Publié le lundi 14 mai 2007 | http://prison.rezo.net/2007-du-sida-on-n-en-fait-plus-une/ Du SIDA, on n’en fait plus une maladie « Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître » [1], mais, pour les plus âgés, vous souvenez-vous, au début de l’épidémie de SIDA, au commencement des années 1980, des campagnes de prévention pour lutter contre cette maladie ? « Le SIDA ne passera pas par moi » disait-on. Pour les plus jeunes, aujourd’hui, en 2007, « sortez couvert » est devenu le mot d’ordre. Mais force est de constater que depuis le début de lépidémie à nos jours, le virus du VIH n’a pas cessé de progresser et qu’il est passé par près de 170 mille personnes dans notre pays et plus de 40 millions dans le monde. Quand j’ai entendu, l’année dernière, les derniers chiffres concernant les nouvelles contaminations au virus VIH, je me suis posé une question : qu’est-ce qu’il fait que le virus VIH, on n’y fait plus attention ? Une question en amène d’autres : pourquoi n’en a-t-on plus peur ? Est-ce seimplement par inconscience ou par insouciance ? Est-ce que les messages de prévention ne sont pas assez percutant ? L’année dernière, il ya eu 40% en plus de nouvelles contaminations par rapport à l’année précédente, ce qui représente tout de même 2.000 personnes. De 5.000 personnes infectées en 2004, on est passé à 7.000. C’est plus qu’effrayant ! Cela fait froid dans le dos. Surtout quand on est soi-même contaminé par ce virus. On sait ce que toutes ces personnes vont devoir endurer. Je suis contaminé depuis 23 ans et j’ai décalré la maladie quand j’ai eu une tuberculose en 2000, alors permettez-moi de dire que je sais de quoi je parle. Voyez le paradoxe, chaque année, le 1er décembre, lors de la journée mondiale de lutte contre le SIDA, les associations se démènent pour diffuser des messages de prévention et, en même temps, on apprend que les contaminations continuent d’augmenter. Y a vraiment pas de quoi se taper le cul par terre ! On pourrait se dire que ça pourrait être bien pire si on ne faisait rien, ce qui n’est pas faut. Mais le problème est que même en faisant quelque chose, c’est chaque année encore plus pire que l’année précédente. Encore et toujours plus de nouvelles contaminations. Alors qu’est-ce qui cloche ? Qu’est-ce qui ne passe pas dans les messages de prévention ? Et d’après ce que j’ai entendu du micro-trottoir qui a été organisé par Sidaction, lors du dernier 1er décembre, je me suis rendu compte que le SIDA ne faisait plus aussi peur qu’au début de l’épidémie. Bien sûr, à cette époque, les craintes n’étaient pas justifiées, on n’était pas contaminé par le VIH en buvant dans le verre d’une personne infectée ou en étant piqué par un moustique (bien que certaines personnes le pensent encore aujourd’hui). En 2006, on connaît les modes de contamination, par le sexe, par le sang et de la mère à l’enfant. Dans le premier cas de figure, seul le préservatif masculin ou féminin peut nous protéger, dans le second, en utilisant son propre matériel d’injection ou de sniff stérile et dans le dernier cas, en suivant un traitement médical bien spécifique. Sachant cela, aucun risque d’être contaminé. Alors, je repose à nouveau la question, pourquoi y a-t-il de nouvelles contaminations ? Et bien parce que l’on pense que le SIDA, on ne meurt plus. « On peut vivre avec » ai-je entendu dire. Ou encore « il existe un vaccin » faisant référence au traitement d’urgence. Tout d’un coup, je me suis dit « mais c’est peut-être moi le responsable quand je dis que j’arrive à vivre avec ma maladie ? » « Peut-être me suis-je mal fait comprendre ou mal exprimer ? ». Didier Robert, détenu à la M.A. de la Santé, à Paris. [1] « La Bohème » de Charles Aznavour, 1966 |