RESOLUTION (70) 1
(adoptée par les Délégués des Ministres le 26 janvier 1970)
ORGANISATION PRATIQUE DES MESURES DE SURVEILLANCE, D’ASSISTANCE ET D’AIDE POST-PENITENTIAIRE POUR LES PERSONNES CONDAMNEES OU LIBEREES SOUS CONDITION
Le Comité des Ministres,
Rappelant la Résolution (65) 1, relative au sursis, à la probation et aux autres mesures de substitution aux peines privatives de liberté ;
Considérant que l’efficacité des mesures de traitement constitue pour tous les Etats membres un objectif primordial de la politique criminelle ;
Considérant qu’il est souhaitable d’éviter de prononcer des peines d’emprisonnement toutes les fois que cela est possible ;
Considérant que la probation, la libération conditionnelle et les mesures analogues qui impliquent un traitement en liberté se développent dans la plupart des Etats membres ;
Considérant qu’il est souhaitable de concevoir pour l’application de ces mesures, le cadre juridique le plus approprié, les services et les méthodes de traitement les plus efficaces ;
Considérant que l’établissement de principes communs pour l’application des mesures conditionnelles est souhaitable pour le développement de ces mesures et qu’il facilitera, en outre, la mise en oeuvre de la Convention européenne pour la surveillance des personnes condamnées ou libérées sous condition,
Recommande aux gouvernements des Etats membres :
1. (a) de revoir leur législation afin :
- d’examiner l’opportunité d’introduire, de développer et d’améliorer les diverses formes de condamnation conditionnelle ou autres mesures analogues, ou d’amender leurs modalités d’application ;
- d’examiner la possibilité d’abandonner ou de réduire les restrictions à
l’application des mesures conditionnelles (concernant des catégories de délinquants ou des catégories d’infractions) qui font obstacle à l’individualisation des condamnations ;
(b) d’envisager que dans la mesure du possible, une enquête préalable au jugement, procurant des informations utiles sur le caractère du délinquant et son milieu social, soit ordonnée toutes les fois que le prononcé d’une mesure de probation ou d’une mesure analogue impliquant le sursis est envisagé ;
(c) d’employer pour ces enquêtes un personnel ayant reçu une formation lui permettant de recueillir et de présenter une information objective sur les besoins du délinquant et ses possibilités de traitement ;
(d) d’offrir des garanties contre une intrusion i n j u s t i f i é e dans la vie du délinquant au cours de l’enquête sociale, ainsi que sur l’utilisation abusive de l’information obtenue ;
2.(a) d’examiner et, s’il y a lieu, d’amender les dispositions légales relatives à l’octroi de la libération conditionnelle, telles que les dispositions concernant la durée de la sanction imposée, la période minimale d’emprisonnement à purger avant la libération et les restrictions relatives à certaines catégories de délinquants (par exemple : récidivistes) ;
(b) de faire en sorte que les personnes condamnées à une peine d’emprisonnement à vie puissent, par le moyen d’un examen périodique, bénéficier de la libération conditionnelle ou, tout au moins, de la grâce, après une étude appropriée de leur personnalité et compte tenu de la nécessité de protéger la société ;
(c) d’exiger de leurs services de probation ou de tout autre service compétent en la matière, qu’en plus de l’aide post-pénitentiaire prévue par la législation, ils offrent une assistance post-pénitentiaire même aux délinquants libérés inconditionnellement ;
(d) de faire en sorte que toute procédure d’octroi de la libération conditionnelle garantisse le droit de chaque détenu de voir son cas examiné de manière approfondie et de faire connaître son propre point de vue, assure des décisions rapides et tienne dûment compte des besoins de traitement du délinquant ainsi que de la protection de la société ;
(e) de réexaminer et de développer, notamment en fonction des méthodes modernes de traitement, les moyens destinés à faciliter la transition entre la vie dans un établissement pénitentiaire et la vie en liberté. Des plans précis et détaillés en vue de cette mise en liberté devraient en particulier être établis à un stade approprié de l’application de la peine ;
3. (a) d’assurer le développement de méthodes de surveillance et d’assistance propres à favoriser la création et l’utilisation de relations personnelles entre les agents de probation et leurs clients dans leur contexte social, et qui permettent d’aider ces derniers à résoudre leurs problèmes individuels ;
