Le placement à l’isolement
Textes sources :
Décret modifiant le CPP et relatif à l’organisation et au fonctionnement des établissements pénitentiaires.
Art. 145-4 du CPP. Art. D. 283-1 et D. 283-2 du CPP. Art. D. 381 et D. 384-1 du CPP.
Circulaire NOR : JUSE9840005C du 8 décembre 1998 portant application du décret modifiant le CPP.
Circulaire DGS/DAP n° 98/538 du 21 août 1998 relative à la lutte contre la tuberculose en milieu pénitentiaire.
Circulaire DAP/DPJJ du 4 février 1994 relative au régime de détention des détenus mineurs.
Texte Abrogé :
circulaire NOR : JUSE9140047C du 12 juillet 1991 relative au placement à l’isolement.
Textes modifiés :
Note garde des sceaux du 11 juin 1982 relative aux mesures de sécurité dans les établissements pénitentiaires.
Note GA du 6 janvier 1995 rappelant la circulaire AP 86-24 G1 du 13 octobre 1986 relative au refus d’aliments solides ou liquides.
SOMMAIRE
Introduction
1. Les motifs du placement à l’isolement
1.1 La mise à l’isolement ne constitue pas une sanction disciplinaire
1.2 L’examen préalable d’une affectation en cellule individuelle
1.3 Le placement au quartier d’isolement sur prescription judiciaire
1.4 Le placement au quartier d’isolement par mesure de précaution ou de sécurité
2. La procédure de mise à l’isolement
2.1 La décision initiale
2.2 Conservation et publicité de la décision
2.3 La levée de la mesure
2.4 La prolongation
2.5 La prolongation au-delà d’un an
3. Les modalités de calcul de la période d’isolement
3.1 Principe
3.2 Dans le cas d’une nouvelle mesure de placement à l’isolement
3.3 La fiche de liaison
4. Le régime de l’isolement
4.1 Les recommandations européennes et nationales
4.2 La mise en oeuvre du régime ordinaire de détention
4.3 Le règlement intérieur
4.4 L’observation et le dialogue avec les détenus isolés
4.5 Le registre des mesures d’isolement
5. Le rôle du médecin
5.1 L’organisation obligatoire d’un suivi médical
5.2 L’avis médical en matière d’isolement
5.3 Conséquences de l’avis du médecin
6. Requêtes et recours du détenu placé à l’isolement
6.1 Les observations auprès du juge de l’application des peines
6.2 Requêtes auprès des autorités judiciaires et administratives
6.3 Le recours gracieux
6.4 Le recours hiérarchique
7. Annexes
POUR ATTRIBUTION
Mesdames et Messieurs les Directeurs régionaux des services pénitentiaires, Directeurs et Chefs d’établissements pénitentiaires, Premiers Présidents, Procureurs Généraux , Présidents, Procureurs de la République ,Juges d’instruction, Juges d’applications des peines
- 14 décembre 1998 -
INTRODUCTION
La modification de l’article D. 283-1 du CPP opérée par le décret relatif à l’organisation et au fonctionnement des établissements pénitentiaires réforme la procédure et le contrôle de la durée de l’isolement. Il m’est apparu indispensable de diffuser des instructions pour accompagner la mise en oeuvre de cette réforme et conforter la place du chef d’établissement, responsable de l’usage de cette mesure comme instrument de gestion de la détention.
Cela entraîne l’obligation de définir rigoureusement les motifs d’un placement à l’isolement, d’être attentif aux délais de notification et aux modalités de calcul des périodes d’isolement, de respecter le principe selon lequel les détenus isolés sont soumis au régime ordinaire de détention.
Ces orientations viennent également corroborer l’évolution récente de la jurisprudence administrative et européenne et les recommandations exprimées par différentes instances internationales : Comité européen de prévention de la torture ou des traitements inhumains et dégradants, Comité des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies.
I. - LES MOTIFS DU PLACEMENT A L’ISOLEMENT
1. La mise à l’isolement ne constitue pas une sanction disciplinaire
La mesure d’isolement, mesure de précaution, ne peut pas être utilisée à titre de sanction disciplinaire. Les motifs de la décision de placement à l’isolement doivent être distincts de ceux de la sanction disciplinaire qui aura pu éventuellement la précéder.
Le quartier d’isolement et le quartier disciplinaire doivent être, dans la mesure du possible, des quartiers nettement distincts. Les cellules du quartier d’isolement doivent recevoir un ameublement identique à celui des cellules ordinaires.
2. L’examen préalable d’une affectation en cellule individuelle
Toute nécessité de séparation d’un détenu du reste de la population pénale ne justifie pas le placement à l’isolement.
Conformément à la compétence que lui confère l’article D. 91 du CPP, le chef d’établissement doit porter une attention particulière à l’affectation de chaque détenu afin d’éviter les regroupements susceptibles d’engendrer des conflits.
Dans la mesure où la structure de l’établissement le permet, le chef d’établissement privilégie le placement en cellule individuelle afin d’opérer une séparation effective entre codétenus.
En outre, le chef d’établissement a l’obligation d’affecter un détenu en cellule individuelle afin de répondre à une prescription médicale, prise en application de l’art. D. 384-1 du CPP, recommandant un isolement sanitaire.
Il s’agit du cas où, par mesure de précaution sanitaire répondant à un objectif de santé publique, le médecin prescrit l’affectation en cellule individuelle d’un détenu suspecté d’être porteur d’une maladie contagieuse (c’est principalement l’hypothèse de la suspicion de tuberculose).
