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3 Enjeux de la privatisation

Mise en ligne : 14 décembre 2004

Texte de l'article :

2. Enjeux de la privatisation

La privatisation d’établissements de détention selon différentes modalités comporte de nombreux enjeux, qui doivent être considérés. La présentation des tendances et des modèles internationaux, ainsi que des expériences canadiennes, permettront ainsi de saisir les questions posées par de telles initiatives.

2.1 Tendances internationales
La privatisation de la gestion d’établissements correctionnels connaît un essor dans différents pays. Au plan mondial, la capacité d’accueil pondérée des prisons administrées par le secteur privé est passée de 15 300 places en 1990 à 145 160 places en 1999 [1]. Il n’opère cependant qu’une faible proportion de la population correctionnelle mondiale.
C’est aux États-Unis que l’on retrouve le plus grand nombre de prisons appartenant à des entreprises privées, construites et gérées par celles-ci [2]. Elles représentent 158 établissements de détention, administrant 5% des détenus (123 000). Par ailleurs, il existe 15 établissements privés en Australie, dont la capacité d’accueil pondérée est de 7 459 places. Au Royaume-Uni, dix établissements de détention privés ont une capacité d’accueil pondérée de 7 161 places. En France depuis le début des années 1990, 21 établissements pénitentiaires ont adopté un nouveau mode de gestion semi-privé, déléguant au secteur privé une grande partie des services. En 2001, ils représentaient 11% des établissements et administraient 20% de la population pénale, soit 9 960 sur 48 858 détenus [3].
Au Canada, il existe quelques initiatives comportant divers degrés de privatisation en Ontario et en Nouvelle-Écosse, allant de travaux de construction financés par le secteur privé au premier établissement correctionnel privé. Un centre de détention construit et administré par le secteur privé, l’établissement de Penetanguishene, a été ouvert en 2001 en Ontario, pouvant accueillir plus de 1000 détenus. L’administration d’un camp de type militaire pour jeunes contrevenants et d’un centre de détention pour jeunes (le Projet Volte-face) a également été confiée à une entreprise privée dans cette province [4]. En Nouvelle-Écosse, le « Nova Scotia Configuration Project », un partenariat public-privé, planifie et élabore des options telles que l’adjudication de marchés négociés par le secteur privé pour la construction ou l’exploitation de prisons. Enfin, le secteur privé aurait depuis avril 2004 la charge de l’entretien des établissements de détention de Colombie-Britannique [5].
Au plan fédéral, aucune privatisation n’a été entreprise en termes de confier l’ensemble de la gestion d’un établissement au secteur privé [6]. Cependant, des contrats pour la prestation de services sont passés avec le secteur privé depuis plusieurs années. Ainsi, les Services Correctionnels du Canada ont conclu des contrats pour la construction et la conception d’établissements. Par ailleurs, des traitements médicaux et psychologiques, des programmes de formation et des services d’entretien peuvent être assurés par des entreprises privées, tandis que la surveillance et le logement pour les détenus en liberté peuvent être assurés par les ressources du réseau communautaire.

