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3 Cadre d’analyse des besoins lors des transferts des personnes détenues

Publié le dimanche 13 juin 2004 | http://prison.rezo.net/3-cadre-d-analyse-des-besoins-lors/

Cadre d’analyse des besoins

1. L’exercice médical en milieu pénitentiaire
L’exercice de la médecine dans l’environnement carcéral doit s’effectuer en tenant compte des contraintes liées au contexte pénitentiaire : spécificités des pathologies, niveau socio-culturel des personnes détenues, conditions de vie avant l’emprisonnement.
L’utilisation de la télémédecine doit contribuer à l’objectif majeur de la loi de 1994 précitée qui est d’assurer aux personnes détenues une qualité et une continuité des soins équivalentes à celles offertes à l’ensemble de la population.
Afin de définir les recommandations pour la mise en oeuvre de la télémédecine dans les établissements pénitentiaires, quatre champs de réflexions sont apparus essentiels :
- il faut d’une part préciser l’expression des besoins (utilisation des technologies de l’information et de la communication
- TIC -) dans ces établissements ;
- et d’autre part tenir compte des contraintes particulières liées au milieu carcéral.
Ces quatre champs se traduisent par :
• un important besoin de sécurité dans les échanges d’information de nature médicale et une indispensable normalisation garantissant l’interopérabilité des équipements et applications ;
• une fréquente notion d’urgence : dans diverses situations la télémédecine assurera une meilleure qualité des soins ;
• une nécessité de recourir à l’avis de spécialistes : la pratique d’une médecine coopérative en réseau permettra de donner des soins dans de meilleurs délais ;
• une possibilité de suivre réellement l’activité médicale, d’avoir une épidémiologie de qualité, d’exploiter des données anonymisées : tout ceci étant indispensable pour l’amélioration de la prise en charges des personnes détenues.

1.1. Un besoin de sécurité dans les échanges d’informations médicales et de normalisation
1.1.1. Le contexte, les contraintes et les résultats attendus
La télémédecine doit apporter dans sa mise en oeuvre, des mesures d’accompagnement qui permettront au système d’information d’intégrer plus rapidement des paramètres de normalisation et de sécurisation.
La démarche d’analyse a permis d’identifier les composantes majeures qui doivent être prises en compte
a) l’existence d’un cadre législatif et réglementaire ;
b) le constat d’un nombre important d’interlocuteurs, tant internes qu’externes, représentés tant par des professionnels de santé, que par des personnels du Ministère de la Justice ;
c) la manipulation, la création, l’échange, l’archivage d’informations multiples, concernant le patient :
- ses caractéristiques d’identification personnelles ;
- ses pathologies ;
- ses traitements respectifs ;
- son suivi ;
et la capacité de structurer un ensemble d’information homogène et précis.
d) le fait que le patient est aussi une personne détenue, créant un contexte d’exercice de la médecine particulièrement contraignant, tant dans sa capacité à intervenir que par la nécessité d’assurer la confidentialité de l’identité des patients dans les échanges d’informations médicales qui leur sont associées.
e) l’existence de systèmes d’information hétérogènes qui associent le plus souvent tant l’information, dans leur format d’origine que le processus de renseignements associé. Cet état de fait conduit à des saisies nouvelles, des lenteurs et des retards de transmissions, des supports papiers, que seul l’échange de télécopie permet de limiter.
Les transferts d’information concernant les patients sont indispensables lors des transferts des personnes détenues d’un établissement pénitentiaire
vers un autre.
La lecture du dossier médical de la personne détenue ainsi transmis permet aux équipes médicales et aux spécialistes extérieurs, de connaître le patient dès son arrivée.

1.1.2. Les besoins d’échanges d’informations compte tenu des
contraintes
a) tenir compte de l’organisation
Prenant acte de l’état des lieux caractérisé par une absence quasi générale de système informatique et de gestion de l’information médicale et de la pauvreté de solutions télématiques, ce développement de la télémédecine en milieu carcéral nécessite de manière indispensable :
- d’équiper les structures en moyens techniques pour la gestion de l’information et de la communication électronique ;
- de prendre en compte l’hétérogénéité des systèmes existants ;
- d’identifier la nature des données échangeables avec les partenaires extérieurs ;
- d’éviter d’imposer des formats et de casser les habitudes ;
- d’utiliser des normes et des standards pour gérer l’information et leur communication :
. au sein du milieu pénitentiaire,
. entre le milieu pénitentiaire et l’extérieur.
b) assurer la confidentialité des informations et la sécurité
pénitentiaire
Il est nécessaire, d’une part, de garantir l’accès à l’information et la confidentialité dans les échanges en respectant les règles déontologiques des professionnels de santé et, d’autre part, de tenir compte des contraintes de sécurité propres au milieu pénitentiaire.
c) intégrer les aspects médico-psychologiques au dossier
médical du patient
- Peut-on proposer une ébauche de dossier commun ?
Les textes le prévoit et certaines structures l’ont déjà développé. Il conviendra d’étendre cette pratique.
d) créer un dossier commun avec le SIH
Il est nécessaire d’apprécier la part des champs communs avec le système d’information hospitalier (SIH) du centre hospitalier de rattachement pour faciliter la saisie, la lecture et l’archivage des informations communes et surtout les échanges d’information entre l’UCSA et le centre hospitalier (lorsqu’il existe un système informatisé d’informations médicales).
e) précéder l’événement
Faciliter la transmission des dossiers concernant un patient quand un transfert est effectué, afin que le médecin receveur dispose de toutes les données médicales dès la première rencontre. Il faut
- préparer et annoncer la visite
- présenter le patient.
f) échanger avec les médecins traitants
A l’issue de la détention, il peut être utile, avec l’accord de la personne détenue, de transmettre certaines informations à son médecin traitant.
Les échanges peuvent s’effectuer en utilisant le réseau santé social (RSS) ) qui ce jour est un réseau de technologie Internet, garantissant un haut niveau de sécurité dont l’accès n’est possible qu’après identification et authentification du professionnel de santé qui se connecte grâce à la carte de professionnel de santé (CPS).
g) archiver
La conservation du dossier est une obligation médico-légale, en particulier pour répondre à d’éventuelles contestations.
h) les pré-requis
Un minimum d’infrastructure est indispensable pour communiquer - câblage - téléphone - micro ordinateurs et réseaux.

