Publié le dimanche 30 mai 2004 | http://prison.rezo.net/mardi-6-janvier-2004/ mardi, 6 janvier 2004 Nous remontons, tranquillement dans nos cellules. Walid se trouve à quelques mètres de moi, j’essaye de donner l ?impression que je l’avais oublié en discutant avec un autre détenu pour éviter que nos regards se croisent. Le surveillant ouvre ma porte, me laisse entrer puis s’en va. Quelle joie de retourner dans ma cellule équipé par un équipement electro-ménager hors du commun : Ma télévision. Que j’avais laissé allumé, d’ailleurs. Enfin un peu de vie dans cette cellule. Je n’ai pas de programme télé alors je me le crée moi-même, en notant les heures des émissions, séries interessantes. La matinée se passe tranquillement, aujourd ?hui je suis affamé, l’appétit est revenu avec la télévision. Je dévore la baguette de pain au gout d ?eau distribué quotidiennement et j ?attends patiemment que le repas de ce midi arrive. J’aime bien manger des frites ici, elles sont toutes molles mais elles me rapellent les mercredi midi à la maison avec mes soeurs et ma mère. On me sert ma barquette, flageollets et un morceau de viande non-identifié. Dans tous les cas, c’est pas du porc. Ils ne servent jamais de porc chez les mineurs. Je dévore ce repas tout en me bouchant le nez. Ca devient un reflexe lorsque je mange de boucher mon nez de la main gauche et de tenir la fourchette de la droite. Au moins, je me nourris, je suis assez mince comme ça. J’ai comme projet de faire de la musculation pour que ce séjour soit au moins constructif, et si je ne mange pas, ce ne sont pas mes os qui se transformeront en muscles. Alors que je m’apprette à écrire une lettre à mon père, loeillet bascule, un surveillant entre. « Décidemment j’adore cette journée ! Je saute sur mes affaires de toilettes tout en me demandant qui m ?attends au parloir. Dix minutes qu’il m’a dit qu’il devait revenir dans cinq minutes, et il n’est toujours pas là. Je colle ma bouche dans le coin de la porte et l’appelle en hurlant. J’ai remarqué que toutes ces racailles aiment bien crier « SURVEILLANT ! » à travers leurs portes. Voici une des premières action de ma mini-carrière de délinquant. Après avoir crier à en casser ma voie, il arrive enfin. Ouf. S ?il y a bien une chose que je ne supporte pas, c ?est les faux-espoirs. Nous marchons ensemble, a travers les couloirs de la prison. Là une phrase se répète dans ma tête : « Surtout, qui que ce soit au parloir, ne pas pleurer. Surtout, qui que ce soit au parloir, ne pas pleurer. Surtout, qui que ce soit au parloir, ne pas pleurer. » Nous arrivons dans une grande salle remplis de détenus. La salle est remplis de barreaux, et des bancs sont collés tout autour. Là, il y a des détenus de tout âge qui attendent leur tour pour le parloir. Les détenus sont appelé par groupe de cinq. A chaque appel, j ?attends impatiemment mon nom. Je taxe une cigarette à un vieux, il me donne un peu de tabac et une feuille à rouler. En prison, 90% des fumeurs fument des roulées. Je m ?assied et essaye de parvenir à créer quelque chose qui ressemble à une cigarette, en vain. Au moins ça passe le temps. Un nouvel appel, mon nom est prononcé parmis le groupe de cinq personnes. Je me lève. Nous marchons dans un grand couloir, je ressens une sorte de trac à l’idée de voir quelqu ?un au parloir. Qui d’ailleurs ?? Nous arrivons dans une salle, avec plusieurs cabines. Un surveillant avec des gants en latex me fait rentrer dans la première cabine et me demande de me désabiller. Malgré ma pudeur, j ?obéis sans réfléchir. C ?est pour une bonne cause.. Je suis nu, je me mets face à lui, une main pour cacher mon sexe. Je reste debout immobile, en l’observant fouiller dans toutes mes affaires. Blousons, doublure de la poche trouée, chaussettes, caleçon que je n’ai pas changé depuis des jours. J’ai un peu honte. Heureusement qu’il a des gants. Puis, J’arrive dans une très grande salle en forme de cercle. Au milieu, une cabine ronde et vitrée où sont assis trois surveillants qui surveillent tous les parloirs en même temps. Le surveillant me demande mon nom, puis m ?indique que je dois aller au parloir numéro 12. Je marche, avec un trac immense en direction de cette petite pièce. |