Et Caïn, répondit au Seigneur : « Ce châtiment est au dessus de mes forces, je dois me cacher loin de toi. Je serais un errant un vagabond et le premier venu me tuera. » Et le seigneur mit un signe sur Caïn pour le préserver d’être tué par le premier venu.
Lui qui a tué son frère, a été pardonné par la justice divine, alors que celui qui a aidé son frère, au delà de la gravité de son acte, doit être exterminé par la justice des hommes au détriment du droit. Lorsque la vengeance se substitue à la punition, elle anhile toute forme de rédemption. Ce dont, pas même les victimes, brandies comme alibi sécuritaire, ne profitent...
Maman je ne veux pas crever ici !
C’est avec cette courte phrase, entre hoquets de colère, de désespoir et de panique, que Cyril, mon fils, haletant m’a interpellé au téléphone il y a quelques jours. Comme si, à l’issue d’une traque sanglante, j’étais son ultime planche de salut.
Au-delà du magma émotionnel et affectif, j’ai pu comprendre, avant que la communication ne soit coupée, que, l’administration pénitentiaire, dans un grand élan magnanime, venait de l’empêcher de faire appel sur une décision arbitraire pour laquelle il n’avait que 24 h pour le faire. Aujourd’hui, même le plus élémentaire des droits n’est plus plus accessible. Le mur se rapproche à une vitesse vertigineuse...
Dans un récent texte je demandais : « faut il que je me suicide devant une caméra pour tenter de sauver la vie de mon fils et, avec un peu de chance, celle de quelques autres » ?
Aujourd’hui je redemande si dois je réellement passer à l’acte, juste avant que ne soient votés les textes sur les condition pénitentiaire, pour tenter de sauver mon garçon. Qu’il puisse sortir debout et vivant de cet univers qui, jamais, ne rendra les hommes meilleurs. Surtout pas en l’état actuel. Apparemment, il n’y a que cela qui fonctionne dans cette société entièrement aliénée à l’image et au profit et dans laquelle, les recours légaux sont illusoires. Plus de six ans que je les pratique sans discontinuer.
Même le plus grand des colosses s’érode, sous les assauts du vain...
Les murs suintent la vie qui ne se manifeste pas. Dans l’espace clos de béton, l’ennui s’affine en fûts de chaînes jusqu’à la dépression. Les heures s’étirent longues, creuses, douloureuses, et sans fin. Pas de réintégration ni de réinsertion possible, c’est une grande illusion.
Tandis que la sécurité dépose devant chaque tombe cellule, un gros bouquet de leurres dans un fracas de clés, à chaque pas que fait l’humanité sur la route du progrès, la régression se densifie, alors qu’entre les êtres, la solidarité se délite. Et, tant vantés les droits de l’homme, infectés de panaris géants, laissent entrevoir la ligne brisée de l’horizon. Funestes complications.
Et, d’états généraux sur la condition pénitentiaire en rapports accablants, même les associations ne peuvent contenir l’abominable et inhumaine infection. Elle continue de déverser son pus acide sur la planète tout en bourrant ses vides démocratiques qui ne se remplissent pas. Dix pas en arrière pour un pas un avant.
Pendant ce temps, la dictature dépose son grand filet sécuritaire sur les épaules du monde. Mille failles à l’envers pour une maille à l’endroit. Et, tout au bout du compte, détricoter l’humain.
Plus de peine de mort prononcée, que des peines à vie qui, planchers ou plafonds, sentent déjà le sapin. Effroyables conditions où des hommes entassés à plusieurs dans quelques mètres carrés, subissent des humiliations qui sont devenues la règle et la torture la norme. L’égalité des chances n’existe que dans la gémellité du sinistre résultat. On ne fait pas subir aux animaux ce que l’on fait subir aux hommes, sinon ce serait une véritable levée de boucliers, dans le camp de leurs associations de protection aux 30 000000 millions d’amis.
L’espoir, lui, a disséminé ses pièges un peu partout, là où, toutes les peines perdues se mêlent.
Etre seul à plusieurs, au coeur d’une fataliste cohésion. Jamais les hommes captifs n’ont été aussi proches de l’implosion. La fuite à n’importe quel prix. Shit, cachets, suicide ou évasion. Tous veulent saisir la corde.
Que faire ? Cautionner l’hermétique et ses pratiques ou bien lâcher l’opaque pour l’éthique ?
Refuser ce système où l’arbitraire bâtit autour du droit, de l’humain et des libertés une grande muraille de chaînes, comme une huitième merveille du monde, en y ajoutant à l’infini des maillons.
En finir avec l’humanité visqueuse qui épouse tous les contours de la sécurité et tous nos à peu près. Et, qu’enfin nos consciences, accouchent de paires d’yeux bien ouverts, à la vision acérée, mais aussi d’élans solidaires qui se cabreraient devant l’ignoble, l’inacceptable et l’inhumain. Larme à l’œil ou l’œil alarme ?
Ah utopie quand tu nous tiens !