(b) de revoir les dispositions législatives en vigueur et, le cas échéant, d’en adopter de nouvelles, pour faire en sorte que les conditions qui accompagnent la probation, la libération conditionnelle et les mesures analogues permettent l’individualisation la plus efficace du traitement ; de veiller à ce que ces conditions respectent pleinement les droits de l’homme et la dignité individuelle ;
(c) d’examiner les dispositions existant actuellement pour le traitement des délinquants qui posent un problème particulier (notamment les toxicomanes ou les alcooliques) et, s’il y a lieu, de compléter ces dispositions ;
(d) d’examiner, et, s’il y a lieu, de développer les mesures concernant le placement en institution des délinquants soumis au régime de la probation ou de la libération conditionnelle ;
(e) de faire en sorte que les conditions fixées dans les décisions ordonnant le sursis ou la libération conditionnelle puissent être modifiées en fonction de l’évolution des besoins ou des circonstances ;
4. (a) d’assurer une bonne intégration des méthodes de traitement des délinquants, employées par les services de probation, d’assistance aux libérés et le service pénitentiaire, quel que soit le cadre administratif dans lequel elles s’exercent ;
(b) d’assurer le recrutement d’un personnel professionnellement qualifié, apte à assurer efficacement le travail de probation ;
(c) d’examiner l’intérêt qu’il y a à ce qu’un personnel bénévole travaille en coopération avec le personnel professionnel ;
(d) d’accorder une attention spéciale, si cela s’avère nécessaire, à l’amélioration des conditions d’emploi des agents de probation en raison des difficultés particulières inhérentes à leur tâche ;
(e) d’organiser la formation initiale du personnel professionnel, qui complétera toute formation préalable déjà suivie, et de prévoir également une formation en cours d’emploi destinée à améliorer les connaissances théoriques et l’expérience pratique de ce personnel ;
(f) de prévoir des méthodes de sélection et de formation efficaces pour les agents bénévoles, ainsi que le remboursement de leurs frais ;
(g) d’examiner le nombre de cas confiés aux agents professionnels ou bénévoles afin de parvenir au traitement le plus efficace et à l’emploi le plus judicieux des ressources humaines et matérielles ;
5. (a) d’organiser un contrôle général administratif des services de probation et de libération conditionnelle ;
(b) de prévoir un système d’inspection destiné à assurer le contrôle de l’application des décisions de probation et de libération conditionnelle ;
(c) d’assurer une orientation du travail social individuel des agents afin de maintenir et d’améliorer le niveau professionnel ;
(d) d’assurer un enregistrement efficace d’observations sur les cas individuels ;
6. (a) d’assurer l’observation des conditions imposées par les décisions ordonnant la probation ou la libération conditionnelle, en autorisant à cette fin le recours à des sanctions appropriées telles que l’imposition d’amendes ;
(b) d’examiner leur législation et leur pratique pour faire en sorte que les sanctions, appliquées dans le cas où le probationnaire ou le libéré conditionnel, sans récidiver, se soustrait à la surveillance ou ne respecte pas les conditions imposées, tiennent compte non seulement de la violation des conditions, mais aussi de toute l’attitude du délinquant et des besoins de son traitement ;
(c) d’examiner leur législation et leur pratique pour faire en sorte qu’en cas de récidive le juge ait la possibilité : - d’imposer une sanction sans sursis aussi bien pour la nouvelle infraction
que pour l’infraction antérieure qui avait donné lieu à une mesure conditionnelle ; - de maintenir la mesure conditionnelle initiale en modifiant éventuellement certaines de ses conditions et en imposant une deuxième sanction, mais cette fois-ci sans sursis, pour la nouvelle infraction ;
- d’ordonner une deuxième mesure conditionnelle applicable aux deux infractions ;
7. d’encourager les recherches sur le choix des délinquants à soumettre à la probation ainsi que sur le fonctionnement des systèmes de probation et de libération conditionnelle ;
8. de faire en sorte que le rapport du Conseil de l’Europe sur l’organisation pratique des mesures de surveillance, d’assistance et d’aide post-pénitentiaire pour les personnes condamnées ou libérées sous condition soit largement diffusé notamment dans leurs services compétents ;
Invite les gouvernements à envoyer tous les trois ans au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe un rapport faisant connaître les suites données par eux aux présentes recommandations.