Une personne condamnée à titre principal à une peine de d’emprisonnement peut, en outre, se voir frappée d’une interdiction, d’une déchéance, d’une incapacité ou retrait d’un droit. Ces privations de droits relèvent soit d’une peine accessoire quand elles résultent automatiquement de la condamnation pénale, soit d’une peine complémentaire lorsqu’elles sont prononcées par le juridiction de jugement en plus de la peine d’emprisonnement. Ainsi, à compter de sa libération, la personne peut subir trois grands types d’interdictions, à savoir l’interdiction professionnelle, l’interdiction des droits civiques, civils et de famille, et l’ITF. Les peines complémentaires ont tendance à se multiplier dans de nombreux domaines alors même qu’elles constituent des obstacles à la perspective de réinsertion sociale et professionnelle des condamnés libérés. Quant aux peines accessoires, bien qu’exclues depuis l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal en 1994, elles restent présentes dans nombre d’autres Codes. Dans ce cas, le condamné peut se voir interdire l’accès à une profession sans que jamais cette sanction indirecte ne lui ait été signifiée lors de son jugement. Une procédure de relèvement de ces peines est censée permettre aux personnes condamnées d’échapper aux interdictions qui, du point de vue professionnel, peuvent lourdement peser sur leurs parcours de réinsertion.
602 Quelles interdictions, incapacités et échéances peuvent s’ajouter à la peine d’emprisonnement ?
Une personne qui se voit infliger à titre principal une peine d’emprisonnement peut également être condamnée à une série de mesures d’interdictions, d’incapacités, de déchéances ou de retraits de droits, qui prendront effet au moment de sa libération. Cette privation de droits regroupe trois grands types d’interdictions : des interdictions professionnelles qui peuvent concerner l’accès à la fonction publique, comme nombre d’emplois privés (Q.608 et suivantes), des interdictions des droits civiques, civils et de famille comme le droit de vote ou l’autorité parentale (Q.637 et suivantes) et une interdiction d’aller et venir comme l’ITF [1] (Q.645 et suivantes). Ces diverses interdictions relèvent soit d’une peine accessoire, quand elles découlent automatiquement et implicitement de la condamnation pénale, soit d’une peine complémentaire, lorsqu’elles sont prononcées et énoncées par la juridiction de jugement. Il est à noter qu’aucune interdiction des droits civiques, civils et de famille ne peut, « nonobstant toute disposition contraire », résulter en principe de plein droit d’une condamnation pénale.
603 Dans quelles conditions les interdictions, incapacités et déchéances relèvent d’une peine accessoire ?
Si le Code pénal prévoit qu’ »aucune peine ne peut être appliquée si la juridiction ne l’a pas expressément prononcée », diverses interdictions, incapacités ou déchéances résultent « de plein droit » du prononcé d’une condamnation pénale, en application de « disposition particulières » disséminées au sein d’autres Codes. Cette peine accessoire est une sanction indirecte, qui est automatique et implicite pour certaines infractions. Elle ne concerne, cependant, pas les mineurs, puisque aucune interdiction ne peut résulter de plein droit d’une condamnation pénale prononcée à leur encontre. Toute la difficulté soulevée par les peines accessoires réside dans le fait qu’elles ne sont pas explicitées dans le prononcé des jugements Par conséquent, les condamnés n’ont pas nécessairement connaissance des interdictions ou incapacités, temporaires ou définitives, dont ils font l’objet.
604 Dans quelles conditions les interdictions, incapacités et déchéances relèvent d’une peine complémentaire ?
Lorsque la loi le prévoit, au sein du Code pénal ou d’autres codes, un crime ou un délit peut être sanctionné par une peine complémentaire à la peine d’emprisonnement. Prononcée par la juridiction au moment du jugement, elle peut consister en diverses interdictions, incapacités ou déchéances. La peine complémentaire étant précisément énoncée par le juge, notamment en ce qui concerne sa nature et sa durée, le condamnée est censé avoir connaissance du type d’interdictions dont il est frappé et, par conséquent, ses droits dont il est privé après l’exécution de sa peine d’emprisonnement. En cas de doute, il peut consulter son casier judiciaire, puisque ces interdiction y sont inscrites (Q.572 et suivantes).