1.1.3. Recommandations
a ) des concepts simples
La mise en oeuvre des conditions de sécurisation des échanges d’information dans un environnement qui devra obligatoirement faire appel à des standards et à des normes.
Celles-ci ne chercheront pas à réaliser des compatibilités lourdes à caractère informatique destinées à intervenir au niveau de conversions de protocoles, exceptés certains cas particulièrement simples pour lesquels les traitements seraient aisés et les résultats appréciables.
b ) permettre un transfert d’information en réduisant les contraintes techniques
Afin de relayer les moyens actuels (dossier papier, télécopie), il convient de proposer des solutions dont la mise en oeuvre est très rapide, afin de permettre le démarrage immédiat de nouveaux concepts de communication, accompagnant le transfert de la personne détenue dans
au moins deux situations :
- transfert dans un hôpital pour examen, soins et éventuellement hospitalisation ;
- transfert vers un autre établissement pénitentiaire.
La nature des informations et leurs spécificités respectives feront l’objet du choix des professionnels et permettront de préparer l’arrivée du patient, de rendre plus efficace les interventions, afin d’éviter le cas échéant de réitérer certains examens.
Suivant la nature du transfert, tout ou partie du dossier médical doit être transmis.
L’organisation et le déclenchement des transferts d’information devront s’intégrer dans un concept global de gestion des transferts des personnes détenues, qui doit prévoir d’informer au préalable les médecins concernés de l’UCSA et du SMPR et le destinataire qui recevra la personne
détenue.
Compte tenu des procédures propres à la sécurité des transferts des personnes détenues conduisant à ne pas faire connaître à l’avance la date et l’heure précise des sorties, la transmission "informatique" des données se fera donc simultanément ou comme cela est souhaitable quelque heures avant l’arrivée de la personne détenue.
c ) créer des enveloppes électroniques
Sur la base d’un concept d’échanges d’information reposant sur l’exploitation de systèmes de messageries électroniques, il sera cherché à rendre communicante les enveloppes entre les différents correspondants qui pourront disposer d’outils minimum à conditions qu’ils disposent d’un PC connecté sur le réseau public France Télécom (RTC + modem ou Numéris) et du logiciel de communication.
L’utilisation d’Internet ne sera envisageable qu’avec des interfaces de sécurisation et de confidentialité de type cryptage.
Les transferts d’informations pourront s’organiser en procédant :
- à la transmission de certains champs d’informations jugés pertinents par le médecin de l’UCSA et du SMPR, saisis préalablement sur micro ;
- à la transmission de fichiers associés, susceptibles d’accompagner l’extrait du dossier médical.
Ces fichiers peuvent être informatiques ou papier. Le fait de les identifier permet de faire savoir que des informations complémentaires existent et peuvent être consultées.

2. La notion d’urgence
2.1. Les constats de la situation existante
L’urgence peut apparaître dans 3 situations différentes :
- dès l’arrivée de la personne détenue au cours du bilan de santé réalisé lors de l’examen médical d’entrée,
- lors d’une consultation médicale à l’UCSA ou auprès d’un spécialiste,
- à l’occasion de manifestations pathologiques survenues en détention.

2.2. Les besoins lors du traitement des urgences
Le personnel de l’UCSA et du SMPR peut ressentir un certain isolement, quand il est confronté au traitement des urgences, et il peut parfois être difficile de maîtriser ces situations. Il faut :
- éviter de traiter certaines situations en urgence quand cela n’est pas justifié ;
- rassurer le personnel ;
- différencier les différents niveaux d’urgence par un diagnostic précis des situations constatées.
Pour garantir ces résultats, l’existence d’une garde senior à l’hôpital est un préalable indispensable.
Deux types de services dans un établissement hospitalier sont principalement concernés pour traiter les urgences à l’hôpital :
- le Centre 15 ou le service d’accueil des urgences (S.A.U) ;
- les services de spécialités (obstétrique, cardiologie, par exemple).
Ceci sera variable selon les établissements et décidé conjointement par le directeur et la commission médicale d’établissement.

