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Annexe 2 : Profils des personnes interrogées

Publié le mercredi 10 septembre 2003 | http://prison.rezo.net/annexe-2-profils-des-personnes/

Annexe 2 : Profils des personnes interrogées

Allen, détenu, ateliers théâtre, écriture, musique, Ban Public
Francine, ancienne détenue, ateliers théâtre, musique, vidéo, Ban Public
Gilles, détenu, Ban Public
Guillaume Fournier, ancien détenu, atelier audiovisuel, IEP Paris, Ban Public
Abdel-Hafed Benotman, ancien détenu, écrivain, Ban Public
Jean-Christophe Poisson, metteur en scène intervenant en détention, Ban Public
Jean-Pierre Chrétien-Goni, metteur en scène intervenant en détention, Ban Public
Laurent-Xavier Concé, SPIP Seine et Marne
Mamadou S., ancien détenu, atelier théâtre, stage de projectionniste dans un théâtre, Ban Public
Marc, détenu, Ban Public
Manu, ancien détenu, ateliers théâtre, écriture, projectionniste dans un théâtre, Ban Public
M., ancien détenu, fondateur et président de l’association Ban Public, site d’informations et de débats sur les prisons
Saïd-André Remli, détenu, ateliers théâtre, marqueterie, musique, peinture, écriture, son, Ban Public
Stanislas, détenu, ateliers théâtre, cinéma
Emmanuelle Schweig, conseillère territoriale Ile de France, chargée notamment du suivi des activités culturelles en milieu pénitentiaire
Shirley Stempfil, agent culture-justice à Loos Lès Lille
Laurentino Da Silva, ancien détenu, ateliers théâtre, écriture, programmateur jeune public dans un cinéma, Ban Public

A ma fenêtre

Cri de détresse noyé au cœur de l’orage !
Gouttes de pluie, chasseresses, sur mon visage,
Me découvrent, animal sauvage, en rage,
Sonnant sa hargne aux barreaux de sa cage.
L’ondée de Mars abreuve ma colère,
Et, ma folie passée me désespère...
Je me cogne, débile, à la moralité et ses frontières.
Il est trop tard, j’aurais dû, y penser naguère...
Pour l’instant, je me noie dans les incertitudes
Au point de céder, graduellement, à l’habitude.
Mon imagination s’oppose à une mortelle anesthésie,
Je rêve d’amour, de reconnaissances, d’envies,
De sensations anciennes pour briser ma léthargie.
"... Voguant, yeux clos, de flash-back en créations virtuelles :
Tel Icare, les courants chauds bercent mes ailes
Frémissant comme feuille sous le vent,
Ballotté par de pervers sentiments troublants,
Cahoté entre les esquifs des ressentiments et craintes,
Grisé comme par les effluves d’un nectar divin,
Je me laisse dériver, embrumé par l’espoir prochain
De retrouver, enfin, des lendemains d’une autre teinte...
Finir du gris muraille pour la chaleur du miel
Qui couvrirait, des murs, les éclats sinistres du fiel..."

Quelle douceur ! Magnificence et bien-être,
Que des épées du soleil qui me pénètrent,
Déchirant les ombres de mon âmes malade,
Symphonisant un hymne en somptueuse sérénade...
... Doux voyage sous un concerto de lumières exaltées
Flirtant sur les visions d’avenir et de... Liberté  !

 L’Ange déchu, Ban Public

Réveil
Je m’éveille,
L’aube naissante répand une lumière pâle dans cette pièce lugubre.
J’assiste une nouvelle fois à cet instant magique
qu’est la naissance d’un jour.
+ Pâle lumière,
fraîcheur de l’aube,
réveil de la ville.
Doucement,
des femmes,
des hommes