2.2 Les modèles

Le modèle des États-Unis
La privatisation d’établissements de détention s’est développée aux États-Unis au cours des années 1980, soutenue notamment par les milieux conservateurs peu favorables à la réhabilitation et désirant réduire les coûts de gestion d’une population carcérale croissante. Afin de diminuer la pression imposée sur le système pénitentiaire, découlant des politiques pénales répressives adoptées, le concept de privatisation a émergé, désigné par le terme « prison for profit » [7].
Beaucoup de services au sein des institutions avaient déjà été confiés au secteur privé, tels l’alimentation, la santé, l’éducation, la formation professionnelle, la maintenance, la sécurité ou le travail [8].
Le secteur privé s’est ainsi développé dans le domaine correctionnel sur la promesse d’économies. En 1984, la compagnie Correction Corporation of America (CCA) a pris en charge la gestion complète d’une prison dans le Tennessee, constituant le premier établissement privé. Considérée comme le leader du marché, la CCA a joué un rôle important dans l’augmentation de l’implication du secteur privé. Plusieurs entreprises de « for-profit prison » se sont progressivement étendues, représentant aujourd’hui 158 établissements à travers le pays. La plupart des contrats incluent la construction, la propriété et la gestion des établissements [9]. Les compagnies assument la responsabilité d’employer le personnel administratif et les agents correctionnels, et d’offrir les programmes et les soins médicaux. Ce secteur est ainsi devenu attractif, car la gestion privée permet un plus grand contrôle sur la répartition des ressources et les niveaux d’emploi, qui représentent les enjeux les plus importants concernant les coûts.
Selon certaines études, la privatisation permettrait d’économiser en moyenne entre 10 et 15% des coûts [10]. La qualité des services serait égale, voire meilleure dans les établissements privés, qui offrent des conditions plus favorables que certains établissements publics.
Cependant, peu de recherches indépendantes soutiennent ces arguments. Une étude conduite par le Federal Bureau of Prisons à partir des résultats d’une enquête menée en 1999 auprès de compagnies dirigeant des prisons privées aux États-Unis révèle que le secteur privé rencontre des problèmes importants concernant le roulement du personnel, les évènements majeurs, dont les évasions, et l’usage de drogues [11].
Des données ont ainsi été collectées pour 91 des 103 contrats identifiés, reflétant un taux de réponse de 88% [12]. Parmi les 84 prisons privées exerçant ces contrats, 72 (soit 85,7%) détenaient uniquement des hommes, 8 (soit 9,5%) uniquement des femmes et 4 (soit 4,8%) des hommes et des femmes, la majorité étant de niveau de sécurité minimum et médium et seulement 4% de niveau de sécurité maximum. Elles sont comparées aux prisons publiques, un biais favorable aux prisons privées étant notable, puisque la proportion d’établissements de niveau de sécurité élevée ou maximum est plus importante pour les prisons publiques.
Il semble que les agences privées favorisent l’utilisation du personnel de garde, le ratio entre le nombre de gardiens et le nombre de détenus étant globalement plus élevé que celui des prisons publiques. Cependant, à l’exception de quelques prisons où ce ratio est très élevé, allant de 100 à 40 gardiens pour 100 détenus, la très grande majorité se situe autour ou en dessous du ratio des prisons publiques de 35 à 20 gardiens pour 100 détenus.
Par ailleurs, le taux de roulement (personnes quittant volontairement ou
involontairement leur emploi) était de plus de 50% dans la moitié des prisons privées, alors qu’il n’excédait pas 9% dans les prisons publiques.
Les tests concernant l’usage de drogues et d’alcool pour 81 des contrats révèlent que 40% des prisons privées présentaient des taux positifs de 3% et plus, et que 20% présentaient des taux positifs de 10% et plus, alors que ce taux était inférieur à 3% dans les prisons publiques.
Enfin, les données de 1999 indiquent qu’il y a eu 23 évasions de prisons privées, tandis qu’on compte une évasion des prisons publiques. Ainsi, 85% des prisons privées n’ont pas connu d’évasion, par rapport à 98,5% des prisons publiques.
La comparaison est difficile concernant les agressions, puisque les définitions varient entre les juridictions. Il peut être noté à titre indicatif que le taux d’agression serait plus élevé dans les prisons privées, étant de 27,4 pour 5 000 détenus, alors qu’il serait de 16,5 pour 5 000 détenus dans les prisons publiques si l’on tient compte uniquement des agressions armées. Cependant, on ne peut déterminer si le taux d’agression général est plus élevé dans les prisons privées, les données manquant pour compléter cette comparaison.
Il est possible de conclure que les prisons privées éprouvent des difficultés pour maintenir la sécurité dans les établissements [13]. Le taux de roulement, qui pourrait influer sur le niveau de formation du personnel, son expérience et les infractions aux règlements commises par les détenus, est notamment un problème important.
Cependant, les questions de la formation du personnel et des normes de garde ne permettent pas de différencier le secteur public et le secteur privé, ce dernier adoptant les normes de l’état dans lequel il opère, qui varient d’un état à l’autre.
Une recherche publiée en 2001 par le Bureau of Justice Assistance établit par ailleurs qu’il n’existe pas de données fiables pour appuyer l’idée que les prisons privées sont plus efficaces et que les services sont de meilleure qualité [14]. Bien que peu d’études aient été menées sur l’impact de la privatisation de prisons sur les coûts, la sécurité, la récidive et les conditions de détention, une des conclusions majeures des études recensées est que les prisons privées fonctionnent généralement de manière similaire aux prisons publiques. Les données indiquent également que les entreprises privées ont construit de nouveaux établissements plus rapidement et pour un coût moindre que les firmes du secteur public. Cependant, des problèmes de gestion ont été décelés dans les prisons privées qui peuvent être reliés à de mauvaises dispositions des contrats, à un manque de prévoyance de la part des agences privées et au transfert de détenus dans des établissements n’ayant pas les ressources requises pour leur classement de sécurité.
Concernant les coûts, l’étude montre que loin des 20% d’économies prévues, la moyenne des économies permises par le secteur privé se situe autour de 1%, la plupart obtenues grâce à une réduction des coûts de la main d’oeuvre [15]. Une étude conduite au Tennessee, généralement reconnue comme la meilleure ayant été réalisée, ne montrait pas de différences, ou des différences très minimes concernant les coûts. De nombreuses études recensées comportaient des failles méthodologiques, liées au mode de collecte des données ou aux comparaisons effectuées. De plus, l’absence d’études à long terme ne permet pas de déterminer si les établissements privés parviennent à maintenir leurs coûts ou la qualité des conditions de détention sur une période de temps plus longue, surtout si les coûts reliés aux salaires augmentent. Une théorie cohérente des raisons pour lesquelles la gestion de prisons par le secteur privé serait meilleure n’a pas été formulée, et il serait même possible de soutenir que le secteur privé a simplement repris les méthodes utilisées par le secteur public concernant la gestion des détenus et du personnel en essayant de réduire les coûts associés à ce modèle. On ne peut ainsi conclure que les prisons privées permettent de faire des économies comparativement au secteur public, et il n’existe pas de résultats établissant que les conditions de détention et les services offerts aux détenus sont meilleurs dans les établissements privés.
Constatant le manque d’information concernant la performance de la plupart des établissements gérés par le secteur privé, le Bureau of Justice Assistance a conduit une étude basée sur le format utilisé par le Bureau of Justice Statistics afin de donner un meilleur aperçu des prisons privées par rapport aux prisons publiques [16]. Parmi les dix firmes identifiées gérant des prisons privées, trois (gérant cinq prisons) ont choisi de ne pas participer à l’étude. Les sept firmes incluses avaient la gestion de 76 prisons en activité ou en construction. Le total des institutions considérées dans l’étude s’élève ainsi à 65 prisons privées, dont 49 étaient dirigées par les compagnies
Corrections Corporation of America et Wackenhut Corrections Corporation.
Plus de 93% de ces établissements étaient de niveau de sécurité médium ou minimum, la majorité des prisons, soit 38, étant de niveau médium et seuls deux établissements étant de niveau de sécurité maximum. Ces derniers étaient de grandes institutions, comptant 1 000 détenus ou plus. Les établissements de niveau de sécurité médium étaient de taille variée, allant de 100 à 1 600 détenus, tandis que la majorité des établissements de niveau de sécurité minimum comptait moins de 500 détenus. La majorité des établissements, soit 75%, détenaient uniquement des hommes, tandis que 8% détenaient des femmes et 17% détenaient des hommes et des femmes.
Concernant les programmes, toutes les institutions privées présentaient des
programmes de travail, d’éducation et d’aide psychologique pour les détenus. Le travail proposé était du travail de bureau, d’alimentation, de buanderie et de travaux en bâtiment. Près de 22% des institutions rapportaient également des programmes de travail en éducation et en service pour la communauté. Le pourcentage de participation à un ou plusieurs programmes de travail, s’élevant à 64% de l’ensemble de la population de ces établissements, était similaire à celui des détenus participant à un programme de travail dans les institutions publiques. Par ailleurs, 96% des prisons privées étudiées offraient des programmes d’éducation secondaire et d’éducation de base pour adultes, et 81,5% proposaient également des programmes d’éducation spécifique à l’emploi. Près de la moitié avaient des programmes destinés aux détenus ayant des difficultés d’apprentissage et des cours de niveau universitaire. Dans l’ensemble, 38,3% des détenus participaient à un programme d’éducation, pourcentage plus élevé que dans les prisons publiques où il était de 23%. Des programmes concernant la consommation de drogue et d’alcool, et les habiletés sociales étaient également disponibles dans presque tous les établissements, ainsi que des services de consultation pour l’emploi et d’aide psychologique ou psychiatrique pour la majorité.
Les agents de correction représentaient 63,2% du personnel des prisons privées en 1997, pourcentage similaire à celui des prisons publiques, mais les effectifs assignés aux prisons privées étaient environ 15% inférieurs à ceux assignés dans les établissements publics, le ratio étant respectivement de 28 gardiens pour 100 détenus et de 32 gardiens pour 100 détenus.
Enfin, la comparaison du nombre d’incidents majeurs dans les établissements publics et privés, incluant les agressions, les émeutes, les feux et les autres troubles, révèle un taux d’agression entre détenus plus élevé dans le secteur privé, de 31,5 pour 1 000 détenus, ce taux étant de 25,4 pour 1 000 dans le secteur public, les autres taux étant comparables entre les établissements publics et privés.
Cependant, il faut noter que les données du secteur public incluent une proportion plus importante d’établissements de niveau de sécurité maximum, et une comparaison a ainsi été effectuée en se limitant aux établissements de niveau de sécurité médium et minimum. Celle-ci confirme les résultats obtenus précédemment, ne permettant pas de déterminer la supériorité de l’un ou l’autre secteur, à une différence majeure près : les prisons privées présentent des taux plus élevés d’agression entre détenus, d’agression de la part de détenus sur des membres du personnel et d’autres troubles. Le taux d’incidents majeurs est ainsi plus important dans les institutions privées.
Ces différences pourraient être reliées à des facteurs tels que les critères pour rapporter les données ou le fait que la plupart des établissements correctionnels connaissent des difficultés au moment de leur ouverture. Cependant, le manque de formation et de personnel qualifié à des points stratégiques peut aussi être une raison valide pour expliquer ces différences. Cela viendrait appuyer les critiques de ceux qui considèrent que le personnel des prisons privées n’est pas adéquat en termes d’expérience et de formation. L’argument que les prisons privées sont plus
sécuritaires ou mieux gérées que les prisons publiques n’est ainsi pas supporté par les résultats de cette étude.
La communication de ces évènements a augmenté l’attention portée par le public à ces établissements, contribuant au ralentissement de la croissance de ce secteur [17]. Depuis 2000, aucun état n’a négocié de nouveau contrat, et certains établissements ont été retirés du secteur privé. On note que si la privatisation a connu une croissance rapide dans certains états, elle est inexistante dans d’autres, bien que gouvernement fédéral y porte un intérêt croissant. Il semble pour beaucoup que d’autres études doivent être menées pour pouvoir déterminer ses bénéfices [18].

