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(2006) Circulaire DAP relative au placement à l’isolement

Publié le mercredi 20 septembre 2006 | http://prison.rezo.net/2006-circulaire-dap-relative-au/

BULLETIN OFFICIEL DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE
n° 102 (1er avril au 30 juin 2006)
Circulaires de la Direction de l’administration pénitentiaire
Signalisation des circulaires du 1er avril au 30 juin 2006

Circulaire relative au placement à l’isolement

DAP 2006-3092 PMJ4/24-05-2006
NOR : JUSK0640117C

Isolement administratif
Isolement judiciaire
Procédure contradictoire
Régime de détention
Destinataires
Directeurs régionaux des services pénitentiaires - Directeur régional, chef de la mission outre-mer - Chefs d’établissements pénitentiaires - Premiers présidents des cours d’appel - Procureurs généraux près les cours d’appel - Présidents des tribunaux de grande instance - Procureurs de la République près les tribunaux de grande instance
TEXTES SOURCES :
Loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal.
Loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public.
Loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
Articles R.57-8 à R.57-9-10 du code de procédure pénale issus du décret n° 2006-337 relatif aux décisions prises par l’administration pénitentiaire.
Articles D.56 à D.56-2 ; D. 283-1 à D. 283-2-4 et D. 381 du code de procédure pénale issus du décret n° 2006-338 relatif à l’isolement des détenus.
Circulaire du 26 avril 2002 relative à la prévention du suicide.
Circulaire du 9 mai 2003 relative à l’application pour l’administration pénitentiaire de l’article 24 de loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
TEXTES ABROGES :
Décret n°2002-1023 pris pour l’application de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 à l’administration pénitentiaire et relatif aux mandataires susceptibles d’être choisis par les personnes détenues
Circulaire du 14 décembre 1998 relative au placement à l’isolement.
Circulaire du 11 juin 1982 relative aux mesures concernant la sécurité dans les établissements pénitentiaires
Note du 18 avril 2003 relative au renforcement des mesures de sécurité lors du placement de détenus dangereux sous le régime de l’isolement
Note du 9 mai 2003 relative au renforcement de la sécurité des quartiers disciplinaires et d’isolement
Note du 11 juillet 2003 relative au récapitulatif des détenus placés en quartier d’isolement
Note du 18 novembre 2003 relative à la demande de vigilance et de vérification des cours de promenade des détenus isolés
Note du 21 juin 2004 exposant les dispositions transitoires relatives à la procédure de placement à l’isolement
- 24 mai 2006 -

INTRODUCTION
L’entrée en vigueur, le 1er juin 2006, des décrets n°2006-337 et 2006-338 du 21 mars 2006 relatifs à l’isolement des détenus constitue une réforme d’ampleur de l’isolement. Elle permet de remédier aux insuffisances de l’ancienne procédure, peu détaillée par les dispositions réglementaires alors en vigueur, qui induisaient certaines disparités dans les pratiques locales. Le contrôle exercé désormais par les juridictions administratives sur les décisions d’isolement ne peut se concevoir sans une base réglementaire claire, permettant d’assurer une meilleure garantie des droits et une plus grande sécurité juridique pour les détenus et les personnels pénitentiaires chargés d’appliquer ces règles.
La présente circulaire a pour objet d’accompagner la réforme et d’expliciter ses principales dispositions codifiées aux articles R.57-5 à R.57-9-10 et D.283-1 à D.283-2-4 du code de procédure pénale (CPP).

I. LA PROCEDURE DE PLACEMENT A L’ISOLEMENT PAR MESURE DE PROTECTION ET DE SECURITE
Une mesure de placement à l’isolement d’office ou à la demande du détenu ne peut être prise que pour des motifs de protection du détenu ou de maintien de la sécurité des personnes et de l’établissement.
La décision doit procéder de raisons sérieuses et d’éléments objectifs et
concordants permettant de redouter des incidents graves de la part du détenu ou dirigés contre lui.
L’isolement est une mesure susceptible d’aggraver les conditions de détention des personnes qui y sont soumises, principalement en restreignant les contacts humains et sociaux au quotidien. Ces restrictions, surtout lorsque l’isolement est prolongé, peuvent induire des conséquences physiques et psychiques auxquelles il convient d’être attentif.
Les détenus mineurs ne doivent pas être placés à l’isolement, sauf en dernière extrémité, et sous la seule responsabilité du chef d’établissement, qui devra avoir préalablement recueilli l’avis du médecin de l’établissement ainsi que celui du juge des enfants compétent. En outre, le chef d’établissement doit veiller à informer les titulaires de l’autorité parentale de la décision qu’il envisage de prendre à l’égard du mineur.

1. Nécessité d’examiner prioritairement une affectation en cellule individuelle
Toute nécessité de séparation d’un détenu du reste de la population pénale ne justifie pas le placement à l’isolement. L’isolement ne constitue pas un mode de gestion de la population pénale.
Les nouvelles dispositions précisent que l’isolement ne peut être décidé que par mesure de protection ou de sécurité, en tenant compte de la personnalité du détenu, de sa dangerosité particulière, et de son état de santé. Une attention particulière doit ainsi être portée aux détenus les plus vulnérables, par exemple au regard de leurs problématiques psychologiques particulières.
Conformément à l’article D.91 du CPP, le chef d’établissement privilégie le placement en cellule individuelle afin d’opérer une séparation effective entre co-détenus.
Lorsque le chef d’établissement se trouve dans l’obligation d’affecter un détenu en cellule individuelle pour répondre à une prescription médicale, prise en application de l’article D.384-1 du CPP, (cas de maladie contagieuse notamment), il convient d’affecter prioritairement le détenu dans une cellule individuelle à proximité de la zone médicale ou d’un poste de contrôle, et non au quartier d’isolement si les conditions de l’article D. 283-1 du CPP ne sont pas remplies.
Dans l’hypothèse où l’isolement est décidé à la demande du détenu, les motifs doivent faire l’objet d’un examen attentif. Ils sont identiques à ceux du placement sur initiative de l’administration mais visent principalement la protection du détenu qui exprimerait des craintes pour sa sécurité. Cette requête ne doit pas être un moyen pour obtenir une affectation en cellule individuelle ; le danger invoqué doit être caractérisé.

2. La procédure contradictoire
Le déroulement de la procédure à mettre en œuvre préalablement à la décision, que ce soit pour un placement initial à l’isolement ou une prolongation, est identique, et quelle que soit l’autorité pénitentiaire compétente pour décider de la mesure. Cette procédure est organisée sous la responsabilité du chef d’établissement, qui peut en déléguer la réalisation à l’un de ses adjoints chargé de l’isolement ou à un personnel gradé du quartier d’isolement.
Lorsqu’une mainlevée est envisagée par le chef d’établissement pour une décision relevant de sa compétence, il n’y a pas lieu de mettre en oeuvre la procédure contradictoire.
En revanche, si la mainlevée concerne une mesure d’isolement en cours à la demande du détenu sans que celui-ci n’en soit d’accord, la procédure contradictoire doit être mise en œuvre.

2.1 La préparation du débat contradictoire
2.1.1. L’information du détenu et la notification des droits
Lorsqu’une décision de placement ou de prolongation d’isolement est envisagée, l’article D.283-2-2 du CPP impose que le détenu soit informé par écrit des motifs pour lesquels une telle décision est envisagée.
Il est également informé de la possibilité qui lui est offerte de présenter ses observations écrites, et, sur sa demande, des observations orales, ainsi que de se faire assister ou représenter par un avocat ou un mandataire agréé.
Le détenu doit être avisé que les frais d’avocat ne peuvent être pris en charge au titre de l’aide juridique.
Cette information du détenu doit avoir lieu dans la mesure du possible au moins trois jours avant la date du débat contradictoire.
A cette fin, il est recommandé d’utiliser l’imprimé joint en annexe relatif à la mise en œuvre de la procédure contradictoire (annexe 1).
Le détenu doit accuser réception de cette information en remplissant le formulaire et remettre à la personne responsable des procédures d’isolement la seconde partie de l’imprimé.

