Publié le jeudi 10 avril 2003 | http://prison.rezo.net/arles-moulins-clairvaux-borgo/ SNEPAP FSU
Arles, Moulins, Clairvaux, Borgo, Fresnes : Prisons d’une guerre à l’autre Paris, le 10 avril 2003 La démonstration est sans doute faite aujourd’hui de l’efficacité du discours sécuritaire dont nous abreuve le gouvernement par la voix du ministre de l’intérieur avec la participation parfois complaisante des média. Pour appliquer le concept paranoïaque de tolérance zéro il faut en avoir les moyens mais pour en obtenir les moyens il n’est pas acceptable de piétiner les valeurs fondatrices de la République. En ce qui concerne la prison, un travail de réflexion a été largement entamé entre 1999 et 2002. La construction de nouveaux établissements, le recrutement massif de personnels, constituent une injure quand dans le même temps le gouvernement supprime des postes à l’Education Nationale comme si la dernière des raffarinades pouvait être : ouvrir une prison c’est fermer une école ! Mais qui parle de cette réglementation pénitentiaire kafkaïenne, cette aberration juridique qui fixe dans le marbre qu’en prison tout ce qui n’est pas autorisé est interdit ? L’application à tous les détenus d’un régime de sécurité à maxima est-elle socialement rentable ? Qu’en est-il de ces malades incarcérés pour des raisons économiques (le prix de journée en prison est très inférieur à celui des hôpitaux psychiatriques) et qui sont difficilement gérables en établissement pénitentiaire, créant des incidents du fait de leur pathologie ? Il serait temps que la prison devienne le lieu de sanction des crimes les plus graves quitte à redéfinir objectivement son rôle de « mise à l’écart temporaire de la société ». L’attaque par un commando de la maison d’arrêt de Fresnes ce mercredi 12 mars 2003 marquera peut-être un tournant dans l’histoire de la prison. Centre névralgique de l’administration pénitentiaire, cet établissement est réputé pour sa capacité à gérer les personnalités les plus diverses, les détenus les plus difficiles et le régime y est strict, par tradition mais surtout pour des raisons objectives. On peut y croiser des détenus condamnés à de faibles peines correctionnelles comme des condamnés à perpétuité, des malades psychiatriques comme des stars des média. Et tous sont consternés de constater que malgré les mâles affirmations sécuritaires du gouvernement, c’est d’ici, du cœur du système pénitentiaire, de l’archétype carcéral qu’est Fresnes qu’un détenu s’évade au son d’une musique guerrière. Ne serait-il pas temps de reprendre le débat là où il fut abandonné pour cause de démagogie pré-électorale ? Pour prévenir l’aggravation de la tension carcérale actuelle et pour garantir une intégration du droit européen il faudrait d’abord rouvrir les discussions sur une loi pénitentiaire. Or qu’en est il ? Le Garde des Sceaux annonce, après les évènements des derniers mois la création des ERIS (équipes régionales d’intervention et de sécurité). Le SNEPAP-FSU s’interroge sur la création de ces équipes d’intervention dont la principale mission serait le maintien de l’ordre. Cette substitution aux forces de l’ordre (gendarmerie et police) seules habilitées a ce jour par la loi pour cette mission, par des fonctionnaires pénitentiaires hors cadre statutaire, est susceptible de mettre en danger l’ensemble des personnels pénitentiaires qui, de fait risque d’être assimilé aux membres de ces groupes. D’autres questions se posent :
Nous ne pouvons adhérer à un discours contradictoire de l’institution qui présente dans une surréaliste campagne télévisuelle de recrutement, des surveillants vantant le contact avec la population pénale et qui annonce dans le même temps la formation de groupes de répression composés de ces mêmes surveillants ! De plus il est à craindre que les opérations envisagées de maintien de l’ordre ou d’opérations « coups de poing » ne mobilisent de plus en plus de personnels du fait de la nécessité des rotations dues aux périodes de repos, de congés ou au rythme de travail. En ne prenant pas en compte la réalité du travail quotidien des personnels et en jouant sur de démagogiques effets d’annonce le Garde des Sceaux ne fait qu’alimenter le ressentiment de personnels déjà éprouvés par les difficulté d’exercer ses missions de garde et de réinsertion. Mais il y a pire ! Dans la note d’information du 17 mars 2003 concernant la sécurité, le garde des Sceaux annonce parmi les neuf actions visant à renforcer « la discipline et le contrôle des détentions pour augmenter la sécurité » (point 3) : « L’anonymat des surveillants effectuant les fouilles pourra être assuré, par le port de cagoules » (sic). Quelle est donc la conception de ceux qui non seulement nous signifient ainsi que nous ne pouvons être fiers d’exercer nos missions (en contradiction semble-t-il avec le Directeur de l’AP qui essaie de nous rappeler que ces missions sont républicaines et que nous sommes dignes de respect) ? Après les évènements de Fresnes, d’aucuns ont mis en avant un discours guerrier. Pour le SNEPAP-FSU |