Le modèle britannique
Depuis les années 1970, des centres de détention d’immigration ont été gérés par le système privé, et des entreprises et des organismes à but non lucratif ont assuré des services au sein du système correctionnel [19].
La mise en oeuvre de la politique de privatisation des prisons a été promue en 1984 par l’Adam Smith Institute (ASI), groupe de droite, dont les arguments étaient basés sur la théorie du marché et les développements récents aux États-Unis [20]. Il suggérait de privatiser la construction et la gestion des prisons, considérant que cela réduirait les coûts et le problème de surpopulation par l’utilisation de méthodes technologiques et de gestion innovatrices et la concentration des ressources sur les investissements. Par ailleurs, la compagnie Corrections Corporation of America (CCA) a formé en 1987 une compagnie britannique, la UK Detention Services Ltd. (UKDS), réunissant deux entreprises de construction établies depuis longtemps. L’un des buts affirmés de cette compagnie était de faire du lobbying auprès du gouvernement pour de la privatisation des prisons.
En 1991, le Criminal Justice Act autorisait l’État à contracter avec des entreprises privées pour assurer la détention de personnes prévenues ou condamnées. La stratégie de privatisation à long terme implantée en 1992, la Private Finance Initiative (PFI), a vu ainsi l’ouverture de 7 prisons financées, conçues et construites par le secteur privé les administrant sous contrat pour une période de 25 ans, et celle de deux autres prévue en 2003 et 2004 [21].
Depuis l’ouverture de la première prison administrée par le secteur privé en 1992, le Royaume-Uni a développé le système de justice criminelle le plus privatisé en Europe [22]. En terme de nombre de prisons privées, il se trouve en deuxième position derrière les États-Unis. En 2001, 6 000 adultes et jeunes délinquants étaient détenus dans des prisons privées en Angleterre et en Écosse. Cela représente environ 8% de la population carcérale totale. Les établissements comptent de 400 à 1 000 détenus environ.
Le manque de recherches indépendantes pour appuyer les succès revendiqués est cependant noté [23]. En effet, les arguments avancés pour la privatisation de la gestion des prisons incluaient la réduction des coûts, mais il a été montré que le secteur public peut être aussi efficace, voire plus efficace, en termes économiques. De plus, en raison de l’utilisation de la « confidentialité commerciale » par le gouvernement et les entreprises et du manque de volonté politique de la part du Select Committee on Public Accounts, il n’a pas été possible de vérifier toutes les données. Il semble cependant que les économies avancées aient été surestimées.
Un autre des arguments en faveur de la privatisation était qu’elle aiderait à réduire la surpopulation. Cependant, la population carcérale ayant augmenté de 51 000 détenus en 1986 à 71 000 en 2002, le nombre de nouvelles places n’a pas suivi le nombre de personnes condamnées à une sentence de détention et même les prisons privées ont été surpeuplées [24]. Par exemple, en janvier 2002, Altcourse et Doncaster, deux établissements privés d’une capacité de 800 détenus, étaient surpeuplés de 212 et 303 prisonniers respectivement.
Enfin, une étude basée sur les témoignages d’anciens détenus de la prison de Wolds, première prison privée ouverte au Royaume-Uni, tend à montrer que les services d’éducation, de travail et de loisirs ne répondaient pas aux besoins des détenus, impliquant un temps plus important passé en cellule [25].
Les arguments soutenant la privatisation ne semblent pas ainsi s’appuyer sur des données valides et les services offerts par le secteur privé n’apparaissent pas plus efficaces, mais seraient à examiner quant à leur qualité dans certains cas. Malgré ces constats et le manque notable d’évaluations, de nouveaux projets sont cependant développés.

Le modèle français
Dans le cadre des établissements pénitentiaires à gestion déléguée (EPGD), la délégation de gestion de certaines fonctions à des entreprises privées n’est pas considérée comme une privatisation. Le débat national animé concernant la possibilité de déléguer un pouvoir régalien a en effet conduit à réduire la privatisation initialement prévue. La loi du 22 juin 1987 définit, dans le cadre du service public pénitentiaire, les missions qui relèvent de la responsabilité directe de l’État (attributions régaliennes) et celles qui peuvent être déléguées [26]. Au sein des établissements, les fonctions de direction, de surveillance et de greffe, fonctions de souveraineté conformément au droit constitutionnel, doivent être exercées par des agents de l’État, et celles qui sont déléguées s’exercent sous son autorité. Selon l’article 2 de la loi, l’État peut notamment confier à une personne de droit public ou privé ou à un groupement de personnes de droit public ou privé une mission portant à la fois sur la conception, la construction et l’aménagement d’établissements pénitentiaires [27].
Il existe donc un service public pénitentiaire dont 21 établissements incluent la participation de l’entreprise privée au fonctionnement de l’établissement. Le programme 13 000, concernant 13 000 places en prisons à gestion mixte, consiste en une concession de 10 ans pour une zone géographique à 4 groupes d’entreprises (conception et construction) [28]. La maintenance, l’hôtellerie, la lingerie, la cantine, la santé, le travail et la formation professionnelle constituent les services délégués.
Selon le Ministère de la Justice, le programme 13 000 a permis d’accroître la capacité d’accueil des établissements pénitentiaires de plus de 30% et de répondre ainsi partiellement à la surpopulation chronique des établissements qui est passée d’un taux de 150% en juillet 1998 à 133% en 1997 [29]. Il a également permis la fermeture de 25 établissements vétustes et délabrés et une augmentation de 20% des effectifs du personnel, ainsi qu’un renouvellement important des agents par les possibilités de mutation et de promotion.
La gestion déléguée est aussi une réponse à la demande croissante de technicité, concernant notamment la maintenance, tant au niveau des matériels que de la logistique, ou d’autres services très réglementés [30]. Elle a en effet donné l’occasion de faire des choix technologiques nouveaux en matière de sécurité (contrôle électronique des circulations, généralisation des postes de centralisation de l’information) De plus, en comparaison de l’utilisation de la sous-traitance ou de la concession d’un certain nombre de services afin d’obtenir un niveau de service adéquat, la délégation globale offre l’avantage d’avoir un seul interlocuteur et donc un seul responsable.
Un autre intérêt de la gestion déléguée a été l’ouverture du fonctionnement quotidien des établissements à une entreprise extérieure [31]. Elle permet ainsi une confrontation permanente entre les logiques de gestions publique et privée, et fait de l’entreprise privée un véritable partenaire du service public pénitentiaire. Cette ouverture a accompagné un décloisonnement demandant d’inclure d’autres Ministères (Éducation Nationale, Culture, Jeunesse et Sport, Santé) pour exercer au sein des établissements pénitentiaires les fonctions qui relèvent du domaine de leur responsabilité.
Il faut noter que la qualité des services fournis est beaucoup plus contrôlée que dans le secteur public [32]. Le rôle des cadres pénitentiaires dans les établissements est en effet de vérifier ces fonctions en application d’un cahier des charges très précis, de manière plus rigoureuse que dans le secteur public. Les services concernant l’alimentation, le transport, la santé et la maintenance semblent ainsi offrir satisfaction. La santé a été retirée du secteur privé par la loi du 18 janvier 1994, qui donne au Ministère de la Santé la responsabilité de la santé des détenus. Les changements apportés par le secteur privé ont cependant inspiré la loi et la prise en charge sanitaire de l’ensemble des détenus. Les frais de gestion associés à la cantine des détenus ont fait l’objet de contestations, mais les contrôles semblent montrer que l’on retrouve des coûts équivalents dans les établissements à gestion publique. Les résultats sont cependant moins bons concernant les fonctions de travail et de formation professionnelle.
La délégation à des acteurs économiques spécialisés de certaines fonctions doit ainsi permettre à l’Administration pénitentiaire de se recentrer sur l’essentiel de sa mission et de tenter de pallier le déficit d’image de cette fonction et la crise d’identité que traversent les personnels [33]. Tous ces éléments permettent de considérer que la gestion mixte peut être un vecteur important de la stratégie de modernisation de l’Administration pénitentiaire.
Des critiques sont pourtant émises à l’égard de ce système. Initialement conçue pour lutter contre la surpopulation carcérale, moderniser le système pénitentiaire et limiter les coûts de gestion, la gestion déléguée semble en effet ne pas avoir réussi sur tous les plans [34]. La gestion est au moins tout aussi onéreuse et la qualité de certains services délégués contribuant à la réinsertion des détenus, notamment le travail et la formation professionnelle, est insuffisante.
Des rapports ont été effectués, mais ils ont été peu diffusés et n’ont pas donné lieu à des débats extérieurs à l’administration [35]. Il semble que le coût global soit légèrement supérieur d’environ 10%, bien que les comparaisons soient difficiles étant donné l’état très différent des conditions. En 2001, la répartition des coûts des EPGD indiquait que 59% étaient consacrés à la logistique, 24% à la réinsertion et 17% à la gestion.
Par ailleurs, lorsque que la question de favoriser une gestion globale ou de dissocier les marchés avait été débattue, des raisons de facilité de gestion et de coûts avaient fait opter pour la première solution [36]. On remarque cependant que chaque groupe a fait appel à des prestataires et ce morcellement pose les problèmes initialement prévus : les entreprises en sous-traitance ne sont pas liées aux exigences du service public et ne sont pas concernées par sa mission.
Enfin, le fait d’argumenter que la gestion déléguée fait évoluer et modernise les prisons de manière générale, grâce à un cahier des charges contraignant, ne favorise pas l’amélioration des services rendus par le secteur public, moins contrôlés et moins stimulés [37].
La délégation au secteur privé n’a donc pas permis d’atteindre l’ensemble des objectifs visés, certains effets négatifs étant notables concernant la qualité des services assurés. La construction de 13 200 nouvelles places selon ce modèle de gestion est néanmoins prévue d’ici à 2007, pour répondre à la détérioration des conditions de détention et à la surpopulation.