Le chef d’établissement décide dans quelles conditions le détenu contagieux doit être éloigné du régime collectif. A cet effet, il examine tous les moyens dont il dispose pour mettre en oeuvre cet éloignement sans nécessairement recourir à la mise à l’isolement.
En effet, au regard de la durée relativement courte du traitement anticontagieux et compte tenu des précautions sanitaires à développer, le quartier d’isolement apparaît particulièrement inadapté à ce cas de figure. Toutes les modalités d’affectation en cellule individuelle doivent être étudiées : une cellule individuelle à proximité de la zone médicale ou d’un poste de contrôle peut être plus appropriée.
Si, malgré tout, pour des raisons de sécurité plus spécifiquement pénitentiaire, le placement au quartier d’isolement ne peut être évité, le chef d’établissement doit suivre la procédure prescrite en joignant copie de l’avis médical prescrivant les mesures sanitaires à l’imprimé de décision de mise à l’isolement. Il doit demeurer attentif à justifier dans sa motivation les impératifs de sécurité imposant le recours au placement au quartier d’isolement.
Les précautions sanitaires et respiratoires recommandées par le médecin doivent être appliquées au quartier d’isolement.
3. Le placement au quartier d’isolement sur prescription judiciaire
3.1. Les mesures de séparation et le placement au quartier d’isolement
Les autorités judiciaires énumérées à l’article D. 55 du CPP, et essentiellement le magistrat instructeur, communiquent au chef d’établissement, par l’intermédiaire de la notice individuelle prévue à l’article D. 32-1, toutes instructions relatives à la détention provisoire exécutée en maison d’arrêt. Ces instructions peuvent recommander des mesures particulières de séparation entre codétenus mais n’impliquent pas nécessairement le placement au quartier d’isolement.
3.2. L’interdiction de communiquer
Lorsque le magistrat instructeur prescrit une interdiction de communiquer à l’encontre d’un mis en examen en vertu de l’article 145-4 du CPP, le chef d’établissement n’a pas d’autre solution que de recourir à l’isolement administratif, selon la procédure décrite ci-dessous. En effet, le chef d’établissement ne dispose pas de meilleur moyen de garantir l’absence de communication de l’intéressé avec son environnement. Dans ce cas, il joint copie de la décision du juge à l’imprimé de mise à l’isolement.
La durée de l’isolement ne saurait alors excéder le délai légalement prévu : dix jours renouvelables une fois. La mesure d’isolement doit être automatiquement levée le jour où s’éteint le délai avant vingt-quatre heures.
4. Le placement au quartier d’isolement par mesure de précaution ou de sécurité
Le placement à l’isolement par mesure de précaution ou de sécurité est ordonné par le chef d’établissement à la demande du détenu ou de sa propre initiative. S’agissant d’une compétence qui lui appartient en propre, il doit porter une attention particulière à sa motivation.
4.1. La nécessité de motiver
Depuis l’arrêt Marie rendu par le Conseil d’Etat le 17 février 1995, les juridictions administratives acceptent de contrôler la légalité des décisions disciplinaires "faisant grief".
Le contrôle de la légalité ne s’est pas étendu pour l’instant aux décisions de placement à l’isolement. Elles continuent à être qualifiées par les décisions les plus récentes de "mesures d’ordre intérieur" non susceptibles de recours.
Les juridictions se réfèrent à l’article D. 283-2 pour considérer que "la mesure de mise à l’isolement n’a pas pour effet d’aggraver les conditions de la détention et n’est pas par nature susceptible d’exercer une influence sur la situation juridique de la personne qui en est l’objet" (Conseil d’Etat, 28 février 1996, arrêt Fauqueux, Conseil d’Etat, 22 septembre 1997, arrêt Trébutien).
Cependant, depuis le revirement jurisprudentiel relatif aux sanctions disciplinaires, on constate un accroissement considérable des recours contentieux formés par les détenus contre les décisions de placement à l’isolement ou de prolongation d’isolement. Le nombre des recours formés contre des décisions disciplinaires ou d’isolement a été multiplié par 4 depuis 1994.
C’est dans ce contexte de prise en compte croissante des droits individuels que s’impose l’obligation de motiver la décision de placement à l’isolement.
4.2. La nature des motifs
La simple reprise des motifs succincts, indiqués à l’article D. 283-1, "par mesure de précaution ou de sécurité", est insuffisante.
A cet égard, ne doit plus être utilisé pour le placement à l’isolement l’imprimé diffusé par la note du 11 juillet 1982 relative à la sécurité dans les établissements pénitentiaires. Il est désormais remplacé par les imprimés joints en annexe.
La mise à l’isolement par mesure de précaution ou de sécurité doit procéder de raisons sérieuses et d’éléments objectifs concordants permettant de redouter des incidents graves de la part du détenu concerné ou dirigés contre lui.
La motivation doit préciser s’il s’agit de risques d’évasion, de risques d’agression ou de pression, de risques de mouvements perturbant la collectivité des détenus, de risques de connivence ou d’entente, s’il s’agit de protéger la vie ou l’intégrité physique de certains détenus ou de l’isolé lui-même.
L’obligation de motivation est cependant limitée : ne peuvent apparaître des éléments mettant en péril la sécurité des tiers ou de l’établissement.
4.3. L’exclusion de certains motifs
Le placement à l’isolement ne peut être prononcé pour les seuls motifs suivants.
4.3.1. La nature de l’infraction
La gravité des faits pour lesquels l’intéressé est détenu et la nature des infractions qui lui sont reprochées ne peuvent justifier en elles-mêmes un placement à l’isolement.
