODE DE PROCEDURE PENALE
Une pure coïncidence temporelle conduit M. François KORBER à saisir le Conseil d’Etat d’un deuxième RECOURS visant à l’abrogation partielle du décret n°75-402 du 23 mai 1975 (art. D.145 et D.146 du Code de Procédure Pénale), après avoir vainement saisi la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation. Celle-ci, -dans son arrêt n°1539 du 12 mars 2008 (pourvoi n°Z07-86.070 F-D) (pièces 5 et 6) concernant, lui aussi, les régimes de détention-, a DIT n’y avoir lieu à statuer sur le pourvoi : « Attendu que François KORBER, qui est actuellement détenu au Centre de détention de MELUN, bénéficie de nouveau des dispositions de l’article D.146 du code de procédure pénale propre aux établissements pénitentiaires de cette catégorie. D’où il suit que le pourvoi est devenu sans objet (...) ».
Elle a ainsi préféré éluder l’importante question qu’il lui était demandé de trancher. M. François KORBER a donc été contraint de saisir madame la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, puis, désormais, le Conseil d’Etat avant de pouvoir saisir, -si nécessaire-, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (principe de l’épuisement des voies de recours interne).
Les inégalités de traitement des condamnés en fonction de leur lieu de détention sont unanimement réprouvées par de nombreux magistrats et par la doctrine la plus éminente (voir Martine HERZOG-EVANS, « Droit de l’exécution des peines », §102.105 et suiv.) (Dalloz action 2007/2008).
Tel est notamment le cas en ce que concerne plus particulièrement les permissions de sortir :
L’article D.145 du C.P.P. (décret n°75-402 du 23 mai 1975) dispose que :
« Des permissions de sortir d’une durée maximale de trois jours peuvent être accordées en vue du maintien des liens familiaux ou de la préparation de la réinsertion sociale, aux condamnés qui ont exécuté la moitié de leur peine et qui n’ont plus à subir qu’un temps de détention inférieur à trois ans.
(décret n°85-836 du 6 août 1985)
Ces permissions sont accordées sans conditions de délai aux condamnés exécutant une ou plusieurs peines d’emprisonnement n’excédant pas au total une durée d’un an ».
(décret n°2004-1364 du 13 décembre 2004, art. 9-I, entrant en vigueur le 1er janvier 2005)
« Ces permissions de sortir peuvent être également accordées sans condition de délai lorsque le juge ou le tribunal de l’application des peines ont, en application du 1° de l’article D.535 et selon la procédure prévue aux articles 712-6 ou 712-7, décidé de subordonner l’octroi de la libération conditionnelle à la condition d’avoir bénéficié d’une ou plusieurs permissions de sortir ».
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L’article D.146 du C.P.P. (décret n°75-402 du 23 mai 1975) dispose, quant à lui, que :
« Les condamnés incarcérés dans les centres de détention peuvent bénéficier des permissions de sortir prévues à l’article D.145, lorsqu’ils ont exécuté le tiers de leur peine ».
A leur égard, la durée de ces permissions peut être portée à cinq jours et, une fois par an, à dix jours ».
Plus personne n’est, aujourd’hui, capable d’expliquer le fondement de cette différence de traitement instaurée par des décrets vieux de plus de 30 ans :
- Il ne peut s’agir d’un motif de sécurité : un condamné détenu en maison d’arrêt, -où il a souvent passé 2, 3 ou 4 ans en qualité de prévenu-, est souvent mieux connu de tous les intervenants de l’Administration pénitentiaire que le même condamné venant d’arriver dans un centre de détention.
- On ne s’explique pas, dès lors, pourquoi le condamné détenu en maison d’arrêt devrait attendre d’avoir purgé la moitié de sa peine pour bénéficier d’une permission de sortir de trois jours maximum (art. D.145 du C.P.P.) au lieu de 5 à 10 s’il était détenu en Centre de détention (art. D.146)
- On ne s’explique pas non plus, pourquoi le condamné détenu en établissement pour peines peut, lui, bénéficier de permissions de sortir de cinq jours (et, une fois pas ans, de dix jours) après avoir exécuté seulement le tiers de sa peine (art. D.146 du C.P.P.).
