Publié le lundi 12 mars 2007 | http://prison.rezo.net/2005-saisine-no2005-68-sur-une/ Saisine n°2005-68 AVIS et RECOMMANDATIONS à la suite de sa saisine, le 18 juillet 2006, La Commission nationale de déontologie de la sécurité a été saisie, le 18 juillet 2006, par M. Louis MERMAZ, sénateur de l’Isère, des conditions dans lesquelles a été pratiquée une fouille intégrale à l’égard d’un détenu au centre des jeunes détenus de Fleury-Mérogis, en même temps que des incidents ayant entouré le changement de cellule et le déclassement de ce même détenu. LES FAITS M. A.L. travaillait à la bibliothèque du centre des jeunes détenus. Le 19 juillet 2004, après la libération (à l’occasion de la fête nationale) de nombreux détenus, le chef de détention décida de réorganiser l’occupation Vers 13h00, le surveillant de service (il s’agissait de M. O.B., alors surveillant stagiaire) invita les détenus appelés à changer de cellule à préparer leur paquetage. M. A.L. s’y refusa. Il aurait alors fait valoir, tant au surveillant présent qu’à la première surveillante intervenue un peu plus tard, que le changement prévu l’éloignerait de la bibliothèque où il travaillait. Vers 15h30, alors qu’il était invité à nouveau à préparer son changement de cellule, M. A.L. fit (selon les dires de son conseil) une « crise de nerfs » et se taillada l’avant-bras avec son couteau. La porte de la cellule fut refermée. Des surveillants munis de boucliers sont intervenus, ont contraint M. A.L. à sortir de la cellule, l’ont menotté et conduit dans une salle où, après démenottage, il fit l’objet d’une fouille à corps. Il fut conduit ensuite à l’infirmerie où neuf points de suture furent pratiqués sur son bras. Ce jour-là, M. A.L. ne fut pas placé en cellule disciplinaire, un certificat médical ayant contre-indiqué un tel placement. Vers 16h30, le premier surveillant chargé d’enquêter sur les faits entendit M. A.L. Celui-ci, selon les dires de son interlocuteur, resta calme au cours de l’entretien, exposant qu’il ne comprenait pas les raisons du changement de cellule. Personne, selon lui, ne les lui aurait communiquées. Aucun élément du dossier ne contredit cette indication. A la suite de ces faits, M. A.L. fut « déclassé », perdant son emploi à la bibliothèque du centre. Il comparut le 28 juillet 2004 devant la commission de discipline, qui lui infligea la sanction du placement en cellule disciplinaire pendant dix jours. Le 22 août 2004, le conseil de M. A.L. saisit le parquet d’une plainte, exposant que la fouille à corps subie le 19 juillet avait été effectuée « dans des conditions particulièrement indignes » et était « constitutive des délits de violences volontaires et d’agression sexuelle en application des articles 222-22 et suivants et 222-7 et suivants du Code pénal ». Le dossier ne contient aucune information sur les suites données à cette plainte. Le 23 août 2004, un article de presse détailla la situation de M. A.L. Prenant connaissance de cet article, le directeur du centre des jeunes détenus demanda aux surveillants qui étaient intervenus le 19 juillet de lui faire un compte-rendu des faits qui s’étaient produits ce jour-là. Le 25 août 2004, il comparut à nouveau devant la commission disciplinaire. Il a indiqué avoir été relaxé du chef de l’accusation de mise en danger de la sécurité d’autrui et sanctionné de deux jours de quartier disciplinaire pour insultes au personnel. Après l’exécution de cette sanction, il fut transféré dans une nouvelle cellule, où il acheva quelques semaines plus tard l’exécution de sa peine. AVIS Sur les interventions des surveillants auprès de M. A.L. En revanche, lorsqu’on lui demanda le 23 août 2004 d’établir un compte rendu des faits survenus le 19 juillet, le gardien stagiaire O.B. n’était nullement tenu d’aller interroger M. A.L. Connaissant les incidents dont il avait été le témoin, il ne pouvait pas ignorer que sa démarche ne pouvait être ressentie par le détenu que comme une provocation. Cette démarche a constitué de sa part une faute à la fois professionnelle et déontologique. Dès lors que M. A.L. s’était tailladé le bras, la fouille à corps effectuée le 19 juillet 2004 était justifiée dans son principe. S’agissant des modalités de son exécution, les éléments du dossier remis à la Commission ne permettent ni de confirmer ni d’infirmer les indications fournies par le conseil de M. A.L. à l’appui de la plainte adressée au parquet. Il appartiendra au juge pénal de se prononcer et à l’administration pénitentiaire de tirer les conséquences de la décision du juge. RECOMMANDATIONS Adopté le 15 janvier 2007 Conformément à l’article 7 de la loi du 6 juin 2000, la Commission a adressé son avis à M. Pascal Clément, ministre de la Justice, garde des Sceaux. |