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A11 La suspension et le fractionnement de peine (207-217)

Publié le mardi 8 avril 2008 | http://prison.rezo.net/a11-la-suspension-et-le/

La suspension et le fractionnement de peine permettent une réelle souplesse dans l’exécution de la peine, lorsque le condamné doit faire face à des problèmes familiaux, médicaux ou professionnels importants. La peine peut être suspendue pendant un temps ou exécutée par fractions, ce qui permet d’alterner les périodes dedans et dehors. Ces mesures restent, cependant, très peu utilisées, notamment en raison de critères d’octroi trop restrictifs. Aucune statistique les concernant n’est, pas ailleurs, diffusée par l’administration pénitentiaire.

207 Que sont la suspension et le fractionnement de peine ?
Les mesures de suspension de peine et le fractionnement de peine sont des modalités d’exécution de la peine privative de liberté, qui permettent à un condamné incarcéré de différer l’accomplissement d’une partie de la peine d’emprisonnement. La suspension lui permet de reporter l’exécution de la peine, donc de quitter la prison pendant une période de temps. Le fractionnement lui permet d’effectuer la peine sous forme de fractions d’une durée minimale de deux jours, donc de ne pas rester en permanence en prison.

208 Pour quels motifs peut-on bénéficier d’une suspension ou d’un fractionnement de peine ?
Les mesures de suspension de peine et de fractionnement de peine ne sont accordées à un condamné que pour un « motif grave d’ordre médical, familial, professionnel ou social ». Ces motifs ne sont pas définis par la loi, mais laissés à l’appréciation de la juridiction compétente. Les magistrats peuvent ainsi permettre à une personne condamnée d’assurer la charge d’un enfant en cas de maladie du conjoint, de rechercher un emploi, un stage ou un logement, de ne pas interrompre un travail ou une formation, d’établir des documents administratifs nécessaires ou de se constituer une couverture sociale, etc.

209 Qui peut bénéficier d’une suspension ou d’un fractionnement de peine ?
Les mesures de suspension et de fractionnement de la peine ne concernent que les personnes qui, en matière correctionnelle, font l’objet d’une condamnation à une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à un an, ou dont le temps de détention restant à subir est inférieur ou égal à un an. Est ainsi exclue du bénéfice de ces mesures toute personne condamnée par une cour d’assises, même si le temps de détention qu’il lui reste à effectuer n’excède pas un an. Aucune mesure de suspension ou de fractionnement de peine ne peut être accordée à un condamné soumis à une période de sûreté, tant que celle-ci n’est pas arrivée à son terme. Si la personne a été condamnée pour une infraction d’ordre sexuel mentionnée à l’article 706-47 du Code de procédure pénale, une expertise psychiatrique doit être réalisée préalablement à l’octroi des mesures (Q.114). Les mesures de suspension et de fractionnement de la peine sont applicables à un mineur.

210 Quelle est la durée maximale de la suspension ou du fractionnement de peine ?
Les périodes de suspension ou les fractionnements de peine ne peuvent être d’une durée supérieure à trois ans. Cela signifie que l’addition des périodes d’emprisonnement et des périodes pendant lesquelles le condamné n’est pas incarcéré ne doit pas dépasser une durée totale de trois ans. Pendant les périodes d’interruption de la détention, le condamné est libre. A son retour en prison, il reprend l’exécution de sa peine là où elle avait été interrompue.

211 Qui décide de la suspension ou du fractionnement de peine ?
La suspension de peine ne peut pas être prononcée au stade de la condamnation. En revanche, le fractionnement de peine peut être décidé par la juridiction de jugement, si la peine d’emprisonnement infligée au condamné est d’une durée inférieure ou égale à une année. Il appartient, ensuite, au JAP (juge de l’application des peines) de fixer, dans un délai de quatre mois, par une ordonnance non-susceptible de recours, les modalités de l’exécution de la mesure. Le JAP est compétent pour décider d’une suspension ou d’un fractionnement de peine à l’égard d’une personne condamnée à une ou plusieurs peines d’emprisonnement dont le total n’excède pas un an, ou qui n’a plus à subir qu’une durée de détention inférieure ou égale à un an (compte tenu de la détention provisoire effectuée). Le JAP peut décider d’une suspension de peine avant l’incarcération du condamné (Q.100). Lorsque le magistrat se prononce au cours de l’exécution de la peine, il peut être saisi par le condamné incarcéré dans les conditions habituelles (Q.108). Le JAP statue, en principe, après un débat contradictoire, au cours duquel sont entendues les réquisitions du procureur, les observations du condamné et celles, le cas échéant, de son avocat. Lorsque le condamné est mineur, les fonctions du JAP sont exercées par le juge des enfants.

212 Un recours est-il possible contre un refus de suspension de peine ou de fractionnement de peine ?
Le condamné, comme le procureur, peut contester une décision de refus d’une mesure de suspension ou de fractionnement de peine. Cet appel doit se faire dans un délai de dix jours à compter de la notification de la décision (Q.123). En cas d’appel du condamné, le parquet dispose d’un délai supplémentaire de cinq jours pour faire à son retour (Q.124). Lorsque l’appel du procureur intervient dans les vingt-quatre heures suivant la notification, l’exécution de la mesure est suspendue (Q.128). L’appel est porté devant la chambre de l’application des peines de la cour d’appel, qui statue après un débat contradictoire, au cours duquel sont entendues les réquisitions du procureur et les observations de l’avocat du condamné. Sauf décision contraire de la chambre, le condamné n’est pas entendu. Si la chambre confirme le jugement refusant d’accorder cet aménagement de peine, elle peut fixer un délai pendant lequel toute nouvelle demande sera irrecevable. Ce délai ne peut excéder ni le tiers du temps de détention restant à subir ni trois années. La décision de la chambre de l’application des peines peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation dans les cinq jours suivant sa notification (Q.126 et 127).

213 A quelles contraintes un condamné bénéficiant d’une suspension ou d’un fractionnement de peine est-il soumis ?
Au cours de l’exécution de la mesure de suspension ou de fractionnement de peine, le condamné fait l’objet des mesures de contrôle de la part du JAP et du SPIP (service pénitentiaire d’insertion et de probation) dans les conditions habituelles relatives à l’octroi d’un aménagement de peine (Q.131). Il doit répondre aux convocations des autorités publiques désignées par le JAP. Il peut s’agir du SPIP, mais également des services de police ou de gendarmerie. Le JAP peut, d’autre part, prononcer une ou plusieurs obligations particulières prévues dans le cadre des aménagements de peine (Q.132). Ces obligations peuvent être modifiées en cours d’exécution de la mesure (Q.133). Les décisions modifiant ou signifiant un refus de modifier ces obligations peuvent faire l’objet d’un appel dans un délai de vingt-quatre heures suivant leur notification (Q.123 et 125). Pendant la suspension ou le fractionnement de peine, le condamné doit faire preuve de « bonne conduite ». En cas de non-respect de ces contraintes par le condamné, le JAP peut décerner un mandat d’amener, afin que le condamné se présente devant lui, ou un mandat d’arrêt, s’il est en fuite ou se trouve à l’étranger (Q.137 et 138).

214 Quels sont les motifs de retrait d’une suspension ou d’un fractionnement de peine ?
Au cours de la suspension ou du fractionnement de peine, toute insoumission aux mesures de contrôle, tout manquement aux obligations particulières et toute « mauvaise conduite » de la part du condamné peuvent donner lieu au retrait de la mesure. Les agents du SPIP, ou le chef d’établissement, doivent adresser un rapport d’incident au JAP à chaque manquement constaté. Le JAP peut, en outre, retirer le bénéfice de la suspension ou du fractionnement de peine, si le condamné refuse une modification des conditions d’exécution de la mesure que le magistrat estime nécessaire ou s’il demande, de lui-même, l’arrêt de la mesure. Par ailleurs, la commission d’une nouvelle infraction pénale ou d’une évasion peut entraîner le retrait de la mesure. La procédure de retrait d’une mesure de suspension ou de fractionnement de peine est identique à celle qui a présidé à son octroi (Q.211). De même, la procédure d’appel de la décision de retrait est identique à celle concernant une décision de refus d’octroi (Q.212). La décision de retrait n’est jamais automatique, même en cas de nouvelle condamnation. Il s’agit simplement d’une faculté laissée à l’appréciation de l’autorité compétente.

215 Le condamné peut-il être réintégré en détention avant le retrait d’une suspension ou d’un fractionnement de peine ?
Le JAP peut décider, après avoir recueilli l’avis du procureur, l’incarcération provisoire du condamné dans l’attente de l’audience qui décidera du retrait de la mesure de suspension ou de fractionnement de peine. Il peut décerner un mandat d’amener, afin que le condamné soit présenté devant lui, ou un mandat d’arrêt, s’il est en fuite ou se trouve à l’étranger (Q.137 et 138). Le débat contradictoire préalable au retrait éventuel du bénéfice de la mesure doit intervenir dans les quinze jours suivant l’incarcération, faute de quoi le condamné est remis en liberté, sauf s’il est détenu pour une autre cause.

216 Quelles sont les conséquences du retrait d’une mesure de suspension ou de fractionnement de peine ?
Lorsqu’il est mis fin à la mesure, le condamné est incarcéré. La durée de l’emprisonnement restant à subir est précisée dans la décision du JAP. Le temps passé en suspension ou en fractionnement de peine est pris en compte, de telle sorte que le condamné ne devra pas exécuter en détention la partie de la peine qu’il a déjà effectuée sous ce régime. Par ailleurs, si le retrait est consécutif à la commission d’une nouvelle infraction, la juridiction de jugement peut décider de retirer tout ou partie de l’ensemble des réductions de peine accordées au cours de la détention (Q.49).

217 Dans quels cas le condamné bénéficiant d’une suspension ou d’un fractionnement de peine est-il considéré comme un évadé ?
S’il ne réintègre pas l’établissement pénitentiaire à l’issue de la période de suspension ou de fractionnement de peine, le condamné est considéré comme évadé. Si le condamné est en fuite, le JAP peut délivrer un mandat d’arrêt qui suspend l’exécution de la mesure jusqu’à son arrestation. Dans tous les cas, le condamné s’expose à une condamnation pour délit d’évasion passible de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende. Cette peine se cumule avec celle qu’il avait à exécuter et au titre de laquelle il avait été placé en suspension ou en fractionnement d peine, sans qu’une confusion des condamnations ne soit possible. Par ailleurs, la part disponible du compte nominatif d’une personne qui s’est évadée est affectée d’office à l’indemnisation des victimes. Le reliquat est acquis à l’Etat, sauf si le directeur régional des services pénitentiaires du lieu où s’est produite l’évasion ordonne qu’il soit rétabli, en tout ou partie, au profit du détenu, lorsque ce dernier a été repris.

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