L’expérience ontarienne
Depuis les années 1990, le gouvernement de l’Ontario a adopté une politique pénale conservatrice qui prône une répression plus dure de la criminalité, introduisant les « super prisons », la suppression de la liberté conditionnelle, l’élimination des programmes et la privatisation de structures pénales [38]. La politique pénale est ainsi orientée autour de l’efficacité promise par des conditions de détention plus austères, devant réduire les coûts. Les politiques correctionnelles mises en place en 1996 devaient créer un système correctionnel plus moderne. Il s’agissait de réaliser des établissements sécuritaires, efficaces et effectifs, sans « fioritures », en appliquant des conditions de détention plus dures. Une des initiatives les plus importantes en coursest le Adult Infrastructure Renewal Project (AIRP), justifié par la nécessité d’améliorer le système vétuste et inefficace, planifiant de fermer environ 20 établissements de détention, d’étendre et de moderniser les établissements restants et de construire deux nouvelles prisons.
Au travers de ce programme, l’Ontario a connu une vague de construction d’établissements de détention, notamment deux prisons entièrement nouvelles : le Central North Correctional Center à Penetanguishene et le Central East Correctional Center à Lindsay [39]. Un des buts majeurs de ces institutions est de s’approcher du modèle de « super prison » et de ses stratégies opérationnelles. Ces deux établissements à sécurité maximale sont tous les deux construits comme un panoptique autour de 6 blocs, comprenant chacun 192 détenus, la population totale étant d’environ 1 200 détenus. Ces prisons offrent une surveillance visuelle optimale avec un personnel minimal. Un ou deux gardiens postés dans la tour de contrôle central peuvent surveiller directement ou par système vidéo les différents secteurs et l’ouverture des portes. Cette structure limite donc la nécessité de patrouille parmi la population et le contact direct entre les gardiens et les détenus.
La privatisation n’a cependant pas été engagée à long terme de manière établie, sans doute en raison des questions soulevées au cours des dernières années concernant les effets de la privatisation aux États-Unis [40]. Une étude d’une durée de cinq ans, utilisant comme test le site de Penetanguishene, a été proposée, le site de Lindsay, qui offre les mêmes conditions mais sous la gestion publique, servant de contrôle. À la suite de cette étude, une décision sera prise pour rendre l’administration de Penetanguishene au secteur public ou pour privatiser également Lindsay et d’autres établissements.
Cependant, l’étude n’a pas encore débuté, bien que d’autres plans de privatisations soient déjà à l’étude.
Le Central North Correctional Center à Penetanguishene a ouvert le 10 novembre 2001 [41]. Depuis, plusieurs incidents sont survenus, qui ont soulevé des questions quant à la qualité des services du Management and Training Corporation (MTC), l’entreprise sous contrat pour la gestion de l’établissement. À peine deux semaines après l’ouverture de l’établissement, 20 des 68 détenus se seraient soulevés sous la forme d’une action collective le 18 novembre 2001, tandis qu’à la même période certains détenus auraient entamé une grève de la faim pour dénoncer leurs conditions de détention. Celles-ci incluaient un manque de manteaux pour porter à l’extérieur, un manque de chauffage, l’absence de couvertures supplémentaires et le refus du personnel de prendre des messages pour des détenus, même pour des appels décrits comme « urgents et personnels ». En août 2002, un quotidien, le Toronto Star, mentionne un autre événement collectif ayant impliqué entre 100 et 180 détenus qui protestaient contre la qualité des soins médicaux et de l’alimentation, les fouilles et le manque d’accès à des installations telles que la bibliothèque [42]. Enfin, en septembre 2002, il a été question d’une troisième action collective dans cet établissement. Bien qu’il aurait concerné 100 détenus, cet incident n’a presque pas reçu d’attention de la part des médias. Les représentants du ministère interrogés avaient alors déclaré qu’en raison de la gestion privée, ils avaient très peu d’informations sur ce qui s’était passé [43].
Le coût quotidien par détenu de 79,45 $ pour le centre correctionnel de Penetanguishene, inférieur au coût quotidien par détenu dans les centres correctionnels de la province s’élevant à 140 $, semble en effet obtenu par une réduction des coûts des services et du personnel, qui pose des problèmes de gestion et affecte la situation des personnes incarcérées. En 2003, les employés du centre correctionnel protestaient contre le manque de personnel à l’intérieur de l’institution et lors des escortes à l’extérieur, bien que l’administrateur de la prison ait assuré que le nombre d’employés répondait aux normes provinciales et qu’il existait de comités de surveillance [44]. Les ratios des effectifs n’ont cependant pas été fournis, invoquant des raisons de sécurité. De plus, une supervision inadéquate par rapport au niveau de sécurité semble avoir été notée, notamment concernant le délai d’intervention lors d’évènements de violence [45]. Cinq détenus sont morts depuis l’ouverture de l’établissement, dont un poignardé et un mort à la suite de mauvais soins médicaux, services qui ont fait l’objet de nombreuses plaintes de la part des détenus.
Le modèle de gestion privée développé en Ontario paraît ainsi poser des problèmes concernant l’administration de l’établissement, les conditions de détention et les services offerts, qui affectent les personnes détenues et les membres du personnel. Le manque de transparence concernant la situation à l’intérieur de l’établissement est également noté, ainsi que le nombre restreint d’études indépendantes. Il semble donc nécessaire de considérer ce modèle avec prudence.