peuplent les rues jusque là désertes.
Le bruit perce cet air cristallin
et envahit l’espace.
Allongé sur ma couche,
je profite de ces dernières minutes,
ces dernières secondes.
La lumière devient plus intense,
elle projette sur le sol l’ombre noire des barreaux.
Des pas dans le couloir,
le bruit sec et métallique des verrous
qui s’amplifie au fur et à mesure que les pas s’approchent.
Le verrou de ma porte claque comme un coup de feu.
Il entre en moi comme la lame d’un couteau,
elle me marque chaque matin d’une cicatrice nouvelle.
Combien de matins encore ?
Chaque nuit mes rêves se peuplent de matins
frais,
sucrés,
au goût de liberté.
Combien je les chérirai
ces matins pluvieux d’hiver
ou aux couleurs chaudes de l’automne,
matins secs de l’été
ou fleuris du printemps !
Combien ils me seront
chers ces matins,
ces réveils,
sans l’ombre des barreaux,
sans le coup de feu des verrous !
Combien de matins encore ?

Jean-François Dudoué, Ban Public

Tristes secondes

Il y a dans la vie
des secondes interminables.
De ces secondes où il semble
que le monde nous abandonne
Des secondes si longues
que l’on croirait des années
On ne sait plus parfois
Qui l’on est, où l’on va :
Est-ce le monde
qui nous abandonne ?
Est-ce nous qui refusons
ce qu’il nous donne ?
Qu’elles sont longues ces secondes
quand elles font remonter
du plus profond de nous-même
ces ruisseaux d’eau claire
qui déposent sur nos joues
des traces d’amertume,
des cristaux de souffrance.
Qu’elles sont longues ces secondes
et si lourdes à porter.
Combien de secondes encore
Avant que le soleil ne sèche
ces ruisseaux sur nos joues si pâles ?
Combien de secondes encore ? 
 
Jean-François Dudoué, Ban Public

Prison d’Alexandrie

Encore une journée qui vient de passer,
Sans un fait important ne puisse la marquer
Comm’sur un vieux tableau d’un portrait sans âge,
Les jours passent et ont le même visage
Comm’une photographie, une image
C’est toujours le morne et triste paysage.

Le temps ne laisse comme solides traces :
- une petite ride que rien n’efface
- une nouvelle croix sur chaque agenda ;
Ce que je veux n’avance que d’un petit pas...
Je me désespère mais il arrivera
L’instant merveilleux où tu seras dans mes bras
Solitaire, je me noie dans ma cellule,
Je m’enfonce sans faire la moindre bulle,
Submergé par le cafard de l’habitude,
Et mon désespoir n’ait de ma lassitude....
Mais devrais-je vendre mon âme à Satan,
Pour ne pas avoir à attendre, si longtemps
Que dois-je faire pour pouvoir sortir d’ici,
Pour quitter, à jamais l’Enfer de Fleury ?
Pour que je connaisses par Toi : le Paradis ?
Quand Je sortirai, seras-tu aussi "Jolie" ?

Il ne pourrait exister de plus fascinant
Ton corps - aux contours excitants - si émouvant !
Gentil Petit Dragon, Beauté Magnifique,
Tu n’as rien d’un rêve chimérique
Ni d’une vieille légende Biblique
Mais tu es d’une splendeur fantastique.
Il faut dans toute attente : l’Espérance
Peu à peu, tout arrive à échéance.
Dans l’attente : Patience et Espérance,
Courage, bientôt, viendra ma délivrance.

Maintenant, il ne reste plus qu’à patienter
Le moment, ou enfin, je pourrais t’approcher.
Je ne puis t’oublier, malgré l’isolement
Que procure cet ermitage ennuyant
Je ne peux souhaiter qu’une chose hardiment
T’avoir après la fin de cet internement...

L’Ange déchu, Ban Public

Prisonnier de la solitude (isolé du monde…)

SILENCE… PLUS RIEN NE BOUGE !

Un temps mort où rien n’existe.
Noir existentiel poignant
Isolé, on s’enlise, s’enfonce…
La gorge nouée, paralysée,
On crie sa pensée avec les yeux
Exorbités, saillants, injectés
Du sang glacé qui déchire
Les veines tendues, comme…
Cordes d’une harpe maléfique.
Seul le souffle de la peur
Gonfle les poumons d’un air
Empoisonné de haine palpable.

  L’Ange déchu, Ban Public