2.1.2 L’assistance d’un avocat ou d’un mandataire agréé
Le décret n°2002-1023 pris pour l’application de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 à l’administration pénitentiaire et relatif aux mandataires susceptibles d’être choisis par les personnes détenues a été codifié aux articles R.57-9-1 à R.57-9-8 du CPP.
Les conditions d’intervention de l’avocat ou du mandataire agréé sont précisées aux paragraphes 2.1 et 2.2 de la circulaire JUSE0340055C du 9 mai 2003 relative à l’application pour l’administration pénitentiaire de l’article 24 de loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
Lorsque le détenu souhaite être assisté par un avocat ou un mandataire agréé, ce dernier doit être convoqué dès que possible. Un formulaire de convocation est annexé à la présente circulaire (annexe 3).
Le détenu ne peut désigner qu’un seul avocat ou mandataire agréé.

2.1.3 Le recours à un interprète
Si le détenu ne comprend pas la langue française, l’alinéa 2 de l’article D.283-2-2 du CPP prévoit que l’information est faite par l’intermédiaire d’un interprète.
Le chef d’établissement peut recourir à un interprète inscrit sur la liste de la cour d’appel de son ressort. Il peut également contacter les services de police et de gendarmerie pour obtenir les coordonnées des interprètes utilisés par ces services. Le chef d’établissement doit être en mesure de justifier des démarches effectuées pour assurer cette désignation. La convocation adressée à l’interprète en vue du débat contradictoire doit être versée au dossier de la procédure.

2.1.4 L’accès au dossier et la préparation des observations
En application de l’article R.57-9-9 du CPP, le détenu doit disposer d’un délai minimum de trois heures avant le débat contradictoire et à partir du moment où il est mis en mesure de consulter les éléments de la procédure d’isolement, en présence de son avocat ou du mandataire agréé, le cas échéant
Il convient, dans la mesure du possible, de mettre les pièces à disposition du détenu et de son défenseur plusieurs jours avant la date prévue pour le débat contradictoire.
Les pièces du dossier auxquelles peuvent avoir accès le détenu et son conseil sont les suivantes :
- la fiche de liaison,
- le rapport de comportement qui sera adressé à la direction régionale en cas de prolongation de la compétence du directeur régional ou du ministre de la justice,
- les avis écrits du juge de l’application des peines ou du magistrat saisi du dossier de l’information et du médecin intervenant au sein de l’établissement en cas de prolongation au-delà d’un an,
- toutes les autres pièces sur lesquelles se fonde l’administration pénitentiaire pour solliciter la mesure.
Compte tenu du caractère écrit de la procédure, une attention particulière doit être portée à la rédaction des rapports ou comptes rendus pouvant justifier la mesure. Les informations recueillies par téléphone auprès des services de police ou de la sous-direction de l’état major de sécurité doivent faire l’objet de synthèses écrites tout en veillant à ne pas faire figurer les éléments susceptibles de porter atteinte à la sécurité de l’établissement et des personnes.
Si certaines pièces contiennent des éléments pouvant porter atteinte à la sécurité des établissements pénitentiaires ou des personnes, elles peuvent ne pas être communiqués dans leur intégralité conformément aux dispositions de l’article R.57-9-9 du CPP alinéa 2 (ex : mode opératoire d’un projet d’évasion, nom ou éléments permettant d’identifier un détenu ayant donné des informations sur un autre détenu ...). Si l’occultation des mentions non communicables rend le document illisible, il n’y a pas lieu de le communiquer.
Des copies des pièces peuvent être demandées par le détenu, son avocat ou le mandataire agréé.
Il convient de ne réclamer le paiement des frais engendrés par les copies destinées au détenu ou à son représentant que dans l’hypothèse où l’un ou l’autre souhaite une seconde copie, la première étant délivrée gratuitement. L’administration est alors fondée à réclamer le paiement des copies, dans la limite du tarif maximum de 0,18 euros par page pour une photocopie de format A4 en noir et blanc. [1]
Pour plus de précisions, il convient de se reporter au paragraphe 3.1.2 de la circulaire du 9 mai 2003 relative à l’application pour l’administration pénitentiaire de l’article 24 de loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

2.2 Le débat : la présentation des observations écrites ou orales
Plusieurs cas de figure peuvent se présenter lors de la mise en œuvre de la procédure contradictoire :
- Le détenu ne souhaite pas présenter d’observations, ni écrites, ni orales. Ce refus doit être mentionné dans le formulaire de décision.
- Le détenu souhaite uniquement présenter des observations écrites et ne demande pas à être représenté : il n’est pas nécessaire d’organiser de débat contradictoire mais il convient d’accuser réception de ses observations et de les joindre à la procédure.
- Le détenu souhaite uniquement présenter des observations écrites et demande à être représenté par un avocat ou un mandataire agréé : une fois le représentant informé, il peut présenter des observations écrites. S’il souhaite présenter des observations oralement, un débat contradictoire est organisé.
- Le détenu souhaite présenter ses observations orales : l’administration doit organiser un débat contradictoire, en présence du conseil du détenu (avocat ou mandataire), s’il a demandé à être assisté.
Le débat doit non seulement permettre au détenu de faire valoir ses observations mais aussi de l’éclairer pleinement sur le régime de détention de l’isolement.
Les observations du détenu et de son représentant doivent être retranscrites dans les formulaires de placement ou de prolongation de l’isolement (annexes 4 à 8).

3. La décision
Dans toutes les hypothèses, la décision de placement à l’isolement ne peut être envisagée que s’il n’existe pas d’autre possibilité d’assurer la protection des détenus ou la sécurité de l’établissement. Les alternatives à l’isolement doivent être étudiées à chaque niveau de décision.
Le chef d’établissement doit être particulièrement attentif à l’impact de la mesure sur l’état psychique du détenu et plus particulièrement encore lorsque ce dernier paraît susceptible de porter atteinte à son intégrité physique ou présente des risques suicidaires. A ce titre, et à chaque fois que la prolongation de la mesure est envisagée, le chef d’établissement doit porter un attention toute particulière aux éléments pouvant figurer notamment dans la cote « suicide » du dossier individuel du détenu prévue par l’article D.115 du CPP.
Une copie de chaque décision relative à l’isolement prise par le chef d’établissement doit être rapidement adressée au directeur régional.
La décision d’isolement doit obligatoirement être datée et contenir les noms, prénoms, qualité et signature de la personne qui l’a prise.

3.1 La transmission des pièces au directeur régional ou au Garde des Sceaux pour les décisions relevant de leur compétence.
La procédure de placement ou de prolongation de l’isolement est toujours initiée sous la responsabilité du chef de l’établissement dans lequel le détenu est incarcéré.

3.1.1 Procédure à appliquer aux décisions relevant du directeur régional
Il convient d’engager la procédure préalable à toutes les décisions de prolongation de la mesure au-delà de 6 mois ou de mainlevée de la compétence du directeur régional, trois semaines avant l’échéance de la mesure.
Le chef d’établissement doit constituer un dossier comprenant :
- l’imprimé de prolongation au-delà de six mois daté et signé,
- le dossier de la procédure (information du détenu, convocations du détenu le cas échéant de son conseil, d’un interprète, observations du détenu, rapport de l’audience contradictoire),
- un rapport du chef d’établissement qui comporte impérativement les informations suivantes :
- relations du détenu avec l’ensemble du personnel (pénitentiaire ou non)
- relations du détenu avec l’extérieur (correspondances, visites...)
- hygiène et tenue de la cellule
- participation du détenu aux activités et à la promenade
- procédures disciplinaires ou incidents
- éléments relatifs à son état de santé communiqués par le service médical le cas échéant
- la fiche de liaison,
- l’avis du médecin visé par l’article D.283-1-3 du CPP s’il a estimé utile d’en émettre un.
Le dossier est adressé à la direction régionale au moins 15 jours avant l’échéance de la mesure.
Le directeur régional, après instruction du dossier, transmet sa décision de
prolongation ou de mainlevée de la mesure d’isolement au chef d’établissement pour notification au détenu. Une décision de refus de prolongation a pour conséquence la levée immédiate de la mesure et le retour en détention ordinaire. Il en est de même, en cas d’absence de décision au jour de l’échéance de la mesure.
Une copie de chaque décision relative à l’isolement prise par le directeur régional doit être adressée au bureau de la gestion de la détention de la direction de l’administration pénitentiaire (EMS1).