Le partenariat public / privé dans la sécurité
Il faut enfin prendre en compte les expériences de partenariat déjà existantes dans ce domaine, puisqu’elles s’inscrivent dans une politique plus générale. La surveillance privée est en effet déjà chargée de missions surveillance de détenus, par exemple dans des lieux publics tels les hôpitaux. Il est à noter que ces services ont fait l’objet de plaintes de la part des détenus.
Ainsi, il existe plusieurs modèles de privatisation des institutions carcérales, qui présentent différentes situations problématiques. La question des conditions matérielles d’incarcération ainsi que celle de la difficulté à maintenir la sécurité se posent dans certaines institutions privées. D’autre part, les problèmes de gestion, la question de la réduction des coûts et de la formation du personnel, ainsi que le fait que les investissements dans le secteur privé se fassent parfois au détriment du secteur public sont des aspects qui ressortent de différentes études. Enfin, le manque de transparence lorsque surviennent d’importants incidents et le manque d’études indépendantes sur l’efficacité réelle de la privatisation sont à noter.

2.3 Différents enjeux

Coûts
Un des arguments soutenant la privatisation est celui de la possibilité de réaliser des économies en permettant la construction et / ou la gestion d’un nouvel établissement à un moindre coût. Il s’agit d’obtenir une construction plus rapide et moins cher, ainsi que de réduire les coûts de gestion d’établissements, par une administration plus économique et plus efficace. La confrontation et la concurrence avec le secteur privé seraient également favorables pour le secteur public, produisant un mécanisme d’évaluation et de contrôle. Tels sont les avantages énoncés dans la politique-cadre des PPP.
Le secteur privé affirme en effet pouvoir construire des établissements plus vite et moins cher, et pouvoir les gérer de manière plus économique et plus efficace, notamment grâce à une technologie et des méthodes de management plus sophistiquées [46]. Une plus grande flexibilité et l’absence de bureaucratie faciliteraient la mise en oeuvre de nouvelles philosophies, l’adaptation aux besoins et la réduction de la surpopulation.
L’efficience de telles mesures peut être questionnée, ainsi que les moyens sur lesquels la diminution des coûts est basée. L’absence d’un nombre important d’études fiables est à noter, mais il semble que la preuve de cette efficacité ne soit pas faite de manière globale dans les pays qui ont adopté une politique de privatisation.
Il existe une grande disparité des résultats, notamment aux États-Unis, où différentes études montrent que certains établissements sont plus économiques, d’autres équivalents et certains plus chers [47]. Ces résultats reflètent la difficulté d’établir des comparaisons entre différents contextes et de mesurer précisément les coûts. La validité des études est ainsi limitée par le fait qu’elles ne prennent pas les mêmes bases de calcul, l’accès aux données étant limité dans le secteur privé par la propriété de l’information et dans le secteur public par le manque de précision dans la présentation des budgets. De plus, la comparaison tient compte pour le secteur privé du prix plutôt que du coût réel. Selon les conditions du marché et la stratégie adoptée, les entreprises peuvent décider de demander un prix plus élevé, égal ou inférieur à leurs coûts, qui sont alors difficiles à évaluer. Du côté du secteur public, les coûts externes, représentant les coûts sociaux entraînés par la privatisation, comme le développement et la négociation des contrats ou le contrôle des structures privées, ne sont pas pris en compte. Enfin, l’indicateur du coût quotidien par détenus est faible, car il est influencé par le taux d’occupation des établissements. En effet, les salaires représentant la majorité des coûts, les établissements ayant un taux d’occupation plus élevé peuvent apparaître plus économiques.
D’autre part, le secteur privé peut chercher à réduire les dépenses au niveau des salaires du personnel, représentant de 65 à 80% du budget [48]. Le ratio entre le personnel et les détenus est en effet souvent inférieur à celui que l’on retrouve dans les établissements gérés par le secteur public, ainsi que la réglementation de la formation du personnel, les conditions salariales étant également moins avantageuses.
En France, des économies sont réalisées notamment sur les salaires, les services offerts ou les matériels [49]. Cependant, les coûts de l’ensemble de la gestion n’apparaissent pas inférieurs de manière générale concernant le secteur privé et il n’existe pas d’étude à long terme permettant de déterminer s’ils peuvent être maintenus.
Ainsi, l’efficacité supérieure du secteur privé ne peut être affirmée, l’évaluation et la comparaison des coûts s’avérant complexes. Ils ne semblent pas inférieurs concernant le secteur privé, malgré certaines restrictions. La construction privée peut ainsi paraître impliquer seulement une transaction moins lourde, les deux processus étant estimé comme environs équivalents [50].
Par ailleurs, certaines études réalisées aux États-Unis ont affirmé qu’une augmentation de l’usage de l’incarcération permettrait des économies importantes, cette méthode étant rentable pour réduire la criminalité [51]. Les bénéfices de l’emprisonnement sont ainsi considérés uniquement en terme de prévention de la criminalité, en tenant compte de la fonction de neutralisation de l’emprisonnement et de son effet dissuasif. Cependant, les dépenses de justice pénale de ce pays n’ont pas enregistré la baisse considérable prévue, alors que la population carcérale a doublé.
Les effets de la neutralisation et de la dissuasion peuvent en effet apparaître comme limités. Il semble ainsi que la demande pour la poursuite de l’augmentation de la population carcérale, vue comme une solution au taux de criminalité, ne soit pas en lien avec ce taux ni avec le taux d’incarcération, mais avec l’anxiété générée par le crime [52]. De plus, en réduisant l’analyse de la politique à la question de la construction de prisons supplémentaires et à une finalité de neutralisation, les autres formes d’interventions, qui pourraient s’avérer économiques, ne sont pas considérées.
En effet, parmi des méta-analyses récentes portant sur plus de 500 études contrôlées, l’ensemble de celles concernant le traitement des délinquants semble indiquer que ceux qui reçoivent une forme ou une autre de traitement psychosocial sont moins susceptibles de récidiver que ceux qui n’en reçoivent pas [53]. De façon générale, l’effet de ce genre de traitement est relativement faible, réduisant le taux de récidive de 10% en moyenne. Cependant, même un résultat assez faible permet de réaliser des économies importantes. De plus, l’effet de traitements reconnus peut être plus important, et des études méthodologiques évaluent que la réduction maximale des taux de récidive pourrait être de l’ordre de 30 à 40%.
Des travaux de recherche conduits au cours des dix dernières années indiquent ainsi que les programmes qui réduisent le taux de récidive peuvent engendrer d’importantes économies de coûts à long terme, en diminuant notamment les frais de justice pénale et les dépenses des victimes [54]. Une analyse de l’efficience, ou des coûts-avantages, a été réalisée dans le cadre d’une méta-analyse récente, portant sur 108 études des résultats du traitement correctionnel [55]. Elle constate des économies de coûts à la fois pour les contribuables et pour les victimes concernant plusieurs catégories de traitement, c’est-à-dire des économies relatives au système de justice pénale d’une part et des économies relatives aux frais de justice pénale et aux pertes monétaires comme les frais médicaux, les pertes matérielles ou la réduction du revenu futur d’autre part. L’étude montre ainsi que de manière générale chaque dollar consacré à des interventions à caractère social, au nombre de 88 dans cette recherche, représente une économie d’environ 5 $ pour le contribuable et de 7 $ pour la victime. À l’inverse, les interventions axées sur la punition, comme les camps de type militaire et les programmes de surveillance faisant appel à des stratégies onéreuses (par exemple la surveillance électronique), au nombre de 20 dans cette étude, ont un rendement inférieur, allant de 50 à 75 cents pour chaque dollar investi.
Les économies de coûts ont aussi été évaluées pour un nombre de programmes de traitement pour adultes portant sur l’éducation et l’emploi, la toxicomanie, la délinquance sexuelle et les déficits cognitivaux-comportementaux, indiquant qu’ils peuvent être rentables. Par exemple, chaque dollar alloué à des programmes d’éducation de base ou de formation professionnelle engendre des économies allant de 1,71 à 3,23 $, et les programmes de recherche d’emploi et d’aide psychologique donnent lieu à des économies allant de 2,84 à 4 $ [56]. Concernant les programmes de traitement congnitivo-comportemental pour adultes, chaque dollar investi entraîne une économie de 2,54 à 11,48 $. En matière de toxicomanie, tandis que le rendement des programmes visant à détourner les délinquants de la drogue est peu élevé, une étude récente menée au Canada établit que l’un des principaux programmes de traitement pour toxicomanes du Service correctionnel du Canada donne lieu à des économies annuelles d’environ 2 000 $ par délinquant [57]. Par ailleurs, si l’on prend en compte les recherches portant sur les toxicomanes plutôt que sur les contrevenants, l’administration d’un traitement à 100 toxicomanes permet une réduction des coûts liés à la criminalité variant entre 1,4 et 2,2 millions de dollars, sous forme de réduction des frais de justice, des pertes tangibles et intangibles pour les victimes et des pertes de productivité du délinquant [58]. Il faut cependant noter que les pertes intangibles des victimes, telles la douleur, la peur ou le traumatisme, ainsi que le coût social de la criminalité, notamment concernant l’interaction sociale et le sentiment de sécurité, sont difficilement quantifiables [59].
D’autres interventions possibles en matière de justice pénale que la simple
neutralisation peuvent ainsi être rentables, notamment en termes de protection de la collectivité, et il semble important de les considérer dans un contexte de restrictions financières, le secteur privé n’apparaissant pas comme le seul secteur efficace.
Espace : répartition sur le territoire, modèle de construction, capacité
Le fait de contracter avec le secteur privé peut avoir des conséquences en termes de localisation, d’architecture et de capacité.
Le choix du lieu de construction des établissements peut en effet être influencé par les intérêts du secteur privé. En France, un certain nombre d’établissements du programme 13 000 sont éloignés des centres urbains en raison des coûts, et y sont mal reliés [60].
D’autre part, si la nouveauté et la clarté des locaux du programme 13 000 sont un aspect positif, présentant une meilleure hygiène et un plus grand confort, la présence de systèmes de sécurité très sophistiqués et d’erreurs de conception, dues à une connaissance insuffisante du fonctionnement et des contraintes des prisons, pose certains problèmes [61]. Les surveillants sont ainsi souvent enfermés dans des postes de surveillance électronique, d’où ils ne peuvent surveiller tous les espaces et dont ils ne maîtrisent pas tous les outils. Les nouveaux établissements de détention construits en Ontario présentent également un modèle panoptique construit en fonction de la surveillance électronique. Privilégiant la sécurité statique au détriment de la sécurité dynamique, une construction axée sur ce mode de surveillance peut influencer les relations avec les détenus, la perception des membres du personnel de leur environnement de travail et le nombre des effectifs, alors que son efficacité en termes de sécurité n’est pas démontrée.
Enfin, la capacité des établissements privés tend à augmenter, les premiers établissements offrant une capacité de 80 détenus tandis que dans les années 1990 les établissements présentent une capacité de 500 ou 600 détenus et parfois plus de 1000 détenus [62]. Les établissements logeant un plus grand nombre de détenus sont en effet plus rentables.
Or, il semble que la gestion de grands établissements soit plus complexe et qu’elle génère plus problèmes. Ainsi, le protecteur du citoyen constate une augmentation considérable des plaintes qui lui sont adressées au cours des dernières années, de l’ordre de 93%, le nombre de plaintes passant de 1 328 en 1994-1995 à 2 567 en 1997-1998 [63]. En examinant la provenance de l’augmentation des plaintes suivant la dimension de l’établissement, il apparaît que cette croissance est beaucoup moins marquée dans les établissements de petite dimension (jusqu’à 100 places) et moyenne (101 à 300 places), respectivement de 11% et de 51%. Les grands établissements (plus de 300 places) connaissent eux une croissance très importante des plaintes, générant une augmentation de l’ordre de 156% entre 1994-1995 et 1997-1998. Ils connaissent le taux de plaintes fondées le plus élevé, ce taux étant supérieur à la moyenne de façon constante au cours de la période étudiée, alors qu’il demeure autour de la moyenne dans les établissements de dimension moyenne et qu’il est toujours inférieur dans les établissements de capacité plus réduite. C’est également dans les grands établissements que les problèmes de protection, d’intégrité physique, de surpopulation, de discipline sont à la fois plus importants et plus difficiles à résoudre [64]. De plus, les relations entre le personnel et les personnes incarcérées sont moins personnalisées et plus difficiles à gérer, ces dernières étant moins axées sur une perspective d’individualisation du traitement de la personne détenue.
Dès lors, le choix de la construction d’un nouvel établissement privé au détriment de la fermeture de petits établissements peut être questionné, alors que l’ouverture d’un centre de détention privé de petite taille est peu probable, en raison de la rentabilité plus faible. Il semble que la qualité des rapports entre les personnes incarcérées et le personnel dans les établissements de petite et de moyenne dimension soit à prendre en compte, ainsi que les enjeux concernant la localisation et le type de construction choisis.

