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10 ZOOM sur une section : l’Aube

Mise en ligne : 2 mars 2006

Dernière modification : 19 août 2006

Texte de l'article :

La situation géographique
La section se trouve au nord de la région pénitentiaire de Dijon. Dans la région administrative de Champagne Ardennes.

3 établissements pénitentiaires
- Centre de détention de Villenauxe la Grande
 établissement du programme 13 000, éloigné de 30 km de la ville la plus proche.
- Centre pénitentiaire de Clairvaux
à la limite de l’Aube et de la Haute-Marne, soit à 70 km de Troyes
gare la plus proche (Bar-sur- Aube) desservie par un réseau de bus.
- Maison d’arrêt de Troyes
surpopulation carcérale comme dans bon nombre de maisons d’arrêt

La section de l’Aube en chiffres
293 601 habitants (INSEE 2002)
800 personnes détenues
15 membres ANVP

Nombre de personnes incarcérées et densité par établissement de l’Aube
- Maison d’arrêt de Troyes
Nbre de personnes détenues : 153, densité : 135,4 %
- Quartier du centre de détention de Clairvaux
Nbre de personnes détenues : 83, densité : 78,3 %
- Quartier de la maison centrale de Clairvaux
Nbre de personnes détenues : 184, densité : 87,6 %
- Quartier de la maison d’arrêt de Varennes-le-Grand
Nbre de personnes détenues : 202, densité : 101,0 %
- Quartier du centre de détention de Varennes-le-Grand
Nbre de personnes détenues : 184, densité : 95,3 %
Source : Administration Pénitentiaire, février 2005

Qui sont les membres de la section de l’Aube ?
La section comprend les visiteurs de ces trois établissements, soit : dix visiteurs de prison et cinq membres associés dont deux futurs visiteurs.
Les visiteurs sont pour moitié en activité professionnelle et pour l’autre en retraite. Le plus jeune a 36 ans et notre aîné, 76 ans. Une équipe constituée de personnes venant d’horizons divers, avec des motivations variées. Cependant, de nombreuses idées nous réunissent au-delà de la visite.

Les rencontres
La fréquence des rencontres est à accroître puisque, pour le moment, nous ne nous retrouvons qu’une à deux fois par an. Ceci s’explique probablement par notre petit nombre. Nous nous croisons souvent en détention, dans des actions et dans les quelques réunions dites trimestrielles (une à deux fois par an selon les lieux).
Il n’y a pas de réunions sur site (sauf les réunions trimestrielles). Les réunions se font systématiquement tous ensembles, et nous abordons la vie de la section, le recrutement, et les projets. Le temps convivial du repas pris ensemble donne l’occasion d’un moment de partage d’expériences.

Les difficultés de la section
Le plus grand souci est le recrutement. Pourquoi sommes-nous si peu nombreux ? Comment faire pour recruter ? Faut-il développer plus le partenariat ? Faire de la publicité dans les journaux ? Les forums des associations sont-ils des lieux appropriés ?
Voici quelques unes des questions auxquelles nous avons tenté de répondre en faisant plusieurs expériences :
- Intervention pour présenter le rôle du visiteur de prison, notre action... dans les radios, sur les plateaux de la télévision locale, dans les clubs (Rotary, Lion’s Club), dans les lycées...
- Nous nous associons aux projets locaux sur le thème de la prison : c’est un moment privilégié pour faire des articles dans les journaux et ainsi nous faire connaître.
- Nous organisons des conférences avec nos partenaires et les questions de la salle lors du débat tendent à nous faire penser que nous allons avoir enfin des candidatures, mais peu de candidats franchissent le pas.

Nous ne désespérons pas, le partenariat avec l’administration est plus qu’excellent sur ce point. Les directeurs sont motivés et motivants, ils cherchent avec nous des pistes, des idées et sont prêts à faire des interventions lors de conférences. Ils accélèrent les procédures à leur niveau. Le DSPIP, lors de ses entretiens ou par les candidatures spontanées, donne nos coordonnées et conseille de prendre contact. Nous assurons un accompagnement de la demande et des premiers pas en prison.
Nous proposons par ailleurs aux membres des associations partenaires, de se joindre à nous lors de la distribution de Noël, éventuellement ; notre but étant de susciter des demandes, de réduire les inquiétudes (en connaissant le lieu et le fonctionnement). Ces personnes sont fidèles et s’impliquent chaque année, mais pas d’avantage pour le moment. Nous sommes plein d’espoir à chaque intervention. Depuis deux ans, dix personnes nous ont recontactés, deux candidatures seulement sont en cours d’examen.