605 Les interdictions, déchéances ou incapacités peuvent-elles être privées d’effet ?
D‘une manière générale, les interdictions, déchéances ou incapacités cessent de produire leurs effets lorsque le condamné fait l’objet d’une réhabilitation, puisqu’elle entraîne l’effacement de la condamnation du casier judiciaire, et, a fortiori, celui des peines complémentaires ou accessoires pouvant éventuellement l’accompagner (Q.577 à 583). Par ailleurs, qu’elles découlent automatiquement de la condamnation pénale ou qu’elles soient prononcées par une juridiction de jugement, les interdictions qui frappent n condamné peuvent faire l’objet d’une requête en relèvement. Cette procédure est soit directe, quand elle concerne de façon spécifique la peine accessoire ou complémentaire dont le condamné fait l’objet, soit indirecte, si elle suppose l’exclusion de la mention de la condamnation dans les bulletins n°2 ou 3 du casier judiciaire. La requête peut aussi bien concernent le relèvement d’une interdiction d’exercer une activité professionnelle ou sociale, d’une incapacité électorale, d’une déchéance de l’autorité parentale ou d’une ITF. Outre ces procédures, il existe parfois, pour certaines professions, des dispositifs spécifiques de relèvement. Tel est le cas, par exemple, de l’incapacité d’enseigner dans les établissements privés sous contrat, dont peuvent être relevés les intéressés par décision du ministre de l’Education nationale, après avis du Conseil supérieur de l’éducation délibérant en formation disciplinaire.
606 Comment le condamné peut-il faire une demande de relèvement direct des interdictions, incapacités et déchéances dont il fait l’objet ?
Une demande de relèvement direct peut être faite par toute personne frappée d’une interdiction, déchéance ou incapacité quelconque, résultant de plein droit d’une condamnation pénale ou prononcée dans le jugement de condamnation à titre de peine complémentaire. Dans le premier cas, le relèvement peut être demandé par l’avocat le jour du jugement. Dans le second cas, la demande ne peut intervenir qu’après un délai de six mois à compter de la condamnation. Dans les deux cas, la requête peut être renouvelée tous les six mois. La demande doit être adressée au procureur de la République qui est tenu de « s’entourer de tous les renseignements utiles » et de « prendre, s’il y a lieu, l’avis » du JAP (Juge d’application des peines), avant de la transmettre à la juridiction de condamnation ou, en cas de pluralité de condamnations, à la dernière juridiction qui a statué. Si la condamnation a été prononcée par une cour d’assises, la juridiction compétente est la chambre de l’instruction dans le ressort de laquelle la cour d’assises a son siège. La juridiction saisie statue par une décision motivée en chambre du conseil sur les conclusions du ministère public, après que le condamné ou son avocat ont été entendus au cours de l’audience ou « dûment convoqués ». la décision peut relever, en tout ou partie, y compris en ce qui concerne la durée, l’interdiction, la déchéance ou l’incapacité dont l’intéressé fait l’objet. Elle est susceptible d’appel ou de pourvoi en cassation, selon la juridiction saisie. Une mention de la décision doit être faite en marge du jugement ou de l’arrêt de condamnation, ainsi qu’au casier judiciaire de la personne condamnée.
607 Comment le condamné peut-il faire une demande de relèvement indirect des interdictions, incapacités et déchéances dont il fait l’objet ?
Qu’elles découlent automatiquement de la condamnation pénale ou qu’elles soient prononcées par une juridiction de jugement, les interdictions, déchéances u incapacités peuvent faire l’objet d’un relèvement indirect par le biais d’une dispense d’inscription de la condamnation au bulletin n°2 du casier judicaire (Q.572). En effet, l’exclusion de la mention d’une condamnation dans ce bulletin « emporte relèvement » de toutes les interdictions, de quelque nature qu’elles soient, résultant de cette condamnation. Le tribunal a la faculté de prendre cette décision soit dans le jugement de condamnation, soit par le jugement rendu postérieurement sur la requête du condamné. Les règles de compétence et la procédure sont identiques à celles décrites dans la question précédente. La dispense d’inscription de la condamnation au bulletin n°2 s’étend au bulletin n°3. Par ailleurs, l’exclusion de la mention de la condamnation au bulletin n°3 s’obtient de la même manière que pour le bulletin n°2. Il est, cependant, à noter que ces dispositions ne sont pas applicables aux personnes condamnées pour une infraction d’ordre sexuel mentionnée à l’article 76-47 du Code de procédure pénale.
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