Législation
Une responsabilité centrale de l’État, l’exercice de la justice, peut-elle être déléguée ?
À qui en revient la responsabilité ? Le mandat est-il défini selon la mission des Services correctionnels ou selon un objectif de gestion ? Ces interrogations constituent des éléments importants concernant la conception de l’État.
Certains opposants à la privatisation soutiennent que pour pouvoir être pleinement imputable, l’État doit gérer lui-même les établissements pénitentiaires et en être responsable [65]. Certains considèrent à l’inverse que la position consistant à dire que les prisons ne peuvent être administrées que par l’État ne peut être tenue [66]. En effet, l’autorité de l’État pour emprisonner est dérivée du consentement des citoyens et du droit, et peut ainsi, avec un même consentement, être déléguée plus loin. Il ne s’agit pas d’une propriété de l’État comme une règle absolue, mais d’une règle de loi qui est soumise à des critères énoncés, que l’incarcération soit exercée par des agents de l’État ou par une entreprise privée. Le fait de contracter dans ce domaine ne serait donc pas incompatible avec l’exercice légitime de l’autorité ou la protection des droits des détenus. La question serait de savoir si nous sommes prêts à accepter le transfert de cette fonction vers le secteur privé.
Aux États-Unis, les instances judiciaires ont établi que les actions effectuées par des parties privées déléguées par l’État constituent des actions de l’État [67]. La position concernant la constitutionnalité de la délégation de cette fonction gouvernementale est moins claire, bien que communément acceptée. Dans d’autres modèles, l’État garde la maîtrise des opérations et reste responsable des services dont il délègue la gestion et l’exécution.
Mais il faut également s’interroger sur les effets de remettre cette fonction de l’État au secteur privé. Le mandat de gestion confié au secteur privé pourrait en effet différer de la mission des Services correctionnels. L’ensemble des actions menées à l’intérieur d’un établissement pénitentiaire pourrait ainsi être considéré comme l’expression de la politique correctionnelle gouvernementale, qui ne devrait pas être déléguée [68].
Les décisions quasi-judiciaires qui affectent le statut légal et le bien-être des détenus sont également à prendre en compte [69]. Des employés du secteur privé peuvent-ils être autorisés à employer la force et jusqu’à quel point ? Peuvent-ils émettre des avis concernant les libérations conditionnelles ou porter des charges internes et appliquer des mesures disciplinaires, qui pourraient affecter les possibilités de libération ?
Enfin, il faut considérer les charges qui doivent être établies par contrat et la question de leur application [70]. Quels normes doivent déterminer la gestion de l’institution et quels moyens doivent veiller à leur mise en oeuvre ? Quels sont les recours du public s’il n’approuve pas le mode de gestion de l’établissement ? La sous-traitance peut-elle être admise, les services n’étant pas alors directement liés aux exigences ? Quels sont les recours de l’État en cas de difficulté économique (augmentation des coûts,
fermeture) ? Si la délégation du pouvoir d’emprisonner de l’État semble possible au plan législatif, celle-ci représente cependant de nombreux enjeux concernant les actions posées et les recours extérieurs permettant de contrôler la gestion effectuée.