3.1.2 Procédure à appliquer aux décisions relevant du ministre de la justice
Avant de décider de la prolongation de la mesure d’isolement au-delà d’un an, il convient impérativement d’étudier toutes les solutions possibles pour y mettre fin compte tenu de la durée déjà effectuée par le détenu, et ce, que l’isolement ait été initialement décidé d’office ou que le détenu en ait fait la demande.
En effet, au-delà d’un an, la prolongation ne peut être envisagée que si aucune autre solution n’a été trouvée pour permettre au détenu concerné de bénéficier d’un régime de détention ordinaire.
Lorsque la prolongation au-delà d’un an est néanmoins envisagée, elle relève de la compétence exclusive du ministre de la justice.
Dans ce cas, il convient que le chef d’établissement transmette au directeur régional une proposition de prolongation environ un mois et demi avant l’expiration de la mesure, afin de permettre un examen effectif de la mesure par les services de la direction régionale puis ceux du bureau EMS1.
Le dossier constitué par le chef d’établissement contient les pièces suivantes :
- l’avis du médecin intervenant dans l’établissement, obligatoirement sollicité préalablement à la prise de décision. Cet avis peut être rédigé directement sur le formulaire de prolongation ou sur un document écrit joint à la proposition. La mention « avis écrit joint à la procédure » doit alors être portée sur le formulaire ;
- l’avis du juge de l’application des peines s’il s’agit d’un condamné ou du magistrat saisi du dossier de l’information (MSDI) s’il s’agit d’un prévenu, sollicité selon les modalités décrites ci-dessus ;
- un rapport de synthèse sur le comportement du détenu au cours de la période écoulée depuis la décision initiale ;
- la fiche de liaison afin de permettre à l’autorité compétente de vérifier la durée effective de l’isolement ;
Après examen du dossier, si le directeur régional estime opportun de prolonger la mesure au-delà d’un an, il adresse sa proposition accompagnée d’un rapport motivé au bureau EMS1, et ce, au moins un mois avant l’expiration de la mesure.
Si le détenu est à l’isolement depuis moins d’un an, le directeur régional peut, à ce stade de la procédure, décider de lever l’isolement. En revanche, pour les échéances supérieures à un an, le directeur régional n’a plus compétence pour lever la mesure, il peut seulement proposer la fin de la mesure ou une solution alternative.
La décision prise par le ministre de la justice est notifiée au détenu avant l’échéance de la mesure en cours. Il appartient au bureau EMS 1 de la direction de l’administration pénitentiaire de transmettre au directeur régional sa décision au moins une semaine avant cette échéance.
Lorsque des éléments nouveaux dans la situation du détenu surviennent après la transmission de la procédure, ils doivent être portés à la connaissance de l’autorité compétente pour décider de l’éventuelle prolongation.
Le ministre de la justice demeure compétent pour décider de toute nouvelle prolongation, par périodes de quatre mois. Il est alors saisi à chaque fois selon la procédure décrite au présent paragraphe.
Enfin, si le chef d’établissement propose au directeur régional ou au ministre de la justice une levée de la mesure relevant de leur compétence et que ceux-ci envisagent au contraire une prolongation, le chef d’établissement doit en être informé au plus tôt et les motifs de la prolongation envisagée doivent lui être transmis pour qu’il en informe le détenu et organise le cas échéant un débat contradictoire (annexe 9). Dans ce cas, le formulaire doit être joint à la décision relative à l’isolement .

3.2 La motivation
En application des articles 1 et 3 de la loi du 11 juillet 1979, la décision de placement ou de prolongation d’isolement doit être motivée en droit (les textes sur lesquels se fondent la décision doivent impérativement être cités) et comporter l’énoncé des considérations de fait (les raisons pour lesquelles le détenu doit être isolé).
La simple reprise des termes "par mesure de protection ou de sécurité" indiqués à l’article D.283-1 du CPP est insuffisante. La mise à l’isolement doit procéder de raisons sérieuses et d’éléments objectifs et concordants permettant de redouter des incidents graves de la part du détenu concerné ou dirigés contre lui.
La motivation doit indiquer de quels risques il s’agit (risques d’évasion, risques d’agression ou de pression, risques de mouvements perturbant la collectivité des détenus, risques de connivence ou d’entente...), et préciser qui la mesure entend protéger (protéger la vie ou l’intégrité physique de certains détenus, de l’isolé lui-même, des personnels ou la sécurité de l’établissement).
La seule référence à l’appartenance au grand banditisme, ou à un risque d’évasion, non étayée, est insuffisante. [2]
Les éléments susceptibles, par leur divulgation, de mettre en péril la sécurité des tiers ou de l’établissement ne doivent pas apparaître dans la motivation. Toutefois, lorsque des informations ont été portées à la connaissance de l’administration pénitentiaire par les autorités administratives ou judiciaires et que, pour des raisons de sécurité, leur contenu précis ne peut être exposé, il est indispensable d’indiquer la date et l’origine de ces informations [3]. (ex : « il ressort des renseignements obtenus auprès des services de police en date du »....).
Aux termes du dernier alinéa de l’article D.283-1 du CPP, l’administration doit tenir compte également dans sa motivation de « la personnalité du détenu, de sa dangerosité particulière et de son état de santé ».
Il convient de rappeler que la gravité des faits pour lesquels l’intéressé est détenu et la nature des infractions qui lui sont reprochées ne peuvent justifier en elles-mêmes un placement à l’isolement. Il en va différemment lorsque la nature des infractions en cause ou la qualité du mis en examen sont susceptibles de provoquer des actes de violence contre l’intéressé de la part de ses codétenus. Des éléments de fait illustrant ce risque de violence doivent alors figurer dans la motivation.
De la même manière, le classement d’un détenu au registre des détenus particulièrement signalés ou la commission d’une faute disciplinaire même grave ne peuvent justifier à eux seuls un placement à l’isolement.
La mise à l’isolement ne constitue pas une mesure disciplinaire. En conséquence, les motifs de la décision de placement à l’isolement doivent nécessairement être distincts de ceux de la sanction disciplinaire qui aura pu éventuellement la précéder. [4]
En cas de transfert suivi d’une nouvelle décision de placement à l’isolement, il convient notamment de rappeler dans la motivation en quoi le transfert n’a pas été suffisant pour assurer la sécurité des personnes ou de l’établissement.
L’isolement ne peut être prolongé au-delà de deux ans sauf s’il constitue l’unique moyen d’assurer la sécurité des personnes ou de l’établissement. Dans ce cas, la décision de prolongation doit être spécialement motivée [5].
Il convient alors d’indiquer en quoi l’isolement est le seul régime de détention possible pour le détenu et l’unique moyen de préserver la sécurité des personnes et de l’établissement.
Un imprimé spécifique a été prévu à cette fin (annexe 8).

3.3 Règles de forme : la délégation de signature
Toutes les décisions doivent contenir, outre les motifs, la mention des nom, prénom et qualité du signataire.
En application des articles R.57-8 et R.57-8-1 du CPP, le chef d’établissement ou le directeur régional des services pénitentiaires ont la possibilité de déléguer leur signature pour toutes les décisions relatives à l’isolement relevant de leur compétence.
Il est toutefois recommandé que le directeur régional ne délègue sa signature qu’à un directeur des services pénitentiaires et pour le chef d’établissement, qu’à son adjoint ou à l’un de ses proches collaborateurs.
Pour que la délégation de signature soit régulière, elle doit être écrite et nominative et doit faire l’objet d’un affichage dans l’établissement, dans un lieu destiné à cet effet, connu et accessible aux détenus pour que ceux-ci puissent en prendre connaissance.

