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LA CENSURE EN DETENTION
Circulaire de l’Administration pénitentiaire R0609 de déc. 1986
La correspondance sous pli ouvert :
1-La correspondance sous pli ouvert est une relation par écrit entre deux personnes nommément désignées qui se distingue des bulletins, lettres, circulaires, tracts, imprimés dont le contenu ne concerne pas spécifiquement et exclusivement le destinataire.
2-Le principe de la liberté de correspondance :
- les prévenu(e)s peuvent écrire tous les jours et recevoir de toute personne de leur choix des lettres telles que définies ci-dessus et ce, sans aucune limitation de nombre ni restriction quant à la longueur (art. D.65 du Code de procédure pénale (CPP)).
- quelque soit le type d’établissement dans lequel ils (elles) sont détenu(e)s, les condamné(e)s peuvent écrire et recevoir de toute personne de leur choix des correspondances telles que définies ci-dessus (art. D.414 du CPP) Il y a lieu de considérer que les dispositions de l’article D.65 du CPP relatives à l’absence de limitation du nombre et de la longueur des lettres pouvant être écrites ou reçues par les prévenu(e)s, sont applicables également aux condamnés.
- les détenu(e)s de nationalité étrangère peuvent, s’ils le désirent et en toutes circonstances, correspondre avec les agents consulaires de l’Etat dont ils sont ressortissants et cela quelque soient les accords avec la France. Le chef d’établissement, notamment à l’occasion de l’entretien dans le cadre de l’accueil le jour de l’incarcération des entrants (art. D.285 du CPP), informe les détenu(e)s concerné(e)s de la possibilité qu’ils ont de correspondre avec le représentant diplomatique ou consulaire de leur pays et leur communique les adresses de ceux ci, qui sont normalement disponibles au service du parquet ou de la préfecture.
3-Les limitations au principe de la liberté de correspondance :
- en cas de mesure disciplinaire (mitard), les prisonniers ne sont autorisés qu’à écrire à leur famille (art. D.169 du CPP) et les représentants diplomatiques et consulaires de l’Etat dont ils sont ressortissants. Les correspondances entre amis et/ou visiteurs de prisons sont bloquées.
- en application d’une décision de l’autorité compétente :
* pour les prévenu(e)s, les restrictions émanant du magistrat saisi du dossier sont portées à la connaissance du chef d’établissement au moyen de la notice individuelle du (de la) prévenu(e) (art. 116 et D.65 du CPP).
* pour les détenu(e)s placé(e)s sous écrou extraditionnel étant soumis au régime de détention des prévenu(e)s, il appartient dans le cadre de la procédure d’extradition au procureur général près la cour d’appel d’adresser toute instruction en matière de courrier et de procéder, si nécessaire, au contrôle de ce dernier.
- Le chef d’établissement peut apporter des restrictions au droit de correspondance lorsque cette correspondance paraît compromettre gravement la réadaptation du (de la) détenu(e) ou la sécurité et le bon ordre de l’établissement (art. D.414 du CPP). La commission de l’application des peines doit être informée de cette décision, qui, en aucun cas, ne peut concerner le conjoint ou les membres de la famille du (de la) détenu(e).
4-Les modalités de contrôle :
- Les correspondances susceptibles d’être contrôlées sont remises ouvertes tant à l’arrivée qu’au départ.
- Il n’y a pas lieu d’effectuer une lecture systématique des correspondances tant à l’arrivée qu’au départ de l’établissement (art. D.416 du CPP). Dans la pratique, et pour des détenu(e)s ne faisant pas l’objet de remarque particulière, il convient de procéder à des contrôles inopinés et fréquents de leurs correspondances. En revanche, il importe de maintenir le contrôle régulier du courrier des détenus dont la personnalité ou les antécédents font craindre qu’il comporte des informations susceptibles de mettre en cause la sécurité des personnes ou celle des établissements.
- Le contrôle effectué par l’administration pénitentiaire (AP) a pour objet de garantir la sécurité des personnes ou celle des établissements pénitentiaires et porte, pour ce faire, sur le contenu des plis et la teneur des informations qu’ils contiennent. Il ne saurait par là même se substituer à celui réalisé par le magistrat saisi du dossier qui peut être d’une nature différente compte tenu des objectifs poursuivis. L’envoi par pli postal de tout objet pouvant être utilisé comme moyen de don, d’échange, de trafic, de tractation ou de paris entre détenu(e)s est prohibé.En revanche est autorisé l’envoi de photographies à caractère familial et de timbres.