Éthique
La question de rentabiliser l’incarcération d’individus est un des débats majeurs concernant la privatisation. En effet, le pouvoir de priver de liberté est très important et il faut s’interroger sur la possibilité pour l’État de remettre ce pouvoir à des organismes qui pourront en tirer profit.
La logique d’un organisme privé à but lucratif diffère en ce qu’elle vise la rentabilité.
Il est ainsi à craindre que le secteur privé cherche à augmenter ses profits en assurant un maintien ou une augmentation de son marché, soutenant notamment des politiques pénales répressives, et en réduisant les coûts de son activité, qu’il s’agisse de construction ou de gestion. Il serait ainsi inapproprié de construire ou de gérer des prisons avec un motif de profit, qui ne tendrait pas vers une réduction de la surpopulation carcérale et l’adoption d’alternatives à l’incarcération ou de mesures concernant de plus vastes problèmes de justice criminelle.
Malgré des pressions vers la privatisation des prisons, les politiques pénitentiaires canadiennes et celles de certaines provinces tendent plutôt vers la recherche de solutions de rechange à l’incarcération, l’utilisation de la peine d’emprisonnement avec sursis et la mise en liberté des contrevenants le plus rapidement possible [71]. Il faut prendre en compte les effets possibles de l’ouverture des prisons au secteur privé sur cette politique favorisant les alternatives à l’incarcération, la prévention et la déjudiciarisation, en raison des intérêts divergents.
D’autre part, la question de l’inégalité de la détention entre les systèmes public et privé doit être considérée. Bien que des conditions de détention identiques selon les établissements ne soient pas garanties par les droits des détenus, il faut moralement prendre en compte la possibilité de conditions et de traitement différents dans des systèmes n’ayant pas la même vision globale des objectifs de la détention.
Autant pour le parc immobilier que pour la gestion, il s’agit donc de savoir si la préoccupation économique ou bien la politique correctionnelle prime, le but de profit et celui de réhabilitation semblant opposés si l’on considère l’aspect économique en jeu dans le secteur privé à but lucratif.

Cliniques
Malgré les arguments avancés par le secteur privé d’une plus grande flexibilité pour s’adapter aux besoins de la clientèle au niveau de la structure des services, la question de la place et du modèle de l’intervention dans le secteur privé est essentielle.
L’implication du secteur privé ne va-t-elle pas induire un système uniquement centré sur la détention et la sécurité, et peut-être le développement d’autres politiques telles que la dissuasion ?
La gestion privée pourrait influencer une qualité moindre de l’intervention, par exemple en raison de la composition des programmes ou de la formation du personnel, dans le contexte de recherche de profit de ce secteur. Il existe peu de recherches indépendantes à ce sujet dans les différents pays. Il semble que les programmes sont assez semblables à ceux offerts par le secteur public, bien que les critères de comparaison ne soient pas toujours clairs. Cependant, les exigences en matière de formation du personnel et les conditions salariales sont moins élevées dans le secteur privé, ce qui peut affecter les enjeux correctionnels et cliniques.
D’autre part, la gestion ultrasécuritaire, la réduction des services et la diminution du contact avec les détenus représentent également des enjeux concernant la notion humaine de l’emprisonnement. Elles pourraient entraîner des conditions de détention plus difficiles, limiter l’action de réinsertion sociale et compromettre le rôle d’aide que peuvent avoir les relations avec les gardiens, particulièrement pour les personnes vulnérables. De plus, l’organisation de l’établissement peut également affecter l’intégrité des programmes et leur efficacité. Un régime carcéral bien structuré et où les facteurs émotionnels et sociaux sont pris en compte peut en effet contribuer à faciliter les interactions dans le cadre des programmes, mais aussi à réduire la récidive [72].
Il faut donc prendre en compte la clientèle confiée au secteur privé. En effet, si la majorité des premiers établissements privés étaient de niveau de sécurité minimum, des établissements de niveaux de sécurité médium et maximum, certains administrant des détenus de tous niveaux de sécurité, tendent à se développer [73]. Les enjeux posés par l’intervention sont alors accentués et il faut s’interroger sur la capacité du secteur privé à y faire face.
Les effets de la privatisation sur la démarche de réinsertion sociale des contrevenants doivent ainsi être considérés, les entreprises privées n’étant pas directement concernées par l’après sentence. La question de l’évaluation de l’intervention et de ses modalités semble très importante, malgré les ententes contractuelles, indiquant les normes à respecter et les résultats attendus, et l’effet la concurrence, avancés comme garants par le secteur privé.

Services
La qualité des autres services offerts par le secteur privé est également importante et les contrats passés peuvent parfois présenter des difficultés. Le fonctionnement de ces services influence les conditions de détention et il faut donc être attentif à leur organisation et à leur évaluation.
En France, le cahier des charges concernant la maintenance se révèle trop imprécis, et bien que les opérations prévues soient exercées de manière satisfaisante, les opérations non prévues peuvent s’avérer dures à négocier [74]. En termes de transport, une lacune fréquemment relevée est l’absence d’astreinte pour les chauffeurs la nuit et le week-end, qui peut poser problème pour le transport d’un malade par exemple. Le système de cantine est également critiqué. Il semble qu’il n’y ait pas de différences entre les secteurs public et privé concernant les produits du « panier des détenus », mais par contre il n’existe pas de contrôle sur les produits à l’extérieur. Enfin, les programmes offerts concernant le travail et de la formation professionnelle sont considérés comme insuffisants, et des services dits accessoires, tels que la santé, l’alimentation et les loisirs, font l’objet de coupes budgétaires [75].
D’autre part, il faut se demander si la délégation de tels services, dans le cadre d’une privatisation partielle ou complète, est souhaitable. En effet, certains membres du personnel considèrent la surveillance comme une mission de sécurité qui devrait revenir entièrement au service public, tandis que d’autres fonctions, telles que la celle de la cantine, sont vues comme permettant un autre mode de rapport avec les détenus [76]. Les services qui impliquent un contact avec la clientèle semblent ainsi devoir être distingués, s’inscrivant dans l’ensemble des actions participant à la
mission des Services correctionnels.

Droits de la personne
Des questions importantes concernant les conditions d’incarcération relèvent de lois et de textes locaux et internationaux relatifs aux droits fondamentaux de tout être humain et aux droits spécifiques des personnes détenues.
L’isolement prolongé d’une personne détenue, reconnu comme pouvant provoquer des séquelles sérieuses, doit notamment être utilisé d’une manière limitée [77].
L’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus adopté par les Nations Unies en 1955 exige que cette sanction ne puisse être infligée qu’avec l’accord du médecin de l’établissement et appliquée sous sa surveillance quotidienne.
Selon ces règles, certains critères doivent également présider au classement des personnes incarcérées [78]. Les prévenus doivent être séparés des détenus et les jeunes de moins de 21 ans qui effectuent une première sentence doivent être séparés des personnes récidivistes. Par ailleurs, les hommes doivent occuper des locaux différents de ceux des femmes et les personnes qui manifestent des troubles d’ordre physique ou mental susceptibles de mettre en danger leur sécurité ou celle d’autrui doivent être placées à l’écart des autres personnes incarcérées.
Il faut donc prendre en compte les possibilités de surveillance et de recours quant aux normes et aux droits lorsque la gestion d’un établissement de détention est confiée a secteur privé. Or, il semble difficile pour les organismes communautaires et les citoyens d’avoir accès aux établissements privés afin d’exercer un contrôle, tel que le montrent les évènements survenus dans l’établissement de Penetanguishene. Le contrôle exercé par l’État présente également des lacunes, si l’on tient compte de l’absence d’évaluation fréquente, bien que prévue dans les cadres législatifs, et des difficultés d’application.
D’autre part, la reconnaissance explicite et le respect des droits des personnes incarcérées dans la pratique quotidienne des intervenants peut être considérée comme une responsabilité très importante et il faut considérer l’existence d’une formation appropriée pour le personnel du secteur privé en ce sens [79].
Le manque de transparence peut ainsi susciter des inquiétudes concernant le respect des droits des personnes incarcérées et les questions de responsabilité et d’imputabilité dans un système privatisé. Le manque de formation du personnel pourrait également affecter la reconnaissance et l’application de ces droits. Il faut donc faire preuve de vigilance, dans un contexte où l’attention portée aux droits des détenus, qui avaient connu un bref moment d’intérêt à la suite de la Commission Arbour, est retombée.