3.4 La notification et la conservation de la décision
3.4.1. Notification
La décision de placement ou de prolongation de l’isolement doit être notifiée sans délai au détenu, et en tout état de cause, selon le cas, avant son placement à l’isolement, la fin du placement provisoire, ou la fin de la mesure en cours.
Une copie de la décision doit être adressée au conseil du détenu ou au mandataire désigné par lui, par courrier ou par télécopie ou à l’issue du débat contradictoire lorsque la décision est prise immédiatement par le chef d’établissement.
De même une copie de la décision est remise au détenu qui peut la conserver dans sa cellule.

3.4.2 Conservation des pièces et de la décision
Tous les originaux des pièces relatives à une mesure d’isolement doivent être conservés dans la partie pénitentiaire du dossier individuel du détenu dans une sous cote "mesure d’isolement administratif".
Cette sous cote comporte toutes les pièces relatives à l’isolement, y compris les demandes et les réclamations émanant du détenu.

3.5 L’information des autorités administratives et judiciaires
3.5.1 L’information des autorités judiciaires
L’article D.283-1-1 du CPP impose que la décision soit communiquée dans les meilleurs délais au juge de l’application des peines si le détenu concerné par la décision est condamné ou au magistrat saisi du dossier de l’information, s’il est prévenu. [6]

3.5.2 Le rapport du chef d’établissement à la commission d’application des peines
A chaque fois qu’il l’estime utile et au moins une fois par trimestre, le chef
d’établissement ou son représentant fait un rapport à la commission d’application des peines sur l’isolement. Le dernier alinéa de l’article D.283-1-1 du CPP impose qu’il rende compte a minima du nombre et de l’identité des détenus placés à l’isolement et de la durée de celui-ci pour chacun d’eux.
Il peut également à cette occasion exposer les spécificités éventuelles du régime de détention au sein du quartier isolement, les activités proposées aux détenus ou les difficultés rencontrées.
Aucune forme n’est exigée pour ce rapport, qui peut donc consister en un compterendu oral.

II. LA PROCEDURE APPLICABLE DANS DES SITUATIONS PARTICULIERES.
1. L’isolement à la demande du détenu
Lorsque l’isolement ou sa prolongation est demandé par le détenu, la procédure contradictoire n’a pas à être mise en œuvre.
L’article D.283-2 du CPP prévoit que le détenu qui souhaite être placé à l’isolement ou qui souhaite que la mesure soit prolongée doit adresser une demande écrite et motivée au chef d’établissement. C’est à l’intéressé de fournir les éléments à l’appui de sa demande.
L’autorité compétente n’est pas tenue d’y faire droit, dès lors que les motifs du détenu ne correspondent pas aux dispositions réglementaires.
Afin que le détenu exprime sa demande en connaissance de cause, une information claire et complète doit lui être donnée sur les conditions de détention au quartier d’isolement.
S’il est dans l’impossibilité de présenter une requête écrite, sa demande fait l’objet d’un compte rendu écrit rédigé par un personnel de l’établissement.
Lorsque la décision relève de la compétence du directeur régional des services pénitentiaires, le chef d’établissement transmet dans les meilleurs délais la demande du détenu, la fiche de liaison ainsi qu’un rapport motivé sur l’opportunité de la prolongation de l’isolement.
Lorsque la décision relève de la compétence du ministre de la justice, le directeur régional doit, en outre, émettre un avis motivé sur la prolongation de la mesure avant transmission de la proposition de prolongation ou de mainlevée au bureau EMS1.
Il doit être répondu par écrit à la demande du détenu en indiquant les motifs de la décision, qu’il y soit fait droit ou non. Cette décision peut prendre la forme d’une mention sur la demande du détenu, les motifs doivent néanmoins apparaître clairement.
Si l’administration ne répond pas dans les deux mois suivant la réception de la demande, celle-ci est réputée rejetée.

2. L’urgence
L’article R.57-9-10 du CPP ménage la possibilité pour le chef d’établissement de procéder en urgence au placement d’un détenu à l’isolement, si cette mesure est « l’unique moyen de préserver la sécurité de l’établissement ou des personnes »
Seuls le chef d’établissement et ses adjoints et, le cas échéant le fonctionnaire d’astreinte, ayant reçu délégation écrite à cet effet, sont habilités à ordonner le placement provisoire à l’isolement d’un détenu.
En cas de placement à l’isolement selon la procédure d’urgence, il n’y a pas lieu d’appliquer la procédure contradictoire. L’urgence doit être rigoureusement caractérisée au regard de la nécessité de préserver la sécurité de l’établissement ou des personnes.
Le placement provisoire à l’isolement ne peut excéder 5 jours. Dans ce délai, et au plus tard le cinquième jour à minuit, une décision de placement, de prolongation de l’isolement ou de levée de l’isolement provisoire doit être prise dans les conditions de droit commun. En l’absence de décision notifiée au détenu dans ce délai, il doit immédiatement être affecté en détention ordinaire.
Pour le calcul de la durée, le premier jour du placement provisoire doit impérativement être comptabilisé.
Ex : si un détenu est placé le 30 décembre à l’isolement provisoire, quel que soit l’horaire du placement, celui-ci doit prendre fin dans la journée du 3 janvier au plus tard à minuit.
En conséquence, le détenu doit être informé de ses droits dès le placement provisoire au moyen du formulaire joint (annexe 1).
Si le délai est écoulé un samedi, un dimanche ou un jour férié, il ne peut en aucun cas être prorogé. Dans la mesure du possible, il convient d’anticiper et d’organiser le débat contradictoire un jour ouvrable.
La durée du placement provisoire s’impute sur la durée totale de l’isolement. En conséquence, celle-ci doit être portée sur la fiche de liaison même s’il n’a pas été suivi d’une décision de placement à l’isolement.
Ex : lorsque le détenu a été placé en urgence à l’isolement le 31 décembre, et que la décision est prise dans la journée du 3 janvier, l’isolement ne peut en tout état de cause être ordonné que jusqu’au 31 mars.

3. Les circonstances exceptionnelles
Le deuxième alinéa de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 dispose que la procédure contradictoire n’est pas applicable en cas de circonstances exceptionnelles.
Pour écarter les garanties procédurales, les évènements doivent être imprévisibles et revêtir tant par leur ampleur que par leur durée une particulière gravité.
Il en va notamment ainsi lorsque les avocats ou les mandataires sont empêchés d’accéder à l’établissement (mutinerie, destruction de bâtiments...) ou lorsque le bon fonctionnement de l’établissement pénitentiaire est durablement affecté (mouvement social...).
En tout état de cause et dans toute la mesure du possible, la tenue du débat contradictoire doit être différée afin que les personnes détenues puissent bénéficier des garanties procédurales.

