Publié le mercredi 21 juin 2006 | http://prison.rezo.net/2006-boumediene-thiery-alima/ Question posée au gouvernement, le 20 juin, par Alima BOUMEDIENE THIERY, sénatrice des Verts, au ministre de la Justice, sur les Unités de Vie Familiale Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, mes Chers collègues. Après le rapport du Commissaire européen aux Droits Humains, après le rapport 2005 de la Commission Nationale Déontologie et Sécurité et après l’Appel des 10 de Clairvaux sur les longues peines, nous ne pouvons demeurer insensibles ou inactifs face aux zones de destruction des êtres et aux espaces de privation de Liberté, et trop souvent de négation des droits, que représentent les prisons françaises. A l’occasion des débats autour des nombreux projets de loi que votre Gouvernement a récemment présenté, ainsi qu’à l’occasion de la séance réservée sur le respect effectif des Droits Humains en France, je n’ai eu de cesse de répéter que la réinsertion commence dès le premier jour de détention. La mise en œuvre de cette réinsertion pour une personne incarcérée passe, notamment, à travers le maintien effectif des liens avec sa famille, en prison. Ce qui suppose, que soient prises, le plus vite, une série de décisions courageuses et indispensables à celle-ci, qui est également une bonne garantie contre la récidive. Parmi ces décisions, je citerai rapidement mais sans m’y étendre plus, la fin de la politique de l’administration dite de « tourisme carcéral ». Cette politique, trop largement répandue et qui vise à punir officieusement la personne incarcérée, consiste à la déplacer de prison en prison sur l’ensemble du territoire national. Les familles de personnes incarcérées se retrouvent ainsi dans l’incapacité de continuer à visiter régulièrement leur proche incarcéré. Trop de familles, parfois même, sur la demande expresse de la personne incarcérée, finissent par abandonner et se résignent à ne plus effectuer de visites. Mais le cœur de mon propose se concentre essentiellement sur la question des unités expérimentales de vie familiale. Ces unités dites UEVF, sont le résultat d’un long processus, que l’on peut faire remonter à 1985, et l’ouverture des parloirs intimes au Centre de détention de Mauzach. Avancée après avancée, le régime des UEVF est aujourd’hui régi par une circulaire du 18 mars 2003. Elles ne sont accessibles aux personnes incarcérées et à leur famille qu’à Rennes, Poissy et Saint-Martin de Ré, et bientôt ailleurs également. Seules les personnes incarcérées, condamnées à titre définitif et ne pouvant bénéficier de permissions de sortir ou d’autres aménagement de peine peuvent accéder aux UEVF L’accès aux UEVF n’est accordé par les autorités pénitentiaires qu’à l’issue d’un très long et complexe processus. Les visites au sein des unités ne peuvent avoir lieu qu’une fois par trimestre et en fonction des possibilité de l’établissement. Monsieur le Ministre, Je me suis personnellement rendue à Moulins, puis à Poissy et à Rennes, pour constater sur place les différences et entendre les personnes concernées. A chacune de mes visites, à chacun de mes contacts il m’a été répondu avec force et conviction que les UEVF étaient un excellent facteur de réinsertion des personnes incarcérées et qu’elles offraient des bénéfices non seulement à ses derniers et à leur famille, mais également à l’administration et au personnel pénitentiaires qui se félicitent de meilleures relations avec les détenus car il existe moins de tensions. Or, les UEVF n’existent toujours qu’à titre expérimental et n’ont pas encore été généralisées à l’ensemble de l’administration pénitentiaire. Pis, lorsqu’elles existent, elles ne sont pas encore utilisées, comme c’est le cas des établissements de Liancourt, Avignon et Toulon, qui ne seront, finalement, mises à la disposition des personnes incarcérées et de leurs familles que ce 1er juillet. Monsieur le Ministre, quand allez-vous mettre en œuvre un rapport et un bilan sur les UEVF ? Il serait important également de revoir le règlement intérieur de ces UEVF. Aujourd’hui seuls les détenus peuvent cantiner, et souvent commandent trop, tellement ils sont contents de cette visite qu’ils veulent honorer le mieux possible, alors qu’ils ont peu de moyens. En outre, Les familles aimeraient préparer et amener avec elles les plats qu’il aime, quitte à venir 1H avant pour les contrôles et vérifications nécessaires. Enfin, ils ne peuvent pas ramener avec eux le trop non utilisé ; et souvent, les familles refusent de le rapporter, par dignité, sachant ce que cela a coûté à la personne détenue. Ces aliments sont ainsi perdus, alors qu’ils ont coûté un prix relativement élevé par le cantinage. Quand allez-vous en tirer les conséquences et ainsi remédier, notamment, à la cadence des visites qui devraient plutôt être mensuelles que trimestrielles, comme cela est le cas chez nos voisins espagnols ? Je terminerai par ce qui m’a été dit à plusieurs reprises par des membres de l’administration pénitentiaire ou des anciennes personnes incarcérées ou leurs familles : Je vous remercie, Monsieur le Ministre. |