Social
L’absence de débat dans la société concernant la privatisation des prisons, non relayé par les médias, est un problème important. L’opinion selon laquelle la privatisation coûte moins cher, qu’elle offre une plus grande sécurité et un système plus punitif semble répandue, les études existantes et les enjeux posés n’étant pas discutés.
La question de l’ouverture des prisons au secteur privé doit pourtant être considérée, car elle pourrait amorcer une évolution vers une plus grande privatisation, influencée par des pressions du secteur privé. Aux États-Unis, dans les régions où il existe un phénomène de surpopulation carcérale, des entreprises privées ont ainsi décidé par elles-mêmes de construire des établissements qu’elles cherchent ensuite à louer à l’État [80]. Au Royaume-Uni, les entreprises privées engagées dans ce secteur cherchent à gagner des contrats de gestion d’autres établissements ouverts à la privatisation, alors même que les études programmées pour évaluer les prisons privées n’ont pas été menées [81].
Par ailleurs, si moins un grand effort de réhabilitation est réalisé dans les établissements privés, favorisant un contrôle plus sécuritaire, la place de la société et des ressources communautaires pendant la détention et les liens possibles après la détention pourraient être limités. Cela pourrait avoir des conséquences sur la réinsertion sociale des détenus, et ainsi sur la sécurité de la société concernant la réduction la récidive. Il faut tenir compte du fait que les entreprises n’ont pas de responsabilité directe à l’égard du public, mais sont engagées face à l’État.
Ainsi, la privatisation des prisons présente des enjeux sociaux importants, relatifs à l’évolution de la société, à la réinsertion sociale des personnes détenues et à la protection du public. Elle doit donc être débattue, ainsi que la question plus générale du désengagement de l’État.

RÉSUMÉ DES PRINCIPAUX ENJEUX
Coûts
- L’efficacité supérieure du secteur privé ne peut être affirmée sur la base de données fiables, l’évaluation et la comparaison des coûts s’avérant complexes.
- D’autres mesures que l’incarcération, telles que les traitements, peuvent être tout aussi, sinon plus rentables.

Espace
- La privatisation d’établissements de détention peut affecter le choix de leur localisation, de leur conception et de leur capacité.
- Les établissements de grande taille, favorisés par le secteur privé car plus
rentables, sont ceux qui présentent les problèmes de gestion les plus importants.

Législation
- La délégation de la fonction de justice dépend de la conception de l’État.
- Le rôle du secteur privé dans la garde d’individus et la gestion de sentence doit être considéré et les actes et les décisions quasi-judiciaires doivent être définis précisément, ainsi que les charges et les processus d’évaluation et de recours.

Éthique
- L’intérêt économique et la politique correctionnelle (actuelle) semblent opposés, le but de profit et celui de réhabilitation induisant des logiques différentes.
- Les logiques propres aux secteurs public et privé pourraient entraîner des disparités au niveau des conditions de détention et du traitement des détenus.

Clinique
- Le mode de gestion privée peut affecter la qualité de l’intervention, concernant notamment la nature des programmes offerts et la formation du personnel, et elle doit être rigoureusement évaluée.

Services
- L’organisation et la vérification des services doivent être clairement réalisées.
- Les services impliquant un contact avec la clientèle peuvent être distingués, participant à la mission des Services correctionnels.

Droits de la personne
- Le manque de transparence, le manque de clarté des processus d’imputabilité et le manque de formation du personnel peuvent susciter des inquiétudes concernant le respect des droits des personnes détenues.

Social
- La privatisation des prisons représente des enjeux sociaux relatifs à l’évolution de la société, à la réinsertion sociale des personnes détenues et à la protection du public. 

Notes:

[1] Service correctionnel du Canada, 2000

[2] Service correctionnel du Canada, 2000

[3] Ligue des droits de l’homme, 2002

[4] Service correctionnel du Canada, 2000

[5] Hainsworth, J., 2004

[6] Service correctionnel du Canada, 2000

[7] Robbins, I., 1986

[8] The Sentencing Project, 2002

[9] Moyle, P., 2000

[10] Moore, A., 1998

[11] Camp et Gaes, 2002

[12] Camp et Gaes, 2002

[13] Camp et Gaes, 2002

[14] Bureau of Justice Assistance, 2001

[15] Camp et Gaes, 2002

[16] Bureau of Justice Assistance, 2001

[17] Bureau of Justice Assistance, 2001

[18] National Institute of Corrections, 1992

[19] Nathan, S., 2003

[20] Nathan, S., 2003

[21] Nathan, S., 2003

[22] Nathan, S., 2003

[23] Nathan, S., 2003

[24] Nathan, S., 2003

[25] Moyle, P., 2000

[26] Perol, J.-L., 1997

[27] Lazerges, C, 1997

[28] Ligue des droits de l’homme, 2002

[29] Perol, J.-L., 1997

[30] Perol, J.-L., 1997

[31] Perol, J.-L., 1997

[32] Perol, J.-L., 1997

[33] Perol, J.-L., 1997

[34] Ligue des droits de l’homme, 2002

[35] Ligue des droits de l’homme, 2002

[36] Ligue des droits de l’homme, 2002

[37] Ligue des droits de l’homme, 2002

[38] Moore et col., 2003

[39] Moore et col., 2003

[40] Moore et col., 2003

[41] Moore et col., 2003

[42] Toronto star, 2004

[43] Moore et col., 2003

[44] SCR Radio, 2003

[45] Toronto Star,

[46] McDonald, D., 1990

[47] McDonald, D., 1990

[48] Gaudreau, F., 1997

[49] Ligue des droits de l’homme, 2002

[50] McDonald, D., 1990

[51] Greenberg, 1990

[52] Zimring et Hawkins, 1988

[53] Lösel, 1996

[54] Brown, 2000

[55] Aos et col., 1999

[56] Aos et col., 1999

[57] Service correctionnel du Canada, 1999

[58] Rajkumar et French, 1997

[59] Zimring et Hawkins, 1988

[60] Combessie, P., 1996

[61] Lazerges, C, 1997

[62] National Institue of Corrections, 1992

[63] Protecteur du citoyen, 1999

[64] Protecteur du citoyen, 1999

[65] Robbins, I., 1986

[66] Logan C., 1989

[67] Robbins, I., 1986

[68] Robbins, I., 1986

[69] Robbins, I., 1986

[70] Robbins, I., 1986

[71] Service correctionnel du Canada, 2000

[72] Moos, 1975

[73] National Institute of Corrections, 1992

[74] Lazerges, C, 1997

[75] Ligue des droits de l’homme, 2002

[76] Lazerges, C, 1997

[77] Protecteur du citoyen, 1999

[78] Protecteur du citoyen, 1999

[79] Protecteur du citoyen, 1999

[80] National Institute of Corrections, 1992

[81] Nathan, S., 2003