4. Le transfert d’un détenu placé à l’isolement
Le transfert du détenu ne met pas immédiatement fin à la mesure d’isolement, sauf si l’autorité compétente pour prendre la décision dans l’établissement d’affectation décide qu’il n’y a pas lieu de maintenir cette mesure.
Le détenu peut être maintenu à l’isolement dans le nouvel établissement d’affectation pendant une durée maximale de 15 jours, quelle que soit la durée de l’isolement restant à subir. Pendant ce délai, la procédure contradictoire préalable à la décision d’isolement doit être mise en œuvre.
Si la décision de prolongation d’isolement n’est pas notifiée au détenu ou si aucune décision n’a été prise dans ce délai, l’intéressé est immédiatement affecté dans un quartier de détention ordinaire.
Le délai de 15 jours expire le quinzième jour suivant l’arrivée du détenu à
l’établissement, à minuit. Il s’impute sur la durée totale de la mesure, que celle-ci soit ou non prolongée.
Ce délai est un délai unique, qui ne saurait être renouvelé par un second transfert du détenu durant ces 15 jours. En revanche, si durant cette période une décision d’isolement est prise et que le détenu est à nouveau transféré, l’autorité compétente bénéficie d’une nouveau délai de 15 jours pour apprécier l’opportunité de prolonger ou non l’isolement dans le troisième établissement.
Si la prolongation de la mesure d’isolement est envisagée, la procédure contradictoire doit être initiée dès l’arrivée du détenu à l’établissement afin que la décision puisse lui être notifiée à temps. Une attention particulière doit être portée aux situations relevant de la compétence du directeur régional ou du ministre de la justice.
Lorsqu’un détenu placé à l’isolement provisoire est transféré, le délai maximal de 5 jours prévu par l’article D.283-2-4 du CPP ne peut en aucun cas être dépassé.
Ex : si le détenu était placé à l’isolement provisoire depuis deux jours dans
l’établissement de départ, la décision de placement ou de prolongation doit intervenir au plus tard dans les trois jours de l’arrivée dans l’établissement d’affectation, après mise en œuvre de la procédure contradictoire.
Lorsqu’un détenu placé à l’isolement sur décision du directeur régional ou du ministre de la justice est transféré, la direction régionale d’origine doit immédiatement alerter la direction régionale d’affectation et le bureau EMS1 lorsque la décision est de sa compétence.
En effet, la situation du détenu doit être réexaminée avant l’expiration du délai de 15 jours. La direction régionale d’origine transmet une copie de la dernière décision relative à l’isolement ainsi que la fiche de liaison.
Si le transfert concerne un détenu placé à l’isolement à sa demande, la levée de la mesure est immédiate.
Il convient de souligner que lorsque le détenu est placé à l’isolement à la demande de l’autorité judiciaire, ces dispositions ne sont pas applicables, et le transfert du détenu ne met pas fin à l’isolement sauf décision contraire du magistrat.

III. LA DUREE DE L’ISOLEMENT
1. Les modalités de calcul
Le chef d’établissement est compétent pour décider du placement à l’isolement d’un détenu et, le cas échéant, pour prolonger la mesure jusqu’au sixième mois.
Le directeur régional des services pénitentiaires est compétent pour décider de la prolongation de l’isolement à compter du sixième mois et jusqu’à un an.
Le ministre de la justice reste compétent pour décider de la prolongation de l’isolement au-delà d’un an pour une durée de quatre mois renouvelables.

1.1 L’interruption de la période d’isolement
Afin de simplifier et d’unifier les modalités de calcul de la durée de l’isolement et de déterminer clairement l’autorité compétente pour décider de la mesure, un principe unique a été fixé par le texte réglementaire.
Toutes les périodes d’isolement effectuées par le détenu, à sa demande ou à l’initiative de l’administration, doivent être prises en compte afin de déterminer l’autorité compétente pour prolonger la mesure, dès lors qu’elles n’ont pas été suivies d’une interruption supérieure à un an.
En revanche, lorsqu’une interruption de plus d’un an a eu lieu, le chef d’établissement redevient compétent : on considère que la nouvelle mesure est alors une décision initiale de placement à l’isolement [7].
L’article D.283-1-10 du CPP dispose que les hypothèses d’interruption que sont le placement au quartier disciplinaire ou l’hospitalisation « sont sans effet sur le terme de l’isolement antérieurement décidé ». Il en est de même pour la permission de sortir ou la décision de fractionnement de peine.
Toutes ces périodes s’imputent sur la durée totale de la mesure.
Il convient par conséquent d’apprécier dans chaque situation l’opportunité de lever l’isolement en fonction de la durée d’absence du détenu du quartier d’isolement.

1.2 La computation des délais
Le calcul de la durée de l’isolement s’effectue en principe de date à date.
Ex : la prolongation d’un isolement initial en date du 5 juin 2006 doit avoir lieu le 5 septembre 2006 au plus tard.
Dans le cas où la mesure d’isolement commence à courir le dernier jour du mois, la date de fin de la mesure est ramenée au dernier jour du mois d’échéance.
Ex : si un détenu est placé à l’isolement pour une durée de trois mois le 31 janvier, l’isolement prend fin le 30 avril ; si la mesure est décidée le 30 novembre, elle prend fin le 28 ou le 29 février.
Lorsque la période d’isolement a été interrompue en raison d’une mainlevée en cours de mesure ou d’un transfert, il y lieu de considérer qu’un mois d’isolement est égal à 30 jours.
La décision de placement ou de prolongation de l’isolement précise la date à compter de laquelle elle prend effet.
La période de trois mois avant l’expiration de laquelle la décision de prolongation doit intervenir doit être comptée à partir de minuit le jour de la notification de la décision initiale ou du placement provisoire.
Ex : si un détenu est placé à l’isolement pour trois mois le 2 février, l’isolement prendra fin dans la journée du 2 mai au plus tard à minuit.
La mesure expire trois mois plus tard à minuit quel que soit le jour de la semaine, y compris le dimanche et les jours fériés.

2. La levée de l’isolement
2.1 L’autorité compétente pour décider de la levée de la mesure
L’article D.283-1 du CPP alinéa 1 prévoit que l’autorité qui a pris ou prolongé la mesure peut y mettre fin à tout moment, d’office ou à la demande du détenu.
Lorsque la décision relève du directeur régional ou du ministre de la justice, le chef d’établissement transmet au directeur régional une proposition motivée de levée de la mesure accompagnée d’un rapport, ainsi que tout certificat médical que le médecin aura estimé utile de rédiger, en joignant son avis sur l’opportunité d’y donner suite.

2.2 Les hypothèses de levée de l’isolement
2.2.1 La levée de l’isolement d’office
Les effets néfastes d’un isolement prolongé imposent un contrôle vigilant de la durée de la mesure par le chef d’établissement et le directeur régional. La possibilité de lever l’isolement doit être étudiée à tout moment de la mesure et a minima à l’approche de l’échéance de la mesure en cours. La levée ne répond à aucune formalité particulière mais elle doit figurer sur la fiche de liaison.
L’isolement est levé automatiquement si aucune décision n’a été prise au jour de l’échéance de la mesure en cours.
Dans un certain nombre de cas, la mesure peut être levée de manière anticipée, et notamment lorsque les motifs de placement à l’isolement ont disparu.
Concernant les prévenus placés à l’isolement sur décision de l’administration pénitentiaire, l’autorité judiciaire peut signaler au chef d’établissement des éléments permettant d’envisager la levée de l’isolement. Cette information n’implique pas que l’administration soit dans l’obligation de lever la mesure dès lors que d’autres arguments justifient ce maintien.

2.2.2 La levée de la mesure d’isolement à la demande du détenu
Conformément à l’article D.283-2-1 alinéa 1 du CPP, dès qu’un détenu placé à l’isolement à sa demande souhaite que l’isolement soit levé, le chef d’établissement doit faire droit à sa demande, même si la décision initiale avait été prise par une autre autorité. Cette décision de mainlevée en cours de mesure n’obéit à aucune forme précise, une mention sur le formulaire de décision est suffisante.
Lorsque le chef d’établissement envisage de lever ou de proposer la levée de la mesure en cours sans l’accord de l’intéressé, il convient d’appliquer la procédure contradictoire préalable à la prise de décision [8]. Il s’agit, en effet, d’une décision individuelle défavorable susceptible de faire grief.

3. La fiche de liaison
C’est la bonne tenue de la fiche de liaison prévue par l’article D. 283-1-4 du CPP, qui permettra de déterminer de façon certaine l’autorité compétente pour décider du placement ou de la prolongation de l’isolement ainsi que la durée maximale de la mesure.
En effet, un certain nombre d’évènements vont reporter ou modifier la date de changement de compétence.
Cette fiche est systématiquement transmise à la direction régionale et à la direction de l’administration pénitentiaire à l’occasion d’une demande de prolongation.
Les placements à l’isolement judiciaire doivent être portés pour information sur la fiche de liaison.
A titre d’exemple, il convient de se reporter à la fiche de liaison complétée en annexe (annexe 14 et 15).

