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(2006) Arrêt de cassation n° 1754 du 15 mars 2006 ?validant une suspension de peine]

05-83.329 Arrêt n° 1754 du 15 mars 2006 (modifié par arrêt rectificatif d’erreur matérielle du 29 mars 2006) Cour de cassation - Chambre criminelle

Rejet

Demandeur(s) à la cassation : procureur général près la cour d’appel de Paris

Statuant sur le pourvoi formé par :

 Le procureur général près la cour d’appel de Paris,

contre l’arrêt de ladite cour d’appel, 13ème chambre, en date du 12 mai 2005, qui a ordonné la suspension de la peine de réclusion criminelle à perpétuité prononcée contre François X... pour complicité d’assassinat ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 591 et 720-1.1 du Code de procédure pénale, et violation de la loi ;

"en ce que la cour d’appel a ordonné la suspension de peine de François X... à compter du 16 mai 2005 aux motifs que les deux derniers experts ont conclu de manière concordante que le pronostic vital de François X... était engagé par la pathologie cardiaque grave et évolutive dont il est atteint et que l’une des alternatives prévues par l’article 720-1.1 du Code de procédure pénale, tel qu’il résulte de la loi du 4 mars 2002, est donc remplie, alors qu’aux termes de l’article 720-1.1 du Code de procédure pénale, la suspension de peine, d’une part, ne peut être ordonnée que si deux expertises médicales distinctes établissent de manière concordante que le condamné se trouve dans l’une des situations énoncées à l’alinéa 1 de l’article susvisé, que tel n’est pas le cas en l’espèce, les deux expertises n’étant nullement concordantes, l’une relevant que le pronostic vital était engagé à moyen terme ou à long terme, l’autre se bornant à poser ce diagnostic sans aucune précision ; d’autre part, ne peut viser que des situations immédiates de mort prochaine et non des états de santé dont l’issue est aléatoire ; qu’en s’abstenant de rechercher si, en l’espèce, le pronostic vital était engagé à court terme et en statuant sans disposer de deux expertises médicales concordantes, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée de l’article 720-1.1 du Code de procédure pénale" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 593 et 720-1.1, 707, alinéa 2, du Code de procédure pénale, pour insuffisance ou contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que la cour d’appel a ordonné la suspension de la peine prononcée contre François X... sans rechercher si cette mesure présentait un risque pour la sécurité et l’ordre public, alors que, d’une part, il résulte explicitement des termes de l’article 707, alinéa 2, du Code de procédure pénale, que "l’exécution des peines favorise, dans le respect des intérêts de la société et des droits des victimes, l’insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive", que, d’autre part, il résulte implicitement mais nécessairement de l’article 720-1.1 du Code de procédure pénale que la juridiction de jugement doit vérifier si l’élargissement du condamné présente un risque pour la sécurité et l’ordre public, qu’en s’abstenant de rechercher si, du fait de la dangerosité propre du condamné et du risque de récidive qu’il pouvait présenter, la mesure de suspension de peine était justifiée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

"Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que François X..., condamné par arrêt de la cour d’assises des Bouches-du-Rhône du 30 juin 1988 à la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité d’assassinat, a présenté une demande de suspension de peine sur le fondement de l’article 720-1.1 du Code de procédure pénale ; que deux expertises médicales distinctes ont été ordonnées ;"

Attendu que, pour accorder une suite favorable à cette demande, la cour d’appel énonce, par motifs adoptés, qu’il résulte de façon concordante des expertises diligentées que le demandeur est atteint d’une pathologie cardiaque, grave et évolutive, engageant le pronostic vital et rendant son état de santé durablement incompatible avec la détention ;

Attendu qu’en prononçant ainsi, les juges, qui n’étaient tenus par aucun texte légal de rechercher si la mesure de suspension présentait un risque pour la sécurité et l’ordre public, ont justifié leur décision, dès lors que l’article 720-1.1 du Code de procédure pénale permet d’ordonner la suspension de peine lorsque la pathologie dont est atteint le condamné rend son état de santé durablement incompatible avec la détention, même si cette pathologie n’engage pas à court terme le pronostic vital ;

D’où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Président : M. Cotte Rapporteur : Mme Ponroy, conseiller Avocat général : M. Charpenel Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan