74 Qu’est-ce qu’une permission de sortir ?
Une permission de sortir est une mesure permettant au condamné de s’absenter, pour un ou plusieurs jours, de l’établissement pénitentiaire et de se rendre en un lieu précis, situé sur le territoire national. La permission est accordée pour une ou plusieurs sorties. Pendant le temps de la mesure, la peine n’est pas suspendue et continue de s’écouler. L’octroi d’une permission de sortir a pour objet de préparer la réinsertion professionnelle ou sociale du condamné, de maintenir ses liens familiaux ou de lui permettre d’accomplir ne obligation exigeant sa présence.
75 Qui peut bénéficier d’une permission de sortir ?
Tout condamné peut se voir accorder une permission de sortir, à l’exception des personnes poursuivies pour une autre affaire, des condamnés qui accomplissent une période de sûreté et des condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité, qui ne peuvent en bénéficier qu’à partir du moment où ils ont été admis pour une libération conditionnelle. Une autorisation de sortie sous escorte peut, toutefois, à titre exceptionnel, être accordée à ces personnes à tout moment de l’exécution de leur peine. Pour ce qui est des mineurs, une permission de sortir ne eut être accordée qu’après avis du juge des enfants. Dès lors qu’un détenu étranger est frappé d’une ITF (interdiction du territoire français) prononcée en même temps qu’une peine d’emprisonnement, il peut bénéficier de divers aménagements de peine, et notamment de permissions de sortir, de façon à lui permettre de préparer une de relèvement de l’ITF. Si une personne a été condamnée pour une infraction d’ordre sexuel mentionnée à l’article 706-47 du Code de procédure pénale, une expertise psychiatrique doit être réalisée préalablement à l’octroi de la mesure. Les conditions requises pour qu’un condamné bénéficie de la mesure varient selon le type de la permission de sortir considéré.
76 Qui décide de la permission de sortir ?
La mesure est accordée par le JAP (juge de l’application des peines) après avis, sauf en cas d’urgence, de la CAP (commission de l’application des peines). Elle ne fait pas l’objet d’un débat contradictoire. Le condamné peut saisir cette juridiction dans les conditions habituelles (Q.108). La procédure d’octroi se déroule selon les modalités de droit commun (Q.118 à 122). Pour décider d’octroyer ou de refuser une permission, le JAP doit prendre en compte un certain nombre d’éléments, tels que la nature des relations familiales, les risques d’incident au sein de la famille et la proximité de la fin de la peine. Mais le comportement du détenu en détention, la motif de l’incarcération et le risque d’incident au cours de a permission sont les éléments les plus déterminants. En outre, alors même que, dans les textes, la permission de sortir ne requiert pas que le condamné fasse preuve d’« efforts de réadaptation sociale », il est généralement tenu compte du contexte social dans lequel il vit et de son effort pour indemniser les victimes. La permission de sortir peut également être assortie d’un certain nombre d’obligations (s’abstenir de se rendre dans certains lieux, se soumettre à des soins, etc.) ou d’interdictions (fréquenter certaines personnes, etc.). La décision d’octroi désigne un lieu, obligatoirement situé sur le territoire français, où le condamné est autorisé à séjourner. Un certificat d’hébergement est généralement demandé par le JAP et une enquête préliminaire peut être réalisée par les services de la police sur les conditions d’accueil du permissionnaire, voire sur les conséquences de la mesure au regard de la situation de la victime. Quelle que soit la durée de la permission, un délai de route peut être accordé au bénéficiaire, compte tenu du temps de trajet et des moyens de transports utilisés.