IV. LE PLACEMENT A L’ISOLEMENT SUR DECISION DE L’AUTORITE JUDICIAIRE
En application des articles 715 et D.55 du CPP, l’autorité judiciaire est compétente pour donner tous les ordres nécessaires soit pour l’instruction, soit pour le jugement, qui devront être exécutés dans les maisons d’arrêt.
Aux termes des articles D.56, D.56-1 et D. 56-2 du CPP, le magistrat saisi du dossier de l’information peut prescrire la séparation d’un prévenu d’autres détenus, l’interdiction de communiquer et l’isolement.
Ces trois procédures doivent être clairement distinguées :
- l’interdiction de communiquer, prévue par l’article D.56 du CPP, peut être ordonnée par le magistrat saisi du dossier de l’information pour une période de 10 jours renouvelable une seule fois. Le régime est plus strict que celui de l’isolement. Le détenu a interdiction de communiquer avec toute personne autre que son défenseur et le personnel pénitentiaire.
- la séparation du détenu avec un ou plusieurs autres prévenus nommément désignés peut également être ordonnée par le magistrat, celui-ci indique la durée pendant laquelle cette séparation doit être effective. A défaut, cette durée est celle du titre de détention. La mesure de séparation ne nécessite pas un placement à l’isolement.
- l’isolement.
L’isolement à l’initiative de l’administration et l’isolement à l’initiative de l’autorité judiciaire sont deux procédures soumises à un régime juridique distinct. Par conséquent l’administration pénitentiaire n’a pas à formaliser une décision judiciaire en la « doublant » d’une décision administrative.
Pour la même raison, la durée de l’isolement judiciaire ne s’impute pas sur la durée de l’isolement administratif.

1. Les motifs de placement à l’isolement sur décision judiciaire
Lorsque le magistrat saisi du dossier de l’information prescrit l’isolement d’un détenu, l’article D.56-1 du CPP prévoit qu’il en est fait mention dans la notice individuelle, lorsque la mesure est décidée au moment de l’incarcération du prévenu. Une copie de la partie de la notice individuelle relative à l’isolement peut être notifiée au détenu.
La décision du magistrat est prescrite dans tout autre document lorsque la mesure est décidée ultérieurement. Une photocopie de ce document peut être notifiée au détenu. C’est ce document qui matérialise la décision du juge. Aucun autre document ne doit être formalisé par l’administration pénitentiaire pour confirmer cette décision.

2. Durée de l’isolement judiciaire
En application de l’article D.56-1 du CPP, le magistrat précise la durée pour laquelle il prescrit l’isolement du détenu. Celle-ci ne peut cependant être supérieure à celle du titre de détention. A défaut de précision, cette durée est celle du titre de détention.
En conséquence, si la détention provisoire est prolongée sans qu’une nouvelle décision d’isolement ait été prise par l’autorité judiciaire, le détenu est affecté en détention ordinaire. Il est souhaitable d’anticiper en rappelant au magistrat concerné au moment de l’échéance du titre de détention, que le détenu est placé à l’isolement et de solliciter de sa part des instructions éventuelles.
La levée de l’isolement judiciaire peut être prononcée d’office par le magistrat, sur réquisitions du procureur de la République, sur requête du chef d’établissement ou à la demande du détenu.
Si le chef d’établissement estime que la mesure doit être levée, il transmet au magistrat concerné des éléments qui justifient qu’une telle mesure n’est plus nécessaire du fait de l’évolution de la situation du détenu.
Tous les documents relatifs à l’isolement judiciaire d’un détenu doivent être conservés dans la partie judiciaire du dossier individuel visée à l’article D.157 du CPP.
En outre, le détenu doit être informé qu’il peut adresser des réclamations relatives à l’isolement au magistrat saisi du dossier de l’information.

V. LE REGIME DE DETENTION
Pour prévenir un trop grand isolement social, le maintien des contacts et des échanges entre le personnel et les détenus isolés est essentiel. S’il permet d’atténuer l’isolement, surtout dans le cas où l’intéressé ne bénéficie pas de parloirs, il participe également de la fonction d’observation de la personnalité du détenu.
Pour ces mêmes raisons, il appartient au personnel de direction et d’encadrement de l’établissement et au personnel socio-éducatif de prévoir des audiences avec les détenus isolés, au moins aussi fréquemment qu’en détention normale.
Le régime de l’isolement doit être appliqué à tous les détenus isolés même en l’absence de quartier prévu à cet effet. Toutefois, si la mesure d’isolement est amenée à durer, il convient d’envisager l’affectation du détenu dans un établissement doté d’un quartier d’isolement afin qu’il bénéficie des infrastructures spécifiques.
En revanche, ce régime spécifique ne doit pas être appliqué à un détenu affecté en cellule au sein du quartier d’isolement pour raison de commodité alors qu’aucune décision d’isolement n’a été prise (par exemple comme auxiliaire). Si l’isolement ne se justifie pas, le détenu doit impérativement bénéficier du régime de détention ordinaire.

1. Le règlement intérieur
Le règlement intérieur de l’établissement doit comporter une fiche relative à la procédure de placement à l’isolement, aux visites médicales obligatoires, à l’emploi du temps et aux activités de ce quartier selon les principes énoncés ci-dessous.
Ces règles doivent être affichées dans le quartier d’isolement. Un exemplaire sera remis à chaque détenu isolé.

2. L’isolement cellulaire
L’article D.283-1-2 du CPP alinéa 2 impose que le détenu placé à l’isolement soit seul en cellule. Les cellules du quartier d’isolement doivent recevoir un ameublement identique à celui des cellules de détention ordinaire. Le type de mobilier utilisé pour les cellules disciplinaires ne peut en aucun cas être employé dans les quartiers d’isolement.
Les règles relatives à la salubrité et la propreté prescrites par les articles D.350 à D.352 du CPP doivent être respectées au quartier d’isolement. Ainsi les cellules qui le composent doivent notamment bénéficier d’un éclairage naturel par une fenêtre permettant d’assurer l’aération nécessaire.

3. L’exercice des droits
L’isolement n’est pas une mesure disciplinaire. Par conséquent, les détenus placés au quartier d’isolement sont autorisés à correspondre, recevoir des visites, ils ont accès à l’information. Toutefois, l’exercice de ces droits peut être aménagé afin d’éviter les contacts entre les détenus isolés et les autres détenus.

3.1 Le droit à l’information
L’accès à l’information des détenus isolés est identique à celui des autres détenus. Ils ont la possibilité de cantiner ou de s’abonner aux revues de leur choix, conformément à la réglementation en vigueur.
Le chef d’établissement organise un accès direct à la bibliothèque à des créneaux horaires spécifiques aux détenus isolés. A défaut, un fond annexe et régulièrement renouvelé doit être constitué au sein du quartier d’isolement et un catalogue comprenant l’intégralité des ouvrages de la bibliothèque doit être mis à la disposition des détenus isolés.
Les détenus isolés ont la possibilité de louer ou d’acheter des téléviseurs dans les mêmes conditions que les autres détenus de l’établissement ainsi que des postes radiophoniques ou des chaînes stéréophoniques.
Au regard de l’absence de contact des détenus isolés avec les autres détenus, il convient, dans la mesure du possible, qu’un poste de télévision soit mis gratuitement à disposition des détenus indigents ou n’ayant pas les moyens de le louer.

3.2 Les relations avec l’extérieur
Le placement au quartier d’isolement ne remet pas en cause le droit à la correspondance, aux visites, et à l’accès au téléphone pour les condamnés en établissement pour peine.
Les détenus isolés peuvent écrire tous les jours et sans limitation à toute personne de leur choix.
Toutefois, les impératifs fixés par le juge d’instruction, la surveillance spéciale liée à l’inscription de l’intéressé comme détenu particulièrement signalé ou à son repérage comme personnalité suicidaire, peuvent justifier une attention particulière portée au contenu de sa correspondance.
La durée et la fréquence des visites autorisées sont identiques à celles des autres détenus, soit au moins trois fois par semaine pour les prévenus et une fois par semaine pour les condamnés. En revanche, l’accès aux locaux des parloirs doit se faire de manière individuelle.
Le détenu placé à l’isolement peut recevoir, comme tout autre détenu, la visite d’un membre des associations intervenant habituellement en détention, telles que le GENEPI ou les visiteurs de prison.