Le principe d’égalité devant le Loi est infiniment supérieur, -dans la hiérarchie des normes-, aux simples décrets ou circulaires, de valeur réglementaire et, notamment, à l’article D.145 du Code de procédure pénale issu du décret n°75-402 du 23 mai 1975.
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La situation de M. KORBER en mai-juin 2007 constitue, à cet égard, un véritable cas d’école soulignant l’obsolescence et l’absurdité de l’actuelle réglementation.
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I LES FAITS
Le requérant s’est trouvé, une fois de plus, transféré, le 9 mai 2007, du C.D. de (28) CHÂTEAUDUN vers la M.A. de (94) FRESNES, pour une durée indéterminée. Dans la mesure où sa nouvelle affectation était le C.D. de (77) MELUN, il n’existait aucune raison pour qu’il ne fût pas conduit directement de (28) CHÂTEAUDUN à (77) MELUN et « séjourne » 4 mois (9 mai 2007- 4 septembre 2007) à la maison d’arrêt de FRESNES.
Au C.D. de (28) CHÂTEAUDUN, M. KORBER bénéficiait, -comme n’importe quel autre détenu répondant aux mêmes critères-, d’une permission de sortir de 5 jours tous les trois mois (recherche d’emploi et de logement, maintien des liens familiaux et amicaux).
La précédente permission de sortir datant du 19 mars 2007 au 23 mars 2007, sur PARIS, M. KORBER s’apprêtait à demander une permission de sortir de 5 jours à la Commission d’Application des Peines (C.A.P.) du C.D. de (28) CHÂTEAUDUN qui devait se tenir le 15 mai 2007.
Son transfert inopiné, le 9 mai 2007, l’en a empêché.
Dès son arrivée à la M.A. de (94) FRESNES, il a saisi la C.A.P. d’une demande de permission de sortir de 5 jours, sur PARIS, augmentée des délais de route FRESNES - PARIS centre - FRESNES.
Il sollicitait clairement, expressément et logiquement, une permission de sortir de 5 jours puisque ladite demande concernait :
- la même personne que celle arrivant du C.D. de (28) CHÂTEAUDUN
- le même dossier
- le même lieu de permission habituel (PARIS)
La seule différence résidait dans le « déplacement » de l’intéressé d’une centaine de kilomètres de (28) CHÂTEAUDUN à (94) FRESNES.
A la date de la décision attaquée, M. KORBER ne relevait, par ailleurs, d’aucune des hypothèses où il aurait pu, « à titre exceptionnel », être incarcéré dans une maison d’arrêt.
Il a obtenu, -sans explications ni motivation-, une permission de... 33 heures ( !) par Ordonnance de madame le Juge de l’Application des Peines de CRETEIL en date du 30 mai 2007, pour une sortie du 14 juin 2007 à 9heures au 15 juin 2007 à 18 heures.
Il a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par Ordonnance n°07/ 04181 du 11 juin 2007, madame la Présidente de la Chambre de l’Application des peines de PARIS a confirmé l’Ordonnance déférée sans aucunement répondre aux OBSERVATIONS formulées par Me Frédérique THUILLEZ, avocate de l’exposant, étayées par la doctrine la plus éminente (voir extraits du Traité de « Droit de l’exécution des peines » § 102.105 et suiv., précité).
La Cour de Cassation, -régulièrement saisie d’un pourvoi contre cette Ordonnance (pièce n°5)-, a, dans un arrêt n°1539 du 12 mars 2008, négligé l’occasion qui lui était offerte de s’emparer du problème et déclaré le pourvoi « sans objet » au motif que M. François KORBER se trouvait, de nouveau, dans un Centre de détention (MELUN) (pièce n°6) (pourvoi n°Z07-86.070 F-D).
Il sera, d’autre part, fait observer que M. KORBER, pendant son transit à la M.A. de (94) FRESNES, -9 mai 2007 au 4 septembre 2007-, n’aura bénéficié que de cette seule permission de 33 heures, et qu’il a dû attendre son transfert au C.D. de (77) MELUN pour saisir, à nouveau, la Commission d’Application des Peines, et obtenir une permission « normale » de 5 jours, du 22 octobre 2007 à 9 heures au 26 octobre 2007 à 18 heures 30.
