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Les femmes purgeant une peine d’emprisonnement de longue durée

Les femmes purgeant une peine d’emprisonnement de longue durée
par Brian A. Grant et Sara L. Johnson [1]
Direction de la recherche, Service correctionnel du Canada

Le Rapport du Groupe de travail sur les délinquants purgeant une peine de longue durée  [2] de 1998 traçait le profil des délinquants sous responsabilité fédérale purgeant une peine de longue durée, en plus de présenter des recommandations sur la manière de rendre leur période d’incarcération plus productive.
Cet article présente les caractéristiques des femmes qui purgeaient une peine de longue durée sous responsabilité fédérale le 1er février 1999. Les femmes ont été réparties en trois groupes : les condamnées à perpétuité purgeant une peine pour meurtre au premier degré, les condamnées à perpétuité purgeant une peine pour meurtre au second degré et les délinquantes purgeant une peine d’une durée déterminée d’au moins 10 ans.

En 1999, on dénombrait dans les pénitenciers fédéraux du Canada 82 femmes qui purgeaient une peine d’au moins 10 ans [3]. Selon le Rapport du Groupe de travail sur les délinquants purgeant une peine de longue durée, les délinquants purgeant une peine de longue durée doivent être gérés différemment. La Commission nationale des libérations conditionnelles examinera éventuellement leur cas pour déterminer s’ils sont prêts à être mis en liberté. Ces délinquants doivent donc être convenablement préparés afin de pouvoir retourner en toute sécurité dans la société.
Il est également signalé dans le Rapport que les délinquants purgeant une peine de longue durée peuvent servir de ressources dans les établissements. Vu la durée de leur incarcération, ils peuvent recevoir la formation voulue pour assurer des services dans l’établissement qui rendront leur période d’incarcération plus utile et productive. Les compétences acquises dans l’établissement peuvent être transférées à des lieux de travail dans la collectivité après la mise en liberté, ce qui accroît les chances de réussite de la réinsertion sociale. En ce qui concerne notamment les délinquantes, le Service a mis en oeuvre des programmes qui semblent particulièrement salutaires à celles qui purgent une longue peine. Ces dernières sont, par exemple, de bonnes candidates pour le Programme d’entraide des délinquantes  [4] et le Programme de dressage de chien, vu la formation intensive et le caractère continu de ces programmes.
Dans cet article, les délinquantes purgeant une peine d’au moins 10 ans sont considérées comme des délinquantes purgeant une peine de longue durée.
Au Canada, les peines de détention sont imposées pour une période fixe et sont appelées des peines d’une durée déterminée. Cela ne signifie pas que la délinquante demeure en détention pendant toute la durée de la peine, mais plutôt qu’elle peut être libérée pour achever sa peine dans la collectivité après avoir purgé le tiers de sa peine en détention si la Commission nationale des libérations conditionnelles lui octroie la libération conditionnelle totale. Si la délinquante est encore en détention après avoir purgé les deux tiers de sa peine, elle obtient normalement la libération d’office. Dans des circonstances exceptionnelles, elle peut être obligée de purger toute sa peine dans un pénitencier.

Les tribunaux condamnent certains délinquants à une peine d’une durée indéterminée. La forme la plus courante de cette peine est la peine « à perpétuité ». Une femme condamnée à perpétuité demeure sous l’autorité du Service correctionnel du Canada le reste de ses jours, même si elle n’est pas nécessairement incarcérée pendant tout ce temps.
Au moment du prononcé de la sentence, l’accusé(e) reconnu(e) coupable de meurtre au premier degré doit automatiquement purger 25 ans de sa peine en détention avant d’être admissible à la libération conditionnelle. Dans le cas des personnes condamnées à perpétuité pour meurtre au second degré ou une autre infraction, le juge fixe la date d’admissibilité à la libération conditionnelle entre 10 et 25 ans. Après avoir purgé le minimum de leur peine de détention, les délinquants sont admissibles à la libération conditionnelle et peuvent être libérés en vue de purger le reste de leur peine dans la collectivité si la Commission nationale des libérations conditionnelles est convaincue qu’ils peuvent être libérés en toute sécurité. Après sa mise en liberté, un délinquant ou une délinquante peut être réincarcéré(e) si il(elle) manque aux conditions de la mise en liberté ou récidive.

Groupes témoins
Nous avons comparé toutes les femmes et tous les hommes en détention purgeant une peine de longue durée. Il y a trois types de peines de longue durée :
* Perpétuité - meurtre au 1er degré :
délinquants purgeant une peine à perpétuité pour meurtre au premier degré.
* Perpétuité - meurtre au 2e degré :
délinquants purgeant une peine à perpétuité pour meurtre au second degré. Une peine à perpétuité peut être imposée pour une infraction autre que le meurtre, mais il n’y a actuellement aucune femme dans cette catégorie.
* Peine d’une longue durée déterminée :
délinquants purgeant une peine d’une durée déterminée d’au moins 10 ans.

Description
Tableau 1

Environ un quart des femmes en détention purgent une peine de longue durée, contre un tiers chez les hommes. Le Tableau 1 présente une comparaison des hommes et des femmes selon le type de peine de longue durée. Le 1er février 1999, il y avait 82 femmes qui purgeaient une peine de longuedurée, dont la majorité purgeaient une peine à perpétuité pour meurtre au second degré (54 %). Environ le quart des femmes condamnées à une peine d’une longue durée déterminée purgeaient une peine d’au moins 10 ans, contre les deux cinquièmes chez les hommes. Comparées aux hommes, les femmes sont un peu plus susceptibles de purger une peine pour meurtre au premier ou au second degré (20 %). Elles sont toutefois moins susceptibles de purger une peine d’une longue durée déterminée.

Origine raciale. Environ les trois quarts des femmes qui purgent une peine de longue durée sont de race blanche ; 15 % sont Autochtones et 10 % appartiennent à un autre groupe racial. Cela concorde avec le profil racial de l’ensemble de la population carcérale féminine sous responsabilité fédérale. Les femmes condamnées pour meurtre au premier degré avaient plus tendance à être de race blanche (24 %) qu’à appartenir à un autre groupe racial, tandis que les Autochtones (67 %) et les femmes appartenant à un autre groupe racial (63 %) avaient plus tendance à purger une peine à perpétuité pour meurtre au second degré. Dans chacun des groupes raciaux, environ le quart des femmes purgent une peine d’une durée déterminée d’au moins 10 ans.

Âge. Les femmes purgeant une peine à perpétuité pour meurtre au premier degré étaient en moyenne 10 ans plus âgées que celles des deux autres groupes. Ainsi, l’âge moyen de ces femmes était d’un peu moins de 50 ans, tandis que celui des femmes purgeant une peine à perpétuité pour
meurtre au second degré et celui des femmes purgeant une longue peine d’une durée déterminée était respectivement de 38 ans et d’environ 36 ans. En outre, les pre m i è res étaient âgées en moyenne de 41 ans au moment de leur admission, tandis que celles des deux autres groupes étaient âgées respectivement de 30 et 31 ans à l’admission. Les premières seront âgées de 64 ans en moyenne à la date de leur admissibilité à la libération conditionnelle totale.

Type d’infraction. Dans cet échantillon, les infractions les plus graves commises par la majorité des femmes purgeant une longue peine d’une durée déterminée sont l’homicide, la tentative de meurtre et le complot
en vue de commettre un meurtre (13 délinquantes ou 59 %). En outre, 18 % des femmes purgeant une peine de longue durée ont été reconnue coupables de voies de fait tandis que les autres ont été condamnées pour d’autres infractions
Tableau 2

Tableau3

Durée de le peine purgée en détention. Le Tableau 3 permet de voir la part d’une peine de longue durée que les femmes ont purgée depuis leur admission. La plupart de ces femmes ont purgé une part relativement petite de leur peine en détention (5 ans ou mois), et il leur reste par conséquentbeaucoup de temps à faire. Cette constatation est particulièrement importante étant donné que les condamnées à perpétuité ne seront admissibles à la libération conditionnelle que dans 10 à 25 ans et qu’elles passeront donc passablement de temps en détention avant leur mise en liberté.