La situation démographique de la région rend notre action encore plus difficile. Lorsque que l’AP décide de construire un nouvel établissement pénitentiaire elle ne prend malheureusement pas en compte cette caractéristique : 250 000 habitants c’est moins de bénévoles potentiels.

Le financement constitu une autre difficulté importante.
La recherche de fonds nous a poussé à favoriser les partenariats sur des actions, plutôt que de faire des demandes de subventions annuelles.
Il est important de préciser que le Conseil général n’accorde pas de subvention à notre section. Réponse faite à chaque demande : « les détenus ne sont pas du département... »

En outre, nous ne sommes pas sollicités pour participer aux commissions d’indigence car nous n’avons pas d’argent à apporter. Nous ne sommes pas toujours inscrits comme partenaires sur des actions menées par d’autres pour les mêmes raisons. Notre expérience de la prison n’apparaît pas toujours suffisante. Nous pouvons apporter autre chose que de l’argent mais, trop souvent, l’argent est une condition sine qua non pour s’inscrire dans les actions engagées.

Continuer l’action
Que faire ? Ne jamais laisser la chaise vide, d’où notre souhait que l’ANVP soit plus présente dans les médias, et donc ne pas baisser les bras. Dans la mesure du possible, nous devons répondre à toutes les invitations, en se répartissant les interventions, et surtout tenter de faire avancer le débat sur la prison auprès des médias et donc de l’opinion publique. Ne pas laisser seuls les défenseurs du tout répressif sur le terrain des médias. Faire connaître à nos concitoyens la prison : les drames familiaux qui s’y jouent, les manques de moyens, la surpopulation carcérale, l’idée du travail de réinsertion et sa réalité...

Les actions de la section
Comme d’autres, l’ANVP organise une distribution de présents au moment des fêtes de Noël. Des lors, il s’agit de trouver le financement, prévoir les autorisations et mobiliser des bénévoles pour la distribution. La question est épineuse car depuis quelques temps certaines personnes détenues nous ont fait remarqué qu’elles ne voient ces bénévoles qu’une fois par an et plus après : « Ils font leur bonne action, et après plus rien... ». Cependant, même si cette affirmation s’avère hâtive, il faut bien comprendre que ces bénévoles rendent service ponctuellement à Noël car le reste du temps ils sont impliqués ailleurs, dans d’autres associations. Mais nous comprenons cette impression de démarche compassionnelle éprouvée par les personnes détenues et nous en tenons compte.
Comme présenté en amont, le partenariat avec d’autres associations est essentiel pour notre section. Par exemple, nous participons à l’émission du Téléphone du dimanche qui est une émission mise en place par le Secours Catholique de l’Aube pour permettre aux familles de passer un message à la radio, transmis en direct sur les ondes de RCF.
D’autres partenariats, notamment avec la Ligue des Droits de l’Homme, nous offrent d’autres perspectives : Une semaine d’exposition Arrêt sur maison d’arrêt à laquelle nous avons participé financièrement et bénévolement ; animation de l’exposition avec accueil des
groupes par des visiteurs, conférence sur le thème de la prison...
Nous avons aussi à cœur d’intervenir dans les lycées et les associations pour sensibiliser différents publics au thème de la prison et de l’action des visiteurs de prison.

Histoire
Lors de la Révolution, les bâtiments de l’abbaye de Clairvaux furent confisqués et déclarés biens nationaux le 2 novembre 1789. Vendue en 1792, l’abbaye fut achetée par l’État en août 1808 afin d’en faire une prison tandis que l’abbatiale était démolie entre 1812 et 1819.