Ce qui a retardé d’autant ses cherches d’emploi et de logement tout en le privant de rares et précieux moments d’intimité familiale ou amicale après plus de onze années d’extrêmes souffrances. Il s’est, d’autre part, vu refuser, -sous la pression de la directrice adjointe de la deuxième Division de la M.A. de FRESNES qu’il n’a jamais rencontrée-, une permission de sortir pour se rendre à (33) BORDEAUX sur la tombe de sa sœur cadette récemment décédée ce qui, un an après, le ruine encore moralement et psychologiquement (deuil impossible).
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La question de l’inégalité de traitement des condamnés selon qu’ils se trouvent en maison d’arrêt ou en centre de détention demeure donc intacte (indépendamment de celle de l’encellulement individuel) :
- qu’il s’agisse du délai de détention préalable nécessaire pour bénéficier de permissions de sortir, avec tout ce que cela implique (maintien des liens familiaux et préparation de la réinsertion, par exemple)
- ou qu’il s’agisse de la durée des permissions de sortir, inégalitaire selon qu’un condamné se trouve détenu dans une maison d’arrêt ou bien dans un centre de détention.
La situation de M. KORBER en mai-septembre 2007 constitue, à cet égard, un véritable cas d’école soulignant l’obsolescence et l’absurdité de l’actuelle réglementation : le même détenu, avec exactement le même dossier, ne pouvait plus bénéficier que de 3 jours de permission de sortir alors que, 3 semaines auparavant, à 100 kilomètre de là, il avait le droit de prétendre à 5, 7 ou 10 jours...
Pour aboutir, -dans l’intérêt général-, au but poursuivi, M. François KORBER se trouve conduit à saisir le Juge administratif pour faire constater la parfaite irrégularité de sa présence à la M.A.de FRESNES en mai-septembre 2007, -en violation, notamment, de l’article 717 du Code de procédure pénale-, et faire sanctionner l’inégalité de traitement dont il a été victime, -notamment en ce qui concerne le bénéfice des permissions de sortir-, à raison d’une simple changement d’établissement. Avant de saisir, si nécessaire, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (épuisement des voies de recours internes).
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Sous la pression des normes pénitentiaires européennes, le pouvoir réglementaire vient de faire un pas sur la voie de l’égalité de traitement entre les condamnés détenus en maison d’arrêt et ceux détenus en établissement pour peines.
Le décret n°2007-699 du 3 mai 2007 modifiant le Code de procédure pénale (troisième partie : Décrets) « relatif au renforcement de l’équilibre de la procédure pénale et à la prévention de la délinquance » vient, en effet, d’autoriser les condamnés détenus en maison d’arrêt à téléphoner à leurs proches, à leur avocat, où leurs employeurs potentiels exactement comme peuvent le faire les condamnés exécutant leur peine en établissement pour peines depuis plus de 20 ans (art. D.419-1 à D.419-3 nouveaux du C.P.P.).
Ce décret oublie malheureusement de toiletter et d’égaliser le régime des permissions de sortir pour ces mêmes condamnés en l’alignant sur celui des condamnés détenus dans des établissements pour peines.
Tous les spécialistes de l’univers carcéral sont pourtant unanimes pour prôner l’égalisation des régimes de détention.
Tel était, notamment, le cas du C.O.R. (Comité d’Orientation Restreint de la loi pénitentiaire mis en place par l’actuelle ministre de la Justice, dans ses ORIENTATIONS et PRECONISATIONS rendues publiques en novembre 2007 (pièce n°7, pp.16-19) :
« (...) Le comité d’orientation estime urgent de mettre fin à la dichotomie existant entre les prévenus et condamnés maintenus en maison d’arrêt et les condamnés affectés en établissement pour peines. Celle-ci conduit à voir les détenus présumés innocents faire l’objet d’un régime de détention moins favorable que celui octroyé à certains détenus condamnés. Cette dichotomie est d’autant plus choquante que :
- d’une part, à raison de la coexistence, dans de nombreux établissements, de ces deux populations pénales qu’induit la longueur des délais d’attente imposés aux condamnés avant leur transfèrement en établissement pour peines.
