L’Acafad, une porte ouverte pour les familles de détenus
Installée depuis trois ans dans un appartement entièrement rénové, situé rue du Palais, à quelques dizaines de mètres de la Maison d’arrêt de Bourg-en-Bresse, l’Acafad, association culturelle des détenus et accueil de leurs familles, cherche à étoffer son équipe de bénévoles.
Quatre petites chaises et une belle table basse, bien ronde, au beau milieu de l’appartement. Le personnage principal de la pièce, théâtre des rencontres les plus impromptues autour d’un petit café bien noir, d’un jus d’orange et d’un morceau de gâteau. C’est là, au 6 rue du Palais, à quelques dizaines de mètres de la Maison d’arrêt de Bourg-en-Bresse, que bat le coeur de l’Acafad, association culturelle des détenus et accueil de leurs familles.
Pas vraiment une salle d’attente, mais un véritable lieu de vie, créé pour supplanter ce vieil abribus qui servait de refuge aux familles, devant la prison. C’est là, dans la petite salle de jeux improvisée, que viennent désormais s’égayer les enfants, avant ou après le parloir. Une salle de bains pour les visiteurs les plus lointains, une cuisine aménagée, un espace canapé-fauteuils, un intérieur modeste mais coquet, qui fait la fierté de l’association depuis 2001.
Car la location de cet appartement entièrement rénové a enfin permis à l’Acafad de faire de l’accueil des familles son activité principale. Reléguant au second plan la participation aux activités socioculturelles, et bientôt la gestion des téléviseurs, activité à l’origine de la création de ce type d’associations (1985), et qui devrait être reprise en compte par l’administration pénitentiaire à l’horizon 2005.
Quatre demi-journées par semaine
Ce dont ne se plaindront pas les bénévoles, la présidente Marie-Christine Chanel en tête : « Finie la gestion des télés, le paiement de la redevance ? Bon débarras, on ne les regrettera pas ! » Ce sera autant de temps supplémentaire à consacrer à l’accueil des familles, la mission désormais prioritaire de l’association, sur la base d’une présence assurée lors des quatre demi-journées hebdomadaires de permanence.
Encore fallait-il pour cela recruter de nouveaux bénévoles, chose faite en septembre, par l’intermédiaire du Centre du volontariat (lire par ailleurs). Notamment pour compenser le départ d’une emploi-jeune appelée à de nouvelles fonctions. Mais « plus nous serons nombreux, mieux ce sera » affirme Marie-Christine Chanel, assistante sociale au sein du Service pénitentiaire d’insertion et probation (SPIP), toujours à la recherche de bonnes volontés. Pour venir en aide « à ceux dont on parle peu souvent, ces mamans, ces frères, ces soeurs, qui vivent - souvent très mal - l’enfermement de l’autre ». Qui peuvent trouver une écoute au local de l’Acafad. Un petit coin de bonheur. Une porte ouverte.
V. L.
« Dédramatiser les temps de parloir »
Comment devient-on bénévole au sein d’une association d’accueil des familles de détenus ?
Madeleine, bénévole à l’Acafad : « Un peu par hasard, et par l’intermédiaire du Centre du volontariat. Ceci dit, il y a aussi le fait que l’activité de l’association correspondait tout à fait à ce que j’attendais. D’ailleurs, depuis que je suis arrivée à Bourg il y a trente ans, j’ai toujours gardé en mémoire cette image des familles en attente devant la prison, sous ce vieil abribus délabré, comme pour se mettre à l’écart du regard des autres. Ça m’avait fait un choc, mais à l’époque, j’avais une activité professionnelle, des enfants à élever. J’avais sans doute gardé ce souvenir dans un coin de ma tête ».
Est-ce aujourd’hui un moyen pour vous de prolonger au delà de la retraite votre activité d’infirmière ?
« Je ne sais pas. Ce qu’il y a de sûr, c’est que j’étais vraiment à la recherche de quelque chose de relationnel. En tant qu’infirmière, finalement, j’aurai vécu pas mal de frustrations. On soulage la souffrance physique, sans avoir jamais le temps de pouvoir écouter la souffrance morale. Là, en quelque sorte, je me rattrape, en donnant du temps et de la disponibilité ».
Quels sont vos relations avec les familles ?
« Il y a quelques habitués qui viennent régulièrement nous saluer, boire un café, décompresser, dédramatiser les temps de parloir, souvent un peu lourds. Ce n’est pas très régulier, mais on voit toujours quelqu’un au cours de la permanence. Les familles ont besoin de notre présence, d’un peu de chaleur. On ne connaît ni le nom, ni le dossier du détenu qu’elles visitent, elles en parlent ou pas, et n’ont jamais à se justifier d’être là. Pour nous, c’est primordial d’épauler les proches du détenu, de leur dire combien c’est important qu’ils poursuivent les visites régulières ».
PROPOS RECUEILLIS PAR VINCENT LANIER
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