77 Qu’est-ce qu’une permission de sortir pour maintien des liens familiaux ou préparation à la réinsertion sociale ?
Comme son nom l’indique, cette permission de sortir vise à favoriser soit le maintien des liens familiaux, soit la préparation à la réinsertion sociale du condamné. Elle peut permettre à un détenu de retrouver peu à peu son cadre familial, hors des contraintes imposées aux rencontres en détention par le biais des parloirs. Elle peut aussi être l’occasion de rencontrer les responsables de l’organisme où le condamné compte développer son projet de réinsertion, voire d’effectuer un cours séjour d’adaptation dans le futur lieu d’accueil, avant d’y résider plus longuement. Certains condamnés peuvent en bénéficier sans condition de délai. Il s’agit des condamnés qui exécutent une ou plusieurs peines d’emprisonnement dont le total n’excède pas un an, de ceux qui sont incarcérés dans un centre pour peines aménagées, et de ceux pour lesquels le JAP ou le TAP (tribunal d’application des peines) a décidé de subordonner l’octroi d’une libération conditionnelle au fait d’avoir, au préalable, bénéficie d’une ou plusieurs permissions de sortir. En dehors de ces cas, des seuils d’exécution de peine (tenant compte des réductions de peine) sont fixés pour pouvoir en bénéficier. En maison d’arrêt ou maison centrale, les condamnés doivent avoir effectué la moitié de leur peine et n’avoir plus à subir qu’un temps de détention inférieur à trois ans pour pouvoir obtenir ce type de permission. En centre de détention, les condamnés peuvent y prétendre dès l’exécution du tiers de leur peine. Des conditions plus drastiques sont imposées aux récidivistes condamnés pour des faits commis après le 31 décembre 2004. Ces derniers ne peuvent solliciter une permission de sortir qu’après avoir purgé les deux tiers de leur peine. Le JAP peut, néanmoins, si la situation le justifie, décider, par une ordonnance spécialement motivée, de leur accorder une permission dès l’exécution de la moitié de la peine (voire du tiers de la peine en cas d’incarcération dans un centre de détention). La durée maximale de la permission pour maintien des liens familiaux ou préparation à la réinsertion sociale varie selon la nature de l’établissement pénitentiaire. Limitée à trois jours en maison d’arrêt et maison centrale, elle peut atteindre cinq jours en centre pour peine aménagées ou centre de détention. Une fois par an, les condamnés en centre de détention peuvent également bénéficier d’une permission de sortir dont la durée est portée à dix jours.
78 Qu’est-ce qu’une permission de sortir pour accomplir une obligation à l’extérieur ?
La permission de sortir pour accomplir une obligation à l’extérieur est destinée à permettre au détenu d’effectuer un acte pour lequel sa présence est nécessaire : un entretien avec un éventuel employeur en vue d’une libération conditionnelle, d’une semi-liberté, d’un placement à l’extérieur ou d’une préparation à une libération prochaine ; une consultation dans un centre de soins ; une présentation aux épreuves d’un examen ne pouvant se dérouler en détention ; une comparution devant un organisme d’ordre administratif. Cette permission de sortir, d’une durée maximale d’une journée, peut être accordée doit aux personnes condamnées à une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à cinq ans, soit aux personnes condamnées à une peine supérieure à cinq ans, s’ils en ont déjà exécuté la moitié. Pour les condamnés en état de récidive légale pour des faits commis après le 31 décembre 2004, le délai est porté aux deux tiers de la peine. Par une ordonnance spécialement motivée, le JAP peut, toutefois, passer outre cette condition temporelle, si la situation du condamné le justifie.
79 Qu’est-ce qu’une permission de sortir pour circonstances familiales graves ?
Ce type de permission de sortir est accordé pour permettre à un détenu de se rendre auprès d’un membre de sa famille proche, gravement malade ou décédé. Seules peuvent en bénéficier les personnes condamnées à une peine de prison inférieure ou égale à cinq ans, ou celles condamnées à une peine supérieure à cinq ans qui ont déjà exécuté la moitié de leur peine. Pour les condamnés en état de récidive légale pour des faits commis après le 31 décembre 2004, le délai est porté aux deux tiers de la peine. Par une ordonnance spécialement motivée, le JAP peut, toutefois, passer outre cette condition temporelle, si la situation du condamné le justifie. La durée maximale de cette permission est de trois jours.
80 Un recours est-il possible contre le refus de permission de sortir ?
Depuis le 31 décembre 2005, les condamnés, comme le procureur, peuvent contester une décision de refus de permission de sortir. Cet appel doit se faire dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de la décision (Q.123). En cas d’appel du condamné, le parquet dispose d’un délai supplémentaire de vingt-quatre heures pour faire appel à son tour (Q.125). L’appel est porté devant le président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel, qui statue par ordonnance motivée, au vu des observations écrites du condamné, ou de son avocat, et des réquisitions du procureur de la République. La décision du président de la chambre de l’application des peines pet faire l’objet d’un pourvoi en cassation dans les cinq jours suivant sa notification (Q.126 et 127).
81 Qui doit prendre en charge les frais occasionnés par la permission de sortir ?
Le condamné doit pouvoir supporter les frais qui résultent de son séjour hors de l’établissement pénitentiaire, notamment le coût des moyens de transport. S’il ne peut pas le faire, ou s’il ne peut pas justifier de possibilités de transport et d’hébergement, il ne peut pas sortir. Nombre de détenus sans ressources ne peuvent donc espérer bénéficier d’une permission de sortir avant leur libération. Toutefois, lorsque le motif de la permission apparaît sérieux et qu le détenu est démuni, le SPIP (service pénitentiaire d’insertion et de probation) du lieu d’incarcération doit lui accorder une aide, éventuellement, un bon de transport.
