Publié le mardi 26 avril 2005 | http://prison.rezo.net/4-la-place-d-un-animateur/ 3. La place d’un animateur socioculturel dans une mission socio-éducative en centre de détention Les centres de détention sont des lieux de vie qui accueillent des individus en rupture sociale et ayant commis des crimes et délits graves. Comme nous l’avons vu précédemment, des actions de démocratisation culturelle sont menées dans les établissements pour peine mais aucun programme d’animation socio-éducative ou socioculturelle n’est validé. 3.1 Qu’est ce qu’un animateur socioculturel ? Selon le répertoire national de la certification professionnelle, "un animateur élabore et met en œuvre des projets d’animation afin de faciliter l’expression, la créativité et la socialisation des individus et qui s’adressent à tous types de publics." Cette fonction est déclinable selon deux axes, à savoir si l’on considère l’animateur en tant que généraliste, auquel cas il assurera la gestion de structures ou des services d’animation ; ou bien en tant que spécialiste d’un public ou d’une technique, auquel cas, il sera en mesure de proposer des activités adaptées et en accord avec les attentes des bénéficiaires. 3.2 Le rôle et les fonctions de l’animateur en milieu carcéral L’animateur socioculturel dans sa conception traditionnelle est à la fois un technicien, un militant et un médiateur, trois fonctions auxquelles sont associées des pôles d’intervention et des spécificités [1]. En centre de détention, l’animateur pourrait mettre en pratique chacune d’entre elles en devenant le coordinateur de projets artistiques et culturels, axés sur un thème propre à vie pénitentiaire. Dans les centres de détention plus que dans d’autres lieux, l’animateur occupe une fonction de médiateur car il fait le lien entre le monde carcéral et le monde extérieur en utilisant les outils que sont les ateliers. Bien souvent, les détenus ne connaissent pas les pratiques culturelles et l’intervenant se place dans une démarche de médiation. Au travers des projets qu’il a programmé, il va transmettre à la fois des savoirs mais aussi des pratiques qui sont la base de la relation et de l’échange entre la personne incarcérée et le professionnel. La fonction de médiation consiste à concilier et plus précisément à réconcilier des êtres ou des parties avec d’autres. Dans le cas des détenus, la réconciliation se fait entre eux et la société avec laquelle ils sont en rupture. Ainsi, le système d’échange peut se faire entre animateur et détenus directement, le médiateur est humain ; ou bien par l’intermédiaire d’un outil médiateur, qui est les ateliers socioculturels. Ces médias permettent de réduire l’écart qui se creuse entre le microcosme carcéral et la société. Ce rôle de médiateur place l’animateur dans une fonction de facilitation, c’est à dire qu’il va rechercher des procédures, des temps, des lieux afin de faire émerger des débats, des communications et des relations entre le détenu et son environnement. Il se situe dans une dimension symbolique dans laquelle il doit trouver les moyens d’améliorer les relations sociales entre les différentes parties en opposition. Cette fonction est difficile à mettre en application dans les centres de détention, d’une part car les acteurs de ce milieu sont nombreux et souvent en contradiction ; d’autre part, car les détenus n’interagissent pas avec leur environnement, ils le subissent et n’ont pas la force de l’affronter. De plus, la présence d’un animateur en centres de détention permettrait d’avoir une approche militante avec les partenaires sociaux et l’administration pénitentiaire. Actuellement, les intervenants culturels appliquent les procédures et les directives du Ministère de la Justice et de l’administration centrale mais ils ne peuvent prendre que peu d’initiatives et ont peu de liberté en ce qui concerne la conception des projets. L’animateur socioculturel militant se place dans une démarche de conscientisation, c’est à dire qu’il doit faire passer des messages entre les détenus et le reste du personnel pénitentiaire ; et entre le microcosme carcéral et la société. Dans cette dimension symbolique et relationnelle, il va entamer des discussions et des négociations avec les partenaires extérieurs au milieu carcéral du milieu associatif par exemple, mais il va aussi en entreprendre avec les directeurs des directions régionales de l’administration pénitentiaire et les directeurs des directions régionales des affaires culturelles. En mettant à profit toutes ses expériences et ses capacités de négociateur, il sera en mesure d’obtenir de nouveaux partenariats et augmentera alors ses possibilités de réalisation de projets plus ambitieux. Enfin, l’animateur socioculturel est un technicien, c’est à dire qu’il doit produire des projets rationnels et réalisables afin de répondre aux demandes des publics spécifiques. Au sein du monde carcéral, il doit faire des études sur son public, en tirer des hypothèses de travail et enfin concevoir et réaliser des projets de vie en accord avec les attentes des personnes incarcérées. En préparant des dossiers cohérents et productifs, tant sur le plan pédagogique que financier, il va multiplier les rencontres avec les organismes susceptibles de financer les activités socioculturelles, notamment les directions des services pénitentiaires. L’animateur socioculturel en milieu carcéral serait un professionnel polyvalent, référent des intervenants culturels dans les centres de détention. Néanmoins, puisqu’il n’existe pas d’animateur professionnel dans les centres pour peines, il convient de s’interroger sur les causes de cette absence. 3.3 La mise en application des fonctions de l’animateur socioculturel en centres de détention Un lourd travail sur le choix des problématiques s’impose d’un point de vue éthique et social. Les personnes placées sous main de justice sont des sujets en souffrance et les problèmes qui se posent à eux sont très complexes. L’animateur doit connaître le plus précisément possible le public auquel ses activités vont s’adresser. Il serait envisageable de travailler, par exemple, sur des thématiques telles que la souffrance, la solitude et l’isolement, la vie en milieu carcéral, la violence ou encore le retour à la vie civique. Un animateur socioculturel spécialiste des personnes placées sous main de justice aurait sa place dans les centres de détention. En effet, toutes les conditions de travail sont réunies en milieu carcéral pour qu’il puisse exercer ses fonctions de coordinateur, de technicien, de médiateur ou encore de militant. Cependant, les priorités budgétaires ont souvent raisons des priorités sociales et culturelles. C’est pourquoi, il ne semble pas d’actualité que les animateurs socioculturels fassent leur entrée dans les établissements pour peine et le milieu carcéral en général. [1] Modèle de Gillet |