Il en va différemment lorsque la nature des infractions en cause (agressions sexuelles, par ex.) ou la qualité du mis en examen (fonctionnaire d’une administration de sécurité) sont susceptibles de provoquer des actes de violence contre l’intéressé de la part de ses codétenus. Des éléments de fait illustrant ce risque de violence doivent alors figurer parmi les motifs de la décision d’isolement.
4.3.2. La grève de la faim
Les dispositions relatives aux "mesures de sécurité dans les établissements pénitentiaires" (note du garde des sceaux du 11 juin 1982) et au "refus d’aliments solides et liquides" (note AP du 6 janvier 1995 rappelant la circulaire AP 86-24 G1 du 13 octobre 1986) ménageaient la possibilité de placer un détenu gréviste de la faim au quartier d’isolement.
Cependant, il n’appartient pas à l’administration de conforter la détermination d’un détenu de refuser les aliments en soutien d’une revendication quelle qu’elle soit. Il revient aux chefs d’établissement de s’assurer de la préservation de la santé du détenu, par la déclaration immédiate à l’équipe médicale de la volonté de l’intéressé de ne plus s’alimenter et par l’organisation du suivi médical, qui seul permet de contrôler l’authenticité de la démarche.
Le maintien du détenu dans sa cellule d’affectation initiale ne fait pas obstacle à l’organisation du suivi médical.
En revanche, il peut apparaître nécessaire, pour des raisons tenant à l’ordre et à la sécurité de l’établissement, par exemple une grève de la faim suscitant des risques de soutien ou de mouvement collectif, de placer à l’isolement un détenu en grève de la faim.
4.4. Le placement à l’isolement d’un détenu mineur
Conformément à la circulaire AP/PJJ du 4 février 1994 relative au régime de détention des détenus mineurs, "les dispositions de droit commun relatives au placement à l’isolement des détenus sont applicables aux mineurs. Toutefois, il y a lieu de ne recourir à cette procédure qu’en dernière extrémité et sous la seule responsabilité du chef d’établissement, qui devra avoir préalablement recueilli l’avis du médecin de l’établissement."
En effet, la protection particulière dont doivent bénéficier les mineurs privés de liberté justifie que de plus grandes précautions soient prises à leur égard.
Ainsi, le chef d’établissement doit veiller à informer de sa décision les parents ou le représentant légal du mineur ainsi que les personnels de la protection judiciaire de la jeunesse chargés de son suivi éducatif.
II. - LA PROCEDURE DE MISE A L’ISOLEMENT
Quel que soit le motif de l’isolement, le respect de la procédure suivante est impératif.
Elle a été élaborée en vue de se conformer aux recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture, tendant au respect d’une procédure écrite, motivée, notifiée au détenu.
La conduite de la procédure est confiée, sous la responsabilité du chef d’établissement, à la ou les personnes qu’il désigne, par écrit, à cet effet.
Le chef d’établissement conservant la responsabilité de la décision, ou son adjoint responsable par intérim, est tenu de signer l’imprimé relatif à l’isolement.
1. La décision initiale
Il faut distinguer 3 hypothèses.
1.1. Le détenu est demandeur de l’isolement
Il doit être reçu préalablement en audience, afin que soit examiné le bien-fondé de sa demande. La décision lui est ensuite notifiée ; un refus doit comporter un minimum de motivation.
1.2. Le placement à l’isolement est à l’initiative du chef d’établissement et ne présente pas un caractère d’urgence
Le détenu doit être prévenu qu’il sera reçu préalablement en audience et qu’il dispose s’il le souhaite d’un délai d’une heure pour préparer ses observations.
1.3. La procédure d’urgence
Dans le cas d’urgence, le détenu ne sera pas reçu préalablement en audience, mais dans les premières heures suivant son placement à l’isolement.
Des éléments permettant d’apprécier l’urgence devront figurer dans la décision. Sont en jeu, par exemple, la protection physique d’un détenu qui vient d’être agressé ou l’apaisement de la détention suite à l’information certaine d’un incident imminent.
1.4. Le contenu de la décision
La décision formalisée par l’imprimé joint en annexe est notifiée à la suite de l’audience. Elle comporte deux plages destinées à recueillir, respectivement, la motivation et les observations du détenu. Des observations complémentaires sur papier libre peuvent être jointes à la décision, ainsi que tout document utile à compléter la motivation.
2. Conservation et publicité de la décision
2.1. Conservation des pièces
Tous les originaux des pièces relatives à une mesure d’isolement doivent être conservés dans la partie pénitentiaire du dossier individuel du détenu, dans une sous-cote "mesure d’isolement". Il s’agit de :
- toute demande d’isolement ou de séparation, obligatoirement formalisée par un écrit ;
- la demande d’interdiction de communiquer ou de séparation formulée par le juge ;
- la décision de placement à l’isolement et les éventuelles observations écrites du détenu ;
- la décision de refus de placement à l’isolement ;
- les demandes et les décisions de mainlevée de l’isolement avec les observations éventuelles du détenu.
2.2. Copie des pièces aux autorités
L’article D. 283-1, alinéa 2, du CPP prescrit au chef d’établissement de rendre compte à bref délai de sa décision au directeur régional et au juge de l’application des peines.
Une copie de la décision doit être également adressée au magistrat saisi du dossier de l’information, lorsque l’isolement administratif s’applique à un prévenu.
2.3. Le rapport à la commission de l’application des peines
Conformément aux dispositions de l’article D. 283-1, alinéa 2, du CPP, un rapport oral, relatif à une décision de placement à l’isolement ou de prolongation, est fait devant la commission de l’application des peines dès sa première réunion suivant la mise à l’isolement.