- d’autre part, à raison de l’impossibilité pour les condamnés maintenus en maison d’arrêt de bénéficier du régime et des conditions de détention des condamnés affectés en établissements pour peines.
Doit donc être affirmé le principe général que toute personne incarcérée doit bénéficier du même régime de détention, la restriction de certains droits imposée aux prévenus ne pouvant résulter que d’une décision de l’autorité judiciaire compétente (...) ».
... sur la demande d’annulation
M. François KORBER se trouve par conséquent bien fondé à saisir le Conseil d’Etat d’une demande d’annulation partielle du décret n°75-402 du 23 mai 1975 modifié.
Il sollicite, par ailleurs, dans son RECOURS ADMINISTRATIF PREALABLE la promulgation d’un décret modifiant ainsi les articles D.145 et D.146 du C.P.P. :
- les condamnés peuvent bénéficier des permissions de sortir prévues à l’article D.145 lorsqu’ils ont exécuté le tiers de leur peine, qu’ils soient incarcérés dans une maison d’arrêt ou dans un centre de détention.
- la durée de ces permissions de sortir est identique (trois jours, cinq jours et, une fois par an, dix jours) pour tous les condamnés, qu’ils soient détenus dans les maisons d’arrêt ou dans les centres de détention.
II DISCUSSION
... sur la recevabilité du recours
L’exception d’illégalité, -devant le Juge administratif-, est ouverte sans condition de délai pour les décisions de caractère réglementaire ce qui est le cas du décret n°75-402 du 23 mai 1975.
L’abrogation d’une décision réglementaire est, par ailleurs, toujours possible. Il s’agit là d’une conséquence du principe de mutabilité : activité d’intérêt général, le Service public doit s’adapter afin de satisfaire au mieux cet intérêt.
Lorsque le règlement est illégal, l’administration se trouve, d’ailleurs, tenue de l’abroger dès lors que la demande lui en a été faite par une personne intéressée et ce, que le règlement ait été illégal dès son édiction, ou qu’il le soit devenu à la suite d’un changement de circonstances de droit ou de fait [6].
La Garde des Sceaux, ministre de la Justice, n’ayant pas donné suite son RECOURS ADMINISTRATIF PREALABLE sur ce point non plus, M. François KORBER se trouve bien fondé à saisir le Conseil d’Etat afin de solliciter l’annulation du décret litigieux.
A L’ILLEGALITE EXTERNE
L’article 1er de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 dispose que :
« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune ».
Le Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 intègre ce principe en énonçant que : « le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l’Homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils on été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu’aux droits et devoirs définis dans le Charte de l’environnement de 2004 (...) ».
Quant à l’article 1er de la même Constitution, il proclame que :
« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion (...) ».
Le principe d’égalité devant la loi a donc valeur constitutionnelle.
Il est infiniment supérieur, -dans la hiérarchie des normes-, aux simples décrets ou circulaires, de valeur réglementaire et, notamment, à l’article D. 145 du Code de procédure pénale issu du décret n°75-402 du 23 mai 1975.
Le Conseil d’Etat a fait du principe d’égalité devant la loi un Principe général du Droit [7]. Ce principe d’égalité joue aussi bien en faveur des agents publics que des usagers du service public pénitentiaire. Il ne peut y être dérogé que pour « une nécessité d’intérêt général » en rapport avec l’objet de la loi [8], ce qui n’est, à l’évidence, pas le cas du décret litigieux. Le Conseil Constitutionnel a, quant à lui, érigé le principe d’égalité devant la loi en principe de valeur constitutionnelle [9], placé au cœur de la conception républicaine du pouvoir et de la société.
De ce premier et unique chef, le décret n°75-402 du 23 mai 1975 sera donc annulé en ce qu’il porte une atteinte grave et non justifiée au principe fondamental d’égalité devant la Loi.
