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Sofian, détenu à Villepinte

Mise en ligne : 18 juillet 2002

Dernière modification : 15 mai 2005

Texte de l'article :

Villepinte, le 28 juin 2002

A tou(te)s les snipers (lire SNAYPER pour Olivier) de l’envolée, bonjour.

Avant tout, une pensée pour Fathi (compagnon de galère sur les miasmes morbides de l’océan déchaîné de la Pestinentiaire). Courage Fathi, je sais que tu en as. Garde le moral au zénith et sache que ton poto pense à toi, malgré la soixantaine de kilomètres qui nous séparent. Faut’q’ça cesse ! Pendant que j’y suis dédicace à tous les prisonnier(e)s d’ici et d’ailleurs et particulièrement à ceux et à celles qui luttent malgré l’adversité et le rapport de force largement en défaveur des néo-bagnards de la République.

Salut tigresque à la féline des MAF André. Tchin Tchin pour la conditionnelle. Salutations à Francine. Ca fait plaisir de réentendre ta voix cash ponctuée de quelques petits dos d’ânes verbaux et quelques grossièretés qui dans ta bouche passent pour des épices d’outremer qui relèvent un peu l’émission (je ne suis pas amateur de grossièretés mais j’aime bien les épices). Pour pas faire de jaloux(ses), salutations rugissantes de la cage de l’oncle Tam...arin à toutes et à tous.

J’ai écouté votre petite discussion à bâtons rompus avec les guerrilléritos del 20ème. Ca fait plaisir de voir que les jeunes aient plus conscience de l’enjeu politico-social de ce début de millénaire. J’espère que leur combat fera beaucoup d’émules et rendra les cerbères de l’Intérieur comme des mules, car comme disait Jean Cocteau « la jeunesse sait ce qu’elle ne veut pas avant de savoir ce qu’elle veut. » et sachez qu’« un homme pur doit être libre et suspect » [Jean Cocteau]. Je suis heureux de savoir que la contestation du système inique existe encore et s’affirme dans la population jeune malgré le bighothérisation [excusez ce néologisme barbare, ça fera un bon exercice de prononciation pour Olivier qui a parfois quelques difficultés avec la langue de Shakespeare].

Je voulais réagir par rapport à la tension entre Ban Public [rappeler les coordonnées, ça serait cool] et l’OIP section française. Je ne connais pas suffisamment l’OIP pour pouvoir les critiquer de façon véhémente mais comme on dit, c’est aux actes que l’on juge les gens. En tant que prisonnier, je suis exaspéré de voir une officine de l’Etat français (si j’en juge à la ligne rédactionnelle de leur magasine Dedans, dehors) faire de l’argent sur le dos des prisonniers (le prix de leur guide n’est pas donné) et ne pas tolérer qu’une association qu’ils ont qualifié d’extrémiste (si je ne m’abuse) puisse publier en ligne de larges extraits de leur ouvrage qui, certes, a demandé un travail appréciable pour sa réalisation et un coût non négligeable pour sa publication si j’en crois la finition du livre mais qui a certainement demandé la collaboration de plusieurs dizaines (voire centaines) de détenus pour sa concrétisation. Ca me fait vomir qu’une telle organisation para-goubvernementale bloque les initiatives en faveur des prisonniers sous la morale des droits bafoués du copyright. Le gouvernement met des informations en masse sur ses divers sites Internet (http://www.admifrance.net/, ... ) et une organisation telle que l’OIP menace de poursuites judiciaires une association au service des damnés de l’Etat français. Monsieur Thierry Levy, si vous m’entendez, vous devriez avoir honte de censurer de fait une association qui contrairement à vous fait des efforts réels pour l’amélioration des conditions des oubliés de la République (de la France de l’underground si l’on devait trouvé une expression dans la droite ligne de la logique de France d’en haut / France d’en bas de Rafarin). Je m’étonne d’ailleurs de cette initiative sachant que les prisonnier(e)s n’ont pas accès à l’Internet, à ma connaissance. Je me demande si vous avez publié le guide du prisonnier (vous avez oublié d’ajouter au titre et de la prisonnière car il y en a malheureusement dans un pays qui se targue d’être le berceau des droits de l’Homme et qui fait sans cesse la morale aux pays dits sous-développés où les femmes sont très rares en prisons) pour les prisonnier(e)s ou si c’est un ouvrage dédié à l’opinion publique pour que l’on puisse voir sur les étals et que le citoyen beta croit que la France est respectueuse de ses exilés intra-muros. Messieurs de Ban Public, je vous exhorte à faire des prisonniers on-line et quand vos finances le permettront une version papier pour torpiller l’initiative intéressée et lucrative de l’OIP qui, comme son nom, l’indique observe et persiste à observer lorsque les prisonnier(e)s périssent et dépérissent dans votre silence complice du pouvoir, interrompu par des bruits ostentatoires pour vous donner un alibi et montrer au dedans et au dehors que vous agissez. Votre masque est tombé. Vous me faites penser à ces ONG qui n’ont de NG que le nom qui prétendent aider les nécessiteux(ses) et qui ne font que récupérer la misère du monde pour redorer le blason de leur pseudo humanisme.

Monsieur Thierry Levy, je conclurai ce billet d’humeur par cette citation de Nadhal Grieg. « Un humaniste est un homme qui répugne l’injustice mais qui refuse de se battre pour ce qui est juste. ».

A bon entendeur salut rugissant de dégoût pour ces mesquineries grotesques.

A l’occasion, salutation à Jérôme Erbin et Nicolas.
Salut à tous.

Sofian