2.3. Les recommandations
La mise en place d’une station de visioconférence, tant aux urgences de l’hôpital de rattachement qu’à l’UCSA, doit permettre grâce à une permanence au centre hospitalier, de répondre aux appels de l’UCSA.

3. Des besoins de consultations de spécialistes
3. 1. Constat de la situation existante : un besoin répété et quotidien dans les établissements pénitentiaires de consultations externes de spécialistes
Bien que des consultations de spécialistes soient organisées en milieu pénitentiaire, le besoin de spécialistes extérieurs est relativement fréquent et peut conduire à des extractions répétées.
Les rendez-vous auprès de spécialistes relèvent d’une programmation préalable, tant pour ce qui concerne les prises de rendez-vous que les escortes des patients.
Cet accueil doit être organisé en procédant successivement :
- à la réservation de créneaux horaires pour l’accès aux plateaux techniques et aux consultations des spécialistes, afin d’éviter des attentes de la personne détenue dans des conditions délicates (patients menottés dans des salles d’attentes communes avec d’autres patients),
- aux transferts préalables d’informations médicales permettant aux spécialistes de disposer des premières données sur le patient, de préparer la consultation en identifiant la nature des examens à prévoir. Il peut s’agir de transmission de données textuelles, d’images radiologiques et d’électrocardiogrammes...

3.2. La recherche d’un avis extérieur
Certaines situations jugées délicates par le médecin de l’UCSA ou du SMPR peuvent le conduire à souhaiter établir un contact avec un confrère afin de disposer d’une seconde opinion et conforter sa décision.
Une transmission minimum d’information est alors nécessaire pour accompagner la demande auprès d’un tiers.
Plusieurs types d’informations sont identifiées et répétitives :
- transmission d’images radiologiques
- transmission d’électrocardiogrammes
- données textuelles.
Par ailleurs la transmission d’images échographiques, dans le cadre de la surveillance de grossesses, peut s’avérer utile.
La pratique de la visioconférence dans le domaine de la psychiatrie pourrait être intéressante.Toutefois, à ce jour, en France, ceci n’est pas pratiqué. L’entretien direct entre le médecin psychiatre et le patient détenu est préféré. Le médecin psychiatre peut éventuellement souhaiter analyser avec un confrère certains troubles du comportement observés lors des entretiens psychiatriques mais ceci nécessite l’accord préalable de la personne détenue que ce soit pour une consultation en direct ou en différé.

3.3. Des mesures d’accompagnement
a) Identifier les interlocuteurs
Une organisation efficace des contacts avec des spécialistes extérieurs et par voie de conséquence, des échanges d’informations en particulier lors de procédures de télétransmission doit s’accompagner d’une connaissance préalable et réciproque des partenaires.
Une liste d’identification des spécialistes susceptibles d’être contactés doit être connue de l’UCSA et du SMPR de chaque établissement pénitentiaire.
Par ailleurs, chaque spécialiste identifié doit avoir accepté d’être sollicité, de recevoir certains types d’informations, dont le traitement fera l’objet d’un protocole bilatéral.
b) Organiser la téléconsultation
La centralisation des unités de traitement des consultations de télémédecine doit être organisée là où existe une présence permanente de médecin.
c) Garantir la sécurité des transmissions des données médicales
Ces transmissions se feront dans le respect des règles déontologiques en mettant en oeuvre des protocoles de communication et des outils adaptés pour répondre aux exigences liées à la détention.

4. Suivi d’activités et statistiques
4.1. Les besoins d’informations
Les données statistiques témoignent de l’activité et permettent d’établir les ressources prévisionnelles à partir de certaines informations, par exemple :
- l’évolution du nombre de personnes détenues et de la durée de détention, afin de prévoir la disponibilité ;
- l’évolution des pathologies, de l’état de santé général des patients et de l’apparition de pathologie nouvelle ;
- l’évolution du nombre d’extractions vers le centre hospitalier de rattachement ou vers des établissements extérieurs ;
- l’évolution de la nature et du nombre d’actes traités tant en interne qu’à l’extérieur ;
- l’évolution d’événements caractéristiques locaux ciblés par l’établissement ;
- l’évolution des consommations de médicaments ;
- l’évolution du nombre de demandes et de conseils échangés entre les médecins de l’UCSA et du SMPR avec des confrères.

4.2. Les recommandations
Il faut permettre le renseignement de ces informations sur des bases de données simples, susceptibles d’être utilisées au niveau national, afin d’ apporter une visibilité d’ensemble et faciliter la mise en place de stratégies régionales pour partager des ressources et accroître globalement la performance de l’organisation.

 
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