3. La levée de la mesure
Une mesure d’isolement n’a pas vocation à durer indéfiniment, étant justifiée par des éléments de fait et de droit qui peuvent évoluer ou disparaître.
Les effets néfastes d’un isolement prolongé imposent un contrôle vigilant de la durée de la mesure par le chef d’établissement et le directeur régional.
La levée de l’isolement intervient automatiquement dans les cas décrits au chapitre 3 ; elle doit être également envisagée lors des échéances ordinaires de prolongation.
La décision de levée doit être notifiée au détenu. Lorsqu’il a sollicité son placement à l’isolement, ses observations éventuelles doivent être recueillies en cas de levée.
4. La prolongation
A défaut de décision de prolongation au terme des trois mois, la levée de l’isolement est automatique.
La période de trois mois avant l’expiration de laquelle la décision de prolongation doit intervenir doit être comptée à partir de 0 heure le jour de la notification de la décision initiale. Elle expire trois mois plus tard à la même date à 0 heure, quel que soit le jour de la semaine pour l’échéance. Si le délai est écoulé un dimanche, il faut notifier la décision le vendredi ou le samedi, voire le dimanche, mais jamais le lundi.
4.1. La proposition de prolongation
La procédure de prolongation doit être engagée trois semaines avant l’échéance des trois mois.
Le détenu à l’isolement doit être informé qu’il est envisagé de proposer une prolongation de la mesure et bénéficier s’il le souhaite d’un délai d’une heure pour préparer ses observations. Il est reçu en audience pour recueillir ses observations. La proposition lui est ensuite notifiée.
Une prolongation ne peut être proposée sans un bilan préalable de la situation du détenu au moyen, notamment, de la fiche d’observation du détenu à l’isolement.
S’il estime devoir proposer la prolongation, le chef d’établissement doit constituer un dossier contenant :
- l’imprimé de proposition comportant les motivations ; elles doivent être actualisées au jour de la demande. L’imprimé comporte la notification de la proposition au détenu, la mention du jour du rapport oral fait à la commission de l’application des peines, la date de transmission au directeur régional ;
- la fiche de liaison ;
- le rapport de comportement du détenu au quartier d’isolement sur la base notamment de la fiche d’observation.
Le cas échéant, lorsque l’équipe médicale a souhaité faire un rapport ou le médecin rendre un avis, ces documents doivent être joints au dossier de proposition.
4.2. L’instruction par le directeur régional
Le dossier est adressé à la direction régionale au moins quinze jours avant la fin du délai des trois mois. Les services du directeur régional examinent le dossier et demandent, si nécessaire, des pièces ou informations complémentaires. Ils sont particulièrement attentifs à l’actualisation des motivations de la prolongation.
Le directeur régional prend la décision relative à la prolongation de la mesure d’isolement et la transmet à l’établissement pour notification au détenu avant l’échéance des trois mois, dans tous les cas. Cette décision est motivée.
Une décision de refus de prolongation a pour conséquence la levée immédiate de la mesure et le retour en détention ordinaire.
Un exemplaire de la décision de prolongation est remis au détenu lors de la notification.
Les règles de conservation des pièces et de transmission de copies aux autorités sont identiques à celles applicables à la décision initiale.
La même procédure est renouvelée lorsque la prolongation apparaît nécessaire à l’issue d’une nouvelle période de trois mois. Le directeur régional doit porter une attention particulière sur les motifs de la nouvelle prolongation, en examinant en particulier si d’autres types de mesures ont été envisagés et en s’assurant de l’impossibilité d’y avoir recours.
Lorsqu’une décision de prolongation a déjà été prise par le directeur régional, la levée de la mesure ne peut intervenir, dans l’intervalle des échéances réglementaires et hormis les cas de levée automatique énumérés au chapitre 3, qu’à la suite d’une décision de la même autorité. Dans ce cas, le chef d’établissement transmet au directeur régional une proposition motivée de levée de la mesure accompagnée le cas échéant d’un rapport justificatif. En outre, le chef d’établissement transmet au directeur régional, sans délai, tout certificat médical que le médecin aura estimé utile de rédiger, en l’accompagnant de son avis sur l’opportunité d’y donner suite.
5. La prolongation au-delà d’un an
La prolongation au-delà d’un an doit être exceptionnelle. Elle relève de la compétence exclusive du ministre de la justice, en application de l’article D. 283-1, alinéa 6.
5.1. La proposition de prolongation
Le chef d’établissement doit transmettre au directeur régional une proposition de prolongation avant l’expiration du dixième mois, afin de permettre un examen effectif de la mesure par les services de la direction régionale puis de l’administration centrale.
L’avis du médecin est obligatoirement sollicité en cas de proposition de prolongation de l’isolement au-delà d’un an. Si le médecin émet un avis, il doit figurer sur un écrit transmis avec la proposition. A défaut d’avis, le médecin émarge au minimum l’imprimé de proposition de prolongation.
Le chef d’établissement présente la proposition de prolongation pour avis à la commission de l’application des peines : cet avis figure sur l’imprimé de proposition.
Le chef d’établissement avertit le détenu qu’il envisage de proposer une prolongation au-delà d’un an. Le détenu peut disposer d’un délai d’au moins une heure, s’il le souhaite, pour préparer ses observations. Elles sont recueillies au cours d’une audience à l’issue du délai. La proposition de prolongation est ensuite notifiée.
Le chef d’établissement doit joindre, à la proposition, un rapport de synthèse sur le comportement du détenu, au cours de la période écoulée depuis la décision initiale.
Enfin, la transmission, avec la proposition, de la fiche de liaison (III.3), permet à l’autorité chargée de la décision de connaître précisément la chronologie de la mesure.