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B SUR LES DOMMAGES ET INTERETS
M. François KORBER se trouve bien fondé à saisir le Juge administratif pour faire constater la parfaite irrégularité de sa présence à la M.A. de FRESNES en mai-septembre 2007, -en violation, notamment, de l’article 717 du Code de procédure pénale-, et pour faire sanctionner l’inégalité de traitement dont il a été victime, -notamment en ce qui concerne le bénéfice des permissions de sortir et des conditions de vie quotidienne-, à raison d’un simple changement d’établissement.
Il sera, en effet, fait observer que M. KORBER, -pendant son transit à la M.A. de (94) FRESNES, du 9 mai 2007 au 4 septembre 2007-, n’aura bénéficié que d’une seule permission de sortir de... 33 heures, et qu’il a dû attendre son transfert au C.D. de (77) MELUN pour saisir, à nouveau, la Commission d’Application des Peines, et obtenir une permission normale de 5 jours, du 22 octobre 2007 à 9 heures au 26 octobre 2007 à 18 heures 30.
Ce qui a brisé la dynamique de libération conditionnelle dans laquelle il se trouvait au C.D. de (28) CHÂTEAUDUN, avec de nombreux contacts téléphoniques et des négociations en cours avec divers employeurs potentiels (toutes choses matériellement impossibles à FRESNES : pas de possibilité de téléphoner). Ce transfert a donc retardé d’autant ses recherches d’emploi, tout en le privant de rares et précieux moments d’intimité familiale ou amicale (permissions de sortir) après plus de onze années d’extrêmes souffrances.
A CHÂTEAUDUN, M. François KORBER pouvait espérer concrétiser ses recherches d’emploi dans l’été 2007 et obtenir une libération conditionnelle dès l’automne 2007.
Mais il y a pire, et plus odieux encore.
Sa sœur cadette (50 ans) étant décédée le 15 mai 2007, il en a été informé seulement le 28 juin 2007 par ses parents (BORDEAUX) brouillés avec lui depuis des années. Une permission de sortir a été demandée pour se rendre sur sa tombe et chez le notaire en charge de la succession le 7 août 2007 mais cette permission de sortir, -remarquablement préparée avec une visiteuse de prison et la Conseillère d’Insertion et de Probation en charge du Requérant-, a été refusée sur opposition écrite, non motivée, de la directrice adjointe de la deuxième Division de la M.A. de FRESNES, que le Requérant ne connaît pas et n’a jamais rencontrée. De toute évidence, l’Administration pénitentiaire, -au seul vu du dossier administratif de l’intéressé et de ses engagements judiciaires pour contribuer, malgré elle, à la modernisation de l’Institution-, a saisi, une fois de plus, l’occasion d’exercer une méprisable vengeance.
Les précédentes permissions de sortir accordées à M. François KORBER s’étant, en effet, parfaitement déroulées, il n’existait pas la moindre raison objective de lui refuser cette permission de sortir.
Les conséquences de ce refus ont été d’une extrême gravité :
- cette rencontre avec ses parents, à BORDEAUX, autour d’un drame récent, aurait été l’occasion de renouer des relations normales après que M. KORBER eût obtenu des explications et des informations précises sur la mort de sa sœur au domicile de ses parents.
Bien au contraire, M. François KORBER, un an après, ignore tout des circonstances de ce décès et n’a toujours pas pu obtenir l’accord de ses parents pour se rendre à leur domicile, à l’endroit où sa jeune sœur a agonisé.
- par ailleurs, en l’absence de réunion familiale chez le notaire, tout accord amiable sur le partage de la succession a été rendu impossible, ce qui entraîne des procédures, des frais et des tracas d’autant plus insoutenables que M. KORBER se trouve détenu et privé, en grande partie, de sa liberté d’agir.
Il n’est pas excessif d’écrire que l’existence de M. François KORBER a totalement basculé, en mai 2007, dans un très mauvais sens :
- en raison de son transfert à la M.A. de FRESNES, d’une façon parfaitement illégale et en se trouvant soumis à un régime de détention lui aussi totalement illégal pour une personne « condamnée », avec un faible reliquat de peine.
