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Pulsart : Activités artisitiques

Publié le samedi 5 février 2005 | http://prison.rezo.net/pulsart-activites-artisitiques/

Association. L’art fait de la résistance Pulsart donne la possibilité à un jeune public en situation d’exclusion de s’initier à un grand nombre de pratiques artistiques, de la musique à la sculpture.

" Comment la prison ne serait-elle pas immédiatement acceptée puisqu’elle ne fait, en enfermant, en redressant, en rendant docile, que reproduire, quitte à les accentuer un peu, tous les mécanismes qu’on trouve dans le corps social ? " citation extraite de Surveiller et Punir, de Michel Foucault, voilà ce qui fait bouger l’association Pulsart. Fondée en 1994, l’association nationale d’actions artistiques développe une démarche essentiellement en direction d’une population dite défavorisée, dont les prisons. Et si sa plus récente action a eu lieu en milieu carcéral (centre des jeunes détenus de Fleury-Mérogis fin août 2003), la structure essaie plus largement d’être présente partout où la culture ne l’est pas. Beaucoup d’enfants grandissent dans des quartiers isolés, des banlieues ou en milieu rural éloigné. Des lieux où ils souffrent d’un manque de dialogue, de possibilités d’expression et d’initiation à la culture. Des lieux qui déterminent leurs comportements et qui les fixent dans un univers sans perspectives.

L’association est située à Montreuil, dans un petit local où les cartons se mêlent aux documents et aux ouvres. C’est là que Maxime Apostolo, directeur et fondateur de Pulsart mais également artiste plasticien, évoque ses débuts avec une douzaine d’artistes las du milieu de l’art contemporain qui pour eux " limite la place et la fonction de l’artiste dans la société ". Ne trouvant aucune structure adaptée à leur besoin d’engagement et de transformation sociale, ils ont créé Pulsart. Les premiers ateliers d’art plastique ont lieu en province avec des interventions en milieu scolaire pour initier à la critique d’art. Puis d’année en année, l’association s’agrandit, ce qui permet à Maxime Apostolo de " conceptualiser plus clairement ses pratiques et d’élaborer un discours sur les perspectives éducatives et culturelles offertes aux jeunes dans la société, et sur le concept de création partagée ".

En partenariat ou à la demande de collectivités locales, de musées et de centres sociaux, le collectif d’artistes propose aux enfants des projets basés sur différents champs artistiques (photographie, peinture, musique, danse, écriture, théâtre, sérigraphie) qui favorisent non seulement une expression personnelle mais aussi collective. C’est le moyen " d’investir des dimensions comme celles de l’éducation à l’altérité, la prévention de la délinquance et de la récidive, ou la lutte contre les discriminations ", explique-t-il. À chaque action, surpris par tant d’envie de créer, Maxime trouve " un formidable potentiel de créativité et d’expression. Reste à transformer cette énergie qui peut être destructrice en une énergie créatrice ". L’Atelier des corps, mis en place d’abord au collège Garcia-Lorca de Saint-Denis en 1998 puis dans les maisons d’arrêt de Bois-d’Arcy (78) et de Villepinte (93) en 2000, en est un exemple. Sur le thème du corps, c’est l’occasion de parler des problématiques liées aux violences corporelles et sexuelles. L’occasion aussi d’amorcer une réflexion sur la relation à son propre corps et au corps de l’autre. " Nous avons travaillé sur le moulage, ce qui a permis de mettre à nu les formes, sentiments et désirs, trop souvent étouffés et inexprimés. C’est un travail de réappropriation et de reconnaissance qui favorise l’émergence d’une conscience de soi et d’une idée du beau ", explique-t-il. Rachid, dix-sept ans, raconte son expérience dans cet atelier : " Durant la première semaine du mois de novembre, j’ai pratiqué la sculpture et le moulage, à l’aide de résine et de plâtre. Cette activité m’a permis d’apprendre à maîtriser ces matériaux que je ne connaissais pas. L’ambiance était bonne grâce aux encadrants. Cette activité pourrait être organisée dans d’autres maisons d’arrêt pour pouvoir sortir le savoir-faire des jeunes qui sont un peu perdus dans leur cellule. "

Avec aujourd’hui une soixantaine d’artistes intervenants, l’association n’a pas pour vocation de pallier " les devoirs de l’État ", même si Maxime Apostolo pointe les défaillances des services publiques et de la société civile. Et si une certaine responsabilité incombe aussi aux parents, c’est avant tout un problème de conditions de vie et d’accès au savoir et à la culture qui est en jeu. " Lorsque l’État lance une politique tarifaire sur les spectacles, c’est un échec. Ce n’est pas parce que la place est à 5 euros le mardi à 17 heures que les plus pauvres iront au cinéma. Il faut d’abord avoir la possibilité psychologique de faire le déplacement. Au niveau des équipements aussi il existe un déséquilibre notoire. On ne peut pas dire que théâtres, lieux de concerts et musées se trouvent dans des zones d’exclusion. Rien n’est fait au niveau culturel pour donner à ces jeunes le sentiment d’appartenance à une société qui, au lieu de les ignorer et de les maltraiter, devrait les associer pour remettre enfin son peuple en état d’effervescence artistique, affirme-t-il. La plupart des jeunes semblent avoir une très faible conscience de leur propre existence. Et avant de leur montrer une exposition de peintres flamands, il faut qu’ils se sentent vivants. " C’est ce à quoi s’emploie l’association avec ce credo maintes fois vérifié : " Créer, c’est découvrir qu’on existe. "

Ixchel Delaporte

Pulsart, 19, rue Gaston-Lauriau 93100 Montreuil. Tél. : 01 48 58 28 24.

www.pulsart.org

Source : l’Humanité