5.2. Le rapport du directeur régional
Le directeur régional dresse un rapport sur la base de la proposition du chef d’établissement et émet un avis motivé sur l’opportunité de prolonger la mesure au-delà d’un an.
Au préalable, le directeur régional peut décider de lever la mesure s’il estime qu’elle n’est plus justifiée ou bien de lui substituer un autre type de mesure relevant de sa compétence.
Il peut également préconiser l’adoption d’une mesure telle qu’un transfert.
Le dossier de proposition de prolongation d’une mesure d’isolement doit être transmis à la direction de l’administration pénitentiaire au moins un mois avant l’expiration de la mesure précédente. L’administration centrale doit avoir le temps d’examiner le dossier et de rechercher éventuellement d’autres mesures.
5.3. La décision du ministre de la justice
Les services centraux transmettent à la direction régionale la décision du ministre de la justice (normalement prise par délégation par le directeur de l’administration pénitentiaire) une semaine au moins avant le terme de la période d’isolement précédente, afin qu’elle puisse être notifiée à temps à l’établissement.
Une copie de la décision est remise au détenu. Un exemplaire est classé au dossier.
Un rapport oral relatif à la décision définitive est fait devant la commission de l’application des peines.
La direction de l’administration pénitentiaire demeure compétente pour décider de toute nouvelle prolongation, chaque trimestre, au-delà d’un an. L’administration centrale est alors à nouveau saisie selon la procédure décrite au présent paragraphe au minimum un mois avant l’expiration de la nouvelle période d’isolement.
Hormis les cas de levée automatique énumérés au chapitre 3, l’administration centrale est également compétente pour toute levée de la mesure au-delà d’un an.
III. - LES MODALITES DE CALCUL DE LA PERIODE D’ISOLEMENT
Afin d’unifier les pratiques, un système de calcul unique de la durée de la période d’isolement est institué. L’information exacte de la fiche de liaison, son examen attentif et sa transmission systématique doivent servir de support au calcul.
1. Principe
1.1. La levée de la mesure
La levée de la mesure est systématique pour :
- la levée d’écrou (transfèrement, admission au CNO, etc.) ;
- toute interruption supérieure à quinze jours (par ex. une sanction de cellule disciplinaire supérieure à quinze jours).
Par extension, l’admission au SMPR, l’admission en semi-liberté ou le placement en chantier extérieur dans le même établissement entraînent la levée de la mesure.
La levée de la mesure peut être l’occasion d’un retour en détention normale. Le chef d’établissement (le même ou celui de l’établissement de nouvelle affectation) ne doit pas envisager immédiatement de prendre ou de proposer une nouvelle mesure, à l’issue de l’événement ayant entraîné la levée de la mesure, sans examiner particulièrement la possibilité du maintien en détention ordinaire. Il tient compte du contexte, du comportement du détenu, qui ont pu évoluer, et de nouvelles solutions qui peuvent se présenter à lui.
1.2. Le maintien de la mesure
La mesure d’isolement est maintenue après :
- toute interruption inférieure ou égale à quinze jours ;
- une levée d’écrou sous la forme simplifiée, pour suspension ou fractionnement de la peine en application de l’article D.149-1, lorsque l’absence du détenu de l’établissement est inférieure à quinze jours ;
- une levée d’écrou simplifiée pour une extraction hospitalière telle que prévue à l’article D. 314-2, lorsque l’absence du détenu de l’établissement ne dépasse pas quinze jours ;
- une levée d’écrou simplifiée en application de l’article D. 313-1.
2. Dans le cas d’une nouvelle mesure de placement à l’isolement
Lorsque la levée de la mesure est suivie d’une nouvelle mesure d’isolement, la durée de l’interruption et la durée de la période d’isolement qui l’a précédée servent de critères de calcul. Ce choix se justifie pour des raisons de simplicité et d’équité. En effet, cela permet de ne tenir compte d’une période d’isolement antérieure que dans le seul cas où elle est susceptible de produire encore des effets sur le détenu, au-delà de la période d’interruption.
2.1. La période d’isolement précédente n’est pas prise en compte (ex. n° 1)
La période d’isolement précédente est inférieure ou égale à l’interruption : elle n’est pas prise en compte.
Toute nouvelle mesure de placement à l’isolement suit son cours normal. Il n’y a pas lieu d’adopter une règle de calcul particulière.
2.2. La période d’isolement précédente est prise en compte (ex. n° 2 et 3)
La période d’isolement précédente est plus longue que l’interruption : elle doit être prise en compte.
C’est l’échéance de prolongation par l’administration centrale, telle que prévue par l’article D. 283-1, alinéa 6, qui est alors avancée à concurrence de la durée d’isolement antérieure.
La mise en oeuvre de cette disposition est facilitée par le mode de calcul suivant. A la date d’isolement initial, il faut ajouter un an et la durée de l’interruption :
Date/mesure antérieure (+) 1 an (+) durée d’interruption = échéance/décision AC.
En revanche, les échéances de contrôle régulier courent de trois mois en trois mois à compter de la nouvelle décision, jusqu’à l’échéance de prolongation de la compétence de l’administration centrale.
Lorsque la mesure d’isolement précédente était déjà de la compétence de la direction régionale ou de l’administration centrale, le chef d’établissement peut décider de replacer l’intéressé à l’isolement, à charge, pour lui, de transmettre sa décision pour confirmation dans les plus brefs délais.
