Publié le mardi 14 juin 2016 | http://prison.rezo.net/la-television-et-la-radio/ La radio ne fit son entrée en prison qu’en 1971. Et la télévision, en 1975, en salles collectives. Elle ne fut autorisée en cellule qu’à partir de décembre 1985, sur une décision du garde des Sceaux Robert Badinter. Comme le souligne son conseiller technique d’alors, Jean Favard, de toutes les mesures prises à cette époque, elle est « sans conteste celle qui a le plus changé la vie quotidienne des détenus » (RSC, 1986, n° 4). Véritable « fenêtre sur l’extérieur », elle permet de garder un lien avec le monde libre, d’accéder à du divertissement et à l’information. Cependant, faute de stimulation ou d’activités suffisantes en détention, la télévision constitue parfois la seule « occupation » des détenus. Elle est aussi un facteur de tentions en cellule partagée : pour le choix du programme, le paiement, ou les durées d’utilisation. Certains détenus sont obligés de supporter la télévision allumée en permanence par un compagnon de cellule. Son prix de location a également été critiqué. En novembre 2010, deux amendements en faveur de la gratuité de la télévision en prison, soutenus par Robert Badinter, ont été déposés l’un au Sénat, l’un à l’Assemblée, lors du débat sur le budget 2011 du ministère de la Justice. La proposition n’a pas été adoptée. À la place, le ministère a mis fin à l’extrême hétérogénéité des prix de location qui pouvaient atteindre 41 euros par mois, en lançant un programme d’uniformisation des prix à 8 euros mensuels par poste de télévision. Quelles sont les conditions d’accès à la télévision ? Les personnes détenues sont autorisées à avoir la télévision en cellule, sauf lorsqu’elles se trouvent au quartier disciplinaire ou qu’une privation temporaire de l’usage de la télévision a été prononcée à leur encontre. La durée de cette sanction disciplinaire ne peut dépasser un mois pour les majeurs, quinze jours pour les mineurs. Les téléviseurs sont généralement loués par l’intermédiaire de l’administration pénitentiaire, mais ils peuvent être également achetés dans les établissements pour peines. À l’égard de certaines personnes, l’administration assure toutefois une mise à la disposition gratuite : les « arrivants », les « mineurs » et les personnes « sans ressources suffisantes », c’est à dire celles disposant de moins de 50 euros par mois. Un seul poste de télévision est admis dans chaque cellule, quel que soit le nombre d’occupants. Les conditions d’utilisation sont définies dans le règlement intérieur de l’établissement. Généralement, il est précisé que « le prêt de téléviseur entre codétenus est interdit », mais également que le poste ne doit pas être démonté ni les branchements modifiés, et que son « usage ne doit pas être gênant » pour les autres personnes sous peine de sanction disciplinaire (faute du 3e degré). Un accès à la TNT et à Canal plus est possible dans tous les établissements, et le choix des programmes est libre. Seuls les mineurs peuvent se voir imposer des restrictions tenant à leur âge : l’accès à certains programmes leur est en principe interdit (pornographie, violence, etc.). En établissements pour mineurs, l’alimentation est coupée à 23 heures, sauf prolongation accordée par le chef d’établissement. Dans la plupart des établissements pour peines, une salle commune est par ailleurs prévue pour un usage collectif de la télévision en journée. Quelles sont les modalités de location d’un téléviseur ? Après l’écrou, des informations sur les modalités d’accès à la télévision et des contrats de location doivent être délivrés aux arrivants. La location des postes de télévision est assurée par des entreprises privées auxquelles l’administration a donné délégation. En vertu d’instructions du garde des Sceaux datant d’octobre 2010, une harmonisation des tarifs de location a été engagée pour aboutir à un prix unique de « 8 euros par cellule et par mois » (N. B. : modifié depuis pour atteindre un prix de 14,15 euros en 2016 ; cf. article R. 541-1 du Code de justice administrative). Depuis le 1er janvier 2012, ce tarif est effectif dans les établissements en gestion publique et le sera dans les prisons en gestion déléguée à partir du 1er janvier 2013. Dans l’attente, le tarif dans ces établissements est de 18 euros par mois. Auparavant, les tarifs n’étaient pas encadrés en gestion publique et pouvaient atteindre 41 euros par mois. En principe, la location est mensuelle et le prix est partagé entre les occupants de la cellule. Toutefois certains établissements fonctionnent par quinzaine. Ainsi si deux personnes occupent une cellule, 4,50 euros sont prélevés tous les quinze jours sur leur compte nominatif (pour le tarif de 18 euros mensuels). Dans les autres cas, la somme due est débitée en fin de mois et, en cas de transfert ou de libération en cours de contrat, le prix est recalculé au prorata des jours d’utilisation. Les contrats de location précisent les charges et obligations des locataires. Ils sont responsables de la « bonne marche » de l’appareil. En cas de dommages causés à l’appareil par un usage anormal ou des dégradations volontaires, leur responsabilité est engagée. Le coût des réparations (ou la valeur de remplacement de l’appareil) leur est imputé et des sanctions disciplinaires peuvent être prononcées (confinement, placement au quartier disciplinaire pour sept jours maximum, privation de l’usage de la télévision pour un mois, etc.). Quelles sont les modalités d’achat d’un téléviseur ? La possibilité d’acheter un téléviseur est réservée aux personnes détenues en établissements pour peines. L’achat se fait en « cantine », et il est préalablement soumis à l’autorisation du chef d’établissement. Avant de donner son accord, celui-ci doit « vérifier que le détenu dispose de fonds suffisants sur son compte nominatif » et qu’il « ne possède pas déjà d’autre poste de télévision (un détenu n’est autorisé à ne posséder qu’un seul poste) pour des raisons de lutte contre l’encombrement des cellules et contre le trafic ». S’il « s’agit de remplacer un poste