Publié le vendredi 20 décembre 2002 | http://prison.rezo.net/0-introduction-la-prison-cette/ « Le but et la justification des peines et mesures privatives de liberté sont, en définitive, de protéger la société contre le crime. Un but tel ne sera atteint que si la période de privation de liberté est mise à profit pour obtenir dans toute la mesure du possible que le délinquant une fois libéré soit non seulement désireux mais aussi capable de vivre en respectant la loi et de subvenir à ses besoins. »
« La prison, cette région la plus sombre de l’appareil judiciaire » est pourtant une institution dont tout le monde connaît l’existence. Elle fait d’ailleurs tellement partie de notre corps social qu’on pourrait la croire éternelle et immuable. Ce serait une erreur, car non seulement la prison –au sens où on la conçoit aujourd’hui- est une institution « moderne », mais elle n’a cessé d’être, depuis ses origines, repensée, contestée, réformée, remaniée, aménagée. Le milieu associatif, très présent depuis une vingtaine d’années, n’est pas étranger à cette évolution. Conçue à l’origine pour enfermer des individus dans l’attente de châtiments aussi divers qu’effrayants, l’idée de pénitence se développa peu à peu, l’amendement permettant le rachat de ses fautes. Cette conception naquit sous l’influence de l’Eglise qui s’est très tôt intéressée à la prison. La charité religieuse vis-à-vis des détenus, qui consistait en grande partie à des visites aux chrétiens emprisonnés, s’est rapidement développée à travers les compagnies d’assistance aux prisonniers pauvres. Bien évidemment, on ne peut pas parler, à l’époque, d’associations au sens où on l’entend aujourd’hui. De l’Antiquité à la Révolution, l’histoire des regroupements d’entraide est celle d’une interminable coercition. Charlemagne interdit les confréries au IXe siècle ; Philippe Le Bel prohibe en 1305 toute association de plus de cinq personnes ; en 1539, l’ordonnance de Villers-cotterêts pose les bases juridiques de la répression anti-associative ; le code Michau de 1629 défend à tous les sujets du Roi de constituer des ligues ou des associations. Bien que la Révolution constitue un tournant pour le système pénitentiaire, dans la mesure où la peine se cantonne désormais à l’emprisonnement, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ignore la liberté d’association et omet sciemment le droit de s’associer : « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. » La nation souveraine est donc la seule association légitime. L’immédiat après-guerre est, en revanche, confronté à une surpopulation pénale jusqu’alors inconnue (plus de 63 000 personnes au plus fort de l’épuration). Cette période est marquée par une audace et une générosité inégalées. La réforme pénitentiaire de 1945 repose en effet sur l’idée d’amendement et de reclassement du condamné. Pourtant, sur le fond, la situation carcérale va rester « moyenâgeuse » au regard de l’évolution des mœurs. Les années 70 sont marquées par les grandes révoltes de prisonniers, par l’apparition de mouvements en faveur des détenus, ainsi que part la reconnaissance de la valeur constitutionnelle de la liberté d’association (Conseil Constitutionnel, 16 juillet 1971). Après cette longue évolution du mouvement associatif, qui s’est largement radicalisé dans les années 70 (1ère partie), la prison s’est enfin ouverte sur l’extérieur.
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