Exemple n° 1 :
isolement n° 1 = 2 mois Interruption = 3 mois 01-06-97 = isolement n° 2
01-01-97I------------I°°°°°°°°°°°°°°°I--------I--------I--------I--------I01-06-98
La période d’isolement n° 2 ne tient pas compte de la période d’isolement n° 1.
Echéance de décision AC = 01-06-97 + 1 an = 01-06-98.
Exemple n° 2 :
isolement n° 1 = 9 mois 16-11-97 = isolement n° 2
01-01-97I------------------------------I°°°°°°°°°°°°°°I----------------------I16-02-98
inter. = 45 j.
La période d’isolement n° 2 tient compte de la période d’isolement n° 1.
Echéance de décision AC = 01-01-97 (+ 1 an + 45 j.) = 16-02-98.
Exemple n° 3 :
iso. n° 1 = 70 j. inter. 40 j. 21-04 = iso. n° 2
01-01-97I---------------------I°°°°°°°°°°°°I-------------3-------------6-------------9-----I11-02-98
La période d’isolement n° 2 tient compte de la période d’isolement n° 1.
Echéance de décision AC = 01-01-97 (+ 1 an + 40 j.) = 11-02-98.
3. La fiche de liaison
Une fiche de liaison est systématiquement renseignée pour toute mesure d’isolement afin de clarifier le décompte des périodes d’isolement, en tenant compte, selon les principes énoncés plus haut, des événements survenus lorsqu’une mesure d’isolement est en cours. Seule la levée de la mesure, suivie d’une nouvelle mesure, entraîne une modification de l’échéance de contrôle par l’administration centrale.
La fiche est renseignée par les rubriques suivantes :
- le nom du détenu, sa date de naissance et son numéro d’écrou ;
- le numéro de la fiche ;
- la date de la décision initiale de placement à l’isolement ;
- les événements interruptifs : date et nature (transfert, CNO, QD, hospitalisation, SMPR, autres) ;
- la durée de la période d’isolement précédant l’événement ;
- la durée de l’interruption ;
- la date de la nouvelle mesure après interruption ou la date de reprise de la mesure antérieure ;
- la nouvelle échéance de la compétence/direction régionale ou le maintien de la même échéance ;
- la nouvelle échéance de compétence/administration centrale selon la règle indiquée au paragraphe III.2 ;
- ou bien la même échéance maintenue.
La fiche de liaison permet principalement de suivre la chronologie de la mesure d’un établissement à l’autre, en dépit des transferts. Elle est systématiquement transmise à la direction régionale et à l’administration centrale, à l’occasion d’une demande de prolongation.
IV. - LE REGIME DE L’ISOLEMENT
1. Les recommandations européennes et nationales
Au terme de sa visite effectuée en France, du 6 au 18 octobre 1996, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants recommande "un équilibre entre les exigences de la cause et la mise en oeuvre du régime de l’isolement", eu égard aux conséquences néfastes que peut avoir ce régime sur la personne incarcérée. Il préconise le recours à des mesures tendant à une organisation du quartier d’isolement préservant l’accès à de meilleurs espaces de promenade et aux activités, notamment de plein air.
Ces recommandations rejoignent les conclusions de groupes de travail conduits par ou à la demande de l’administration pénitentiaire.
Ainsi, le rapport sur la prévention du suicide en milieu pénitentiaire de mai 1996 et le rapport rendu par le Pr. Gentilini sur les infections à VIH, hépatites, toxicomanies et les analyses sur l’application de la loi du 18 janvier 1994, dans les établissements pénitentiaires, relèvent de la même manière l’urgence de définir des modes de gestion du quartier d’isolement permettant un minimum de vie sociale, notamment par le biais d’activités. En effet, la vocation du quartier d’isolement "suppose que le régime de l’isolement soit, conformément aux textes en vigueur, nettement distinct de celui du quartier disciplinaire".
Pour ces raisons, les éléments essentiels du régime ordinaire de détention doivent, dans la mesure du possible et en tenant compte des contraintes matérielles, être préservés au quartier d’isolement.
2. La mise en oeuvre du régime ordinaire de détention
Conformément à l’article D. 283-2 du CPP, les détenus placés à l’isolement sont soumis au régime ordinaire de la détention.
1° Les droits de la défense, protégés par les textes de valeur constitutionnelle et internationale, doivent pouvoir s’exercer pleinement selon les modalités prévues par le code de procédure pénale distinguant le statut des condamnés de celui des prévenus. L’interdiction de communiquer de l’article 145-4 ne peut porter sur la communication avec l’avocat.
2° Le droit aux relations familiales ou avec des tiers s’exerce dans le cadre des visites au parloir : sous réserve de l’organisation de l’accès individuel à la cabine de parloir, elles ne souffrent aucune limitation, hormis le cas de l’isolement sur prescription judiciaire.
Aucune restriction ne doit porter sur la correspondance émise ou reçue par le détenu isolé ; toutefois, le contrôle accru de sa correspondance peut répondre aux impératifs fixés par le juge ou aux conséquences de son inscription comme détenu particulièrement signalé, conformément aux dispositions de l’article D. 276-1 du CPP ou encore à la surveillance spéciale recommandée à l’endroit d’une personnalité suicidaire.
Pareillement, l’accès aux communications téléphoniques dans les conditions prévues à l’article D. 417 du CPP dans les établissements pour peine n’est pas suspendu pour cause de placement à l’isolement.
3° L’accès à l’information des détenus isolés n’est pas limité dans son principe, sous réserve du contrôle pratiqué normalement pour toute la détention. Les détenus isolés conservent le droit de cantiner les journaux de leur choix, de faire usage d’une radio ou d’une télévision dans les conditions habituelles.
Lorsque la bibliothèque fonctionne en accès direct, son accès pour les isolés doit être organisé par des horaires spécifiques ou par constitution d’un fonds annexe au quartier d’isolement.
4° La pratique de la religion.
Elle s’exerce au quartier d’isolement selon les modalités prévues aux articles D. 437 à D. 439 du CPP. Les isolés ne pouvant participer aux offices habituellement célébrés pour l’ensemble de la détention, des offices spécifiques peuvent être autorisés en accord avec l’aumônier, pour les détenus placés à l’isolement.
5° Hygiène de vie.
La protection de la santé du détenu isolé doit se traduire par la mise en oeuvre de conditions de détention préservant une hygiène de vie :
- les cellules doivent bénéficier d’un éclairage naturel par une fenêtre permettant également l’aération nécessaire telle qu’elle est prescrite par l’article D. 350 du CPP ;
- l’espace prévu pour la promenade doit obligatoirement comporter une perspective à l’air libre. L’option d’un créneau spécifique pour la promenade des isolés dans une cour ouverte doit être envisagée. Il convient également de permettre des plages de promenade équivalentes à celles dont bénéficie la détention ordinaire ;
- il convient de rendre possible l’organisation d’activités sportives au quartier d’isolement, par exemple par l’équipement d’un vélo de salle, d’un tapis de gymnastique ou d’une table de ping-pong.
2.6. Les activités au quartier d’isolement
La mise à l’isolement suspend l’accès du détenu isolé aux activités organisées de manière collective en détention ordinaire, mais la préservation d’un régime ordinaire suppose que la plupart des activités connaissent aussi une organisation spécifique au quartier d’isolement, permettant parfois des petits regroupements de détenus isolés.
Ainsi, chaque fois que cela est possible, le chef d’établissement doit autoriser les détenus isolés à se regrouper ponctuellement par deux ou trois pour la promenade ou pour une activité. Une salle, qui peut être polyvalente (sport, lecture), doit être prévue à cet effet. Il appartient au chef d’établissement d’apprécier l’opportunité de ces regroupements et d’appliquer une individualisation de la mesure tenant compte de la raison du placement et de l’objectif poursuivi ainsi que de la personnalité et du comportement du ou des détenus concernés.
De plus, il est souhaitable de ne pas décourager les modules d’enseignement individuel ou encore l’organisation d’enseignement à distance, lorsque cela est proposé par un enseignant ou un formateur, afin que les activités soient également orientées vers la formation.
2.7. Les isolés indigents
Il n’est pas rare que des détenus isolés se retrouvent dans une situation d’indigence, soit qu’ils aient perdu la ressource du travail, soit que toute relation avec l’extérieur ait été rompue. Dans ces cas, ils doivent pouvoir bénéficier du traitement organisé par l’établissement pour les indigents, par exemple en matière d’hygiène ou de prestations financées par l’association socioculturelle.
3. Le règlement intérieur
Le règlement intérieur de l’établissement, communiqué au juge de l’application des peines pour avis et au directeur régional pour approbation, doit comporter une fiche relative à la procédure de placement à l’isolement, aux visites médicales obligatoires, à l’emploi du temps et aux activités de ce quartier, selon les principes énoncés plus haut.
Ces règles doivent être affichées dans le quartier d’isolement. Un exemplaire sera remis à chaque isolé.
4. L’observation et le dialogue avec les détenus isolés
4.1. L’observation
Une fiche d’observation doit être ouverte pour chaque détenu placé à l’isolement : elle est complétée, par le personnel en poste ou responsable du quartier, de toute remarque pertinente concernant le comportement du détenu isolé au cours de l’exécution de la mesure.
Elle constitue un document d’alerte lorsqu’il apparaît que l’isolement a des effets néfastes sur l’état du détenu.
Elle est régulièrement consultée par l’encadrement et en tout cas lorsqu’il est envisagé de proposer la prolongation de la mesure.
Une synthèse en est transmise au directeur régional et à l’administration centrale avec la proposition de prolongation ou bien dans le cas où le détenu forme un recours hiérarchique contre une décision initiale ou de prolongation de la mesure d’isolement.
Chaque établissement est responsable de l’élaboration ou de l’amélioration, si elle existe déjà, d’une fiche d’observation répondant à l’objectif indiqué.
4.2. Le dialogue
Pour prévenir un trop grand isolement social, le maintien des contacts et des échanges entre le personnel et les détenus isolés est essentiel. S’ils permettent d’atténuer l’isolement, surtout dans le cas où l’intéressé ne bénéficie pas de parloirs, ils participent également de la fonction d’observation de la personnalité du détenu.
Pour ces mêmes raisons, il appartient de plus au personnel d’autorité de l’établissement et au personnel socio-éducatif d’envisager les audiences avec les détenus isolés, au moins aussi fréquemment qu’en détention normale.
5. Le registre des mesures d’isolement
Le registre des mesures d’isolement répertorié antérieurement dans les registres du greffe figure désormais à l’article D. 283-1 du CPP. Constitué de feuillets numérotés et datés, il retrace tous les mouvements au quartier des isolés : les entrées et sorties de détenus placés à l’isolement, ainsi que l’heure de ces mouvements, les passages ou audiences avec des membres du personnel, des intervenants extérieurs ou des autorités judiciaires ou administratives, les visites du personnel médical.
Une colonne doit permettre de recueillir en face de chaque mouvement le visa du responsable ou du visiteur.
V. - LE ROLE DU MEDECIN
La mise en oeuvre de la mission de soins auprès des détenus isolés suppose des obligations tant pour l’administration pénitentiaire que pour le médecin.