ancien », ce dernier devra être préalablement « restitué et déposé au vestiaire », puis, remis, le cas échéant, « à la famille du détenu ». Par ailleurs, tous les types de téléviseurs ne sont pas autorisés. Afin de « limiter l’encombrement des cellules » et « faciliter les opérations de contrôle » ou « manutention », les appareils doivent répondre à certaines caractéristiques : ils doivent être de « type écran plat », la diagonale de l’écran ne doit pas dépasser « 53 centimètres » et le poids ne pas excéder « 8 kg ». Certains établissements proposent plusieurs modèles en cantine, d’autres n’en offrent qu’un seul. Les prix oscillent généralement entre 200 et 380 euros. L’achat d’un téléviseur implique, « pour son propriétaire, l’acceptation de son raccordement au réseau de diffusion interne de l’établissement et donc du paiement d’une contribution ». Cette contribution qui permet d’accéder à la TNT et au bouquet de chaînes payantes de Canal plus a été fixée à 13 euros par mois. L’acquisition d’un poste entraîne également l’assujettissement « au paiement de la redevance audiovisuelle » une fois par an (125 euros environ pour la France métropolitaine et 80 euros pour les départements d’outre-mer). Les personnes dont le « revenu fiscal de référence » (qui figure sur les avis d’imposition) est égal à zéro en sont toutefois exonérées. Le non-paiement de ces différentes cotisations peut entraîner le prononcé des sanctions disciplinaires applicables aux fautes du 3e degré, notamment le retrait de l’appareil pour une durée d’un mois. En cas de transfert, le transport de la télévision est effectué « par une société de transport privée » aux frais du détenu. Toutefois, si « les conditions matérielles de transfert le permettent et que le détenu le sollicite », l’administration pénitentiaire peut acheminer elle-même le poste de télévision. Dans ce cas, le détenu est « informé de ce que l’administration ne pourra être tenue pour responsable d’éventuels dégâts survenus à l’occasion du transport dans les véhicules de l’administration ». Qu’est-ce que le « canal vidéo interne » ? Le « canal interne » est un circuit de diffusion audiovisuel propre à l’établissement pénitentiaire. Les personnes reçoivent les émissions sur leur téléviseur, sur une chaîne réservée aux programmes de la prison. Le plus souvent, il s’agit d’informations générales sur l’établissement (activités proposées, présentation des intervenants, des différents services, etc.). Mais il peut s’agir aussi de montages d’informations réalisés par des détenus dans le cadre d’ateliers vidéo ou de films en DVD. Selon les directives de la Direction de l’administration pénitentiaire, la sélection des documents diffusés doit tenir compte de la mission de réinsertion de l’administration : les films pornographiques ont ainsi été interdits de diffusion sur le « canal interne » par une note du 26 février 1996. Des détenus travaillant au « service général » assurent généralement le fonctionnement du canal, avec l’aide de professionnels de l’image. Selon les directives de la Direction de l’administration pénitentiaire, la sélection des documents diffusés doit tenir compte de la mission de réinsertion de l’administration : les films pornographiques ont ainsi été interdits de diffusion sur le « canal interne » par une note du 26 février 1996. Des détenus travaillant au « service général » assurent généralement le fonctionnement du canal, avec l’aide de professionnels de l’image. Selon le ministère de la Justice, « 36 établissements ont un canal vidéo interne actif ». Pour le contrôleur général des lieux privatifs de liberté, « le canal vidéo interne est sous-utilisé dans les établissements alors que son coût est important. Il y tient une place modeste alors qu’il serait possible, par ce biais, de tourner et de monter de petits films pour valoriser les productions des détenus ». Il pourrait également « servir de relais à la diffusion pour l’ensemble de la population pénale des cours d’enseignement dispensés à un petit nombre de détenus dans une salle de classe ». Quelles sont les conditions d’accès à la radio ? Toutes « les personnes détenues peuvent acquérir par l’intermédiaire de l’administration pénitentiaire » un « récepteur radiophonique ». Cependant, les appareils munis d’un système d’enregistrement sont interdits. Généralement, plusieurs modèles, plus ou moins perfectionnés (lecteur de CD ou de cassettes intégré) sont proposés à la vente par la « cantine » de l’établissement. Les prix peuvent osciller entre 16 et 120 euros selon les modèles. Les conditions d’utilisation des récepteurs sont définies dans le règlement intérieur de l’établissement. Généralement, il est précisé que l’appareil « doit être utilisé de façon à ne pas gêner les codétenus et ne pas troubler le bon fonctionnement de l’établissement, sous peine d’être retiré ». La violation de cette interdiction peut entraîner le prononcé des sanctions disciplinaires applicables aux fautes du 3e degré, et notamment la privation de l’appareil pendant une durée d’un mois maximum. Le règlement intérieur précise également qu’en cas de transfert « les appareils achetée dans un autre établissement ne sont remis au détenu qu’après contrôle de l’appareil et présentation d’un justificatif » de propriété (bon de garantie, facture). Existe-t-il des émissions de radio destinées aux prisonniers ? Certaines radios locales organisent la diffusion de messages de proches à destination des détenus. C’est le cas notamment à Angers, où une émission est animée par des étudiants membres de l’association Génépi, (Radio G-Génépi). Ou encore à Marseille, où deux radios locales (Radio Galère, Radio Dialogue) diffusent des émissions similaires. À l’échelle nationale, RCF (Radios chrétiennes francophones) diffuse également des messages de ce type chaque dimanche. Cela permet aux proches qui ne peuvent se rendre aux parloirs de donner de leurs nouvelles, ou à d’autres d’expliquer pourquoi ils n’ont pas pu, par exemple, se rendre au parloir...
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