Publié le jeudi 24 juin 2004 | http://prison.rezo.net/appel-aux-ministres-francais-pour/ Lettre Ouverte à Monsieur Barnier, "Cette affaire me dépasse, les directives viennent d’en haut". Voici donc la réponse d’un responsable de l’administration pénitentiaire aux familles des détenus tunisiens Ridha Saïdi, Mokdad Arbaoui, Lotfi Snoussi, Ali Harrabi et Khaled Kawwache, lorsque celles-ci les interpellaient sur le sort de leurs proches incarcérés. Tous les cinq, prisonniers d’opinion depuis plusieurs années, ont été transférés à la prison de Borj El Amri (Tunisie) au mois d’octobre 2003 et y sont détenus en isolement total, littéralement emmurés vivants. Cette situation a été dénoncée à plusieurs reprises, entre autre par la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme. Alors que leurs proches sont en grève de la faim depuis 38 jours aujourd’hui afin de réclamer, non pas leur libération, mais un peu d’air pur et de lumière, les familles ont lancé un appel désespéré à l’issue de la dernière visite, où certains grévistes, trop faibles, n’avaient pu se rendre. A l’heure où le monde entier dénonce ici et là les atteintes à la dignité humaine, à l’heure où les images choquent, émeuvent et révoltent, on ne peut qu’essayer de se faire le porte-voix de ceux qu’on ne voit pas et qu’on n’entend pas. Ceux qu’on ne voit pas, et dont j’évoque le cas aujourd’hui survivent dans des pièces de deux mètres sur un mètre cinquante. Celles-ci ne peuvent contenir qu’un lit, elles sont dépourvues de robinet et de toilettes, fermées de toutes parts, et ne sont "éclairées" que par la lumière du couloir filtrant par une fente dans la porte. Ces cachots nauséabonds et obscurs sont de surcroît infestés d’insectes et de détritus et les prisonniers sont privés de toute distraction qui leur permettrait d’oublier ne serait-ce que quelques instants leur calvaire. "Cette affaire me dépasse, les directives viennent d’en haut". Vous ne pouvez ignorer que cette réponse signifie tout simplement qu’il s’agit là d’une décision "politique", dans un pays où toutes les décisions sont prises par les instances dirigeantes du parti au pouvoir, le RCD, jusqu’au Président de la République lui-même, en l’occurrence Zine El Abidine Ben Ali. Je m’étais déjà adressée à certains d’entre vous lorsque mon fiancé Zouhair Yahyaoui était détenu dans cette même prison, dans des conditions terribles. Grâce aux efforts conjoints d’ONG, de responsables politiques, de diplomates français et étrangers, il fût libéré le 18 novembre 2003. Monsieur le Ministre, Votre intervention auprès des Autorités Tunisiennes pourraient sauver la vie des ces prisonniers, et leur permettre d’être incarcérés dans des conditions respectant leur dignité et préservant leur santé. Je vous remercie de tout coeur de l’attention que vous voudrez bien porter à cette missive, et vous prie de recevoir l’expression de mon plus grand respect. Fait aux Ulis, le 5 Juin 2004 Sophie Piekarec, tel : 06 70 52 10 71 Références importantes Lettre des familles des prisonniers politiques de la prison de Borj El Amri (1er Juin 2004) Alerte de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (30 Mai 2004 ) Appel pour sauver la vie des emmurés (novembre 2003) Les coulisses de la mort lente, Rapport sur l’isolement dans les prisons tunisiennes Les coulisses de la mort lente, Rapport sur l’isolement dans les prisons tunisiennes |