- en raison de la soumission à un régime de permissions de sortir parfaitement irrégulier pour une personne appartenant à la même catégorie pénale que la sienne. Un lieutenant pénitentiaire de FRESNES lui a, pourtant, fait observer : « Vous devriez être content d’avoir 33 heures. La tradition, veut, en effet, que, -à FRESNES-, les « transitaires » [10] n’obtiennent pas de permissions ! ».
- M. François KORBER attend, d’autre part, des explications de la Garde des Sceaux, ministre de la Justice afin de savoir pourquoi il s’est trouvé traité, pendant 4 mois, comme une « P.S.I. » (« personne sans importance »), enfermée presque tout le temps, avec des promenades sordides dans des cours minuscules, et une promiscuité forcée à deux ou trois dans une cellule de 9 mètres carrés.
Bien que s’étant déclaré « non fumeur » à son arrivée, il a dû systématiquement cohabiter avec des fumeurs pendant 4 mois [11]...
Cette discrimination est parfaitement inacceptable puisque M. François KORBER, -comme n’importe quelle autre personne détenue-, aurait dû bénéficier du « régime V.I.P. » qui recouvre, en réalité, le « régime normal » dont doivent bénéficier tous les détenus de France.
Elle est moralement criminelle puisqu’elle a généré d’indicibles souffrances morales depuis un an, tout en retardant la libération de M. KORBER de près de 10 mois à ce jour.
... sur les dommages et intérêts
Sachant que M. François KORBER vaut, environ, 5 à 7.000 euros mensuels sur le marché du travail, il a donc perdu une somme d’environ 60.000 euros (6.000 euros x 10 mois) depuis le mois d’octobre 2007, date à laquelle il aurait normalement dû être libéré s’il n’avait pas été « baluchonné » [12] à FRESNES.
Il a, par ailleurs, enduré un préjudice moral (détention inutile) équivalent (60.000 euros) du fait de la poursuite, absurde et inutile, de sa détention, mais aussi du refus odieux, -à l’instigation de l’Administration pénitentiaire-, de lui accorder une permission de sortir pour se rendre à BORDEAUX sur la tombe de sa sœur et, subsidiairement, à un rendez-vous chez le notaire en charge de la succession pour y rencontrer ses parents à défaut d’avoir pu les retrouver aux obsèques de sa sœur.
Soit une somme totale de 120.000 euros.
... sur l’offre de transaction
A titre de transaction, M. François KORBER avait sollicité, dans son RECOURS ADMINISTRATIF PREALABLE :
- l’abrogation partielle du décret du décret n°75-402 du 23 mai 1975 modifié, avant le 31 août 2008
- la modification subséquente des articles D. 145 et D.146 du Code de procédure pénale au plus tard le 31 août 2008
- le versement d’une somme de 120.000 euros au mandataire de son choix au plus tard le 31 août 2008 en réparation de son préjudice matériel (60.000 euros) et de son préjudice moral (60.000 euros).
A défaut de réponse de madame la Garde des Sceaux, ministre de la Justice au plus tard le 23 septembre 2008, M. François KORBER se trouvera bien fondé à solliciter du Conseil d’Etat la condamnation de la ministre de la Justice au paiement de la somme de 120.000 euros en réparation de son préjudice moral et matériel.
C SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE L.761 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE
S’agissant d’une seule et même procédure, -bien qu’elle vise deux décrets totalement distincts-, le Requérant ne demanderait pas d’autre somme que celle visée en page 15, au titre du recours contre l’article 1 du décret n°2008-546 du 10 juin 2008, s’il devait maintenir sa REQUÊTE devant le Conseil d’Etat, faute d’accord sur les offres de transaction.