3.3 Les activités
Les détenus isolés ne peuvent participer aux promenades, activités collectives et offices religieux prévus pour les détenus soumis au régime ordinaire de détention, à moins qu’ils n’y aient été autorisés pour une activité spécifique par le chef d’établissement.
Celui-ci peut par exemple autoriser un détenu isolé à participer à un atelier
thérapeutique ou lui permettre de poursuivre une activité entreprise avant le placement à l’isolement après en avoir évalué les conséquences pour la sécurité des personnes ou de l’établissement [9].
En outre, tous les détenus isolés doivent bénéficier d’une promenade d’au moins une heure chaque jour [10]. Il convient, dans la mesure du possible, de permettre des plages horaires de promenade équivalentes à celles dont bénéficient les personnes placées en détention ordinaire.
L’espace prévu pour la promenade doit obligatoirement comporter une perspective à l’air libre. L’option d’un créneau horaire spécifique pour la promenade des isolés dans une cour ouverte doit être envisagée.
Le chef d’établissement doit favoriser, si la personnalité du détenu et les motifs de l’isolement le permettent, le regroupement avec un plusieurs autres détenus isolés. Ces regroupements ponctuels peuvent en particulier être favorisés pour des occasions telles que les fêtes nationales ou religieuses [11].
Des espaces spécifiques aux activités en commun pourront être aménagés au sein des quartiers d’isolement, en particulier lorsqu’ils sont de taille importante.
Le quartier d’isolement doit impérativement permettre l’organisation d’activités sportives, seul ou en petit groupe. Des équipements adaptés doivent être prévus à cet effet.
En outre, le chef d’établissement doit tout mettre en œuvre pour proposer du travail aux détenus isolés et favoriser l’organisation de modules individuels d’enseignement, de formation ou d’enseignement à distance, en liaison avec les services de l’éducation nationale.

4. Le rôle des autorités médicales
4.1 L’information quotidienne et le suivi médical obligatoire
Le chef d’établissement doit s’assurer de la transmission quotidienne de la liste des détenus placés à l’isolement à l’équipe médicale, mentionnant, le cas échéant, les nouveaux arrivants [12].
En effet, chaque détenu placé à l’isolement doit faire l’objet d’un examen médical au moins deux fois par semaine [13].
Le médecin doit pouvoir s’entretenir avec le détenu dans des conditions préservant le secret médical. Le personnel de surveillance ne peut être présent dans la cellule à l’occasion de la visite du médecin. Si nécessaire, une garde vigilante d’un ou plusieurs agents dans le couloir doit permettre de préserver la sécurité du personnel soignant, sauf si le médecin ou l’infirmier sollicite des précautions plus importantes.

4.2 Les avis médicaux
L’article D.283-1-3 du CPP dispose que « chaque fois qu’il l’estime utile au regard de l’état de santé du détenu, le médecin émet un avis sur l’opportunité de mettre fin à l’isolement ».
Au-delà des visites régulières du médecin, le chef d’établissement peut solliciter le service médical et lui demander un avis quant à l’impact de la mesure sur l’état de santé du détenu.
En outre, en application de l’article D.283-1-7 du CPP alinéa 2, les décisions de prolongation d’isolement au-delà d’un an sont prises après avis écrit du médecin intervenant à l’établissement.
L’administration n’est pas liée par l’avis médical. Elle doit cependant en tenir compte et rechercher d’éventuelles solutions d’aménagement de la mesure.
Lorsque l’isolement est de la compétence du chef d’établissement, celui-ci informe le directeur régional des suites données à cet avis médical. Dans le cas contraire, il accompagne le certificat médical de son avis sur l’opportunité d’y donner suite.
Lorsque l’isolement est de la compétence du ministre de la justice, le certificat médical est transmis au bureau EMS1 par le directeur régional, qui y joint son avis.

5. Mesures permettant de renforcer la sécurité
Conformément à la circulaire du 14 mars 1986 relative aux fouilles des détenus, une fouille intégrale du détenu doit être effectuée avant son placement à l’isolement.
Pour la surveillance du quartier d’isolement, le chef de détention chargé de fixer les horaires des rondes de nuit, en application de l’article D.272 du CPP, organise des rondes à l’œilleton toutes les deux heures.
Les cellules des détenus isolés ne peuvent être ouvertes qu’en présence de deux surveillants. En outre, lors de tous leurs déplacements, ces détenus doivent être accompagnés d’un surveillant. En fonction de la personnalité ou du profil du détenu concerné, le chef d’établissement ou son représentant peut imposer, également, la présence d’un gradé.
Lors des déplacements des détenus isolés, les mouvements de détention qui impliqueraient une rencontre avec d’autres détenus doivent être suspendus.
Les personnels affectés au quartier d’isolement doivent être sensibilisés à l’importance de l’observation des détenus isolés. Celle-ci doit permettre de donner des éléments qui tendront à conforter l’appréciation des risques encourus pour la sécurité des personnes ou de l’établissement, soit à proposer la levée de la mesure, mais également à détecter les effets éventuels de l’isolement sur la santé physique ou psychique de l’intéressé.
Cette observation donne lieu à l’élaboration d’une fiche par détenu placé à l’isolement, complétée par le personnel en poste ou responsable du quartier de toute remarque concernant le comportement du détenu isolé au cours de l’exécution de la mesure.
Cette fiche est régulièrement consultée par l’encadrement et impérativement avant de proposer la prolongation de la mesure. Le rapport de comportement en constitue la synthèse, transmise au directeur régional et à la direction de l’administration pénitentiaire avec la proposition de prolongation.
La forme de cette fiche est libre. En revanche, dans la mesure où elle contient des éléments relatifs à la personnalité du détenu, elle lui est communicable. Seuls les éléments susceptibles de porter atteinte à la sécurité de l’établissement peuvent en être occultés.
En outre, les éléments d’évaluation du risque suicidaire de chaque détenu isolé doivent être régulièrement actualisés.

6. Le registre des mesures d’isolement
L’article D.283-1-4 du CPP alinéa 2 prévoit qu’un registre des mesures d’isolement est tenu sous la responsabilité du chef de l’établissement. Il doit être visé par les autorités administratives et judiciaires lors de leurs visites de contrôle et d’inspection.
Constitué de feuillets numérotés et datés, le registre retrace tous les mouvements au quartier d’isolement : les entrées et sorties des détenus, ainsi que l’heure des mouvements, les passages ou audiences devant les membres du personnel, des intervenants extérieurs, des autorités judiciaires ou administratives ainsi que les visites du personnel médical. Une colonne doit permettre de mentionner en face de chaque mouvement le visa du responsable ou du visiteur.
Le directeur régional doit veiller à ce que ses services transmettent mensuellement à la sous direction de l’état major de sécurité la liste des détenus placés au quartier d’isolement, et leur activité en matière d’isolement.

VI. LES VOIES DE RECOURS
Il s’agit de préciser ici les recours relatifs à l’isolement décidé par l’administration, et non par l’autorité judiciaire.

1. Réclamations auprès des autorités administratives et judiciaires
1.1 Observations auprès du juge de l’application des peines ou du magistrat saisi de l’information
L’article D.283-1-1 du CPP prévoit que le détenu placé à l’isolement « peut faire parvenir au juge de l’application des peines ou au magistrat saisi du dossier de l’information toutes observations concernant la décision prise à son égard ». Le détenu et son avocat, ont la possibilité de demander des explications sur la mesure au magistrat saisi du dossier de l’information ou aux autorités pénitentiaires, à tout moment de la procédure.

1.2 Requêtes auprès des autorités judiciaires et administratives
Ces requêtes sont ouvertes à tous les détenus, y compris ceux placés à l’isolement.
L’article D.262 du CPP autorise les détenus à écrire sous pli fermé aux autorités dont la liste est fixée par l’article A.40 du CPP. En vertu des articles D.259 et D.261 du CPP, le détenu peut-être entendu par les magistrats et fonctionnaires chargés de la visite ou de l’inspection de l’établissement et par toute autorité chargée d’une mission dans l’établissement.
Ces entretiens se déroulent hors la présence des membres du personnel de l’établissement.