5- Diligences à accomplir lors de la retenue :
- Les correspondances faisant l’objet d’une retenue fondée (point 4) sont, si possible, retournés à l’expéditeur ou à défaut classées dans la partie pénitentiaire du dossier individuel du détenu (art. D.159 et D.160 du CPP). Les objets saisis dans ces correspondances sont, eux aussi, si possible, retournés à l’expéditeur ou à défaut placés au vestiaire du détenu. Ils leur seront remis lors de son élargissement s’il s’agit d’objets dont la détention est licite et n’est pas soumise à une autorisation particulière. En aucun cas, lesdits objets ne peuvent être vendus par les services de l’AP.
- Les correspondances qui contiennent des éléments ou des propos, mettant notamment en cause d’une façon particulièrement grave la sécurité des personnes ou celle de l’établissement, sont transmises par le chef d’établissement au procureur de la République du lieu de détention dès lors qu’elles sont susceptibles de constituer une infraction pénalement punissable.
- La décision de retenue et éventuellement d’envoi au procureur de la République prise par le chef d’établissement, à l’égard d’une correspondance ou d’un objet contenu dans cette dernière adressée ou envoyée par un détenu, est notifiée à ce dernier.
- En plus de ce contrôle interne à l’AP, les correspondances des détenus prévenus sont transmises au magistrat saisi du dossier (art. D.416 du CPP). La transmission au magistrat saisi du dossier des correspondances est réalisée sans retard.
La correspondance sous pli fermé :
1-La correspondance sous pli fermé empêche d’effectuer à leur égard un contrôle et par voie de conséquence de les retenir.
2-Le principe de la liberté de correspondance :
La correspondance sous pli fermé est limitée aux seuls courriers des détenu(e)s avec le conseil (avocat qui assure ou a assuré la défense de l’intéressé) (art. 716 du CPP), les autorités administratives et judiciaires (art. D.262 du CPP), l’aumônier de l’établissement (art. D438 du CPP) et les travailleurs sociaux affectés dans les services placés sous l’autorité du garde des Sceaux (art. D.469 du CPP). Il convient de rappeler la possibilité offerte aux détenu(e)s (art. D.183 du CPP - nouvel alinéa) d’adresser sous pli fermé leurs requêtes portant sur un domaine relevant de la compétence de la commission de surveillance de l’établissement pénitentiaire, au président de cette dernière, soit le préfet, commissaire de la République, ou le sous-préfet, commissaire adjoint de la République du département dans lequel se trouve le lieu de détention. Par définition la notion de correspondance et de lettre exclut tout recours au courrier sous pli fermé pour transmettre des objets. Ainsi, dès lors qu’il résulte de l’aspect extérieur de l’enveloppe ou d’une palpation que celle-ci contiendrait autre chose que du courrier il convient de refuser de l’expédier et de le retourner à l’intéressé pour qu’il en modifie le contenu.
3- Les limitations au principe de la liberté de correspondance sous pli fermé :
- Le principe de l’exercice des droits de la défense implique que la correspondance sous pli fermé est autorisée en toutes circonstances. La mise en cellule de punition du (de la) détenu(e) ou l’interdiction de communiquer ordonnée (art. 116 du CPP) ne saurait faire obstacle à ce qu’il (elle) corresponde librement.
- Les correspondances avec le conseil doivent clairement faire apparaître sur les enveloppes la qualité de leur destinataire et celle de leur expéditeur : adresse professionnelle au moyen en particulier d’un cachet du conseil et le nom et prénom du (de la) détenu(e).
- Les correspondances avec les autorités habilitées doivent comporter soit la mention nominative du titulaire des fonctions et leur intitulé officiel, soit le seul nom du correspondant sans aucune référence à ses titres ou qualités, lorsque ce dernier est notoirement connu comme les exerçant. Toutes les correspondances adressées par un(e) détenu(e) aux autorités doivent être au départ de l’établissement enregistrées sur un registre spécial et envoyées dans les délais les plus brefs à leur destinataire. Les détenu(e)s qui multiplieraient des correspondances injustifiées aux autorités encourent une sanction disciplinaire (art. D.262 du CPP - alinéa 3).
- L’interdiction de communiquer (art. 116 du CPP) suspend les courriers entre le (la) détenu(e) et l’aumônier de l’établissement et les travailleurs sociaux habilités par le ministère de la Justice sauf mention expresse dans l’avis d’interdiction décidée par le juge (art. D32-1 du CPP).