Les projets
Depuis plusieurs années, nous avons divers projets que nous essayons de concrétiser pour faire progresser le débat en apportant bon nombre d’idées.
- Favoriser la mise en place du GENEPI dans notre département, car il y a des besoins en matière d’enseignement dans les établissements pénitentiaires. Pour l’instant, la section de l’ANVP assure le relais et la mise en relation avec les partenaires : AP, étudiants, Éducation nationale...
- Cette année nous espérons enfin pouvoir distribuer un colis Croix Rouge, à tous les indigents du département, soit environ 100 personnes. L’an passé il nous a été répondu qu’il n’y avait plus d’indigents !
- Réalisation d’un film documentaire avec une société de production rémoise sur le thème de La famille et la sortie. L’expérience menée dans la maison d’accueil de Clairvaux montre combien cette question est importante. De nombreux couples ne tiennent pas l’année qui suit la sortie, des conflits apparaissent avec les enfants, les membres de la famille élargie... Quel accompagnement est proposé ? Les projets sont envisagés avec la personne détenue mais jamais avec le couple et trop souvent les liens avec les enfants sont négligés : quel type d’accueil au moment des parloirs ? doit-on favoriser les parloirs familiaux ? Pour ce film, nous attendons de nouvelles autorisations, les premières ayant été annulées en raison de la mutinerie qui a eu lieu le jour retenu pour le tournage.
- A la suite de ce documentaire, organiser une soirée débat pour permettre de faire progresser l’idée « famille » au sein de la prison et de la population générale, et favoriser une réflexion sur les modalités d’accueil des familles (avec un souci particulier pour les enfants) au moment des parloirs.
- Les parloirs : nous proposons une réflexion au SPIP de Clairvaux pour mettre en place une ludothèque au parloir du centre pénitentiaire pour permettre aux enfants et leurs pères de se retrouver dans un contexte plus agréable, où le jeu apparaîtrait comme un moyen de faciliter la rencontre.

Les questions futures
La perspective de la création de 200 places supplémentaires au centre de détention de Villenauxe, nous oblige à réfléchir à l’accueil des familles, au recrutement de visiteurs et aux conditions de détention (les ateliers ne s’agrandissent pas, le temps de parloir va se réduire à une fois par semaine...).

En conclusion
Nous avons tous nos soucis et bien évidemment la section de l’Aube n’y échappe pas. Toutefois, l’ambiance est bonne. Les relations avec l’AP sont parfois aigres-douces mais le plus souvent satisfaisantes. Le partenariat est excellent, la taille de notre département est un avantage, car elle permet de bien nous connaître. Les projets ne manquent pas... c’est uniquement le temps pour les réaliser qui manque.
Nous devons nous préparer à l’arrivée de nouveaux détenus dans les deux ans qui viennent (1 000 personnes incarcérées pour le département de l’Aube) et donc recruter de nouveaux visiteurs (pour cela, faire en sorte d’accélérer les agréments). Enfin, les deux mutineries passées ont eu un impact négatif sur l’image de la prison, et plus particulièrement des personnes détenues, auprès de la population. Il nous incombe de changer cette image pour améliorer les conditions de vie de toutes ces personnes en détention.

Johann Avisse,
Président de la section et visiteur à Clairvaux
Source : Jéricho 190, Février 2005, ANVP 

Réctificatif
Lors de notre article présentant notre section de l’Aube dans le numéro 190 de Jéricho, nous avons commis une erreur.
Nous souhaitons tout d’abord présenter nos plus vives excuses aux personnes qui ont dû reprendre et sans cesse corriger cette erreur auprès des personnes détenues. Ainsi, le Centre de Détention de Villenauxe doit accroître sa capacité d’accueil de 200 places supplémentaires. Cependant, ces 200 places ne seront effectives qu’après des travaux qui s’étendront sur plusieurs mois, voire années. En outre, la direction et le personnel qui ont et auront toujours le souci du maintien du lien familial, nous ont indiqué qu’à aucun moment il n’était question de réduire le nombre de parloirs. Par ailleurs, nous avons la possibilité d’être informés au fur et à mesure de l’avancée des travaux.C’est donc en toute transparence que cet agrandissement s’effectue. Notre article avait pour but et objectif de souligner notre difficulté de recrutement de bénévoles.

Johann Avisse
Président section Aube
Source Jéricho 191,septembre 2005