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PAR CES MOTIFS, LE REQUERANT CONCLUT A CE QU’IL PLAISE AU CONSEIL D’ETAT :
... sur le premier recours
Dire et juger que la règle pénitentiaire européenne 18-5 adoptée le 11 janvier 2006 par le comité des ministres européens stipule que : « chaque détenu doit, en principe, être logé pendant la nuit dans une cellule individuelle sauf lorsqu’il est considéré comme préférable pour lui qu’il cohabite avec d’autres détenus » ;
Dire et juger que le Comité d’Orientation Restreint de la loi pénitentiaire préconisait, à l’unanimité, en novembre 2007, « l’instauration d’un régime de détention identique entre prévenus et condamnés maintenus en maison d’arrêt et condamnés en établissements pour peines » en « estimant urgent de mettre fin à la dichotomie existant entre les prévenus et condamnés maintenus en maison d’arrêt et les condamnés affectés en établissements pour peines (...) » ;
Dire et juger que l’article 1 du décret n°2008-546 du 10 juin 2008 relatif au régime de détention, portant création de l’article D. 53-1 du Code de procédure pénale, est contraire au principe constitutionnel d’égalité devant la loi en ce qu’il instaure une discrimination entre les personnes détenues dans les établissements pénitentiaires des Départements et Territoires d’Outre-mer et ceux de la métropole ;
Dire et juger que ledit décret est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qu’il est matériellement inapplicable ;
Dire et juger qu’il est constitutif d’un détournement de pouvoir en ce qu’il n’a d’autre but que de contourner les dispositions des articles 68 de la loi n°2000-516 du 15 juin 2000 et 41 de la loi n°2003-495 du 12 juin 2003 instaurant le droit à l’encellulement individuel des prévenus qui le désirent ;
Dire et juger que les articles 68 de la loi n°2000-516 du 15 juin 2000 et 41 de la loi n°2003-495 du 12 juin 2003 sont eux-mêmes contraires au principe d’égalité devant la loi, en ce qu’ils instaurent un régime de détention privilégié pour les personnes prévenues et l’excluent pour les personnes condamnées à l’intérieur d’une même maison d’arrêt, seules les premières se voyant reconnaître le droit à l’encellulement individuel si elles le désirent.
Dire et juger que l’existence de « Quartiers V.I.P. » (Very Important Persons) dans certains établissements, -et notamment à la maison d’arrêt de La Santé, à Paris-, implique, nécessairement, le traitement de tous les autres détenus comme des P.S.I. (Personnes Sans Importance), souvent entassées à 2, 3, 4 ou 6 personnes dans une cellule de neuf mètres carrés prévue pour une personne ; que cette discrimination dénuée de toute justification déontologique, médicale, humaine ou de sécurité constitue une insupportable atteinte au principe républicain d’égalité de tous les citoyens devant la loi, ainsi que de tous les usagers du service public pénitentiaire ; que tous les détenus, -prévenus ou condamnés-, devront, dans le délai de : un an à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir, bénéficier des mêmes conditions de détention que les personnes actuellement détenues au Quartier V.I.P. de la M.A. de La Santé ; que ce délai sera assorti d’une astreinte de 1.000 euros par jour de retard ; que cette décision emportera inéluctablement l’application du principe du numerus clausus par la Garde des Sceaux, ministre de la Justice,
En conséquence, annuler l’article 1 du décret n°2008-546 du 10 juin 2008 relatif au régime de détention, portant création de l’article D. 53-1 du Code de procédure,
Allouer une somme de 20.000 euros au Requérant en réparation de son préjudice moral,
Condamner la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, au paiement d’une somme de 5.000 euros au Conseil du Requérant sur le fondement de l’article L.761-1 du Code de Justice administrative, cette somme correspondant aux frais et honoraires qu’il aurait demandés à son client si ce dernier n’avait pas bénéficié de l’aide juridictionnelle pour mener la présente procédure devant la Haute Juridiction.