2. Recours non contentieux
Deux voies de recours résultent d’un principe général du droit administratif et peuvent être utilisées par les personnes détenues contre une décision d’isolement : le recours gracieux et le recours hiérarchique. Toutefois, leur exercice ne suspend pas immédiatement l’exécution de la décision contestée.

2.1 Recours gracieux
Il s’exerce directement auprès de l’autorité qui a pris la décision d’isolement : chef d’établissement, directeur régional ou ministre de la justice. La réponse faite par l’autorité saisie est totalement libre quant à la forme.
L’autorité saisie d’un recours gracieux contre une décision d’isolement peut rapporter cette décision ou la maintenir.

2.2 Recours hiérarchique
Toute personne peut saisir le supérieur hiérarchique d’une autorité administrative afin de lui demander de revenir sur une décision prise par cette dernière. Conformément à l’article D.260 du CPP, un détenu peut contester la décision d’isolement prise par le chef d’établissement ou le directeur régional respectivement devant le directeur régional ou le ministre de la justice.
L’autorité saisie de ce recours peut examiner la légalité et l’opportunité de la décision attaquée. Elle peut retirer cette décision et, le cas échéant, en prendre une nouvelle qui se substituera à la première avec effet rétroactif ou rejeter le recours hiérarchique.

3. Recours contentieux
Les décisions relatives à l’isolement sont susceptibles de faire l’objet d’un recours devant une juridiction administrative.

3.1 Recours pour excès de pouvoir
3.1.1 La procédure
Le recours pour excès de pouvoir vise à obtenir du juge l’annulation d’une ou plusieurs décisions de placement ou de maintien à l’isolement du fait de leur illégalité. Le détenu dispose d’un délai de deux mois à compter de la notification de la décision d’isolement pour former un recours.
Sa requête est adressée au greffe de la juridiction compétente et doit être accompagnée de la décision attaquée.
Le juge administratif contrôle en premier lieu la légalité externe de la décision, c’est à dire le respect des formes dans lesquelles la décision a été rendue. Il contrôle en second lieu sa légalité interne, c’est à dire les motifs ayant conduit à la décision de placement , refus de placement ou de maintien à l’isolement.

3.1.2 L’annulation d’une décision d’isolement
Lorsqu’une décision d’isolement est annulée par le tribunal, celle-ci est censée n’avoir jamais existée, même si dans les faits, elle aura souvent déjà été exécutée. Dans cette hypothèse, l’exécution de la décision d’annulation ne se traduira par aucun acte.
En revanche, si la décision annulée est en cours d’exécution, le détenu doit être à nouveau affecté en détention ordinaire.
Si la mesure annulée a fait l’objet d’une prolongation, il convient impérativement de s’interroger sur la légalité des décisions subséquentes et sur l’opportunité de lever l’isolement.
En outre, après avoir obtenu du tribunal administratif une décision d’annulation de la mesure d’isolement, l’intéressé peut introduire un recours en indemnisation, qui vise à faire reconnaître une faute de l’administration et à obtenir réparation du préjudice causé par cette faute. En d’autres termes, ce recours vise à obtenir l’indemnisation du temps passé à l’isolement.

3.2 Référé administratif (procédure d’urgence)
Le référé est une requête visant au prononcé de mesures provisoires, avant tout débat au fond sur la légalité d’un acte administratif. En matière d’isolement, le référé vise à obtenir du juge administratif qu’il suspende la mesure d’isolement en cours. Pour cela, il faut que l’urgence le justifie et qu’il existe un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la mesure. [14]
Le détenu placé à l’isolement qui obtient une telle décision doit immédiatement rejoindre la détention normale et un nouveau placement à l’isolement ne peut être décidé que sur le fondement d’éléments actualisés, circonstanciés et postérieurs à la suspension de l’isolement [15].
Pour le calcul de la durée d’isolement et la détermination de l’autorité compétente pour prendre une telle mesure, il conviendra de tenir compte du temps effectivement passé par le détenu au quartier d’isolement, même si la mesure est suspendue ou annulée.
Vous voudrez bien me rendre compte des difficultés éventuelles que vous pourrez rencontrer dans l’application des dispositions de la présente circulaire.

Pour le garde des sceaux, ministre de la justice
Le directeur de l’administration pénitentiaire
Claude d’HARCOURT

ANNEXES
FORMULAIRES
1. Information du détenu - mise en œuvre de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000
2 .Convocation du détenu pour le débat contradictoire
3. Formulaire de désignation de l’avocat ou du mandataire agrée
4. Décision initiale de placement à l’isolement
5. Décision de prolongation de l’isolement du chef d’établissement
6. Décision de prolongation de l’isolement du directeur régional
7. Décision de prolongation de l’isolement du ministre de la justice
8. Décision de prolongation de l’isolement du ministre de la justice au delà de deux ans
9. Organisation de la procédure contradictoire par le chef d’établissement à la demande du directeur régional ou du ministre de la justice
10. Mainlevée de la mesure
11. Décision de placement à l’isolement à la demande du détenu
12. Décision de prolongation de l’isolement à la demande du détenu
13. Décision de mainlevée d’office de l’isolement à la demande du détenu
14. Fiche de liaison vierge
15. Fiche de liaison complétée (exemple)

[1] Article 35 du décret n° 20005-1755 du 30 décembre 2005 et arrêté d’application du 1er octobre 2001

[2] Une décision d’isolement motivée sur la protection d’un détenu compte tenu de ses antécédents sur l’établissement et des problèmes qu’il serait susceptible de rencontrer avec d’autres détenus, a été annulée car elle ne comportait pas de précisions factuelles les illustrant (TA Dijon, 27 janvier 2004)

[3] Un placement à l’isolement a été annulé pour erreur manifeste d’appréciation en raison notamment du fait que la provenance d’informations faisant état de suspicion de projet d’évasion n’était pas connue (TA Clermond-Ferrand, 29 décembre 2005 )

[4] Un placement à l’isolement décidé à la suite de l’exécution d’une sanction disciplinaire prononcée après la découverte d’un téléphone portable dans une cellule a été annulé pour insuffisance de motivation, parce qu’il ne démontrait pas le lien de causalité pouvant exister entre la saisie de cet objet et la nécessité d’une mesure de précaution. En revanche, le fait qu’un tel individu ait été signalé comme présentant des risques d’évasion par l’autorité judiciaire et que la préparation et l’exécution d’une telle initiative pouvaient être facilitées par l’utilisation d’un téléphone mobile, permet de justifier un placement à l’isolement par mesure de sécurité (TA Clermont -Ferrand, 8 novembre 2005)

[5] Article D.283-1-7 alinéas 3 et 4 du CPP

[6] Article D.51 du CPP : Juge d’instruction ou juge des enfants, procureur de la République, président de la chambre de l’instruction, président de la cour d’assises, procureur général près la cour d’appel, procureur général près la Cour de cassation

[7] D. 283-1-8 du CPP qui renvoie à l’article D. 283-1-5 relatif à la compétence du chef d’établissement

[8] D. 283-2-1 alinéa 2 du CPP

[9] D.283-1-2 alinéa 4 du CPP

[10] D.283-1-2 alinéa 5 et D.359 du CPP

[11] D.283-1-2 alinéa 6 du CPP

[12] D. 283-1-3 du CPP

[13] D.381 c) du CPP

[14] Ainsi, les tribunaux administratifs ont considéré que l’urgence était caractérisée lorsqu’il était établi, notamment par des certificats médicaux, que la mesure d’isolement portait atteinte à l’intégrité physique et psychique du détenu et que cette atteinte s’aggravait à mesure que l’isolement se prolongeait (TA Dijon 01.04.2004)

[15] Un tribunal administratif a validé une nouvelle mesure d’isolement prise pour un détenu qui aurait dû sortir de l’isolement après annulation de sa mesure mais dont le changement d’affectation s’imposait et qui a donc été replacé à l’isolement en attendant ce changement d’affectation (TA Paris 17 novembre 2005)