La correspondance - Dispositions diverses :
1-Mention de l’incarcération sur le courrier
En aucun cas les agents chargés du contrôle ou de l’acheminement de la correspondance sous pli ouvert ou sous pli fermé, ne doivent apposer sur les enveloppes et les courriers même le cachet de l’établissement ou toute autre mention faisant apparaître l’incarcération de l’auteur ou du destinataire du courrier.
2-Suivi du courrier
Les lettres autorisées sous pli fermé sont expédiées dans la mesure du possible au détenu, à sa nouvelle adresse, lorsque ce dernier a été transféré ou libéré. Les autres correspondances sont retournées à leur expéditeur.
3-Information du prisonnier
Copie de la totalité du chapitre sur les dispositions diverses de la présente circulaire ou seulement celle de la liste des autorités administratives et judiciaires, peuvent être communiquées au détenu qui en fait la demande, en application des dispositions de la loi du 17 juillet 1978 relatives à l’accès aux documents administratifs et selon les modalités définies par la circulaire d’application AP 85-31-G 1 du 13 novembre 1985 (communication aux détenus de documents administratifs).
Sortie des écrits des prisonnier(e)s :
1- Autorisation de sortie
la sortie des écrits faits par un détenu en vue de leur publication ou de leur divulgation, sous quelque forme que ce soit, ne peut être autorisée que par décision du ministre de la Justice (art. D.430 du CPP 1er alinéa). Sous réserve de l’exercice des droits de la défense, tout manuscrit rédigé en détention peut être retenu pour des raisons d’ordre, par décision du ministre de la Justice ou du chef d’établissement (art. D.430 du CPP 2ème alinéa). Il est placé au vestiaire de son auteur pour lui être remis le jour de son élargissement. Si l’auteur est prévenu, le magistrat saisi de son dossier est, saisi avant le ministre de la Justice de la demande de sortie dudit manuscrit.
2- Obligations du chef d’établissement
Les écrits rédigés par un(e) détenu(e) en vue de leur publication ou de leur divulgation sont transmis pour décision, par le chef d’établissement au bureau de la Réinsertion (G2) de la direction de l’AP. Si l’auteur est prévenu, le chef d’établissement soumet au magistrat saisi du dossier de l’information le manuscrit et il procède ensuite à son envoi pour décision, au bureau de la Réinsertion (G2) en précisant expressément la suite que souhaite voir donner le magistrat instructeur à la demande d’autorisation de publication formulée par le détenu.
3- Réalisation de journaux ou publications diverses rédigés et préparés par des détenus
La décision de principe d’autoriser la réalisation par les détenus et la diffusion à l’intérieur ou à l’extérieur de la détention de publications appartient à la direction de l’AP (bureau G2) (art. D.430 du CPP 3ème alinéa). Afin que la direction de l’AP soit en mesure d’exercer un contrôle, deux exemplaires de chacun des numéros de la publication sont transmis par le chef d’établissement au bureau de la Réinsertion (bureau G2) sous couvert du directeur régional. Il appartient au chef d’établissement, lorsque l’autorisation de principe a été accordée par l’administration centrale, d’exercer personnellement un strict contrôle du contenu de la publication avant diffusion. Ce contrôle doit porter non seulement sur la conformité des articles et documents aux dispositions de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse, mais également sur leur adéquation aux objectifs généraux de réinsertion et sur leur impact au regard de l’ordre public tant à l’intérieur de l’établissement qu’à l’extérieur.
Conseils Pratiques
Il arrive, lorsqu’on écrit à des prisonniers, de vouloir leur joindre des tracts, des coupures de journaux, des communiqués d’autres prisonniers, etc. Se pose alors la question de la retenue ("censure") de ce genre de document. Selon le CPP (art. D.415 et D.416), et de la présente circulaire, les lettres peuvent être retenues si elles "contiennent des menaces précises contre la sécurité des personnes ou celle des établissements pénitentiaires", ou si elles servent à des "trafics, tractations, ou paris". L’AP doit prévenir le détenu de la retenue du courrier et réexpédier le texte saisi si possible (adresse expéditeur mentionnée). Pour finir, la décision de retenue est susceptible de recours devant le Tribunal Administratif après avoir fait un recours gracieux auprès du directeur (tout simplement lui rappeler les termes de la loi et en quoi la retenue est une erreur d’appréciation, et lui expliquer qu’il lui est possible de revenir sur sa décision avant une procédure administrative). Pensez à numéroter toutes les pages de vos courriers, écrire le nombre timbres envoyés, mettre votre adresse sur l’enveloppe, cela vous aidera lors d’un recours possible.