... sur le second recours
Dire et juger que le décret n°75-402 du 23 mai 1975 modifié par le décret n°85-836 du 6 août 1985 et par le décret n°2004-1364 du 13 décembre 2004, portant création des articles D. 145 et D. 146 du Code de procédure pénale, relatif au régime des permissions de sortir, est contraire au principe d’égalité devant la loi ; qu’il instaure, en effet, une discrimination inacceptable entre les condamnés détenus en maison d’arrêt et ceux détenus en établissements pour peine ;
Dire et juger que les permissions de sortir constituent un élément fondamental pour favoriser le maintien des liens familiaux et parentaux, limiter les effets destructeurs de la détention, permettre une recherche d’emploi ou de logement, et, -par conséquent-, préparer la réinsertion d’un condamné quel qu’il soit ;
Dire et juger que tous les condamnés peuvent bénéficier des permissions de sortir prévues à l’article D.145 et D.146 du Code de procédure pénale lorsqu’ils ont exécuté le tiers de leur peine, sauf en mesure individuelle de sûreté ; que la durée de ces permissions de sortir est identique (trois jours, cinq jours et, une fois par an, dix jours) pour tous les condamnés remplissant les conditions légales d’attribution de ces permissions de sortir ;
Dire et juger que M. François KORBER s’est trouvé illégalement transféré et affecté à la M.A. de FRESNES du 9 mai 2007 au 4 septembre 2007, en violation, notamment, de l’article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 et de l’article 717 du Code de procédure pénale ;
Que le préjudice qui a résulté de cette illégalité fautive a été considérable pour lui, le privant, de facto, de permissions de sortir, et retardant sa libération conditionnelle de près de 10 à 12 mois, tout en générant de terribles souffrances liées, notamment, au refus d’une permission de sortir pour le laisser se rendre sur la tombe de sa sœur cadette décédée le 15 mai 2007 à BORDEAUX ; que le traitement subi est constitutif d’un traitement inhumain et dégradant ; que le Requérant a été contraint de cohabiter, pendant 4 mois, avec un ou deux codétenus fumeurs dans une cellule de 9 mètres carrés prévue pour une seule personne alors qu’il est non-fumeur déclaré ; qu’il n’existait aucun motif pour que M. François KORBER fût traité, à l’instar de milliers d’autres détenus, comme « une personne sans importance », tandis que certains privilégiés, bénéficiaient, au même moment, d’un régime de détention réservé à de prétendues « very important persons » ; que le préjudice moral et matériel résultant de ce transfert et de cette affectation dans une maison d’arrêt peut être estimé à la somme de 120.000 euros.
En conséquence, annuler les dispositions du décret n°75-402 du 23 mai 1975 modifié par le décret n°85-836 du 6 août 1985 et par le décret n°2004-1364 du 13 décembre 2004 qui instaurent une discrimination au regard du régime des permissions de sortir entre les personnes condamnées,
Allouer une somme de 120.000 euros au Requérant en réparation de son préjudice moral et matériel ;
Condamner la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, au paiement d’une somme de 5.000 euros au Conseil du Requérant sur le fondement de l’article L.761-1 du Code de Justice administrative, cette somme correspondant aux frais et honoraires qu’il aurait demandés à son client si ce dernier n’avait pas bénéficié de l’aide juridictionnelle pour mener la présente procédure devant la Haute Juridiction, cette somme étant confondue, le cas échéant, avec celle allouée au titre du premier recours.
Le jeudi 7 août 2008
S.T.R.
1. Décret n°2008-546 du 10 juin 2008 relatif au régime de détention et modifiant le Code de procédure pénale
2. Article du « Canard Enchaîné » du mercredi 30 janvier 2008 relatif aux mésaventures carcérales de M. KORBER
3. Propositions en faveur du numerus clausus (« Libération » - lundi 5 mai 2008)
4. Décret n°75-402 du 23 mai 1975 relatif au régime des permissions de sortir
5. Mémoire de M. François KORBER devant la Cour de Cassation au soutien d’un pourvoi formé contre les articles D.145 et D.146 du Code de procédure pénale (pourvoi n°Z07-86.070 F-D)
6. Arrêt n°1539 de la Chambre criminelle en date du 12 mars 2008 déclarant le pourvoi sans objet
7. Orientations et préconisations du C.O.R. (Comité d’Orientation Restreint de la loi pénitentiaire).
8. Article du quotidien « Le Parisien » sur le Quartier V.I.P. à la Maison d’arrêt de la Santé
9. Lettre d’accompagnement du RECOURS ADMINISTRATIF PREALABLE adressé à la Garde des Sceaux le mercredi 30 juillet et preuve de dépôt de la lettre recommandée
10. RECOURS ADMINISTRATIF PREALABLE adressé à la ministre de la Justice
11. Accusé de réception du R.A.P. par le Directeur de Cabinet de la Garde des Sceaux le mercredi 30 juillet 2008
12. Article du quotidien « Le Monde » en date du jeudi 31 juillet 2008