82 A quelles contraintes un condamné en permission de sortir est-il soumis ?
Au cours de l’exécution de la mesure de permission de sortir, le condamné fait l’objet de mesures de contrôle de la part du JAP et du SPIP dans les conditions habituelles relatives à l’octroi d’un aménagement de peine (Q.130 et 131). Il doit répondre aux convocations des autorités publiques désignées par le JAP. Il peut s’agir du SPIP, mais également des services de police ou de gendarmerie. Le JAP, peut, d’autre part, prononcer une ou plusieurs obligations particulières prévues dans le cadre des aménagements de peine (Q.132). Ces obligations peuvent être modifiées en cours d’exécution de la mesure (Q.133). Les décisions modifiant ou signifiant un refus de modifier ces obligations peuvent faire l’objet d’un appel dans un délai de vingt-quatre heures (Q.133). Pendant sa permission de sortir, le condamné doit être muni d’un document permettant de « justifier de la régularité de sa situation » et le produire à toute réquisition de l’autorité publique. Il doit, en outre, faire preuve de « bonne conduite » et respecter « l’ensemble des règles disciplinaires relatives au régime des détenus » de sa catégorie (Q.130). En cas de non-respect de ces contraintes par le condamné, le JAP peut décerner un mandat d’amener, afin que le condamné se présente devant lui, ou un mandat d’arrêt, s’il est en fuite ou se trouve à l’étranger (Q.137 et 138).
83 Quels sont les motifs d’un retrait de permission de sortir ?
Au cours de la permission de sortir, toute insoumission aux mesures de contrôle, tout manquement aux obligations particulières, toute infraction au régime disciplinaire et toute « mauvaise conduite » de la part du condamné peut donner lieu au retrait de la mesure. Les agents du SPIP ou le chef d’établissement doivent adresser un rapport d’incident au JAP à chaque manquement constaté. La permission de sortir peut être révoquée, avant même d’avoir été mise à exécution, par exemple en cas d’incident grave en détention. Le JAP peut, en outre, retirer le bénéfice de la permission de sortir, si le condamné refuse une modification des conditions d’exécution de la mesure que le magistrat estime nécessaire, ou s’il demande de lui-même l’arrêt de la mesure. Par ailleurs, la commission d’une nouvelle infraction pénale ou d’une évasion peut entraîner le retrait de la mesure. La procédure de retrait d’une permission de sortir et identique à celle qui a présidé à son octroi (Q.76). De même, la procédure d’appel de la décision de retrait est identique à celle concernant une décision de refus d’octroi d’une permission de sortir (Q.80). La décision de retrait n’est jamais automatique, même en cas de nouvelle condamnation. Il s’agit simplement d’une faculté laissée à l’appréciation de l’autorité compétente.
84 Le condamné peut-il être réintégré en détention avant le retrait de la permission de sortir ?
Dans l’attente de l’audience qui décidera du retrait de la permission de sortir, le condamné peut être placé en détention ordinaire. En cas d’urgence, le chef d’établissement peut, de lui-même, décider la réintégration immédiate du condamné en détention, à condition d’en informer sans délai le JAP. Celui-ci dispose d’un délai de dix jours pour statuer, après débat contradictoire, sur un éventuel retrait de la mesure.
85 Quelles sont les conséquences du retrait d’une permission de sortir ?
Lorsqu’il est mis fin à la mesure, le condamné est incarcéré. La durée de l’emprisonnement restant à subir est précisée dans la décision du JAP. Le temps passé en permission de sortir est pris en compte, de telle sorte que le condamné ne devra pas exécuter en détention la partie de la peine qu’il a déjà effectuée sous ce régime. En outre, la « mauvaise conduite » du condamné dans le cadre de la mesure peut justifier le retrait du bénéfice du CRP (crédit de réduction de peine) par le JAP (Q.42). Par ailleurs, si le retrait est consécutif à la commission d’une nouvelle infraction, la juridiction de jugement peut décider de retirer tout ou partie de l’ensemble des réductions de peine accordées au cours de la détention (Q.48).
86 Dans quels cas le condamné en permission de sortir est-il considéré comme un évadé ?
S’il ne réintègre pas l’établissement pénitentiaire à l’issue de la permission de sortir, le condamné est considéré comme évadé. Il en est de même s’il se soustrait aux mesures de contrôle qui lui sont imposées. Si le condamné est en fuite, le JAP peut décider un mandat d’arrêt qui suspend l’exécution de la mesure jusqu’à son arrestation. Dans tous les cas, le condamné s’expose à une condamnation pour délit d’évasion, passible de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende. Cette peine se cumule avec celle qu’il avait à exécuter, sans qu’une confusion des condamnations ne soit possible. Le condamné encourt, en outre, les sanctions disciplinaires prévues en cas d’évasion, notamment le placement en cellule disciplinaire pour une durée maximale de quarante-cinq jours. Par ailleurs, la part disponible du compte nominatif d’une personne qui s’est évadée est affectée d’office à l’indemnisation des victimes. Le reliquat est acquis à l’Etat, sauf si le directeur régional des services pénitentiaires du lieu où s’est produite l’évasion ordonne qu’il soit rétabli, en tout ou partie, au profit du détenu, lorsque ce dernier a été repris.
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