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Lettre des détenus Communards

Publié le dimanche 12 février 2006 | http://prison.rezo.net/lettre-des-detenus-communards/

“ Belle-Ile-en-Mer, le 30 juillet 1873
A Monsieur le Ministre de l’Intérieur,
Monsieur le Ministre
Le Soussigné détenu politique, à la Maison de Détention de Belle-Ile-en-Mer, a l’honneur de vous adresser une demande ayant pour but d’obtenir sa transportation dans une Ile de nos possessions, soit dans l’un des groupes de la Martinique ou de la Guadeloupe, soit dans les Iles St louis, St Anne, L’Hattes, St Maurice, St Pierre (Direction de St Laurent du Maronge), dans la Guyane Française, soit encore en Algérie afin d’y coloniser et de si créer une position d’avenir pour lui et sa famille.
Jeune et vigoureux, mais profondément attristé par la misère et les angoisses terribles dont sa malheureuse famille est accablée et prévoyant pour son avenir les funestes conséquences d’un état de repos meurtrier, qui paralyse toute énergie, détruit la force et l’agilité des membres, sans soustraire le cœur a une influence pernicieuse, et démoralisatrice.
Il ose espérer Monsieur le Ministre qu’en raison de l’importance de sa peine, le Gouvernement lui accordera quelques adoucissements comparativement au régime de la déportation ; que les conditions qui lui seront imposées seront acceptables, et qu’il aura la faculté de faire venir auprès de lui sa famille.
Le soussigné a le ferme espoir Monsieur le Ministre que vous accueillerez cette demande de colonisation avec une bienveillante sollicitude et que vous daignerez intercéder en sa faveur auprès de Messieurs les Membres du Gouvernement.
En rendant à la vie du travail, un homme chez lequel les sentiments du devoir et de la justice ne sont pas encore éteints, vous contribuerez puissamment, Monsieur le Ministre, par votre bienveillant concours, à une œuvre toute humanitaire.
Confiant dans les sentiments de haute équité qui vous anime il vous prie d’agréer,
Monsieur le Ministre l’expression sincère de son très humble et très respectueux dévouements
Bailly Louis
Condamné par le 3° CG le 3 avril 1872 à 20 ans de détention, âgé de 25 ans, célibataire ”