Niveau de besoins. Peu après leur admission dans un pénitencier fédéral, les délinquantes font l’objet d’une évaluation visant à déterminer leur niveau de besoins criminogènes. Ces besoins influent sur le risque de récidive, mais, contrairement aux facteurs de risque statiques évalués à l’aide des antécédents criminels, ils sont dynamiques et peuvent être changés au moyen d’interventions correctionnelles. Les programmes qui ciblent des aspects comme la toxicomanie, le dysfonctionnement familial et l’emploi jouent sur les facteurs de risque dynamiques ou besoins criminogènes.
Graphique 1

Les résultats présentés au Graphique 1 montrent également que les femmes condamnées à perpétuité pour meurtre au premier degré ont des besoins criminogènes moins marqués que les femmes classées dans les deux autres groupes de femmes condamnées à des peines de longue durée. Celles qui purgent une peine à perpétuité pour meurtre au second degré ou une peine d’une longue durée indéterminée sont les plus susceptibles d’avoir un niveau de besoin moyen ou élevé. En plus de donner une cote globale des facteurs dynamiques, l’Évaluation initiale des délinquants (EID) fournit des cotes pour sept domaines individuels, y compris l’emploi, les relations conjugales et familiales, les fréquentations et interactions sociales, le comportement dans la collectivité, la toxicomanie, l’orientation personnelle et affective et l’attitude. Pour quatre de ces domaines (attitude, comportement dans la collectivité, toxicomanie et fréquentations), les femmes purgeant une peine d’une durée indéterminée ont présenté le niveau le plus élevé de besoins, suivies de celles qui purgeaient une peine à perpétuité pour meurtre au second degré et des condamnées à perpétuité pour meurtre au premier degré, qui avaient la cote la plus basse. Alors que 71 % des femmes condamnées à perpétuité pour meurtre au second degré avaient des besoins dans les domaines de l’emploi et de l’éducation, seulement 23 % des condamnées pour meurtre au premier degré avaient ces besoins à leur admission.
Graphique 2

Résumé
La plupart des délinquantes (89%) purgeant une peine de longue durée ont été reconnues coupables d’un homicide ou d’une infraction liée à l’homicide (tentative de meurtre et complot en vue de commettre un meurtre). Toutefois, nous avons constaté des diff é rences entre les groupes selon le type de peine. Dans l’ensemble, les femmes purgeant une peine pour meurtre au premier degré semblent se distinguer des autres femmes purgeant une peine de longue durée. En ce qui concerne les facteurs démographiques, elles sont plus âgées, ont été admises plus vieilles et sont plus portées à être de race blanche. Elles semblent aussi avoir moins de besoins criminogènes. D’après les comparaisons que nous avons faites, les femmes purgeant une peine à perpétuité pour meurtre au second degré présentent des caractéristiques ressemblant davantage à celles des femmes purgeant une peine d’une durée déterminée d’au moins 10 ans qu’à celles des condamnées à perpétuité pour meurtre au premier degré. Les caractéristiques des femmes condamnées pour meurtre au premier degré présentent un défi de taille aux travailleurs correctionnels, qui savent qu’elles passeront beaucoup de temps en incarcération, soit au moins 25 ans. Les compétences qu’elles possèdent et les nouvelles compétences qu’elles sont susceptibles d’acquérir durant cette longue période d’incarcération pourraient contribuer au fonctionnement des établissements dans lesquels elles doivent vivre, en plus de les employer dans des activités constructives durant leur peine.

[1] 340, avenue Laurier ouest, Ottawa (Ontario) K1A 0P9

[2] Mise en oeuvre du « concept Life Line » Rapport du Groupe de travail sur les délinquants purgeant une peine de longue durée, février 1998

[3] Au Canada, les peines d’une durée minimale de deux ans sont purgées dans les pénitenciers fédéraux

[4] Blanchette, K. et G. Eljdupovic-Guzian, « Résultats d’une étude pilote du Programme d’entraide des délinquantes », Rapport R-73, Service correctionnel du Canada, 1998

 
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