1. L’organisation obligatoire d’un suivi médical
1° L’administration est tenue de signaler au médecin les détenus placés à l’isolement (D. 283-1 du CPP). A cet effet, le chef d’établissement doit adresser quotidiennement au médecin un état des détenus isolés en mentionnant, le cas échéant, les entrées nouvelles.
2° Le médecin a l’obligation de visiter deux fois par semaine les détenus placés à l’isolement (D. 381 du CPP). Le chef d’établissement doit organiser le service du quartier d’isolement afin que ces visites soient toujours possibles. Le médecin doit pouvoir s’entretenir avec le détenu dans des conditions préservant le secret médical ; ainsi n’est pas autorisée la présence du personnel de surveillance dans la cellule à l’occasion de la visite du médecin. Si nécessaire, une garde vigilante dans le couloir, par un agent et par un gradé, doit permettre de préserver la sécurité du personnel soignant, à moins que le médecin ou l’infirmier lui-même ne réclame des précautions plus importantes.
2. L’avis médical en matière d’isolement
2.1. Avis sur l’opportunité de mettre fin à l’isolement
Conformément à l’article D. 283-1 du CPP, il appartient au médecin, chaque fois qu’il l’estime utile au regard de l’état de santé du détenu, d’émettre un avis sur l’opportunité de mettre fin à la mesure d’isolement. Il en résulte que le médecin a la faculté d’émettre un avis à tout moment.
2.2. Avis en cas de prolongation au-delà d’un an
L’avis médical n’est obligatoirement requis que lorsqu’une mesure d’isolement doit être prolongée au-delà d’un an. Compte tenu des éventuelles incidences d’une prolongation sur l’état d’un détenu, il importe que, dans l’examen approfondi des données de la cause qui est exigé à cette occasion, l’administration prenne particulièrement en considération la santé physique et mentale de ce dernier. A cet égard, l’avis médical peut être fourni par le médecin psychiatre, s’il est invité à le faire par le médecin chef de service.
2.3. Avis en cas de placement à l’isolement d’un mineur
En outre, conformément aux dispositions précitées, l’avis du médecin doit être sollicité lorsque le placement à l’isolement concerne un détenu mineur.
3. Conséquences de l’avis du médecin
Dans tous les cas, l’administration n’est pas liée par l’avis médical. Elle doit cependant en tenir compte et rechercher d’éventuelles solutions d’aménagement de la mesure, afin de résoudre, le cas échéant, un problème de santé lié à la situation d’isolement du détenu. Le chef d’établissement doit transmettre sans délai au directeur régional tout certificat médical que le médecin aura estimé utile de rédiger, en l’accompagnant de son avis sur les suites à lui donner.
VI. - REQUETES ET RECOURS DU DETENU PLACE A L’ISOLEMENT
1. Les observations auprès du juge de l’application des peines
L’article D. 283-1 du CPP prévoit que le détenu placé à l’isolement peut faire parvenir ses observations au juge de l’application des peines soit directement, soit par l’intermédiaire de son avocat.
L’avocat peut intervenir à tout moment de la procédure pour réclamer des explications auprès du juge de l’application des peines, mais aussi auprès des autorités pénitentiaires.
2. Requêtes auprès des autorités judiciaires et administratives
L’article D. 262 du CPP autorise les détenus à écrire sous pli fermé aux autorités dont la liste est fixée par l’article A. 40 du CPP.
Par ailleurs, les articles D. 259 et D. 261 du CPP prévoient que le détenu peut être entendu, respectivement, par les magistrats et fonctionnaires chargés de la visite ou de l’inspection de l’établissement et par toute autorité chargée d’une mission dans l’établissement.
Ces audiences se déroulent hors de la présence de tout membre du personnel de l’établissement.
3. Le recours gracieux
Un détenu placé à l’isolement peut formuler une requête auprès de l’autorité qui a pris la décision. C’est une faculté ouverte auprès du chef d’établissement, par l’article D. 259 du CPP, à propos de toute décision dont le détenu fait l’objet.
Le recours gracieux auprès du directeur régional ou du ministre de la justice n’est pas spécifiquement prévu par la réglementation pénitentiaire, mais résulte des règles générales applicables en matière de décisions administratives.
4. Le recours hiérarchique
L’article D. 26O du CPP pose le principe de l’accès au recours hiérarchique pour "tout détenu ou parties auxquelles une décision administrative a fait grief". Ce recours est formé auprès du directeur régional, si la décision émane du chef d’établissement, auprès du ministre de la justice, si elle émane du directeur régional.
Ce même article précise que toute décision régulièrement prise est exécutoire nonobstant le recours gracieux ou hiérarchique.
Le recours hiérarchique n’est assujetti à aucun délai.
Les recours contentieux sont actuellement déclarés irrecevables par le juge administratif.
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Je vous demande de veiller à l’application rigoureuse de ces instructions dans les établissements placés sous votre autorité et de suivre attentivement les décisions de placement à l’isolement qui seront prises. Vous voudrez bien me rendre compte des éventuelles difficultés qui pourraient en résulter, sous le timbre de la sous-direction de l’organisation et du fonctionnement des services déconcentrés (bureau de gestion de la détention).
Le garde des sceaux, ministre de la justice,
Par délégation :
Le directeur de l’administration pénitentiaire,
G. AZIBERT
A N N E X E S [1]
Annexe I. - Imprimé sur le placement à l’isolement : décision initiale.
Annexe II. - Imprimé sur la mesure d’isolement : prolongation au-delà d’un an.
Annexe III. - Imprimé sur la mesure d’isolement : fiche de liaison.
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