Publié le jeudi 26 avril 2007 | http://prison.rezo.net/2006-saisine-no2006-61-sur-les/ Saisine n°2006-61 AVIS et RECOMMANDATIONS à la suite de sa saisine, le 23 juin 2006, La Commission nationale de déontologie de la sécurité a été saisie, le 23 juin 2006, par Mme Nicole BORVO, sénatrice de Paris, de violences dont un détenu écroué à la maison d’arrêt de Strasbourg aurait été victime de la part du personnel pénitentiaire, à la suite de son refus de réintégrer sa cellule. LES FAITS C’est au moment où le détenu s’agrippe à une grille palière que l’alerte générale est donnée - sans doute par le surveillant principal M. A., en poste dans le kiosque de l’étage -. Immédiatement, une dizaine de surveillants interviennent afin de prêter main-forte au lieutenant H.M. et maîtriser le détenu récalcitrant. Maintenu en l’air avant d’être plaqué au sol face contre terre, les bras maintenus dans le dos et les jambes neutralisées par une clé, le détenu indique avoir eu « l’impression de recevoir des coups, comme des taquets donnés avec la paume des mains » pour l’obliger à s’aplatir complètement. Si le détenu prétend avoir été menotté au moment de l’incident, les personnels pénitentiaires interrogés réfutent pour leur part cette affirmation en soulignant qu’aucun des intervenants n’était doté de menottes. En tout état de cause, pétrifié par l’intervention musclée et massive des agents appelés en renfort, le détenu, totalement résigné, arrête sa résistance et regagne sa cellule sous bonne escorte. En raison d’une vive douleur au genou, le détenu C.B. sollicite par la suite l’intervention du surveillant d’étage pour se rendre à l’UCSA, où il sera reçu par un personnel soignant environ deux heures après l’incident. Le certificat médical établi le jour même par le Dr S. atteste « une dermabrasion de 1 cm sur 2 à la base du cou à gauche, un hématome en nappe à la face postérieure des deux bras, un oedème douloureux au niveau du genou gauche et du tendon rotulien ». Il faut préciser qu’en cette circonstance, aucun compte-rendu verbal ou écrit n’a été adressé par le lieutenant H.M. à sa hiérarchie. AVIS Selon le Code de procédure pénale (art. D.249-3, 4°), tout détenu qui refuse d’obtempérer aux injonctions des membres du personnel de l’établissement pénitentiaire se rend coupable d’une faute disciplinaire du troisième degré. En refusant de réintégrer sa cellule malgré l’injonction du lieutenant H.M., le détenu C.B. s’est donc rendu coupable d’une telle faute. À cet égard, le comportement du lieutenant H.M. (qui n’a pas rédigé ledit compte-rendu) apparaît tout aussi coupable du point de vue de la déontologie que celui du chef de détention, Mme M-H.N., qui s’est abstenue de solliciter de son subordonné des explications écrites, alors qu’elle ne pouvait pas ignorer, compte tenu de sa présence à proximité des lieux de l’incident, que la coercition avait été employée pour maîtriser le détenu. La Commission ne remet nullement en cause la légalité même de l’emploi de la coercition dans les circonstances de l’espèce. C’est la proportionnalité qui est critiquable. Il apparaît que l’intervention n’a pas respecté les règles énoncées aux articles D.242 et D.283.5 du Code de procédure pénale, rappelées par l’instruction du garde des Sceaux du 11 février 2002. Alors que tous les témoignages décrivent M. C.B. comme un détenu calme et non violent, l’inertie physique dont il a fait preuve en refusant de regagner sa cellule, ne justifiait pas le déclenchement de l’intervention. Cette intervention (faisant suite au déclenchement sans doute prématuré de l’alarme) d’une dizaine d’agents du personnel pénitentiaire pour maîtriser M. C.B. n’était ni ajustée à la situation, ni strictement nécessaire au contrôle du détenu. RECOMMANDATIONS Adopté le 18 décembre 2006 Conformément à l’article 7 de la loi du 6 juin 2000, la Commission a adressé son avis à M. Pascal Clément, ministre de la Justice, garde des Sceaux. |